𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐗𝐈𝐈𝐈
— S A N S M A N I E R E S —
cw — violence, mention de
meurtre
負けるが勝ち
LA PIECE EST silencieuse. Nul n’ose bouger.
Autour de moi, les corps se sont raidis et l’atmosphère s’est brusquement tendue. Nul ne s’attendait à ce que je fasse irruption de la sorte mais je suis là, à présent. Des silhouettes figées s’étendent, les regards convergent en ma direction.
Que dire ? Que faire après de telles accusations ?
Mes mots leur semblent sans doute incompréhensible. Mais ils ne sont pas anodins. Evoquer un meurtre, un gang, prendre de front le fils chéri de la famille… Tout cela n’est chose facile à ignorer.
Et cela se devine au simple regard qu’Eren pose présentement sur moi.
La tête légèrement penchée en avant, des ombres dansant sur son visage, il semble particulièrement obscur. Ses longs cheveux bruns tombent de chaque côté de sa tête, accentuant les ténèbres sur ses traits. Dans la sombre torpeur habillant ses traits, ses iris brillent telles deux émeraudes, rivées en ma direction.
Je peux voir la rage dans son regard.
Les paroles que je viens de prononcer m’incriminent, moi. Mais plus important. Elles l’incriminent, lui.
— Vous devez vous tromper, répond-t-il d’une voix où n’importe qui peut deviner la menace sous-jacente.
— Je me fiche de ce que les gens pensent de moi ici et la seule personne que je connaisse me considère déjà comme un assassin. En revanche, toi, tu es celui qui a plus à perdre, je lâche dans un sourire mesquin.
Il le sait. Il le voit à mon air confiant, je suis en position de supériorité dans cette conversation.
Ses mains jointes et sa position penchée en avant sont défensives, il réfléchit à une parade, un moyen de me contrer. Mais, à l’époque où le Serpent le tenait dans son estime, il m’a confié que son plus fidèle soldat était un homme du nom d’Eren Jäger et m’a même montré les photographies très réussies que celui-ci capturait lorsqu’il prenait quelqu’un en filature.
Et cette façon de prendre les clichés par trois pour suivre les mouvements de sa cible, de focaliser l’attention sur une seule personne en floutant le reste, ce travail presque artistique et non de simple enquêteur est facilement repérable. Là est d’ailleurs la raison pour laquelle une colère sourde s’est mise à gronder en moi lorsque j’ai posé pied dans l’appartement du professeur Andrews.
La première fois que j’ai entendu le nom du professeur Jäger, celui-ci m’a semblé familier mais je n’ai pas saisi où je l’avais précisément entendu.
Le traumatisme lié à mon passé a gelé une partie des informations que j’assimilais à Han Halmes. Même lors de ma première rencontre avec le blond, lorsque le prénom d’Eren m’a été mentionné, je suis demeurée incapable de réagir, de comprendre. Seule une gêne lointaine s’est emparée de moi.
Cependant, quand, debout au milieu de l’appartement du professeur Andrews, mes yeux se promenant sur les murs tapissés de photographies de ma personne, un profond malaise s’est emparé de moi, j’ai compris. Car mon regard a croisé celui de Han, sur l’un des clichés. Il fixait alors l’objectif, était conscient que nous étions observés alors que moi, à son bras, demeurait insouciante.
Cela signifie que celui qui a capturé ces moments n’est autre que son photographe attitré.
Celui que j’ai oublié. Eren Jäger.
M’accroupissant lentement, je glisse mon visage dans le creux de son épaule. Puis, le laissant me suivre du regard et se tendre, je souffle ces mots contre son cou :
— Pour ta gouverne, aucune des preuves que tu as placé pour m’incriminer n’est validée par les enquêteurs, ils ont trouvé le pot aux roses.
Susurrant mon venin à quelques centimètres de son oreille, je détaille attentivement ses réactions. Il demeure pourtant stoïque, les traits immobiles.
Je poursuis donc, bien décidée à le pousser dans ses retranchements.
— Je ne sais pas réellement ce que tu as voulu faire mais je suis du genre rancunière alors prépare toi à tomber.
Ses poings se serrent entre ses genoux.
— Ton patron était un connard et toi tu étais son pigeon, celui qu’il manipulait pour faire le sale boulot.
Sa mâchoire se contracte.
— Le cabot qu’il menait à la baguette, prêt à tout faire pour lui, je susurre.
