Who are you ?
C'était étrange, presque déroutant. Lucifer Morningstar, l'ange déchu, cet être maudit par Dieu et par l'humanité pour avoir osé les expulser de l'Éden, était censé incarner le mal absolu. Ne devait-il pas être laid, repoussant, mauvais et infâme ? Le monstre que les croyants redoutaient, celui dont les histoires étaient narrées aux enfants pour les effrayer dans l’obscurité de la nuit ? Alors pourquoi... pourquoi était-il si beau ?
Son apparence était une contradiction vivante. Plutôt que d’évoquer la peur, il irradiait une lumière douce et chaleureuse, une aura qui apaisait. À sa vue, nul frisson de dégoût, juste un sentiment inexplicable de sérénité. Il ne ressemblait pas au démon que l'on décrivait dans les livres, mais plutôt à un prince d’un conte de fées, bienveillant et protecteur. En observant Lucifer s’occuper de sa fille et des membres de l'hôtel, il semblait tout à fait normal. Chacun de ses gestes était empreint d’une grâce infinie, chaque sourire était une invitation à la chaleur humaine, chaque mot résonnait avec une attention particulière qui faisait que chacun se sentait exceptionnel et unique en sa présence.
Pourquoi était-ce ainsi ? Pourquoi cette douce lumière l’entourait-elle ? Alastor ne comprenait pas. Était-il possible que Lucifer soit un imposteur, un usurpateur jouant un rôle qui n’était pas le sien ? Et surtout, pourquoi cet être, qui avait tout pour lui, le regardait-il avec tant de bienveillance ?
Alastor, qui avait l'habitude de le rabaisser, l'insulter et l’humilier, se trouvait confronté à un Lucifer qui ne répondait pas à ses provocations. Au contraire, ce dernier ne faisait que se montrer compatissant et attentif, ce qui le perturbait au plus haut point. C'était insupportable. Dans ce monde où la cruauté semblait régner en maître, Lucifer apportait une lumière inattendue. Cela le déstabilisait, lui, le maître du chaos et de l'ironie, qui se retrouvait en proie à une incompréhension amère. Comment pouvait-il tolérer cette chaleur, cette luminosité qui contrastait si violemment avec l’obscurité qu’il représentait ?
Le visage d'Alastor se déformait, partagé entre l'envie de détruire cette image idyllique et l'irrésistible attirance pour cette lumière qui le faisait vaciller. Dans ce combat intérieur, il comprenait qu'il n'était pas simplement confronté à un adversaire, mais à un mystère insondable qui le poussait à se remettre en question.
Il en avait eu la nausée ce jour-là. Ce jour où, blessé par Adam, il avait vu ce cher ange surgir de nulle part pour le soigner. Même quand il l'avait repoussé d'un revers de la main, infligeant une douleur au visage de Lucifer, il n’avait vu aucune colère dans ses yeux, seulement une profonde compréhension.
— Pourquoi tu fais ça !? s'était-il exclamé, le désespoir mêlé à la colère. Je ne t'ai rien demandé ! N'est-ce pas toi, le diable ? Ne devrais-tu pas te réjouir de la souffrance de nous autres pécheurs ? Qu'attends-tu en retour ?
Lucifer avait alors pris une profonde inspiration, son regard d’un bleu saisissant brillant d’une lueur douce.
— La Bible dit que j'ai été déchu parce que je haïssais l'humanité plus que tout, mais c'est faux. Je suis l'ange qui vous a le plus aimé. Je suis devenu votre esclave et j'ai pris un nom qui n'était pas le mien pour vous. Mon seul désir était votre liberté, mais j'ai échoué.
Alastor avait regardé, abasourdi, alors que, d'un geste plein de douceur, Lucifer lui faisait boire son propre sang. Peu à peu, il avait vu sa blessure se refermer, comme si la vie revenait doucement dans ses veines. Certes, il resterait une cicatrice, mais rien de vraiment grave.
C'était vraiment un ange crédule, se dit Alastor, candide, presque touchant dans sa naïveté. Comment pouvait-on le qualifier de mauvais ? À bien y réfléchir, il était surtout profondément idiot.
— Ne force pas trop, avait murmuré l'ange, avant de s'éclipser aussitôt
— Fuck, avait grogné Alastor, la frustration l'envahissant. Il avait maintenant une dette envers le type qu'il détestait le plus au monde.
Mais que devait-il faire pour que Lucifer lui montre enfin son vrai visage ? La question le hantait, un poids qui se mêlait à son irritation, l’empêchant de se défaire de cette étrange connexion qui le liait à cet ange déchu.
