𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐈
— S A N S M A N I E R E S —
cw — le personnage principal est
extrêmement manipulateur
負けるが勝ち
L'AILE EST DU BÂTIMENT A tranche superbement avec le restant des départements de l'université. Ici, les murs peints de couleurs criardes tachés ont laissé place à du bois parsemé de tableaux à l'effigie des doyens ou même parfois de reproductions d'œuvres célèbres. Le sol semblable à du plastique devient du parquet brun et les néons se muent en chandeliers décoratifs et lampes ouvragées.
Je retiens un sifflement admiratif en passant devant un buste d'Augustus en plâtre posé sur une minuscule table de bois calée à côté d'une toile. Entre les subventions généreuses et les œuvres minutieuses des étudiants en art, cette partie du bâtiment occupée par les professeurs les plus populaires — ceux qui ont écrits des thèses étudiées à travers le monde ou sont la raison pour laquelle des élèves s'inscrivent dans cette école ou même viennent d'une famille de généreux donateurs — est devenue un véritable musée.
Devant moi, la silhouette emmitouflée d'un cardigan de l'assistante du professeur Jäger se découpe. Son pas est lent, doux. Presque endormi. Il m'apaise presque malgré la situation actuelle.
L'une des têtes les plus appréciées de cette école me convoque dans son bureau après que je me sois prise le bec avec l'une de ses protégées. Sachant que je n'ai pas encore eu le temps de me plaindre auprès de son bureau, je ne vois qu'une explication à cela.
Elle a voulu prendre les devants et être la première à accuser l'autre.
Ainsi, je me retrouve ici. Au milieu de tant de décorations et ornements qu'un rire jaune me prend en songeant de nouveau à l'état de nos projecteurs qui transforment nos powerpoints soigneusement montés en amas de ligne de trois couleurs. J'en connais un qui ne sais absolument pas gérer le budget.
Une vague de colère me reprend lorsque je pense aux heures supplémentaires que j'ai dû faire pour payer mon année, à l'état de nos infrastructures, à la politesse plus que discutable de notre professeur de la veille et maintenant à cela. Un musée à l'intérieur d'une université, plaçant ici de belles œuvres qui n'aideront même pas la carrière des étudiants auteurs de celles-ci puisque, à part leurs propres professeurs, personne ne les voit.
Mon regard s'attarde sur une splendide toile très colorée représentant deux petites filles se tenant la main au milieu d'une forêt enchantée. Leurs yeux sont démesurément grands et leurs lèvres, minuscules. En s'attardant légèrement, on se rend compte que certaines plantes sont en réalité des animaux.
Cette peinture aurait eu beaucoup plus de visibilité dans le hall de l'université. Pas dans un énième couloir menant au bureau du professeur Jäger.
Je serre les dents. Je hais les élites. Ces personnes suffisantes qui hiérarchisent les goûts et les couleurs, ne cachent pas leurs mépris et volent ce qu'ils ont déjà. Des raclures. Du genre de celles que j'ai pu côtoyer.
Du genre que j'adore pousser à bout.
— Nous y sommes, retentit la délicate voix de l'assistante tandis que je détaille rapidement ses cheveux ébènes tombant sur ses épaules.
Elle frappe trois coups à la porte. Une voix à l'intérieur lui somme d'entrer. Elle ouvre avant de se poser à l'extrémité de l'encadrement, me laissant voir la scène se profilant sous mes yeux.
Le bureau est vaste et dans le même style que le restant de l'aile Est. De vieilles cartes sont accrochées au mur ainsi que des tableaux. Sur des meubles, des bibelots onéreux sont visibles, mais sans doute pas aussi coûteux que la large tapisserie posée sur le parquet et sur laquelle trône deux chaises faisant face à un bureau, dans le fond de la salle.
L'un des deux sièges est occupé par le crâne rasé affublé de créoles du professeur Andrews. A quelques mètres d'elle, assis sur un pupitre en retrait, un homme aux cheveux de jais me lance un regard ennuyé derrière ses lunettes. Sans doute le médiateur chargé d'attester qu'aucune pression n'aura été mise sur mes épaules pour calmer ce litige.
Sa simple présence rend cette entrevue particulièrement officielle et je ne peux m'empêcher de déglutir péniblement. J'avoue que je ne m'attendais pas à ce que l'on me convoque si tôt dans le bureau du professeur Jäger et encore moins que l'on fasse venir M. Ackerman.
