𝐉𝐨𝐮𝐫 𝟏𝟐 : 𝐋𝐢𝐯𝐚𝐢.
𝐑𝐔𝐌𝐏𝐋𝐄𝐓𝐈𝐓𝐒𝐊𝐈𝐍
𝐋𝐢𝐯𝐚𝐢 𝐀𝐜𝐤𝐞𝐫𝐦𝐚𝐧
𝐗𝐈𝐈
Le sol est poisseux, contre ma joue.
Dans mon nez s'insinuent les capitons nauséabonds et âcres de ma cellule. A chaque inspiration, l’odeur est telle que ma vision s’en trouve troublée. Les contours des objets sont moins nets, les couleurs se confondent les unes en les autres.
La poitrine écrasée contre le sol, je peine à respirer. Le moindre mouvement me fait mal, mes côtes sont sans nul doute brisées à bien des endroits. Je tousse bruyamment, éreintée.
Aucune fenêtre. Seule une lampe à huile à la lumière défaillante, posée non loin, illumine les lieux. Je frissonne, ne parvenant que difficilement à voir quoi que ce soit.
Ma respiration se fait sifflante, plaintive.
— Liv…
Ma voix meurt dans ma gorge sèche. Je ne sais depuis combien de temps je n’ai pas bu. Mais je suis épuisée. Je ne parviens même pas à réfléchir à un moyen de m’en sortir.
Seules mes dernières heures de liberté me reviennent en boucle. Tournoyant sans répit dans ma tête.
Lancinantes.
J’étais sortie sillonner les rues à la recherche de nouveaux meubles. Un marché a attiré mon regard et je m’y suis rendue avec joie, songeant que mon époux avait beau ne pas apprécier l’idée de tout rénover chez lui, je parviendrais à le convaincre de rendre notre logis plus accueillant.
Il a toujours été plutôt… réticent à tout.
Seulement, cette fois-ci, peut-être aurais-je mieux fait de l’écouter. Il aurait sans doute été préférable que je ne m’en aille pas seule, dans les rues mal famées du côté ouest du village, pour chercher de simples meubles.
Une douleur lancinante m’a prise lorsque l’on m’a assommée. Puis, je me suis réveillée ici. Avec un mal de tête insupportable.
Au loin, il me semble entendre des hurlements étouffés. A mesure du temps, ils se rapprochent. Je n’ai même pas la force d’avoir peur. Je suis épuisée.
Je me sens partir.
Soudain, une déflagration. Mon corps tressaute, soufflée par un vent violent. Une lumière éclatante déchire les ombres de la pièce. Quelques débris volent au-dessus de moi mais je ne parviens pas à me concentrer sur eux.
Mes paupières sont lourdes.
Pourtant, je distingue les flammes autour de moi. Partout dans la pièce, des feux sont attisés. Mon corps se réchauffe légèrement tandis que leur forme crépite dans des ondulations écarlates.
Quelque chose siffle dans mes oreilles. Un acouphène. Conséquence de l’explosion. Étendue sur le sol, du sang suintant depuis une plaie barrant mon front, je n’arrive à songer qu’à une seule chose.
Tout est si douloureux.
Au loin, un son à peine audible. Je ne sais d'ailleurs pas comment je le distingue, après la surdité causée par l’explosion. Seulement, immobile, allongée sur le sol, je l’entends. Un bruit de pas.
Entre mes paupières à demi-close, je distingue un mouvement. Juste devant-moi, un pied vient de passer. Habillée d’une pantoufle de cuir au bord en pointe, surmontée d’une boucle d’argent, la godasse m’est bien familière.
Je la lui ai offerte, après avoir fait cramer sa penderie.
Si j’en étais capable, je crois que je sourirais. Cependant je suis si faible que je ne peux que laisser couler une larme de soulagement. Je suis sauvée. Il est là.
Livai est là.
Deux bras se glissent sous mon corps, l’un sous mes omoplates et l’autre, sous mes genoux. Chauds, emprunt d’une odeur de pin. Le sol rude se presse de moins en moins à moi, à mesure qu’il me soulève. Bientôt, je ne repose plus que sur lui, me portant.
Ma tête tombe dans le vide et tout est soudain moins douloureux.
