𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐗𝐗𝐗𝐈𝐗
— S A N S M A N I E R E S —
EBAHIE, J’ECARQUILLE les yeux en observant le hall de ma nouvelle demeure.
Un escalier est planté devant la porte d’entrée, large et en marbre ocre. Il mène au premier étage tandis que deux arcades à ma droite et ma gauche débouchent sur la cuisine et le salon. Tout semble avoir été nettoyé à la statuette près. Les bustes de marbres, tableaux et couleurs dominantes ocre, dorée et blanche me rappellent l’Antiquité.
Dans mon dos, Sieg pose les dernières valises avec un soupir. Notre vol a été long et nous sommes bien contents d’être enfin arrivés. A tel point que, malgré notre quantité astronomique de bagages, le blond n’a pas laissé de personnel de maison nous aider.
Il voulait tout poser dans l’entrée avant de découvrir les lieux.
— Nous y sommes, je soupire.
— Notre nouveau chez nous.
Me retournant, je souris au blond qui semble exténué. Derrière ses lunettes sont creusés des cernes et ses cheveux sont en bataille sur le sommet de son crâne. Observant son costume trois-pièces, je soupire. L’élégance de mon petit-ami le perdra un jour.
N’importe qui ayant plusieurs heures de vol s’habillerai d’un jogging et un sweatshirt. Mais lui a tenu à être sur son trente-et-un.
— Retire-moi ça, je pouffe en agrippant sa veste et la faisant glisser le long de ses bras.
— Déjà, mademoiselle ? rit-t-il doucement.
Je secoue la tête.
— Hors de question, je sourie. Je suis trop crevée pour quoi que ce soit alors, sauf si tu comptes dormir avec moi dans la baignoire, tu ne me suis pas.
— Tu sais quoi ? J’accepte, grogne-t-il.
Tandis qu’il défait son nœud de cravate, j’ouvre la valise contenant nos peignoirs. Puis, l’imitant, je retire mes habits avant de m’habiller du tissu plus léger.
— Je me sens déjà mieux, je ris doucement.
Il m’imite, serrant la ceinture autour de lui. Puis, s’approchant, il glisse les bras autour de mon corps et me laisser poser ma tête sur son pectoral. Son odeur et sa chaleur m’apaise. Si je le pouvais, je m’endormirais là, contre lui.
Mais, caressant doucement mon dos, il me rappelle à la réalité.
— Livai n’est jamais venu ici mais il a contacté le personnel de maison qui a déjà préparé notre arrivée. Donc on peut se doucher, des serviettes et savons sont prêts. Et les lits sont déjà dressés.
— Oh, merci, je soupire contre lui. J’ai vraiment la flemme de mettre des draps sur un matelas.
Il rit doucement et, saisissant ma main, me mène à l’escalier que nous grimpons. Une fois à l’étage, une vaste salle s’étend devant nous, semblable à un salon. Diverses portes mènent à des pièces que je ne connais pas encore mais le blond semble mieux se repérer.
Dépassant une arcade, il s’engouffre dans un couloir au bout duquel il actionne une poignée et me fait rentrer dans un décor de marbre blanc joliment agrémenté de plantes. La salle de bain.
Une baignoire creusée dans le sol trône au centre de la pièce et une douche s’étend sur tout son fond.
— Tu préfères quoi ? lance le blond.
— Même si cette douche est assez grande pour qu’on s’y allonge tous les deux et que maintenant que je le dis à haute voix, j’ai bien envie de tenter l’expérience, je suis beaucoup trop crevée pour autre chose qu’un bain.
Je n’en prends pas aussi régulièrement d’habitude, privilégiant la douche qui est plus rapide. Mais le souvenir du corps mouillé et chaud de Sieg contre lequel je me suis blottie avant notre départ me donne envie de recommencer.
Il ouvre les robinets.
— Si t’as encore tes sels de bains, je suis preneur, lance-t-il en ôtant ses lunettes et les posant sur le lavabo.
— Ce ne sont pas les miens…
Il me lance un regard interrogatif, devinant à mon ton empli de culpabilité que cela cache quelque chose.
— Nicole a fait importer un coffre rempli d’herbes pour m’écarter de toi et vous rapprocher, je lance à toute vitesse.
Ses sourcils se froncent.
— Tu peux étayer ?