Eren a toujours apprécié son patron, y voyant la figure paternelle qu’il n’a jamais réellement pu avoir. Alors se retrouver en face de celle qui l’a rendu orphelin de père est compliqué.
— Rarement j’ai vu aussi pathétique spectacle que celui de ta personne, courant dans toute la ville pour le satisfaire. Enfin, je ne te voyait pas te mes propres yeux, je ne savais même pas à quoi tu ressemblais du temps où Han et moi étions amis. C’est lui qui m’a parlé de ton dévouement.
Il a tenté de me priver de liberté, me piéger. Sans doute par vengeance.
Je le lui ferais payer.
— Si pathétique, le petit Eren tentant désespérément de se faire bien voir.
Han a entreprit de détruire pièce par pièce ma personne, me manipulant et me faisant presque renoncer à moi-même. Nombreuses ont été les fois où j’ai souhaité me donner la mort, en sa compagnie.
Et, même s’il est possible qu’Eren ne soit qu’une autre victime, je ne parviens pas à le regarder avec compassion.
Car je me souviens de sa voix lorsqu’il se tenait sur le seuil de l’appartement miteux où j’ai croupi un mois, je n’oublie rien de mon corps incapable de bouger, étendu sur le sol, jamais ne s’effacera le souvenir de la main que j’ai tendue en sa direction afin qu’il m’aide.
Ce jour-là, il l’a simplement regardée. Ses yeux émeraudes brillant dans l’obscurité et que je reconnais aisément aujourd’hui. Ceux-là même qui me provoquent multitude de frissons.
Parce que, à ce moment-là, alors que je voyais enfin le bout du tunnel, qu’un visage avenant se dessinait sous mes yeux, qu’il semblait sincèrement peiné de voir une femme rouée de coups dans les toilettes miteux de ce studio délabré, que j’ai tendu la main en le suppliant de m’aider…
Il a tourné les talons.
J’ai connu son nom et j’ai vu sa silhouette. Ce n’est qu’aujourd’hui que je parviens à faire un lien entre les deux.
Eren Jäger. Le brun aux yeux émeraudes.
S’il avait saisi ma main, ce jour-là, peut-être les choses auraient-elles pu être différentes. S’il s’était interposé. S’il avait élevé la voix. S’il avait empêché Han d’aller plus loin. Oui. Mes paumes seraient sans doute encore vierges aujourd’hui. Aucun sang n’en habillerait les fissures.
Car ce n’est que cinq minutes après son départ que j’ai tué Han Halmes.
— Tu veux savoir comment je m’y suis prise ? je murmure, ma voix se faisant vacillante.
Il déglutit péniblement.
— Quinze fois, je susurre en ouvrant les paupières grandement, admirant ses pupilles se dilater. J’ai frappé son crâne quinze fois.
Mes yeux me brûlent. Je sais pertinemment que des larmes menacent d’en couler. Tout comme je suis consciente, au fond, que je suis en train de fauter.
J’ai pour habitude de me montrer froide, intelligente et calculatrice. Débarquer dans l’appartement des Jäger sans précaution, avouer un meurtre et provoquer si bêtement un homme lié aux crimes organisés n’est pas la chose à faire.
Mais, à chaque respiration, l’odeur de moisissure qui régnait dans cette salle de bain me reprend, la douleur de mon corps tuméfié me parcourt, la peur croissant en moi revient, mon ventre criant famine me transperce. Devenir un être manipulateur était censé m’empêcher de retomber à nouveau dans ces filets.
Cependant, même dans la mort, il continue de me hanter.
Et je veux que quelqu’un paye. Parmi tous ses proches qui savaient et qui n’ont rien fait, ces silhouettes qui sont passées devant la porte ouverte de la salle de bain en ne m’accordant qu’un regard empli de dédain. Les géôliers qui se sont mêmes assurés que je ne puisse pas m’en aller. Géôliers dont Eren faisait parti.
J’ai besoin qu’un être pleure tout comme j’ai moi-même pleuré.
—Y’avait sa cervelle partout sur le sol et son sang habillait le carrelage, petit, je lâche entre mes dents serrées, fébrile.
Un rire triste me parcourt. Les iris d’Eren se posent sur moi et je ne parviens même pas à distinguer le sentiment abritant ses yeux. Mon sens de l’observation légendaire ne fonctionne plus, parasité par ma propre douleur.
— C’était dégueulasse, y’en avait partout, je glousse. Mais j’espère bien qu’il a souffert le mar…
Ma voix meurt dans ma gorge lorsqu’une main se referme brutalement sur mon épaule. La prise est tenue, presque douloureuse. La tension dans ces cinq doigts me frappe de stupeur tant la retenue se devine.