— Approche et assis-toi, résonne la voix de l'homme occupant le bureau.
Mes yeux se posent enfin sur lui et je déglutis péniblement. Avec sa carrière dans les sports du combat et l'escrime ainsi que son visage toujours impassible, Livai Ackerman est l'homme qui me terrifiait le plus à l'université.
Mais, aujourd'hui, je pense que cela va changer.
Sous des lunettes rondes et dorées, deux yeux noisette me percent à jour. Légèrement assombris par la position inclinée vers l'avant de son visage, ils me donnent l'impression de n'être qu'une proie guettée par son prédateur. D'autant plus lorsque de désordonnées boucles blondes chutant sur son front lui auraient, en temps, normal, conféré une allure angélique. Car avec sa barbe fournie, ses pommettes hautes, son costume onéreux et son expression vile, il ressemble en effet à un ange, mais un déchu.
Alors, faisant mine de rien ressentir de son aura percutante, je franchis la dizaine de mètres me séparant du bureau et prend place sur le fauteuil de cuir brun en veillant à ce que mon dos touche le dossier. Il faut que mon langage corporel laisse voir de moi une personne extrêmement confiante et à l'aise. Même si la façon dont ses yeux ne m'ont pas quittée pendant que je marchais m'a saisie.
Sinon, ils me mangeront toute crue.
— Bien, vous pouvez disposer, mademoiselle Finger, lance-t-il fermement à l'intention de son assistante sans me lâcher un instant des yeux.
Je soutiens son regard sans sourciller ni ciller. S'il croit m'intimider avec un simple contact visuel, il se fourre le doigt dans l'œil.
Même si j'avoue en mon for intérieur que la façon qu'il a de figer sa pupille dans la mienne est sur le point de m'arracher un frisson. Je ne sais réellement ce qu'il pense mais, rien qu'à l'ardeur de son iris, je devine des émotions intenses. De la colère surtout. Aussi de la curiosité, peut-être.
La porte se ferme derrière nous au moment où Livai Ackerman prononce la date du jour et l'heure.
— Bien. Nous pouvons commencer, conclut-il.
Aussitôt, le professeur Jäger attaque, son dos collé au dossier de son fauteuil et ses mains jointes tandis que chacun de ses coudes reposent sur un des accoudoirs. Il n'a pas seulement l'air à l'aise. Il est à l'aise. C'est son terrain. Qu'importe la présence du médiateur, il compte bien me faire payer le fait d'avoir menacer la carrière d'un enseignant.
Un sourire étire le coin d'une de mes lèvres. Il a ramené Ackerman pour m'intimider en rendant cette entrevue officielle. Mais le noiraud est surtout là pour veiller aux droits de l'élève.
Croit-il sincèrement que je ne vais pas me servir de sa présence ?
— Bien, mademoiselle (T/P) (T/N), retentit la voix du professeur. Hier à vingt-et-une heure trois, j'ai reçu un appel de madame Andrews ici présente me faisant part d'un incident survenu au début de son cours.
Je me tourne vers la femme en haussant un sourcil. Elle fuit mon regard, gardant le sien rivé sur le blond. J'ai dû particulièrement l'ébranler pour qu'elle aille pleurer chez son directeur de thèse trois minutes seulement après la fin de sa classe, ne s'inquiétant pas de le perturber dans sa vie privée.
Mes yeux s'entrouvrent légèrement. Une autre explication peut éclairer le fait qu'elle n'ait pas peur de se mêler de sa vie en dehors des cours. Si elle en fait partie, elle ne craint évidement pas de le contacter tardivement.
— Selon la plainte qu'elle a écrite conte vous et m'a rendue ce m..., continue-t-il.
— Vous couchez ensemble ? je le coupe d'une voix ferme.
Sa voix meurt immédiatement dans sa gorge. Je sens le faible sursaut de la femme à côté de moi et même le médiateur, connu pour être un homme froid ne montrant jamais ses émotions, hausse un sourcil sans quitter les yeux de ses notes.
Le professeur Jäger, de son côté, contracte violemment la mâchoire en voyant mon sourire en coin.
— Ma vie privée ne vous regarde pas, cingle-t-il simplement.
— A partir du moment où elle fausse votre jugement et vous empêche de poser un œil critique sur cette affaire, bien sûr que si, je rétorque simplement. Il y a clairement conflit d'intérêt.