Depuis, Alastor toujours dissimulé dans l'ombre, ne pouvait s’empêcher d’observer Lucifer avec une curiosité de plus en plus insatiable. Le roi des Enfers, avec sa grâce naturelle, dégageait une aura presque envoûtante. Chaque mouvement qu'il faisait, même le plus banal, était empreint d'une élégance délicate qui le faisait ressortir dans cet environnement parfois brut et chaotique de l'Hôtel Hazbin.
Lucifer avait un penchant pour l'art sous toutes ses formes, une passion que peu de démons pouvaient comprendre. Il passait des heures à contempler des peintures anciennes, à admirer la manière dont les artistes parvenaient à capturer l’essence de la condition humaine. Alastor le voyait souvent assis devant une toile, son visage illuminé par une lumière douce, alors qu’il laissait son esprit vagabonder à travers des mondes d’imagination. Les couleurs et les formes semblaient le transporter au-delà des limites de l’Enfer, là où les douleurs et les souffrances ne le définissaient pas.
Il était fascinant de le voir discuter avec les démons de leurs créations. Lorsque Lucifer parlait de musique, de littérature ou de peinture, une lueur passionnée brillait dans ses yeux. Son amour pour l’art était une fenêtre sur une humanité qu’il admirait tant, un moyen d’échapper, ne serait-ce qu’un instant, à son propre destin maudit.
— As-tu déjà pensé à ce qu'un chef-d'œuvre pourrait être, Alastor ? lui avait-il demandé un jour, un sourire énigmatique aux lèvres. Les émotions, la douleur, la beauté... C'est tout cela qui nous définit, qui nous relie.
Alastor avait dévisagé Lucifer, surpris par cette introspection. Il n'avait jamais considéré le roi sous cet angle. Certes, il était un souverain craint, un maître de l'ombre et de la manipulation, mais ici, devant lui, il semblait plus humain que jamais. Les manières de Lucifer, son penchant pour le raffinement et la beauté, contrastaient avec le stéréotype de ce qu’un démon devrait être.
Lucifer avait aussi cette habitude d'étudier les humains, de s'intéresser à leurs luttes, à leurs joies. Il avait l’esprit d'un artiste en quête d'inspiration, absorbant les histoires, cherchant à comprendre ce qui poussait les mortels à créer. C'était presque touchant de voir à quel point il se laissait émouvoir par la fragilité humaine, comme s'il était en quête d'une vérité plus grande, quelque chose qui pourrait le libérer de son propre fardeau.
Alastor, malgré sa méfiance instinctive, ne pouvait s’empêcher de ressentir une sorte d’admiration, mêlée d’un peu de frustration.
Quel étrange roi tu fais, Lucifer, murmura Alastor dans sa tête. Un roi qui semble plus préoccupé par la beauté du monde que par son propre royaume. Mais alors, qui es-tu vraiment ?
A cet instant, Lucifer, comme s'il avait entendu les pensées d'Alastor, tourna la tête lentement dans sa direction. Le regard du roi des Enfers se posa sur lui, intense, brûlant d'une profondeur insondable, mais c’est son sourire qui acheva d’immobiliser Alastor. Un sourire sombre, effrayant, presque carnassier, se dessina sur le visage du roi, une expression qu’Alastor n’avait encore jamais vue chez lui. Ce sourire semblait dire bien plus que des mots n’auraient pu le faire, comme si le déchu avait perçu la moindre de ses pensées, ses doutes, ses interrogations et qu'il s'en délectait.
Ce rictus effrayant, glacé et presque provocateur, n'avait rien de la douceur ou de la bienveillance qui semblait d'ordinaire émaner de Lucifer lorsqu’il s’entourait de ceux qu’il aimait. C'était un sourire empli d'une puissance qui dépassait la simple humanité, une noirceur dissimulée dans les tréfonds de son être qui rappelait à Alastor qu’il avait face à lui le maître des Enfers, l'ange déchu lui-même, capable de comprendre et de manipuler des ténèbres auxquelles personne d'autre n'avait accès.
Puis, comme si de rien n’était, Lucifer détourna son regard, s'éloignant en silence pour examiner une autre œuvre, ses gestes de nouveau empreints d'une grâce troublante, presque trop parfaite. Mais Alastor resta figé un instant, perturbé par cette lueur dangereuse qu’il avait aperçue dans ses yeux.
La vision de ce sourire hantait ses pensées alors qu’il l’observait s’éloigner, l’esprit agité. Il venait d'apercevoir un éclat de la véritable nature de Lucifer, quelque chose d’à la fois magnifique et terrifiant, un aspect du roi qu’il avait toujours cherché à comprendre, mais dont la proximité lui paraissait soudain risquée. Ce sourire sinistre, cet aperçu d’un pouvoir insondable caché derrière le masque du souverain raffiné, rappelait à Alastor que Lucifer, malgré sa fascination pour les humains, restait un être à part, infiniment complexe et dangereux.
Alastor comprit qu’il n’était peut-être pas le seul à observer.
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