Cette personne fait de son mieux pour ne pas lever la main sur moi.
Précautionneusement, lentement, je tourne la tête. Encore accroupie devant Eren, je dois lever les yeux pour croiser le regard brun du seul autre homme de cette pièce que je connaisse. Et, derrière sa monture dorée arrondie, je distingue aisément deux prunelles traversées d’une certaine colère.
Dans ses iris de lumière, l’amusement qu’il a autrefois sur me montrer ne se résume aujourd’hui plus qu’en une dense aigreur.
Autour de sa pupille, en volutes brunes, le passé surgit. Sous ses verres aux reflets bleutés, je discerne son écœurement face au cadavre d’Esther Andrews, sa stupeur en entendant mon discours post-mortem, son contentement face à mes excuses et sa déception en apprenant la folle théorie des policiers sur ma supposée implication dans ce meurtre.
Je ne sais réellement ce qui a traversé son esprit, depuis trois jours que nous ne sommes point vu. Personnellement, ma tête s’est vue parcourue de mille et un questionnements en rentrant du poste de police. Le soleil était haut dans le ciel mais sous mon crâne évoluait une véritable tempête.
Ymir, franchissant le seuil de notre bar favori, le visage déconfit. Les larmes roulant sur ses joues à mesure que ses lèvres laissaient filer un obscur témoignage. La rage grimpant en moi quand j’ai pris conscience des faits. Le faux-sourire sur mes lèvres en croisant la route de Han pour la première fois. Les après-midis à gagner sa confiance.
Le mois enchainé au radiateur de sa salle de bain. La peur panique à chaque fois qu’il posait pied dans l’appartement. Ses poings percutant mon ventre. Ses pieds faisant de même. Les menaces sifflantes. L’impression d’être sale. Mon ventre gargouillant. Les hallucinations liées à la faim. Le désespoir. L’envie de mourir.
L’ultime provocation. Le bracelet métallique cédant sous mes coups. La lourde pierre, rappel de la profanation d’une tombe dont il était fier. Ma main la saisissant. La rage explosant. La fureur m’emportant.
Quinze coups.
Juste pour être sûre de ne jamais plus avoir à endurer tel supplice.
Une lettre glissée sous le pas de ma porte. Olympe Loreen. Le déni. L’ignorance. Le rejet.
Une dispute avec un professeur. La rencontre de son supérieur. Des rires. Des disputes. Un meurtre. Des photographies. Une manipulation.
Eren Jäger.
Sieg Jäger.
Tout cela n’a cessé de me hanter, détruisant d’une bourrasque mon travail au cours des dernières années. La glace figée autour de ma personne a fondue. Mes capacités à prendre mes distances avec tout et tous afin d’exécuter des choix avisés se sont trouvées bloquées. Mon travail sur moi-même a disparu.
Je ne suis plus l’étudiante dotée d’une grande intelligence mais de nouveau la prisonnière chétive et affamée. Soumise.
— Ça suffit.
La voix de Sieg est ferme. Sans appel.
Soudain, comme s’il ne m’avait fallu qu’elle pour saisir ce qu’il se produit réellement autour de moi et ce qu’il vient de se passer, la stupeur me frappe. Je réalise enfin. J’ai perdu mon sang froid. La panique m’a menée à des actions inconsidérées.
Accroupie au centre d’un salon peuplé d’inconnus, après avoir confessé un meurtre devant ces mêmes inconnus et menacé le fils chéri de la famille, que me reste-t-il ?
Si ce n’est le regard empli de déception de Sieg, juste à côté de moi.
Sa prise sur mon épaule est ferme. Je m’en défais d’un coup sec avant de me redresser. Je dois quitter ce lieu au plus vite avant d’aggraver trop mon cas. A moins qu’il ne soit déjà trop tard. Qu’importe.
Sans un mot de plus, saisie par mes propres actions, je rebrousse chemin en toute hâte. Comment ai-je pu me montrer aussi stupide ? Quoi, à cause de mes traumastimes ?
Ce n’est nullement une raison.
Distinctement, j’entends dans mon dos des pas précipités. Quelqu’un me suit. Mes yeux me brûlent. Je suis furieuse. Contre moi. Contre eux. Contre tous. Rien ne m’aidera. Je veux être seule.
Qu’importe combien la solitude a pu m’empoisonner par le passé. Je ne survivrai pas sans elle, aujourd’hui.
