⸺ Remus, je te cherchais partout ! s'écria une voix joyeuse.

Je sursautai brusquement puis me retournai : Tonks s'avançait vers moi avec un grand sourire. Ses cheveux violets voletaient derrière elle dans un mouvement aérien et léger. Elle était décidément magnifique. Elle avait l'air certes, fatiguée, mais après tout rien d'étonnant : nous enchaînions les missions pour l'Ordre depuis plusieurs semaines. Dès le jour suivant de notre cérémonie de mariage dans le nord de l'Écosse, nous avions dû reprendre les sorties nocturnes d'espionnage.

⸺ Comment vas-tu ma belle ? lui souris-je en me levant pour me diriger vers elle.

Elle m'adressa un grand, un immense sourire sublime. Elle avait sincèrement l'air heureuse. Pas simplement joyeuse, comme sur le moment. Non, elle avait une expression faciale qui laissait transparaître une bonne humeur durable et sincère. Je lui renvoyai son sourire et me penchai vers elle pour l'embrasser. Elle se leva sur la pointe des pieds et m'enlaça tendrement. Tonks était vraiment une femme magnifique. Magique. Cette métamorphomage avait été la première personne à me porter un amour amoureux. Pour la première fois de ma vie, je me sentais vraiment libre. Libre d'aimer. Libre d'être moi. Même si... parfois, j'avais peur que tout s'effondre. Parfois, je me disais qu'elle était trop bien pour moi, et qu'elle finirait par me quitter car ma situation de lycanthrope lui nuirait plus qu'autre chose. Mais... oh, et puis assez ! Deux voix dans ma tête s'affrontaient sans cesse. Entre mes démons, mes peurs et mon envie furieuse et sauvage de vivre, je me retrouvais sans cesse coincé.

⸺ Où étais-tu durant la journée ? Je ne t'ai pas vue dans la maison lorsque je me suis levé.

⸺ Je me suis rendue dans une ville Moldue pour faire un rapport sur la situation actuelle. J'ai failli tomber dans une embuscade faite par les Mangemorts mais je leur ai très facilement échappé.

Je le regardai avec admiration et tendresse avant de la prendre dans mes bras.

⸺ Tonks, ne te mets pas en danger inutilement. Je ne voudrais pas te perdre. Je t'aime.

⸺ Je ne suis plus une enfant, Remus ! répliqua-t-elle avec la fougue qui lui était propre.

⸺ Je ne te considère pas comme telle.

Et encore heureux, d'ailleurs, me direz-vous.

⸺ Alors ne m'en donne pas l'impression ! re répondit-elle en se dégageant de mon étreinte avec un sourire mi-moqueur mi-charmeur.

Je la rattrapai et prit ses mains dans les miennes. Puis je déposai mes lèvres sur les siennes, une fois.

⸺ Ça, c'est pour te montrer que je ne te considère pas comme un enfant.

Je réitérai cette action.

⸺ Ça, c'est pour oublier que tu es partie aujourd'hui sans me prévenir et que j'ai eu peur que tu ne reviennes pas.

Je me répétai tandis qu'elle souriait.

⸺ Et ça, c'est pour tous les « je t'aime » que je ne t'ai pas dit. Que je n'ai pas pu te dire.

Elle me regarda avec de grands yeux brillants. Malgré tout, ce regard lumineux démontrait qu'elle gardait encore de beaux vestiges de son âme d'enfant. L'insouciance. Une certaine naïveté. Une gentillesse à toute épreuve.

⸺ Je t'aime aussi.

Elle m'embrassa avec passion. Ses lèvres soyeuses se muèrent en un sourire mélancolique.

⸺ Au fait, Remus, je dois te dire quelque chose.

Aussitôt, elle prit un air sérieux. Puis afficha un sourire sur son faciès pour masquer l'anxiété qui pointait sur son visage.

⸺ Que se passe-t-il ? la questionnai-je, affolé, tandis que mon esprit anxieux faisait défiler devant mes yeux des situations plus horribles les unes que les autres.

