chapitre 30 ◌ ...and fall
Ophelia ne put se contraindre immédiatement à regarder les dégâts. Les hurlements de panique et le son des tribunes s'effondrant sous les poings d'Eren suffisaient. Elle n'avait pas besoin de voir la peur de tous ces gens ou de penser aux enfants qui se trouvaient au milieu de ce chaos, d'apprendre que Sophia avait reçu un rocher aussi gros qu'elle sur la tête ou qu'Udo était mort piétiné par la foule.
Elle se rendit cependant vite compte qu'elle serait gênée par son maudit uniforme qui ne servait qu'à faire bonne figure devant les haut-gradés, et non pas à se battre au beau milieu d'un tel enfer. Délaissant alors son fusil après un énième coup d'œil en direction de l'équipe de Magath sur le toit d'à côté, Ophelia desserra sa cravate et ouvrit son long manteau jusqu'à pouvoir l'enlever. Avec ou sans, elle serait de toute manière tout autant vulnérable aux potentiels projectiles.
Partiellement cachée derrière le rebord du toit, Ophelia releva ensuite son fusil et observa attentivement Magath et ses hommes. L'absence des guerriers les avait complètement déstabilisés, c'était évident. Ils étaient le cœur de l'armée Mahr. Sans eux, les chances de remporter un quelconque conflit ne pouvaient que chuter.
Néanmoins, parmi les morceaux de la scène détruite, une femme se redressa avec difficulté. Un filet de sang coulait le long de sa tempe et son abdomen n'avait pas été épargné par la chute de débris, ainsi, la sœur de Willy Teyber n'eut pas besoin de faire un quelconque geste pour se transformer.
L'éclair orangé surprit Ophelia. Les yeux écarquillés, elle se tourna du côté du champ de bataille qu'était devenu le centre de Revelio et vit Eren envoyer le Titan à peine formé de la Teyber au sol en un seul coup de poing. Il ne s'arrêta pas là, profitant de son immobilité temporaire pour solidifier ses doigts et donner plus de puissance à ses attaques. Il s'acharnait sur elle sous les regards impuissants des soldats Mahr.
C'était sans compter Magath et sa détermination sans faille. Quand il leva son fusil pour tirer dans la direction d'Eren, comme pour signaler que la riposte pouvait commencer, Ophelia n'hésita pas à diriger le canon de sa propre arme dans la direction de son équipe. Elle entendit bien le Titan Marteau d'Armes terminer de se transformer et faire apparaître un gigantesque pic solide au bout duquel son adversaire se retrouva empalé, mais elle se concentra uniquement sur ce qu'elle voyait à travers son viseur et sur sa respiration qu'elle devait garder stable. Quand son coup partit et qu'un soldat ennemi s'effondra à quelques mètres de là, elle esquissa un sourire.
— C'est Hawk ! signala immédiatement un homme au capitaine Magath qui n'en fut aucunement surpris.
— Plus le temps pour les interrogatoires, répondit alors ce dernier. Tuez-la dès que vous en avez l'occasion.
Ce fut pourtant vers Eren qu'ils durent diriger toutes les armes lorsqu'il se dégagea habilement du piège de la Teyber pour éviter l'attaque de son marteau, un bout du pic encore planté dans le ventre. Ophelia ne lâcha pas son sourire satisfait tandis qu'elle répétait son action précédente, profitant du fait qu'ils ne pouvaient rien contre elle tant qu'il n'y aurait personne d'autre pour tenter de contrecarrer les offensives d'Eren. Deux autres soldats tombèrent sous ses balles avant que le Marteau d'Armes attire son attention en abattant son lourd marteau directement en direction de la nuque de l'Assaillant.
— Bon sang, quelle puissance ! Il l'a eu ! L'Assaillant n'a pas fait le poids ! Le Marteau d'Armes l'a vaincu !
Le regard désormais rivé à ce qu'il restait du Titan concerné, Ophelia observa avec nervosité le halo de fumée que sa nuque dégagea soudainement. Sur le toit voisin, Magath serra les dents.
— Et voilà... Eren Jaeger en chair et en os, ironisa-t-il.