La présence d’autrui est un poison.
— (T/P) ! Attends !
Au moment où je m’apprête à dépasser le couloir et m’engouffrer dans l’entrée, réduisant drastiquement la distance entre la porte et ma personne, une main large et chaude enroule mon poignet. Ferme, elle ne me laisse pas le choix.
Et, la voix grave de Sieg venant de résonner dans mon dos, je ne parviens pas à me retourner. Je ne veux pas affronter son regard plein de déception.
Pas une nouvelle fois.
Alors je m’immobilise, statique, lui montrant le dos. La poitrine serrée, les muscles raides, je fixe la porte d’entrée noire percée de son judas devant moi. Comme si je n’attendais qu’une seule chose pour m’en aller, qu’il lâche ma main.
Pourtant, la dense torpeur émanant de la sienne, du contact de nos peaux ensemble est réconfortant. Aussi étrange cela puisse-t-il paraitre, même si me retourner et lui faire face serait bien trop douloureux, présentement, je ne veux en réalité pas qu’il me lâche.
La solitude est peut-être ma seule alliée de poids et cet homme semble sans doute un adversaire, maintenant.
Mais cela signifie alors que je me sens mieux dans le camp ennemi.
— (T/P), tu peux m’expliquer ? résonne la voix du blond.
— Je n’ai rien à expliquer, j’ai juste bu, je mens d’une voix cassante, espérant que cela suffise à justifier mon acte.
Mais il n’est pas dupe. Evidemment. Cela me coûte de le dire mais il est trop intelligent pour cela.
— Je t’ai connu meilleure menteuse, souligne-t-il d’un ton presque amusé.
— Mais vous ne semblez plus vouloir me connaitre, maintenant, je rétorque avec froideur.
La prise sur mon poignet se relâche un peu. Mon cœur s’immobilise de brefs instants lorsque l’idée qu’il puisse rompre notre contact physique et m’abandonner à nouveau me prend. Car même si je suis furieuse de la façon qu’il a eu de me traiter, je n’en demeure pas moins terrifiée.
Je veux être seule. Par crainte de la trahison, de déception, du mal que l’on pourrait m’infliger.
Mais je ne veux plus connaitre la solitude. Elle me ronge toujours plus chaque jour écouler.
Un condensé de paradoxes me tiraille.
Je ne sais pas réellement ce que je souhaite. Peut-être simplement quelqu’un de confiance. Quelqu’un comme Sieg Jäger. Une personne bien quoi que comportant quelques travers. Un être profondément humain et compréhensif.
Que je ne mérite pas. Pas après ce que j’ai fait, ce jour-là.
Car les années et lavages ont passé, les nuits à pleurer se sont écoulées, les miroirs brisés se sont succédés mais le sang demeure encore et toujours sur mes mains ainsi que l’œil sur mon front. La culpabilité est trop dense même si je fais de mon mieux pour ne jamais y penser.
Et j’y suis même parvenue. Quelques jours durant, je me suis laissée aller à penser que je pourrais être normale.
Jusqu’au décès de cette femme.
— Je pense que tu mérites de pouvoir me raconter ta version des faits et…
— Je ne mérite rien.
Ma voix est rude. Je n’ai pas réellement réfléchi avant de parler. L’image du crâne défoncé et couvert de sang de Han m’est juste apparu nettement.
Sieg semble surpris, demeurant muet une poignée d’un instant. Mais il brise à nouveau le silence au terme de ce court laps de temps :
— Ecoute, je suis désolé de t’avoir parlé de cette façon, sans chercher vraiment à te comp…
— Vous aviez raison, je le coupe.
Puis, enfin, puisant dans mes dernières ressources mentales et prenant une profonde inspiration pour me donner un peu de contenance, je me retourne. Les doigts de Sieg glissent légèrement autour de mon poignet à ce geste.
Là, mes yeux se retrouvent face aux siens. Notre proximité me surprend. Quelques centimètres seulement séparent nos corps. Ses mèches d’or tombant sur son front m’apparaissent nettement ainsi que sa barbe épaisse.
Je me surprends à me dire qu’elles m’avaient manqué. Mais qu’importe.
— Vous aviez raison, je répète.
Il semble légèrement surpris. Ses sourcils se haussent derrière ses lunettes dorées, écarquillant ses iris de lumière et les rendant plus visibles.
Cette vue me plait. Elle est rassurante.