— Il y a avait une feuille tapée à la machine à écrire, je lance. Dessus, des instructions expliquaient que pour m’endormir ou me tuer, certaines plantes étaient préférables. D’autres étaient aphrodisiaques. D’autres visaient juste à créer un bain romantique…
— Et tu as utilisé les affaires offertes pour ma première fois avec Nicole pour te venger ? demande-t-il. C’est d’ailleurs pour ça, que tu nous as fait ce cirque ?
Juste avant de partir, j’ai demandé à Livai de livrer le colis contenant la boite en bois. Au moment où il m’a demandé quelle adresse il devait indiquer, Sieg est apparu. Ne pouvant décemment pas déclarer devant lui que je comptais faire une mesquinerie aussi immature à son amie, j’ai repris le coffre sous leurs regards atterrés.
Il est encore dans mon armoire, caché sous un faux fond. Car j’ai aussi senti, au moment de le ranger, qu’il pourrait en réalité s’avérer très utile et que se débarrasser d’une telle preuve est mal jouer ses cartes.
J’acquiesce doucement. Il soupire.
— Tu es fâché ? je demande, presque timidement.
— Non, bien sûr que non. J’aurais juste aimé que tu m’en parles.
Penchant la tête sur le côté, je hausse les épaules.
— Même si tu m’as choisie et je sais que tu m’aimes, Nicole a compté pour toi. Enormément. Vous avez été fiancés et surtout amis. Il est logique que tu aies du mal à te dire que tout c’est fini si mal entre vous et…
— Tu n’as pas voulu remuer le couteau dans la plaie en me montrant l’étendue de son plan qui comprenait d’ailleurs une partie où elle te fait du mal, termine-t-il.
Il acquiesce.
— J’avais saisi.
Sa voix se fait rauque. Presque sifflante. Je ne peux que deviner combien cette période est dure pour lui. Sa famille a tenté de lui passer les chaines et il se trouve obligé de la fuir. Même s’il a toujours été élevé dans un climat hostile, ses craintes sont légitimes.
Et sa douleur aussi.
— J’aime pas te voir souffrir, je souffle en le prenant dans mes bras, enfouissant ma tête dans le creux de son épaule.
Il rit doucement en me rendant mon étreinte, embrassant le sommet de mon crâne.
— Je ne souffre pas, (T/P).
— Tu es obligé de fuir ta famille à cause de moi, je chuchote.
— Hé, lance-t-il dans un chuchotement.
Attrapant mon menton entre son index et son pouce, il redresse mon visage. Ses yeux se posent alors sur les miens et son regard se fait particulièrement doux.
— Ce n’est pas « à cause » mais « grâce à » toi. Que tu sois là ou non, Grisha m’aurait un jour forcé à épouser une femme à la fortune démesurée et l’influence tout aussi grande. Toi, tu m’as donné la force de me battre pour pouvoir aimer librement. Et si je dois marier quelqu’un, ce sera toi.
Mon cœur rate un battement et mes yeux s’écarquillent. Il songe réellement à faire de moi sa femme ?
— Alors non, je ne souffre pas. Pas quand tu es là avec moi.
Là-dessus, il ferme le robinet. L’eau est montée assez haut. Nous retirons nos peignoirs et nous glissons dans la baignoire. S’appuyant contre la surface, il me ramène contre son torse et je sourie en posant ma joue sur son pectoral.
Mes seins se pressent à son ventre. L’eau me réchauffe. Je ferme les yeux et savoure la sensation de mes muscles se détendant un à un.
— Sieg ? j’appelle doucement.
— Mmmmh ?
— Tu disais la vérité ?
— De quoi, ma puce ?
Levant les yeux vers lui, j’observe son visage détendu et ses paupières closes. Puis, me redressant pour lui faire face, je constate que son pénis est durci, contre mon ventre. Souriant doucement, je frôle celui-ci, Sieg frémit mais m’arrête d’une voix endormie.
— Mon cœur, même si j’ai très envie de toi, surtout quand tu es nue devant moi, je suis épuisé.
Je sourie doucement avant de poser les lèvres contre les siennes.
— Pas de problème, mon amour, je chuchote contre sa bouche avant d’enrouler mes bras autour de son cou et poser ma tête sur son épaule.