La fumée ne tarda pas à se dissiper et la jeune femme écarquilla les yeux en apercevant le corps humain de celui qu'elle aimait. Il était de nouveau bien entier et, les joues décorées des marques habituelles de sa transformation, planta son regard plus déterminé que jamais dans celui du Titan qui s'apprêtait à lui porter le coup fatal.
— Eren Jaeger, dit la Teyber d'une voix qui résonna à des mètres de là, infâme usurpateur... Une dernière parole à prononcer avant de mourir ?
Ophelia frôla l'arrêt cardiaque lorsqu'elle sentit une présence près d'elle et releva son fusil par pur réflexe, le doigt sur la détente. Ses yeux en croisèrent d'autres, gris, familiers. Elle haussa les sourcils et, avant qu'elle n'ait le temps de dire quoi que ce soit, Eren formula sa réponse et cette silhouette si rapide qu'Ophelia ne l'aurait certainement pas vue si elle ne s'était pas arrêtée face à elle s'éleva dans les airs avec agilité.
— C'est à toi... Mikasa.
Le Marteau d'Armes n'eut pas l'occasion de voir arriver la concernée et ne put rien contre les lances foudroyantes qu'elle planta dans sa nuque. Impressionnée, Ophelia vit le Titan s'écrouler tandis que Mikasa rejoignait Eren. Une autre personne ne tarda pas à se poser près de la tireuse, provoquant un nouveau sursaut de sa part.
— Vous allez être combien à me faire le coup ?! râla-t-elle en se tournant vers l'adolescente aux cheveux blonds vêtue du nouvel uniforme du Bataillon d'Exploration.
— Désolée, on m'a dit de te donner ça !
Confuse, Ophelia baissa les yeux vers la grosse mallette apportée par la nouvelle venue et ouvrit grand la bouche en comprenant de quoi il s'agissait.
— Un équipement ? s'étonna-t-elle. Tu sais pas à quel point tu me sauves la vie, gamine ! Tu vas me couvrir le temps que je l'enfile, d'ailleurs, donc bouge pas de là. Tu t'appelles comment ?
— Luise.
— Merci, Luise, sourit alors Ophelia tout en attachant un à une les sangles autour de ses jambes le plus vite possible. Un uniforme Mahr et un équipement tridimensionnel, quelle classe, pas vrai ?
Attentive à ce qu'il se passait aux alentours malgré ses mains prises, elle vit Jean et l'escouade qu'il dirigeait lâcher des grenades par les fenêtres du bâtiment où s'étaient réfugiés Magath et ses hommes. Floch, accompagné d'autres soldats de la même brigade d'entrainement que Luise, n'épargnait personne et se plaisait à faire exploser les habitations sans se soucier de savoir si elles étaient occupées ou non.
Ophelia fronça les sourcils mais, avant qu'elle ne puisse faire une quelconque remarque, un mouvement anormal attira son attention du côté du champ de bataille des Titans. Sous les regards confus de ses ennemis, le Marteau d'Armes se redressa malgré sa nuque touchée et usa de son pouvoir pour faire apparaître une arbalète qu'il dirigea vers Eren sans hésiter. Plus rapide, Mikasa attrapa ce dernier par le bras pour s'envoler à nouveau et se diriger vers le toit le plus proche.
— Mikasa, détourne son attention, indiqua-t-il dès qu'ils furent hors de portée. Si tout se passe bien, je devrais pouvoir le bouffer.
La Ackerman ne chercha pas à contester ses dires. Armée de ses lances foudroyantes, elle se rua vers le Titan de la Teyber pour l'affronter à elle toute seule le temps qu'il trouve un moyen d'en finir pour de bon. Occupée à attacher la dernière sangle de son équipement mais incapable de ne pas jeter des coups d'œil réguliers dans sa direction, Ophelia fut la première à remarquer le tireur qui s'apprêtait à presser la détente, le canon pointé vers Eren. Luise écarquilla les yeux en la voyant relever son fusil à toute vitesse, viser, tirer, tout cela en ce qui sembla être une fraction de seconde.