Mon flanc se blottit contre le torse de mon époux. Je peux sentir les formes de ses pectoraux contre moi et seuls les tissus de nos vêtements nous séparent.
Je suis sauvée. Encore dans cette tour. Mais je suis conscient que rien ne peut m’arriver.
— HAL…
Un hurlement retentit, aussitôt écrasé dans un bruit de succion. La tête dans le vide, j’entrouvre les paupières, tentant de discerner ce qu’il se passe,
Les couloirs sont maculés d’un liquide rouge. Dans cette tour, descendant un escalier en colimaçon, je découvre progressivement des éclats de cervelle, cheveux et bout de cadavres à mesure que nous progressons.
— Ferme les yeux.
La voix de Livai est douce mais ferme. Il a l’habitude de s’exprimer ainsi, quand les choses deviennent compliquées. Jamais de larmes ni de compassion.
Sa façon de montrer son empathie est de murmurer calmement cela.
— L… Livai…
— Je suis là. Plus rien n’arrivera.
Mes paupières se font lourdes. Je ne lutte pas bien longtemps. Son corps est chaud, contre le mien et l’odeur qui l'embaume m’apaise.
Je me laisse tomber dans les bras de Morphée.
♔
Le tintement régulier du métal me tire de mon sommeil. L’obscurité de mes paupières closes laisse soudain place à une lumière qui brûle ma rétine. Je ferme aussitôt les yeux à nouveau puis me décide à les ouvrir.
Emmitouflée sous d’épais draps brodés de fils d’or, dans un lit voilé de rideaux blancs, je réalise que je suis chez moi. Je reconnais les panneaux de bois taillés constituant les murs, les chandeliers disposés partout et surtout…
Earl Grey. L’odeur du thé que se prépare Livai, chaque matin.
— Comment vas-tu ?
Mes sourcils se froncent. La voix du noiraud résonne dans la pièce, mais il n’y a personne.
Soudain, sa silhouette apparaît brutalement, juste sous mon nez. Il se téléporte. Je sursaute violemment, poussant un cri en plaçant ma main sur mon cœur :
— LIVAI ! P…
Ma voix meurt face au regard d’acier de mon époux.
Sous une rangée de cils d’obsidienne, deux hématites me fixent, adoucies par quelques mèches d’onyx tombant sur un front de marbre. Taillés avec minutie, les traits de mon époux semblent avoir été façonnés de la main d’un maître artisan.
— Navré. Je ne voulais pas t’effrayer.
Je pousse un soupir de soulagement.
Debout devant moi, un plateau dans les mains, mon époux m’observe. Je me suis aussitôt morveuse en voyant les deux tasses et petits biscuits posés sur le socle.
— Oh, tu es venu m’apporter le petit déjeuner… Et je t’ai hurlé dessus. Je suis vraiment désolée.
— Ne t’excuses pas. La plupart des humains que je rencontre hurlent pareillement quand j’arrive devant eux, déclare-t-il en plaçant le plateau sur le matelas, traçant une rune dans les airs pour ensorceler le petit-déjeuner afin qu’il ne tombe pas dans le lit.
— Et tu n’as pas perdu l’habitude de le faire ? je demande dans un sourire tendre.
Il hausse les épaules.
— Non, je me fiche simplement du mal-être des humains.
Se redressant, son bras frôle le mien et je frissonne. Bien que nous soyons mariés, Livai n’a pas pour habitude de se montrer très tactile avec moi.
Nous ne dormons pas ensemble, il ne me prend pas souvent la main dans la rue ni ne m’embrasse. Je dois avouer que cela me peine.
— Hormis le tiens, chuchote-t-il en se redressant, ses yeux analysant mon visage.
Doucement, il tend la main vers moi. Mon souffle se coupe en voyant ses doigts frôler ma peau. Je pense qu’il va avoir un geste pour moi.
Cependant, au dernier moment, il se ravise et recule d’un pas.
— Le sort que je t’ai lancée t’a soigné, déclare-t-il comme si de rien n’était, reculant jusqu’au fauteuil, posté au bord de mon lit.
Je ne peux m’empêcher de pincer les lèvres en le voyant s'asseoir dans le siège. Ses doigts claquent et la tasse qu’il avait posée sur le plateau se téléporte dans sa main.