⸺ Ne t'inquiète pas. C'est... c'est juste une grande nouvelle, et je ne sais pas vraiment comment te l'annoncer.

⸺ Ne stresse pas. Dis-le-moi comme tu veux. Je ne te jugerai pas. Qu'y a-t-il ?

Tonks m'adressa un sourire lourd de sens tandis que sa poitrine se soulevait de plus en plus vite. Mais pourquoi donc avait-elle l'air si affolée ? Ses mots avaient l'air emplis d'appréhension.

⸺ Tonks ! S'il te plaît, tu me fais peur.

⸺ Je suis désolée... Excuse-moi. Je... je suis... Oh ! C'est tellement compliqué à dire...

Je serrai mes mains dans les siennes.

⸺ Que se passe-t-il ? répétai-je encore une fois.

⸺ Je suis... commença-t-elle avant de s'arrêter brusquement. Oh. Tu vas mal le prendre.

⸺ Dis-le-moi. Je t'en prie. Je sens que c'est une grande nouvelle et qu'il est compliqué pour toi de me parler mais... fais-le, s'il te plaît.

⸺ Je suis... je suis... je suis en... oh, non, attends. S'il te plaît. C'est trop dur.

Je la pris dans mes bras. Quelle pouvait donc être cette nouvelle pour qu'elle mette Tonks dans tous ses états ?

⸺ Si tu n'arrives pas à le dire, peut être préfères-tu l'écrire ? suggérai-je.

⸺ Je... oui. Oui, tu as raison

Elle se dégagea et, d'un coup de baguette, fit apparaître un petit bout de parchemin et un stylo. Je la laissai faire, voyant qu'elle tremblait légèrement. Au bout de nombreuses secondes où j'essayais de ne pas penser à des choses horribles, elle me tendit le parchemin. Et alors ma vie bascula.

« Je suis enceinte, Remus. »

Je me reculai et tenant le papier entre mes mains tremblantes. Non. Ce n'était pas possible. Pas elle. Pas moi. Pas maintenant. Pas...

⸺ Si c'est une blague, elle est très mauvaise, Tonks, parvins-je à articuler.

Elle s'approcha de moi et me pris dans ses bras. Je ne réagis pas. J'en étais incapable. Tout autour de moi venait de s'effondrer.

⸺ Ce n'est pas une blague, Remus. Je suis réellement enceinte de toi. Ce n'est pas merveilleux ?

Les mots sortis de sa bouche mirent quelques secondes avant de se clarifier. Je la repoussai avec véhémence.

⸺ Merveilleux ? Merveilleux ? Tu trouves cela merveilleux de savoir que j'ai peut-être transmis ma lycanthropie à ton enfant ? À... à notre enfant ? Tu trouves ça merveilleux de savoir que nous vivrons peut-être la même vie misérable que mes parents ? Des nomades désespérés traînant un enfant de plus en plus violent ? Tu trouves ça merveilleux, Tonks ?

Je retenais tant bien que mal mes larmes. Comment pouvait-elle trouver cela merveilleux ? Elle était folle, inconsciente ! Et moi, je venais de détruire nos vies. En la rendant enceinte. J'aurais dû faire attention, j'aurais dû...

⸺ Remus... tu... Pourquoi réagis-tu comme cela ? Tu devrais te réjouir !

⸺ Me réjouir de savoir que j'ai détruit nos vies et celle de notre enfant à venir ? vociférai-je avant même qu'elle n'ait terminé sa phrase.

⸺ Tu n'as rien détruit ! Arrête de culpabiliser, ce que tu penses est faux !

Tonks avait raison. Mais je ne l'ai pas compris tout de suite. J'ai malgré tout ressenti un petit pincement au cœur lorsque je suis sorti de la maison en trombe et que je l'ai vue sangloter à la fenêtre, une lueur m'implorant de revenir dans son regard.

En ce moment, mes démons avaient pris le pas sur l'espoir qui avait fini par naître après tout l'amour que j'avais vécu avec elle.