Quand Eren tourna la tête vers elle, surpris par le coup de feu, la jeune femme lui adressa un simple signe de la tête qu'il lui rendit avant de baisser les yeux sur la raison de leurs difficultés à venir à bout du Marteau d'Armes. Sans se laisser plus de temps pour réfléchir, le Jaeger sauta du rebord du toit tout en plantant ses dents dans sa propre main. Quand son Titan se matérialisa pour la deuxième fois, son immense poing s'enfouit immédiatement sous terre et en ressortit un cristal pareil à celui d'Annie, mais renfermant cette fois-ci le corps humain de la sœur de Willy Teyber.
Tous les regards restèrent braqués sur lui tandis qu'il approchait la structure solide de sa bouche ouverte, prêt à tenter de la briser avec ses dents. Encore persuadé que le plan s'était entièrement déroulé comme prévu, il ne put prédire l'attaque du vif Titan qui, jusque-là agrippé à un bâtiment, se jeta sur lui. Ses griffes se plantèrent dans l'épaule de l'Assaillant et ses dents aiguisées trouvèrent sa nuque, prêtes à la trancher.
Avant d'y parvenir, Porco aperçut du coin de l'œil une silhouette familière et sentit la lame qu'elle glissa du côté gauche de sa mâchoire. Déstabilisé par la présence volante de la jeune femme qui lança ses grappins sur le premier toit qu'elle vit tout en lâchant un « youhou » nerveux, il n'eut plus l'occasion de s'emparer du pouvoir de l'ennemi dont on parlait depuis des années. Sous ses dents, la peau d'Eren se durcit jusqu'à devenir impénétrable et le poing de ce dernier vint attraper la crinière blonde du Mâchoire pour le jeter un peu plus loin, là où les soldats du Bataillon pourraient viser et tirer leurs lances foudroyantes.
L'air soucieux, Ophelia se posa sur l'épaule de l'Assaillant et baissa les yeux en direction de la sœur Teyber, toujours enfermée dans son cristal. Elle ouvrit la bouche pour parler mais fut coupée dans son élan par l'entrée de Pieck et de son unité blindée dont les tirs fusaient dans la direction de leurs adversaires. Ophelia vit des soldats venus de Paradis tomber en plein vol dans des giclées de sang qui lui rappelèrent amèrement la guerre contre l'Alliance du Moyen-Orient, puis elle laissa échapper un hoquet de surprise lorsque le Titan sur lequel elle était perchée bougea comme pour lui indiquer de ne pas rester autant à découvert. Elle glissa de son épaule et se rattrapa de justesse à sa main libre qu'il ouvrit pour lui permettre de se tenir debout dans son immense paume, tournant le dos à l'agitation pour être sûr qu'elle ne se retrouve pas victime d'une balle perdue.
— Sympa, la communication avec toi. J'aime bien, ironisa-t-elle. Je doute que tu puisses briser ce cristal avec tes dents, au passage.
Eren ne put que lui répondre d'un grognement indistinct et baissa les yeux vers elle, presque certain que même sous cette forme, elle serait capable de le comprendre.
— J'ai pas de meilleure idée, si c'est ce que tu cherches à me demander.
Son regard se fit plus insistant et Ophelia leva les yeux au ciel, détournant involontairement son attention vers Porco un instant.
— D'accord, j'en ai peut-être une, mais...
Sur le coup, il lui sembla ne jamais avoir réagi aussi vite de sa vie. Elle s'envola vers le bâtiment le plus proche au moment précis où le Marteau d'Armes joua sa dernière carte et fit apparaître une structure capable de bloquer Eren. Il s'éleva à nouveau sur un pique de cristal, cette fois-ci transpercé par quelques dizaines de branches appartenant à cette construction improvisée. Autour, les tirs cessèrent et l'agitation fut remplacée par un silence pesant, seulement brisé par le son des lourds pas qui approchaient.
— C'est le Bestial !
Le regard rivé au piège dans lequel était pris Eren, Mikasa se posa aux côtés d'Ophelia tandis que cette dernière observait les guerriers se rassembler auprès de Sieg. L'arrivée de leur capitaine les avait remotivés à se battre pour leur ville, mais ils étaient bien loin de se douter des véritables intentions de l'aîné Jaeger. Malgré tout, leurs Titans firent face aux soldats du Bataillon d'Exploration et seules quelques minces secondes de répit furent accordées aux troupes avant que le conflit ne reprenne de plus belle.
