chapitre 9 ◌ fuite

La conférence où s'exprimerait l'association en faveur des droits du peuple Eldien eu lieu le lendemain. Dans l'immense salle déjà pleine à craquer, le groupe venu de Paradis se repartit sur plusieurs rangées dans le public pour ne pas trop attirer l'attention. Ophelia se plaça aux côtés d'Hanji, qui tenait à l'avoir à l'œil depuis la veille malgré les nombreuses interventions d'Eren qui affirmait qu'elle l'avait suivi uniquement pour tenter de le ramener à la résidence des Azumabito. Personne n'était dupe et tous étaient conscients du caractère secret de la jeune femme.

Hanji était intransigeante ; elle avait elle-même permis à cette adolescente de les rejoindre, trois ans auparavant. Elle en était responsable. Seulement, surveiller Ophelia n'était pas une chose simple.

À vrai dire, la principale concernée n'en avait rien à faire, c'en était presque irritant. Elle se fichait des limites qu'on lui imposait mais prenait toujours soin de se montrer polie, trop polie et irréprochable pour que l'on ait de véritables raisons de la suspecter de quoi que ce soit.

— Nous cherchons de l'aide pour les sujets d'Ymir éparpillés à travers les nations ! commença le représentant de l'association qui représentait la dernière chance pour Paradis de se montrer pacifiques. Ces réfugiés n'ont jamais été Eldiens et n'ont rien à voir avec les dangereuses idéologies de l'Empire Eldien ! Ce ne sont rien de plus que des victimes qui méritent de la compassion, forcés par l'Empire Eldien à se reproduire. Il n'y a que les démons de cette île qui méritent notre haine, aujourd'hui plus que jamais !

Habituée à ce mode de pensée, Ophelia ne montra aucune réaction, contrairement aux autres dont les visages se décomposèrent. Bien sûr qu'ils n'allaient pas défendre Paradis. Hanji l'avait dit elle-même avant de venir jusqu'ici : que ces fameux démons rassemblent le peuple dans leur haine arrangeait tout le monde.

— Les démons qui ont fui jusqu'à cette île il y a cent ans sont ceux que nous devons abhorrer ! tonna l'homme sous les applaudissements et les acclamations. Nos ennemis sont ces démons insulaires !

Mikasa fut la première à remarquer le départ d'Eren. Situé à la dernière rangée comme s'il avait déjà tout prévu, il se leva sans prévenir et passa la porte sans un regard pour ses amis. Perdue, la Ackerman le signala à Hanji avant de jeter un regard méfiant à Ophelia, qui se contenta d'écouter les horreurs que déblatéraient tous les idiots présents dans cette salle. Consciente qu'attirer l'attention sur eux maintenant n'était pas une bonne idée, le major fit signe aux jeunes de rester tranquilles malgré son propre agacement.

Évidemment, il y eut un mouvement de foule dès la fin de la conférence. Les Eldiens de Paradis firent de leur mieux pour ne pas se perdre de vue pour se retrouver à la sortie, et l'inévitable se produisit.

Arrivée au regroupement de ses soldats, Hanji poussa un soupir excédé. Elle porta l'une de ses mains à son front et secoua la tête sous les regards nerveux de ses soldats.

—Ophelia est encore partie.

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De toute évidence, l'armée Mahr n'avait pas choisi Ophelia Hawk au hasard lorsqu'il avait été question de l'envoyer sur le terrain alors qu'elle n'était qu'une simple humaine.

Disparaître avec discrétion, jauger une situation plus vite que quiconque et agir selon son instinct... Ses compétences étaient nombreuses et plutôt impressionnantes, il fallait le reconnaître.

Seulement, après avoir été suivi plusieurs fois par cette soldate d'élite, il n'eut aucune difficulté à s'en rendre compte cette fois-ci.

Ophelia ne put que lâcher un hoquet de surprise lorsque deux mains agrippèrent fermement ses épaules et la tirèrent dans un chemin à l'abri des regards. Le choc de son dos contre le mur froid lui arracha une légère grimace qui laissa vite place à une expression agacée.

— Décidément, c'est ton truc, les ruelles.

— Pourquoi tu me suis ? gronda Eren.

La jeune femme planta son regard dans le sien, accusatrice. Elle ne fit rien pour se défaire de sa prise, mais celle-ci se desserra d'elle-même après quelques secondes. Il ne la lâcha pas pour autant, bien décidé à la convaincre de faire demi-tour.

— Tu poses vraiment la question ? Parce qu'on dirait que tu la connais déjà, parfois.

— Tu t'es fait ta place dans le Bataillon, avec les autres, pourquoi tu voudrais gâcher ça maintenant ? Tu sais très bien qu'ils vont commencer à se méfier.

— Pas toi ? le nargua-t-elle. Qu'est-ce qui te dit que je compte pas te tendre une embuscade pour te ramener à l'armée Mahr, que je viens pas de te faire croire que tu m'avais piégée ?