Je frissonne.
Un instant, j’ai sincèrement cru que nous allions prendre le petit-déjeuner dans mon lit, nous rouler en boule dans les draps, peut-être même renverser le thé dans un rire maladroit et se plaindre qu’il faudrait nettoyer la tâche avant de tout remettre à plus tard, trop occupés à s’embrasser.
Seulement nous ne sommes pas ainsi.
— Q… Qu’est-ce qu’ils me voulaient ? je demande d’une voix rauque, tentant d’ignorer ces pensées sombres.
— Qu’importe. Ils ne sont plus en vie pour l’expliquer.
Je tressaille à ses paroles.
— Tu les as tous tués ?
— Ils s’en sont pris à mon épouse.
Le regard de Livai est droit et son ton, sec, sans appel. Les doigts posés sur le bord de sa tasse, soigneusement articulés autour d’elle, ils la portent à ses lèvres avant de la boire.
Se faisant, pas une seule seconde il ne cille. Ses hématites demeurent rivées loin de lui. Au fond de ses pensées.
— La solitude t’effraie à ce point ?
Il ne répond pas. Mais je réalise que je connais la réponse. Ce n’est pas à moi qu’il tient.
Il est terrifié à l’idée d’être seul.
♔
Il y a plusieurs années, la Reine Rouge a promulgué un décret selon lequel les femmes d’un certain âge ne s’étant pas encore mariées seraient forcées de le faire au premier qui leur en ferait la demande.
A cette époque, obnubilée par mon envie de devenir magicienne, je ne m’étais pas concentrée là-dessus. Convaincue que je passerais entre les mailles du filet et deviendrait marraine, usant de mes pouvoirs pour protéger les jeunes femmes, je n’ai réalisé l’infâme vérité que le jour où il est venu me chercher.
Melfis. Une voix aussi grasse que ses blagues. Un ton aussi violent que sa façon de lever la main sur tout ce qui bougeait. Une propension à la haine.
Il m’a réclamée, comme le disposait la loi.
Mes pouvoirs, à peine éclos, n’ont eu aucun effet sur lui. Armé de deux amis faisant la moitié de son poids — ce qui était toujours le double du mien — il m’a fait saisir à la manière d’un déchet et projetée à l’arrière d’un carrosse.
Pieds et poings liés, bâillonnées, j’ai réalisé que je m’étais fourvoyée. Jamais je n’allais devenir une magicienne. Je serais condamnée à être l’esclave des désirs pervers d’un homme violent.
Et, en effet, le soir-même, sa main large a saisi ma tête et l’a envoyée cogner contre un mur.
Il n’avait pas apprécié que je refuse de l’épouser.
Ses pieds se sont alors déchaînés, frappant mon ventre, mes épaules, ma poitrine. A un moment, posant sa chaussure sur ma tête, il a écrasé celle-ci de tout son poids. J’ai hurlé à la mort, couverte de sang et respirant difficilement.
Reculant de plusieurs pas, il a alors ôté sa ceinture. Un sourire machiavélique sur les traits, il l’a abattue sur moi avec rage. La douleur était telle que j’ai tourné de l'œil.
Dans mon malheur, il y avait quelque chose de positif.
Melfis était dégoûté par le sang, les bleus. Parfois, il venait dans ma chambre, tirait sur ma chemise dans un grognement bestial et écoeurant. Mais, lorsqu’il voyait un hématome sur mon ventre, il se ravisait.
A une époque, lorsqu’il est parti servir la Reine Rouge à l’armée, il a disparu plusieurs mois durant. Mes plaies ont guéri.
Et j’en étais terrifiée.
Chaque jour, il pouvait revenir. Et je savais ce qui m’attendrait s’il se comportait de la sorte. Alors au levé du soleil, je gravissais l’un des plus hauts rochers de la forêt.
Puis, une fois en son sommet, je m’y laissais tomber. Il me fallait souvent faire preuve de grandes ressources pour parvenir à me relever, après ces épreuves qui cassaient souvent mes os.
Chaque matin, je vérifiais consciencieusement que les traces étaient encore visibles. Et quand elle commençait à disparaître, j’y retournais.
Car je pouvais tout endurer. Mais pas le viol.