— Fais attention à celui-là, indiqua Ophelia en désignant à la Ackerman le Titan Mâchoire. Le connaissant, il va foncer vers Eren dès qu'il en aura l'occasion et il ne risque pas de s'arrêter avant de l'avoir tué.
— C'est pas un problème, affirma Mikasa.
Le tintement de ses lames quittant leurs étuis inquiéta un instant la jeune femme, mais elle savait que, malgré ses extraordinaires capacités, Mikasa ne viendrait pas à bout de Porco si facilement. Il était plus rapide qu'elle et assez coriace pour lui échapper. Le plus propice à le tuer était Eren lui-même, et le mieux placé pour percer les défenses des soldats et atteindre l'Assaillant était Porco. Il s'agissait donc seulement de les tenir éloignés l'un de l'autre le plus possible. Peut-être était-elle trop optimiste.
— Qu'est-ce que tu vas faire, toi ?
— Je suis une tireuse, dit simplement Ophelia. Je vais me débrouiller pour retrouver un fusil et faire mon travail.
Elles échangèrent un signe de la tête avant de se séparer. Alors que Pieck et son unité blindée repassait à l'action et que Mikasa rejoignait Eren pour tenter vainement de briser le cristal à l'aide d'une lance foudroyante, Ophelia usa de son équipement pour prendre son élan et, pieds en avant, traverser une des fenêtres du bâtiment où étaient rassemblés quelques tireurs Mahr. Seuls deux d'entre eux se trouvaient dans la pièce. Rapide, elle agrippa le premier par les épaules pour se protéger des balles du deuxième et s'empara de l'arme du mort pour abattre son camarade.
— C'est ça d'entraîner des enfants à devenir des machines à tuer contre leur gré, ironisa-t-elle à voix basse tout en vérifiant le chargeur du fusil.
Un nouvel éclair de transformation la prit par surprise. À l'extérieur, Eren venait de quitter son Titan piégé pour en faire apparaître un tout neuf sous les regards ahuris des guerriers. Trois fois en si peu de temps, c'était si drainant en énergie qu'aucun d'entre eux ne s'y tentaient, même en temps de guerre.
Ophelia regretta de s'être approchée de la fenêtre lorsque cette dernière vola en éclat devant son visage. L'une de ses mains prit pratiquement tous les dégâts quand elle la plaça devant elle pour se protéger, mais quelques bouts de verre entaillèrent ses joues et son front dans un picotement particulièrement désagréable.
— Enfoiré de singe et ses putains de cailloux, jura-t-elle.
— Je ne te crains pas, Eren Jaeger ! s'exclama Sieg, dehors. C'est de toi que je vais m'occuper en premier, Levi ! Montre-toi donc ! Le temps presse, non ?
La jeune femme fronça les sourcils, peu certaine de saisir le message caché puisqu'elle ne connaissait pas le plan exact. Pour ce qui fut des quelques événements qui suivirent, tout se déroula presque simultanément. Un dôme de lumière se forma à l'extérieur de la ville, là où se trouvait le port militaire de Revelio. Les navires volèrent au-dessus et le souffle de l'explosion balaya les rues du camp, même à des centaines de mètres de là. Seul un Titan spécifique était capable de causer tant de dégâts sans faire aucun effort. Si, pour les soldats du Bataillon, l'apparition du Colossal sonna comme un signal attendu, pour les guerriers, elle ne fut que la confirmation que Bertholdt Hoover n'était plus de ce monde et que les démons insulaires s'étaient emparé de son pouvoir.
Après cela, le Bestial s'effondra sans que personne ne voie arriver son attaquant. Levi atterrit près de sa nuque tranchée, une trace de sang sur la joue, et son regard croisa celui de Magath avant qu'il ne lâche une grenade là où le corps de Sieg devait se trouver. Personne ne put dire où il disparut ensuite, laissant l'unité des guerriers dans un désarroi profond.
Quittant sa cachette pour retourner sur les toits, Ophelia se posa dès qu'elle repéra un rebord assez haut pour la cacher partiellement et tendit son fusil en direction des soldats adverses restants. L'escouade de Jean lança une offensive contre le Charrette qui valut à Pieck une chute de plusieurs mètres. L'unité blindée était complètement anéantie. Ophelia déglutit, soucieuse de savoir si la guerrière était encore en vie. Porco semblait se poser la même question, mais il venait de passer la barrière que représentait Mikasa et ne pouvait plus faire demi-tour, seul face à l'Assaillant.