— Je ne suis pas du genre à utiliser mon autorité à mauvais escient, lâche-t-il en retour en se redressant légèrement sur son siège, menaçant.
— Dixit l'homme qui met en place une tactique d'intimidation minable en faisant venir un médiateur, je crache en retour en me penchant vers lui.
— Le médiateur est là pour veiller sur vos droits, répond-il avec véhémence en s'approchant lui aussi de ma personne, son buste allant vers l'avant.
— Me faire croire que vous me tendez une rose alors que c'est un flingue, je lâche avec un rictus sarcastique. Dites-moi quel abruti ne verrait pas la tactique de manipulation évidente dans ce procédé ?
— C'est vrai que la manipulation, ça vous connait.
Sa dernière réplique cingle l'air déjà électrique entre nous. La tension émergée est si vive que je sens presque l'atmosphère crépiter. Je n'ai qu'une envie, me jeter par-dessus ce bureau et lui enfoncer ses propres lunettes dans la gorge.
Je hais les intellectuels pour ce point précis. Ils sont convaincus que leur savoir est une arme et justifie les pires comportements parce qu'ils seraient mieux que le restant des mortels. Alors qu'ils ne sont en réalité que des connards affublés de livres pas foutus d'ouvrir les yeux sur le fait que leur puissance ne vient pas de leur intellect mais de la façon plus que méprisable que les autres ont de s'agenouiller devant eux.
Et cela se voit aux éclairs dans ses yeux. Ses bouquins ne lui sont d'aucune aide, aujourd'hui. Ce dont il aurait eu besoin, ce aurait été d'une élève prête à courber l'échine à cause de ses thèses si appréciées.
Je sais à quoi il fait allusion, dans sa dernière prise de parole. J'ai poussé madame Andrews à la faute intentionnellement. Oui c'est de la manipulation. Oui, je me suis servie de mon intelligence comme d'un pouvoir. Oui, j'ai fait ce que lui et tous ses semblables prétendent faire alors que leur seule puissance ne viendra jamais que de leur popularité.
Nous deux avons abusé de notre pouvoir tous les deux, à vrai dire. Le sien est son influence. Le mien est mon cerveau.
Va-t-il oser me faire la leçon ?
— Quoi qu'il en soit, reprit-il après un silence, je ne répondrai pas à cette question.
— Vous savez que c'est illégal de coucher avec votre étudiante ? je mens.
— Absolument pas, nous sommes majeurs et consentants, rétorque immédiatement la femme à ma droite.
Un sourire étire mes lèvres au moment où le professeur Jäger foudroie sa petite-amie du regard. Etant donné ma démonstration de la veille, elle aurait dû se douter que je serais prête à ce genre de stratagème pour la pousser à se dévoiler devant notre témoin, le médiateur Livai Ackerman qui s'empresse d'ailleurs de noter cette information sur son bloc-notes.
Je sais que Jäger me maudit en ce moment-même. Malgré son air détendu et le spectacle qu'elle nous a fait hier, la femme à mes côtés est de toute évidence quelqu'un de particulièrement impressionnable. Comme je suis l'élève et elle, le professeur, il est surprenant de réaliser que le schéma des pouvoirs entre nous est inversé.
Mais le blond a dû le comprendre dès lors qu'elle lui a répété notre conversation d'hier. Il a entendu comment je l'avais poussée à la faute.
Et il vient de me voir recommencer.
— Je pense que nous avons donc finit, je déclare simplement. Je demanderai à être changé de classe pour le TD de méthodologie et suis prête à faire un geste en ne parlant pas de cette entrevue.
Même s'il demeure stoïque, je devine combien le professeur Jäger fulmine intérieurement. Comment, moi, une gamine même pas diplômée, touchant le quart de son salaire — sans doute moins, d'ailleurs —, n'étant capable d'aucune forme de politesse et ayant vingt ans de moins que lui peut se permettre de le prendre de haut de la sorte ?
Tout simplement parce que, si Ackerman note que je me comporte comme une peste, je pourrais me défendre en disant que j'étais simplement intimidée et avais la sensation que mes droits étaient bafoués. Mais si le blond craque et m'insulte, le médiateur écrira tout de la scène et je pourrais m'en servir auprès de son supérieur.