Un jour, étalée dans les graviers après une très douloureuse chute, la joue écrasée dans l’herbe, j’ai aperçu deux bottes. Des chaussures onéreuses qui se sont plantées devant moi.
— Voilà une bien particulière occupation.
Cette phrase a été la première que Livai m’a adressée.
Penchant la tête sur le côté, il m’a regardé un instant avant de décliner son identité. Ou plutôt, le nom par lequel tous l’appelaient.
— Rumpletitskin, tel est le nom qu’on m’attribue.
Je me souviens m'être figée en reconnaissant le nom du sorcier le plus terrifiant de tous les temps. Le seul être capable de vaincre la Reine Rouge.
Une créature de légende, avec sa canne surmontée d’un crâne en argent.
Il m’avait expliqué être passé un jour devant moi lorsque je m’apprêtais à sauter dans le vide. Puis, régulièrement, il m’avait vue recommencer. Cela l’avait intrigué.
— Puis-je savoir ce qui ne va pas, chez les humains. Pourquoi faire une telle chose ?
Je ne m’étais pas expliquée, me contentant de me relever péniblement. Il m’avait regardé faire sans proposer aucune aide.
Je ne sais trop ce qui a bien pu le pousser à me suivre tandis que je marchais. Il m’avait expliqué qu’il était assez intrigué par le besoin que pouvait avoir une femme d’agir de la sorte.
Terrifiée et admirative de la présence d’un sorcier occulte d’une grande renommée, je n’avais osé lui répondre trop largement ou l’ignorer. Mes explications succinctes avaient attiré sa curiosité.
Quand, soudainement, il m’a proposé un contrat.
Les marchés de Rumpletitskin ont toujours été célèbres. Les légendes racontent que l’une des plus grandes enchanteuses de tous les temps a, un jour, accepté d’échanger quelque chose de très précieux contre quelque chose.
Qu’il lui apprenne à changer la paille en or.
Les contrats de cet homme sont connus pour être aussi intéressants que dangereux. Alors j’ai d’abord été tenté de refuser. Quand il m’a proposé quelque chose que je ne pouvais pas refuser.
— Epouse-moi. Tu échapperas au décret de la Reine comme tu seras mariée mais ne craindras rien de moi. Je t’offrirais indifférence et protection. Tu pourras même recommencer à étudier la magie.
Seulement car la situation ne pouvait être pire, j’ai accepté.
Je ne savais pas ce qu’il y gagnait, à l’époque. Mais il respectait toujours les termes de son contrat et avait été limpide dedans. Il ne me toucherait d’aucune manière, se devant de se montrer indifférent à ma présence. Mais il me protégerait lorsque cela serait nécessaire.
Il m’a fallu des années pour comprendre que ce qu’il gagnait, dans ce marché, était simple.
Il n’était plus seul.
Et c’est en réalisant doucement cela que j’ai aussi compris quelque chose à mon propos.
J’étais tombée amoureuse de lui.
♔
Livai boit silencieusement son thé tandis que je m’exerce. Mes mains tracent des runes dans les airs et je fais de mon mieux pour rassembler le maximum de magie possible en moi.
Mais l’apprentissage de cet art est dur. Quand nous nous sommes mariés, quelques jours seulement après la cérémonie, j’ai tenté de lancer un sortilège pour faire cuire un plat et ai mis le feu à sa penderie.
Le lendemain, je lui ai acheté une paire de chaussure absolument ignoble et ridicule mais qui était la seule que je pouvais payer avec mes maigres économies.
Depuis, il n’en a jamais mise d’autre.
— Plus droit, le mouvement.
Son ton est calme, sérieux. Rien ne vient jamais teinter sa voix. Je n’ai jamais perçu quelconque inquiétude ou animosité dans celle-ci.
Car il ne s’inquiète pas pour moi. Moi ou une autre, cela reste la même. Son manoir n’est pas vide.
Je devrais réfléchir ainsi. Je suis mariée, habite un palais luxueux quoique sombre, suis assidûment protégée et peut en plus exercer ma passion : la magie.
— Pas non plus rigide, concentre-toi.
Mon cœur bat à toute vitesse dans ma poitrine.