— Ophelia !
Détournant son attention de son viseur après avoir abattu un homme d'une balle dans le cœur, la concernée tourna la tête vers son interlocutrice avec surprise. Sasha se trouvait à quelques mètres de là et avait l'air de lui faire signe de se diriger vers elle. Presque instantanément, les tirs fusèrent en direction d'Ophelia qui s'adossa au rebord du toit pour se protéger. Elle adressa un hochement de tête à la soldate afin de lui faire comprendre qu'elle arrivait et l'observa s'en aller.
La bataille touchait à sa fin, c'était un moment décisif. Porco était le seul guerrier encore en état de se battre, ceux du Bataillon se préparaient à battre en retraite et une petite partie d'Ophelia doutait qu'elle puisse quitter ce chaos maintenant qu'elle était devenue une des cibles prioritaires.
Elle aurait pu être distraite par n'importe quoi sans s'en trouver trop étonnée, mais ce fut bien un miaulement qui attira son attention. Un miaulement familier provenant de la ruelle juste en-dessous. Pouvait-on vraiment reconnaître un miaulement ? Apparemment oui, puisque la boule de poils blanche qu'elle aperçut en se décalant pour pouvoir regarder rapidement ce qu'il se passait en bas était bien reconnaissable. Contre toute attente, la présence de l'animal lui arracha un sourire. Tellement, qu'elle prit la décision impulsive de sortir de sa cachette pour se laisser chuter dans la fameuse ruelle.
— Bon sang, qu'est-ce que tu fais là ? souffla-t-elle quand le chat miaula plus fort, effrayé. C'est moi, idiot. Allez, viens, tu peux pas rester là.
Ophelia ne remarqua l'état de sa main gauche qu'en voyant les traces de sang qu'elle laissa dans le pelage de l'animal en l'attrapant. Au centre du champ de bataille, Eren avait enfin trouvé le moyen de prendre pocession du Titan Marteau d'Armes. Après avoir placé la coquille incassable entre les dents du Mâchoire, il attrapa la tête de ce dernier et la plaça au-dessus de sa propre gueule ouverte, forçant sur ses mâchoires jusqu'à voir le cristal se briser et sentir le sang de la sœur Teyber couler dans sa gorge.
C'était le moment de partir, Ophelia le savait. Qu'Eren s'arrête là ou bien qu'il décide de voler le pouvoir du Mâchoire au passage, il fallait qu'elle s'en aille. Le chat dans les bras et prête à suivre les balises posées sur les toits jusqu'à rejoindre l'aéronef vers lequel les autres se dirigeaient, elle se croyait aussi hors de portée de tous les tireurs maintenant qu'elle avait changé de position.
Elle n'eut aucun moyen de voir venir la balle qui transperça sa jambe alors qu'elle s'apprêtait à lancer ses grappins pour s'élever dans les airs et passer au bâtiment suivant.
Le premier coup de feu plongea les lieux dans un silence trop... silencieux, pour être réel. Peut-être était-ce seulement dans sa tête. Le deuxième, par contre, parut rendre tout plus bruyant que jamais. Le rugissement de colère de l'Assaillant, son poing qui se chargea d'achever tous les soldats Mahr encore en vue, le son que fit Porco en s'effondrant dans les débris, trop faible pour se relever et trop déboussolé pour réagir, le bruit sourd que fit son propre corps lorsqu'il s'écroula, tout était trop. Même son cœur se faisait trop entendre, à battre ainsi dans ses oreilles.
La douleur mit quelques secondes interminables à l'atteindre. Une plainte échappa alors à la jeune femme qui porta une main à son épaule pour la découvrir couverte de sang. Consciente qu'elle ne pourrait jamais se relever et s'en aller dans cet état, elle reposa sa paume contre le sol et soupira de résignation. Elle était là, sa chute. Alors qu'elle avait obtenu réparation pour la mort d'Aida, la vie se chargeait de la rappeler à l'ordre. Elle était tout sauf invincible. À côté d'elle, le chat qu'elle avait lâché dans sa chute miaula et tourna en rond, cognant parfois son bras du haut de sa tête comme pour la réconforter. Cette idée la fit ricaner malgré les larmes qui s'amassaient dans ses yeux.