Je sais combien mon comportement est répréhensible et je n'en suis honnêtement pas fière. Je n'ai pas la sensation d'être un antagoniste appréciable, juste une personne capable d'intelligence. Et je me sers de celle-ci quand je me sens en danger.
Même si, lorsque je le fais, la sensation de puissance qui m'envahit est grisante.
— Restez ici, mademoiselle (T/N), tonne la voix froide de Livai Ackerman sans qu'il ne se détache de son papier. Je suis peut-être là pour défendre vos droits mais je vous prierai de ne pas insulter mon intelligence en pensant que je ne vois pas clair dans votre jeu. La relation entre les professeurs Jäger et Andrews ici présents sera mentionnée si cette affaire va plus loin mais aussi votre prédisposition à pousser les gens à bout.
Je me fige. Bien que mon jeu n'ait pas été très subtil, j'avoue que je n'imaginais pas le médiateur capable de s'en rendre compte. Et, ma stratégie mis-à-nue, cet abruti vient de me faire perdre un atout considérable.
Je me replace donc plus confortablement sur mon siège sans piper mot. Je remarque le carnet en cuir brun que le professeur Jäger vient de tirer de son bureau et pose sur la table mais n'en dit rien, voyant qu'il ne l'ouvre pas et le laisse simplement à côté de lui.
— Bien, nous allons donc reprendre, déclare-t-il.
Je ne réponds pas et, dardant un regard venimeux sur le blond, le regarde reprendre peu à peu toute la contenance qu'il avait abandonné face à mes accusations.
— Mademoiselle (T/N), reconnaissez-vous avoir critiqué les méthodes d'enseignement du professeur Andrews hier et l'avoir menacée par la suite ? demande-t-il d'une voix douce.
— Non, je rétorque. Je ne l'ai pas menacée, j'ai simplement dit que j'allais vous parler. Si elle y a vu une menace, ça la regarde.
Evidemment qu'il y avait une menace. Mais j'ai pris grand soin de ne pas la formuler à haute voix justement pour qu'on ne m'accuse pas d'avoir tenté de l'intimider.
— C'était implicite, insiste la femme à ma droite.
— On ne s'intéresse qu'aux paroles dites, ici. Vous ne savez rien de ce que je pensais lorsque je vous parlais. Vous ne savez pas si je discutais dans le but de vous menacer ou que je me montrais simplement bienveillante en vous prévenant de ce que je comptais faire, je rétorque. A moins que vous ne soyez télépathe ?
— Mademoiselle (T/N), me rappelle fermement à l'ordre Livai Ackerman en entendant cette question rhétorique. Tenez-vous-en à votre défense, je vous prie.
Il a raison. Je ne dois pas me laisser déborder par la colère de sentir mon propre piège se refermer sur moi.
Il est clair que je la menaçais, le fait qu'ils couchent ensemble n'est pas si important que ça mais, comme je suis celle l'ayant mis en avant, il est clairement visible que j'aime mettre en place certains stratagèmes. Pour l'instant, je n'ai que l'allure d'une manipulatrice voulant emmerder une pauvre professeure qui n'a rien demandé.
Alors qu'elle est foncièrement en tort, à l'origine.
J'ai merdé. J'aurais dû éclater en sanglots et dire que j'avais trop travaillé pour payer mon année, que me déplacer jusqu'à l'université avait été compliqué, que j'étais épuisée et que voir ma professeure ne rien faire m'avait donc poussée à craquer au lieu de jouer les fortes têtes. Cela aurait été tellement plus subtile. Ils se seraient apitoyés sur mon sort et auraient accédé à mes requêtes.
Je viens de commettre une erreur de débutant. J'ai envie de me frapper à cette simple pensée.
Je n'ai plus qu'à renverser la balance, maintenant.
— La menacer aurait été dire que je mettrais fin à sa carrière, je reprends d'une voix calme. Je n'ai fait que lui signifier que j'allais discuter avec son supérieur du problème de son cours que tous les élèves ont remarqué.
Je sens les trois têtes se tourner vers moi. La femme à ma droite semble comprendre que je vais cracher le morceau sur le fond de notre litige puisqu'elle se tend soudain.
— Je n'ai eu aucune intention de reporter ses paroles prononcées sur le coup de la colère et qui auraient mis sa carrière en danger.
Bien sûr que si, j'en avais l'intention. Et je fais d'ailleurs faussement semblant de les énoncer innocemment pour attirer l'attention des deux hommes dessus.