Hier, des hommes m’ont enlevées. Il n’est intervenu que parce que le contrat précise qu’il doit veiller à ma sécurité. Mais cela ne l’a pas affecté le moins du monde.
Il agit comme si rien ne s’était passé.
— Mets-y du t…
— Ça suffit, je le coupe brutalement, laissant retomber aussitôt mes bras.
Le dictionnaire que j’essaye de soulever retombe. Livai le considère un instant avant de se tourner vers moi, ses billes d’acier me détaillant.
— Je te connais, tu as les capacités pour le faire, déclare-t-il. Tu dois juste te concentrer un peu…
— Mais je ne parle pas de ça !
Une ombre voile son visage.
— Ça suffit de tout ! j’explique en sentant des larmes brûler mes yeux. Tu m’as fait une fleur en m’offrant ta protection et je t’en suis reconnaissante mais ça suffit ! Je veux rompre le contrat.
— Et en quel honneur ?
Sa mâchoire s’est contractée et un éclair de colère traverse son regard.
— Ecoute, je te remercie sincèrement de m’avoir aidée. Mais ce contrat ne t’apporte rien qu’une autre ne puisse pas t’amener aussi. Et je suis fatiguée de cette vie.
— Fatiguée ?
Dans sa colère, il semble sincèrement surpris.
— Je n’ai jamais rien fait. La clause du contrat sur l’indifférence stipule que je ne peux pas te toucher, simplement t’offrir protection !
— Mais justement ! je m’exclame. L’indifférence !
Ses yeux s’écarquillent. D’un claquement de doigt, je fais apparaître le contrat. Le parchemin se matérialise dans mes mains et j’observe les lignes couchées à l’encre.
Je ne peux pas nier que ce contrat est correct. A vrai dire, Livai y a inscrit tout ce qu’il pouvait y mettre. Demeurant professionnel , il a fait tout dans les formes — ne m’offrant son vrai prénom qu’au bout d’un an de vie conjugale.
Je ne reproche rien à Livai. La situation me fait simplement mal.
— Ecoute, je…
— Mon indifférence te gêne ? murmure-t-il soudain.
Pour la première fois depuis que je le connais, il me semble entendre une émotion percer nettement, dans sa voix. De la surprise, mêlée à un brun de consternation.
Je cille. Un éclat illumine ses yeux. Nouveau, différent.
Soudainement on dirait qu’il a laissé l’obscurité voilant son regard, le masque empêchant quiconque de voir clairement en lui s’envoler en mille et un éclats. Qu’il s’en est débarrassé.
Je frissonne.
— J… Oui.
Ses yeux écarquillés me dévisagent. J’observe le contrat et il fait de même, m’approchant. La distance entre nous réduit à mesure que la chaleur de la pièce augmente.
Chaque pas, l’air se fait plus dense, moins respirable. Il grossit dans nos poumons, gonfle. Ma gorge est sèche sans que je ne puisse regarder autre chose que ses lèvres gonflées.
Ses longs doigts saisissent le contrat.
Et, à l’instant où ils l’effleurent, de la braise se dépose sur le parchemin. Dans un froissement violent, une flamme jaillit du trait qu’il vient de dessiner. Le feu se répand.
Le contrat disparaît en quelques secondes, consumé par les flammes.
Hébétée, je l’observe. Ses yeux louchent sur mes lèvres quand un spasme me secoue.
— Maintenant, je peux faire ça.
Sa main se glisse sur ma joue et il m’embrasse avec douceur.
Mon cœur rate un battement. Il me faut quelques secondes avant de réaliser ce qu’il se passe. Là, enfin, je ferme les yeux.
Mon corps fond dans son étreinte et je l’embrasse passionnément. Lorsque mes doigts courent dans ses cheveux, entortillant ses mèches, ses larges mains caressent mon dos.
Elles glissent jusqu’à mes hanches, les palpant. Je gémis contre lui.
Bientôt, s’écartant de moi, il pose son front contre le mien.
Le dos de ses doigts caresse ma joue et il chuchote :
— Enfin…
Une larme roule sur sa joue.
Je frissonne à cette vision.
— Je mourrais de te voir sans t’avoir.
Ses doigts s’entrelacent aux miens et je chuchote doucement :
— Tu m’as, maintenant.
♔
à demain !!
♔
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