Ses lèvres s'étirèrent en un sourire joueur lorsque son visage fut à quelques centimètres à peine de celui d'Eren. Il gardait les sourcils froncés et les dents serrées, deux éléments qui lui donnaient l'air de toujours être en colère - ce qui était presque le cas, au final - mais malgré cela, elle avait entendu son souffle se couper et percevait parfaitement sa nervosité. Il la dévisagea un moment, déstabilisé par son regard calculateur qui semblait le passer en revue.

— T'es pas si imprévisible que tu le penses, rétorqua-t-il.

Ophelia laissa retomber son sourire et haussa un sourcil.

— Oh, vraiment ?

Il eut tout juste le temps d'identifier ce ton railleur avant qu'elle ne se dégage de sa prise pour l'attaquer, le bloquant avec ses bras et passant son pied derrière les siens. Elle le fit si vite qu'il ne s'en rendit compte que lorsqu'il retrouva à terre, piégé par la soldate qui rendait toute offensive impossible, ainsi placée au-dessus de lui.

— Tu disais ?

Visiblement très peu perturbé par la position censée être inconfortable, Eren ne tenta pas de s'en défaire, coupé dans son élan par un éclair de compréhension.

— Tu te bats comme...

— Comme Annie ? J'aimerais bien, sourit Ophelia. Non, je lui ai seulement piqué quelques techniques. Vu le nombre de raclées qu'elle m'a mises, je me suis dis que c'était légitime.

Sur ces mots, elle se releva et, après avoir brièvement épousseté ses vêtements, tendit la main au jeune homme qui la toisa comme si elle était la personne la plus stupide qu'il eût jamais rencontrée. Confuse, elle s'apprêta à se raviser par méfiance lorsqu'il la saisit avec fermeté. En un claquement de doigts, les rôles furent inversés et Ophelia se retrouva piégée à son tour, le dos plaqué contre le sol froid, l'avant-bras d'Eren placé devant sa gorge et prêt à appuyer si elle tentait quelque chose.

— Et bah, je commence à comprendre pourquoi c'est elle qui a été choisie pour le Féminin et pas toi. Si t'as pas un fusil entre les mains, tu vaux plus grand chose, pas vrai ?

Un instant incapable de comprendre ses intentions, la jeune femme fronça les sourcils, une paume plaquée contre son torse pour tenter vainement de le repousser. Puis, face au regard curieux du brun, elle éclata de rire.

— Attends, je rêve où tu essaies de me faire fuir avec des mots méchants ? Non, c'est vraiment hilarant, articula-t-elle au désarroi de son interlocuteur. Tu crois vraiment qu'avoir le Titan Féminin ou entrer dans le Bataillon étaient des objectifs que j'avais ? Tu crois que j'en ai quelque chose à faire ? Pire encore, tu crois que tu peux m'offenser et contrôler mes décisions comme ça ? Je te pensais moins naïf, Jaeger. Pour faire du mal à quelqu'un, il faut au moins connaître quelques unes de ses faiblesses.

Elle retrouva son sérieux et le toisa d'un regard ennuyé, encore mécontente de s'être faite avoir. Perdu quant au comportement qu'il devait adopter avec elle, Eren prit quelques secondes pour l'observer avant de reprendre la parole.

— T'es vraiment incompréhensible.

— Je le prends comme un compliment. Écoute, on a pas mal de choses à se dire et j'ai en tête une petite liste argumentatives des raisons pour lesquelles tu devrais t'arranger pour me garder de ton côté alors on ferait mieux d'aller ailleurs pour discuter, tu penses pas ?

Contraint d'admettre qu'il n'avait pas vraiment d'autre choix, Eren la relâcha à contrecœur et, sans mauvaises intentions cette fois-ci, lui tendit la main après s'être relevé. Ophelia accepta son aide son rechigner, satisfaite d'avoir son attention. Une fois face au brun, elle lui lança l'un de ses fameux regards espiègles, ceux qui témoignaient de ce tempérament imprévisible qu'elle aimait secrètement dévoiler au grand jour après avoir été bien trop polie à son goût durant une longue période.

— Fais pas cette tête, je suis sûre qu'on va bien s'entendre, ironisa-t-elle.

Eren marmonna une réponse inintelligible avant de désigner la sortie de la ruelle d'un geste de la main, soupirant de fatigue par la même occasion.

— Après toi.

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Se retrouver au milieu de ses futures victimes ne lui apportait plus ce sentiment d'oppression, ou presque plus. Peut-être devenait-il peu à peu hermétique à toute émotion. C'était le processus, non ? Bientôt, il n'aurait plus rien d'humain et, quitte à porter ce fardeau, Eren le porterait la tête haute. Plus question de se laisser aller comme il l'avait fait la veille. C'était ainsi, pleurer ne servirait à rien. Le destin ne cédait jamais aux supplications.

Alors il demeura indifférent durant les longues minutes qu'il passa à attendre le retour de sa camarade dans cet endroit qui lui était inconnu, et se contenta de faire comme si de rien n'était.