Elle veut pleurer dans les jambes de son patron ? Je vais lui donner une raison de pleurer.
— Moi je voulais juste discuter du fait qu'elle refuse de nous faire cours et qu'elle nous a clairement dit qu'elle s'assiérait sans bouger pendant deux heures, je poursuis, cachant le sourire voulant étirer mes lèvres lorsque je vois le haussement de sourcils que Livai Ackerman adresse à la concernée. Je veux dire, j'ai payé mon année et j'ai eu du mal à venir en cours juste après mon travail !
C'est faux, je ne travaillais pas ce jour-là. Mais d'autres, si. Alors je ne me sens pas coupable de mentir.
— Si je paye des cours, que je me dispute avec ma manager pour être à l'heure là-bas et qu'au final on me dit juste de lire un texte pendant deux heures, je craque, c'est tout. Et c'est de ça que je voulais vous parler, professeur Jäger...
Je regarde celui-ci dans les yeux, prête à asséner le coup de grâce avec une dernière phrase.
— Pas du fait qu'elle m'a dit qu'elle saboterait mon épreuve de rattrapage et mon examen, je susurre avec une moue faussement compatissante avant de faire semblant de prendre sa défense, après tout, nous avons tous nos moments de colère.
Aussitôt cette phrase fend-elle l'air que les deux hommes se tournent vivement vers l'autre femme. Et c'est avec un sourire caché que je vois les yeux écarquillés du professeur Jäger se poser sur sa petite-amie.
De toute évidence, elle ne lui a pas tout dit, hier, finalement. Ou peut-être a-t-elle minimisé ses propos ?
Qu'importe. (T/P), deux. Madame Andrews, un. La balle au centre. À elle de jouer.
— Vous avez fait quoi ? demande le blond d'une voix sèche et cassante.
— Je... Je..., balbutie la femme sous le regard noir du médiateur ayant déjà pris note de cette information.
Je dois me retenir de rire. Après un tel but de ma part, c'est sûr que c'est compliqué de relancer le jeu. Va-t-elle réussir à rattraper son point manquant ? Je n'en sais rien.
En revanche, j'apprécie la tournure des évènements.
— Mais vous voyez bien qu'elle fait semblant d'être compatissante ! s'exclame-t-elle. Elle a fait exprès de vous parler l'air de rien de ça et elle a vraiment mis sa menace à exécut...
Oh ma jolie, je songe, très mauvais angle de défense. Je dirais même but contre son camp. Non seulement elle admet ses torts mais essaye de s'en justifier alors que, lorsqu'on commet une telle faute, le mieux reste encore de s'excuser. Même si la demande de pardon est fausse, elle témoigne d'une envie d'apprendre de ses erreurs qui a tendance à toucher les autres. D'autant plus que, étant donné que c'est un acte considéré comme humiliant, le faire est perçu en réel effort.
Je ne compte plus le nombre de fois où je me suis excusée en déballant un discours factice sur mes torts juste pour me tirer d'une mauvaise situation.
— Evidemment qu'elle essaye de nous manipuler pour passer pour la gentille ! la coupe le blond d'un ton sanglant. N'importe quel abruti serait capable de le voir ! Mais ce qui compte, ce n'est pas ça !
Ma mâchoire se contracte. Je veux bien admettre qu'on insulte mon jeu d'acteur mais ça, c'était franchement juste méchant.
— Avez-vous, oui ou non menacez cette élève de saboter son examen ? demande le professeur.
Le silence se fait après sa question. Les regards des deux hommes convergent en direction de la femme à ma droite mais je préfère ne pas les imiter. Car je sais ce qu'il se produirait si je m'avisais de la regarder.
Et éclater d'un rire moqueur dans une telle situation serait de très mauvais goût.
Elle se tait durant de longs instants, ayant visiblement aucune idée de comment se défendre à partir de là. Bien sûr, elle pouvait m'accuser de mentir. Mais quarante élèves témoigneraient du contraire. Elle était cernée.
Peut-être ma réaction était-elle exagérée. Après tout, elle n'avait fait que tenter de se la couler douce à nos frais. C'est d'ailleurs pour cette exacte raison que, ce matin, j'hésitais encore à prévenir son directeur de thèse.