— Et donc, de quoi parlais-tu ? insiste-t-il.
J’hésite un instant.
— Tu m’épouserais ? je demande.
Il se redresse légèrement, assez pour se décaler et pouvoir me regarder. Ses yeux sont doux et tendres. Ils m’apaisent.
— Tu ne peux pas savoir à quel point je serais fière de te présenter sous mon nom de famille, de prendre ta main habillée d’une bague me liant à toi, de montrer mon alliance à quiconque me demande si j’ai quelqu’un dans ma vie…
Mon cœur bat à toute vitesse.
— Mais tu n’es pas du genre traditionnel alors, si tu préfères qu’on reste comme ça, je suis partant. Tant que je me réveille à tes côtés chaque jour et que je peux t’aimer à jamais, je…
— Pose-moi la question.
Un vague sourire zone sur ses lèvres et il se redresse. Assise sur ses cuisses et lui faisant face, je l’observe depuis ma hauteur tandis que nos nez se frôlent.
— Veux-tu m’épouser ?
— Je le veux.
Il laisse voir un rictus étincelant et ses bras s’enroulent autour de mon corps. Puis, posant la tête sur la naissance de mes seins, il chuchote doucement :
— Madame (T/P) Jäger.
Je pouffe, grisée par cette appellation et il s’allonge, m’emportant avec lui. L’eau chaude nous recouvre jusqu’au cou et je me redresse assez pour poser mes lèvres contre les siennes. Ses mains caressent alors mon dos, approfondissant le baiser.
Au bout de quelques instants, nous nous séparons et il murmure :
— Bon, faudrait qu’on se dépêche et se lave car j’aimerai bien aller dormir avec ma fiancée.
ꕥ
La chambre, à l’effigie du reste de la maison, est spacieuse. Un gigantesque lit à baldaquin gravé de motifs végétaux trône au centre. Ses draps d’or et de blanc semblent particulièrement confortables. Habillée de mon peignoir, je ne jette aucun regard aux affaires nuit sorties pour nous habiller et défait la ceinture.
Entièrement nue, je me glisse sous les couvertures. Debout dans l’encadrement de la pièce, le blond m’observe faire, un sourire taquin aux lèvres.
— Tu la joues comme ça ?
— J’ai la flemme de m’habiller et comme ça, dès qu’on aura repris des forces après une bonne nuit, on sera prêt à le faire. Une pierre, deux coups !
Il éclate de rire.
— Curieusement, ce résonnement se tient.
Ôtant le peignoir, il le jette au sol avant de rejoindre le lit. Je sourie en sentant son corps chaud se blottir contre moi. Ses bras s’enroulent autour de mes épaules et j’enfouis ma tête dans son torse. Aussitôt, mes paupières se font lourdes.
Mais, les yeux clos, je murmure :
— Une idée de ce qu’on va faire demain ?
La voix tout aussi fatiguée du blond me répond :
— Visiter mon nouveau lieu de travail et la ville, t’en dis quoi ?
— Le programme a l’air génial, je soupire. Je vais sans doute me trouver aussi un travail.
— Tu n’es pas obligé, tu sais ?
— J’en ai très envie.
— Tant que ça ne contient aucune scène de crime et barre de pole dance, je suis partant.
Si je n’avais pas été aussi éreintée, j’aurais sans doute éclaté de rire. Mais le sommeil m’emporte, je le sens. Même si je suis encore éveillée, ma fatigue est telle que je suis incapable de parler ou bouger.
— Fais ce que tu veux ma belle, reprend la voix ensommeillée de Sieg. Quoi que tu fasses, de toute façon, je te suivrai.
Il remue légèrement, me serrant encore plus fort contre lui. Son parfum et sa chaleur m’apaisent. En sa présence, je me sens détendue. Ma crainte quant à l’avenir n’existe plus. Car je sais qu’il y sera et cela suffit à m’apaiser.
Bientôt, je porterai son nom et nous entamerons une nouvelle vie ici. Ensemble contre l’adversité. Fin prêts.
Juste avant de m’endormir pour de bon, j’ai le temps de surprendre les dernières paroles que le blond me murmure, profitant de mon état de semi-conscience.
— Tu es la femme la plus courageuse et débrouillarde que je connaisse. Je sais que tu y arriveras, peu importe ce que tu choisis.
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