Ophelia finit par le rejoindre, s'installant sur la banquette d'en face. Elle fit glisser une tasse de thé jusqu'à lui et leva les yeux au ciel en le voyant grimacer à l'odeur inhabituelle du café. De son côté, elle devait bien avouer que retrouver sa boisson préférée lui faisait du bien.

— Je te trouve bien impoli, Jaeger.

— Merci, grommela le jeune homme.

— Je t'en prie, sourit-elle.

Pensif, Eren but une gorgée de sa boisson chaude sans cesser de dévisager Ophelia. Elle faisait de même, partiellement cachée derrière sa tasse. Quelle ironie. Elle tentait de le comprendre, de l'analyser comme elle le faisait avec chaque personne qu'elle croisait, mais elle-même était un mystère ambulant. Ne baissait-elle vraiment jamais sa garde ? Comment pouvait-elle contrôler son aspect extérieur avec tant d'aisance ? C'en était fascinant.

— Alors, tu comptes vraiment me coller longtemps ? finit-il par questionner après s'être raclé la gorge.

La jeune femme se contenta de hausser les épaules.

— Je sais pas, je connais pas le futur.

Le rictus étrange qu'il eut en entendant ces mots ne lui échappa pas, mais elle n'en fit aucun commentaire.

— Et tu finiras peut-être par vouloir me garder, qui sait ?

— Et qu'est-ce que tu as à gagner en me suivant ? reprit-il, ignorant sa plaisanterie qu'il trouva plutôt ironique.

— Oh, c'est surtout une question de sécurité, puisque ceux du Bataillon ne me font plus confiance. Tu comprends, une fille comme moi seule ici... J'ai peur de ce qu'on pourrait me faire si on me reconnaissait. Je ferais certainement pas long feu.

Ennuyé, Eren reposa sa tasse sur la table dans un vif claquement qui fit sourire Ophelia. La patience ne figurait pas sur la liste de ses qualités, elle le savait et il ne faisait que lui prouver encore et encore. Et cela l'amusait.

— C'est moi qui ai fini à terre en premier, pas vrai, madame l'imprévisible ? ironisa-t-il. Je commence à me demander si t'es pas juste une pâle copie d'Annie.

— Hm, fit la jeune femme avant d'avaler une nouvelle gorgée de café. Vraiment ? On n'a pas grand chose en commun, pourtant. Au passage, je remarque que ton humour est plutôt médiocre, monsieur liberté.

— Qu'est-ce qui se passera s'ils te retrouvent ? S'ils apprennent ce que t'as fait ? questionna Eren sans prendre en compte sa remarque.

L'air indifférent, Ophelia posa doucement le récipient devant elle sans le lâcher de ses deux mains. Elle retrouva son sérieux mais ne montra aucun signe de nervosité face à la mention de ceux qu'elle avait fui. Les Mahr ne seraient pas doux avec elle, c'était certain.

— Je serais certainement renvoyée à Paradis sous une forme bien moins humaine, plaisanta-t-elle. Peut-être qu'on me torturerait un peu avant, s'ils sont assez intelligents pour comprendre que je sais tout sur l'île et ses habitants. Histoire de me forcer à parler avant de me faire taire à jamais.

— Tu parlerais ?

Transcendants, les yeux azur d'Ophelia se heurtèrent à ceux, accusateurs, de son interlocuteur.

— Tu leur dirais tout ce que tu sais ?

— D'après toi ? lança-t-elle, les coins de ses lèvres se relevant en un sourire joueur.

Eren prit un instant pour réfléchir, se laissant prendre au jeu. Analyser quelqu'un, décrypter son comportement et prédire ses agissements pouvait s'avérer être plutôt divertissant. Bien qu'il n'ait pas la patience d'agir ainsi au quotidien, il comprenait mieux Ophelia en essayant de fonctionner comme elle.

— Tu parlerais uniquement si t'étais sûre de gagner quelque chose d'intéressant en retour.

— Pas mal, le complimenta-t-elle. C'est vrai. Ce serait mon genre. Et pour répondre à ton autre question... J'ai tout à gagner. C'est l'avantage de ne rien avoir à perdre, je suppose.

— T'as vraiment rien à perdre ?

Pour la première fois, Ophelia eut un geste qui trahit un élan de nervosité. Elle détourna le regard, juste une seconde mais ce fut assez pour comprendre qu'elle cachait bien quelques détails importants. En remarquant qu'il la dévisageait comme pour trouver lui-même la réponse, la jeune femme le jaugea un instant en silence, l'air de se demander s'il valait vraiment la peine d'exposer ses faiblesses comme son instinct lui disait de le faire. Finalement, elle termina son café d'une traite et esquissa un sourire.

— T'as gagné, Jaeger. C'est l'heure de passer aux révélations.

。・:*:・゚★,。・:*:・゚☆

ça vous dit d'en apprendre un peu plus sur Ophelia ?
rendez-vous au prochain chapitre alors 😼

Zoé

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