— Vous savez, quand on s’est disputé, j’étais furieuse. Je me sentais rejetée et même humiliée, vexée.
Il ouvre la bouche pour parler mais je le devance, poursuivant.
— J’ai eu l’impression que vous ne cherchiez qu’un prétexte pour ne plus avoir à faire à moi et je trouvais ça lâche, j’explique. Mais je crois qu’au fond je savais que je ne pourrais jamais comprendre ce qu’il vous a réellement motivé à agir de la sorte mais que moi-même savais que les raisons importent peu, vous avez fait ce qu’il y a de mieux.
Mes yeux me brûlent. L’envie de me gifler pour laisser des larmes briller me prend. Mais Sieg les regarde avec une telle douceur présentement, sincèrement surpris de les voir, comme si jamais il ne m’aurait cru capable de montrer la moindre émotion que je m’en sens malgré tout apaisée.
Il ne se moque pas de moi.
— J’étais furieuse parce que vous êtes mon seul ami, je lâche d’une voix rendue aigue par l’émotion. Je passe mon temps à analyser et juger le monde qui m’entoure, personne n’est prêt à accepter quelqu’un qui se comporte de la sorte et c’est bien normal d’ailleurs parce que je giflerai quiconque agirait comme ça avec moi.
Je renifle bruyamment avant de détourner les yeux, ne supportant pas notre contact visuel.
— Vous étiez mon seul ami. Après des années, j’avais enfin un ami alors j’ai sincèrement ressenti de la peine lorsque vous m’avez affirmé le contraire.
Ma gorge est serrée.
— Mais vous avez eu raison car cela m’a rappelé la réalité, je poursuis. Vous connaitre a été une chance mais ce n’est réellement pas ce que je mérite. Car je ne suis pas quelqu’un de bien et une personne pouvant faire du mal à autrui ne mérite pas de vivre à proximité d’autrui.
Un hoquet me prend. La main de Sieg se fait plus pressante sur mon poignet, comme pour attirer mon attention mais mes yeux demeurent loin de lui, incapables de soutenir son regard.
— Je vous jure que je n’ai pas tué le professeur Andrews et ne suis pas une tueuse à gages, appelez le capitaine Church et il vous le confirmera.
Je marque une brève pause, incertaine quant à ce que je m’apprête à dire.
— Mais j’ai déjà tué quelqu’un et je sais que je ne mérite pas le pardon pour cet acte car…
Ma voix manque de se briser dans ma gorge. Je force légèrement dessus afin de parler, haussant le ton :
— …Je ne me sens pas coupable qu’il soit mort, je pense qu’il me méritait. Je me sens coupable parce que c’est moi qui l’ai tué. Je n’ai pas le sentiment altruiste d’avoir heurté autrui mais l’idée égoïste que c’est ma pureté qui a été entachée.
Ma poitrine me fait mal et mes jambes sont flageolantes. Je suis trop affaiblie pour demeurer ainsi mais j’ai besoin de terminer mon propos.
— Avant de vous rencontrer, j’étais seule car marginale. Je ne sais pas trop s’il s’agit d’un choix inconscient ou non mais la réalité est que j’ai du mal à m’intégrer aux autres car je suis différente d’eux. Mais cela ne signifie pas du tout que je les méprise, au contraire…
Mes mains se crispent.
— …Je les jalouse.
Mes propos sont décousus, j’en ai conscience. Seule mon envie d’extérioriser est présente.
Alors, levant enfin les yeux vers lui, je me décide à affronter de nouveau son regard. Ses sourcils sont légèrement haussés et une véritable empathie semble traverser ses iris, comme pour me couver.
Mais comment peut-il m’accorder tant de douceur alors que je lui ai avoué un meurtre ?
Qu’importe. Il se fait tard. Je dois conclure mon aveu.
— C’est juste qu’avec vous, je ne ressentais pas cette jalousie car les autres devenaient juste ce qu’ils sont : les autres.
Là-dessus, je m’écarte de lui. Je frissonne lorsque sa main chaude quitte mon poignet et, face à son expression surprise, tandis qu’il ne bouge pas, sous la stupeur, je ne lui laisse pas le temps d’ajouter quoi que ce soit et tourne les talons.
Quelque chose vient de changer entre nous. Irrémédiablement.
負けるが勝ち
3461 mots
hehe on commence à
en aprendre un peu plus
sur ce qu'il s'est
passé
bon les chapitres sont
un peu tristounets
en ce moment
mais ça va s'améliorer
vous inquiétez
pas
:)
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