— Merde... Depuis quand tu tiens autant à moi, toi ? Tu crois que je vais mourir... pas vrai ?
— Les gars, elle est vivante !
Surprise, Ophelia tourna la tête - trop violemment pour son épaule blessée - et haussa un sourcil en apercevant un trio familier penché au-dessus d'elle.
— Qu'est-ce que...
— Et elle parle, ajouta Conny. À un chat, mais elle parle.
— T'as quelque chose contre les chats ? rétorqua Sasha. Il est tout mignon, regarde !
— Vous pouvez pas la fermer, tous les deux ? On devrait déjà être à l'aéronef. Faut qu'on l'emmène jusque là-bas.
— Pourquoi est-ce qu'on devrait l'emmener ? questionna froidement une nouvelle voix.
— C'est toi qui dis toujours qu'elle pourrait facilement nous trahir, pas vrai ? soupira Jean en se tournant vers le rouquin qui venait de parler. T'es sûr de vouloir la laisser en territoire ennemi, si t'as des doutes ?
— Pitié, taisez-vous, supplia Ophelia. Est-ce que je suis en train... de me vider de mon sang ?
Il y eut un moment de flottement entre les soldats qui échangèrent des regards perplexes.
— Question stupide ?
— Un peu, avoua Jean.
Elle sentit sa jambe blessée bouger et devina qu'on tentait de ralentir l'hémorragie en l'enroulant dans un bandage serré. Soudainement fatiguée, la jeune femme chercha le chat des yeux et fut soulagée de le trouver dans les bras de Sasha.
— Il faut l'emmener aussi, parvint-elle à articuler.
— Je vais le faire, affirma la soldate. On peut y aller ?
— Ouais, ça fera l'affaire. Dépêchez-vous ! Hawk, ça va faire mal.
— Tant pis... Du moment que je reste pas ici plus longtemps.
Le jeune chef d'escouade s'empressa de l'attraper pour la transporter au mieux tandis que ses amis partaient devant. Ophelia ne put retenir une grimace de douleur pour son épaule et ferma presque automatiquement les yeux, bien plus faible qu'il y a tout juste quelques secondes. Elle avait froid, maintenant. Elle ne vit pas le chemin jusqu'à l'aéronef mais sentit bien lorsque Jean s'arrêta, qu'on la déposa sur le parquet du véhicule volant et qu'on pressa quelque chose contre la plaie. Ses paupières se soulevèrent difficilement mais elle força dessus pour rester consciente, le souffle court. Elle pouvait s'en sortir, même avec ces blessures.
Elle devait s'en sortir, à en juger par le regard émeraude qui croisa le sien lorsqu'elle tourna la tête. C'était une nécessité. Continuer à exister avec l'idée qu'elle était morte pendant une bataille qu'il avait initiée lui paraissait inconcevable. Impuissant, Eren réprima son envie de s'approcher pour lui prendre la main, juste parce que ne pas être en contact avec elle lui donnait l'impression qu'elle était déjà partie. Il ne pouvait pas faire ça, pas alors que les autres se trouvaient tous là et que Sieg se tenait à côté de lui. Ç'aurait été une faiblesse exposée, peut-être même une raison pour le Bataillon de perdre un peu plus confiance en elle.
Il y eut du mouvement dans la salle, et du bruit aussi, mais Ophelia n'entendit rien et, plus pâle encore que d'habitude, se contenta de le regarder lui avant de fermer à nouveau les yeux par manque de force. Elle plongea alors dans un état de semi-conscience qui ne lui permit pas de comprendre les événements qui suivirent. Elle n'avait qu'un seul objectif, pour les heures à venir.
Il fallait qu'elle s'en sorte.
。・:*:・゚★,。・:*:・゚☆
je suis très peu douée pour écrire de l'action donc ce genre de chapitres c'est ma hantise 😭
j'espère que c'est quand même pas trop mal et que vous avez apprécié, mais bon
update post-correction : je suis très sceptique
enfin bon, à bientôt pour la suite ✨
Zoé
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