Mais après m'avoir fait convoquée dans ce bureau, jouer des muscles en y amenant un médiateur et ridiculisée en mettant en avant mes méthodes, j'avoue que je ne parviens pas à résister à une petite vengeance. Elle l'a méritée.
Selon qui ? Selon moi. Est-ce que je suis un juge impartial ? Non. Est-ce que cela me préoccupe ?
Absolument pas.
— Répondez à la question, je vous prie, résonne à son tour la voix du noiraud.
Elle semble enfin s'animer.
— Euh... Oui... Sur le coup de la colère il se pourrait que j'ai menacé de..., hésita-t-elle.
— Vous m'avez dit hier qu'elle vous avait poussé à bout et que vous l'aviez traitée de petite conne, tonna le blond en réponse. Vous vous rendez compte de la différence entre insulter une élève et menacer de détruire son avenir ? Le premier est une agression verbale compréhensible quand on sait qui était votre interlocutrice, le deuxième est un abus de pouvoir flagrant. Et vous m'avez menti lors de votre plainte, en plus.
Ignorant la pique du blond à mon égard, je refreine comme je peux une remarque acerbe sur le fait qu'une plainte n'en était pas vraiment une lorsqu'elle se formulait sous les draps. C'est drôle mais fort déconvenue.
Surtout quand je suis clairement en train de marquer un but magistral.
Le silence se fait, elle n'ose répondre. Le noiraud écrit en toute hâte ces dernières paroles avant de relever la tête.
— Etant donné les dernières révélations et le fait que six autres élèves se soient déjà plaints du format de vos cours, il me semble qu'une décision doit être prise.
Bénis soient ces six autres élèves qui sont sans doute bien plus crédibles que moi. Je sais que, s'ils n'avaient pas existé, ma simple voix — parasitée par l'image qu'ils avaient de moi — n'aurait débouché sur rien du tout à part une petite remontrance.
— Je pense savoir quoi faire, intervient Jäger.
Je soupire et ne cherche pas à m'en cacher. Cet abruti est clairement émotionnellement impliqué avec l'accusée, le médiateur ne va quand même pas le laisser choisir sa punition ?
— Je vous écoute.
Mais qu'il est con, je songe en fusillant Livai Ackerman du regard qui, vu celui qu'il me rend, doit deviner clairement ce à quoi je pense.
— Le professeur Andrews est nouveau, elle doit encore parfaire ses méthodes d'enseignement. Je propose donc qu'elle prenne le relais du TD que j'assure le lundi. Mon petit frère Eren est élève dedans, il pourra me dire comment les cours se déroulent et si elle a corrigé le tir.
— Et qui assurera les cours de mademoiselle (T/N) et le restant de sa classe ? demande le noiraud en acquiesçant tout de même à sa proposition.
Un silence se fait et je peux presque voir l'éclat malicieux dans le regard que me jette le blond derrière ses lunettes.
— Moi.
Le médiateur note cela sur son bloc-notes avant relever la tête.
— Je trouve cette solution judicieuse. Madame Andrews écrit encore sa thèse, la renvoyer mettrait en danger son avenir, surtout pour un simple éclat de colère. Mais nous devons marquer le coup er s'assurer qu'elle apprenne de son erreur.
La concernée hoche la tête, un sourire reconnaissant aux lèvres.
— Bien, reprend le médiateur en fermant son bloc-notes. Je ferais parvenir à vous trois une copie de cette décision que vous signerez.
Il concentre son regard sur moi.
— Je conseille à tout le monde de le faire car vous tous avez des choses à vous reprocher qui pourraient vous être particulièrement préjudiciables si nous ouvrons une autre séance.
Je ne réponds pas. Je sais que je suis la seule visée par cette phrase. Il se lève de son siège.
— La séance est terminée.
Je fulmine. Pendant que le noiraud quitte la salle et que la femme à ma droite range ses affaires, je vois nettement le sourire en coin que me lance le professeur Jäger. Lui saura me pourrir la vie sans se faire prendre. J'aurais du mal à le manipuler et le pousser à la faute s'il s'avise de s'en prendre à moi. Et il le sait pertinemment.
Ce connard compte bien prendre sa revanche.
負けるが勝ち
4190 mots
et voilà pour le premier
chapitre de sans
manières et la
rencontre entre sieg et
(T/P)
pour le personnage de
(T/P), ne vous inquiétez
pas, elle va évoluer !
j'espère tout de même
que ça vous a plu
même si on commence
tout doucement
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