Chapitre 51 √

Le chemin pour aller au palais est plus long que ce que je n'imaginais. Dans mes souvenirs, la route ne devait pas faire plus d'un quart d'heure mais en réalité, cela fait une heure que je suis dans cette foutue limousine, à chercher un peu d'oxygène parmi toute cette chaleur. Si cela continue ainsi, je vais finir par mourir littéralement de chaud. Nous sommes en juillet et il fait une chaleur atroce.

Je ne sais pas comment fait ma mère pour rester silencieuse et zen. Depuis quelques minutes, je bas des mains pour me faire de l'air mais j'arrive plus à m'essouffler qu'autre chose mais éternelle insatisfaite que je suis, je préfère tenter quelque chose plutôt que de rester là, à poireauter comme une imbécile.

Ah, par contre avec Kaled tu as poireauté...

Je chasse cette maudite voix de mon esprit et me concentre sur la route. Aiden n'est pas venu et la seule compagnie que j'ai pour le moment est celle d'une mère qui me croit capable de commettre les crimes les plus horribles du monde.

Mais bon, je me réconforte en me disant que ce fichu séjour ne durera que quelques jours. Enfin, j'espère. Hors de question que j'assiste aux yeux papillonnant de ma sœur.

Au fond, j'ai beau jouer l'intouchable, je suis assez peureuse à l'idée de revenir dans le palais, et de le croiser lui. Je n'ai pas envie de me remémorer toute la souffrance que j'ai ressenti quand je suis partie, le déchirement qui a eu lieu dans mon cœur. Je n'ai pas envie de croiser son regard, de me rappeler la saveur de ses baisers ou encore la sensation que je ressentais quand il posait ses mains sur moi.

Je n'ai pas envie de me rappeler de tout ça et pourtant, il le faudra.

• • •

- Mesdames, vous êtes arrivées.

Ma mère s'empresse de sortir, me laissant seule dans la limousine. De l'intérieur, j'aperçois déjà ma sœur se précipiter dans les bras de ma mère. Je pousse un petit soupir, lassée. Le cœur battant, je fixe la silhouette élancée de ma sœur, son regard heureux. Elle rayonne clairement de bonheur et ça me fait mal de l'avouer, mais je suis terriblement jalouse. Et envieuse.

Je penche la tête sur le côté et me masse le front nerveusement. Me voilà encore embarquée un mois dans le palais.

Je jette un regard aux baies vitrées du palais et mon regard est attiré sur une silhouette grande et imposante. Le prince. Aux cheveux bruns et aux yeux aussi bleus que le ciel, à la beauté époustouflante, et au charisme digne d'une pub de parfum pour homme.

Ses yeux sont posés sur la vitre teintée, sur moi mais il ne peut pas me voir. Enfin, normalement.

Je soupire une énième fois, m'étire lentement et ma main se pose sur la poignée de la portière. Et alors que je m'apprête à ouvrir celle-ci pour enfin assumer les conséquences de mes choix, je me stoppe.

Si je sors, je reverrais Solenn, le prince et tous les mauvais souvenirs remonteront à la surface. Je ferme les yeux, empêchant les larmes de couler.

Tu n'es rien, Sarah. Tu es pitoyable, une moins que rien, une incapable. Le prince est à moi alors bas les pattes, petite sœur ou tu en subiras les conséquences.

Je repousse ces maudites pensées et me recentre sur les bons côtés car oui, il y a beau avoir des mauvais côtés, il y en aussi des bons.
Neyla, Ariane, les jumelles, et malgré tout, le prince.

Suis-je prête à assumer ? À me reprendre en mains ? Oui. Je le suis car je suis Sarah Crawford et que je suis forte. Je suis et resterai forte alors je vais sortir de cette fichue limousine et prendre mon plus beau sourire pour la peste de sœur que j'ai.

J'actionne la poignée et à peine suis-je sortie que le soleil m'aveugle. J'abaisse mes lunettes de soleil sur mon nez, arbore mon plus beau sourire et avance telle une mannequin. J'exagère, j'avance normalement. Enfin, j'espère.

Je dépasse ma mère puis m'approche de Solenn. Je lui souris et déclare :

- Salut, grande sœur.

- Petite sœur, épargne-moi ton stupide sourire. Le prince est à moi dès à présent.

Pour toute réponse, je lui fais un clin d'œil puis m'avance dans le palais. Je tourne la tête vers l'endroit où le prince était posté et fronce les sourcils. Il n'est plus là.

Il faut que je lui parle. J'ai des choses à lui dire, des explications à lui donner. En deux mois, il a pu s'imaginer les pires scénarios possibles et je n'ai pas envie de repartir en étant en mauvais terme avec lui.

Mais bon, pour ça faudrait-il déjà que je le trouve. Ne souhaitant pas chercher plus longtemps bêtement, j'interpelle Winston pile au moment où il passe près de moi.

- Excusez-moi, savez-vous où est le prince ?

Winston me toise un instant de haut en bas puis fronce les sourcils.

- Pourquoi ?

- C'est important. S'il vous plaît...

- Il est dans sa piscine privée mais il ne veut recevoir personne. Allez avec votre famille, Mademoiselle. Ça vaut mieux.

Il se détourne de moi pour s'en aller mais je le rattrape.

- Vous pouvez me dire où il est ? Enfin, m'y conduire ? Je ne sais pas où c'est.

Il me regarde et semble hésiter. Il pousse un petit soupir en voyant mon regard désespéré et me fait signe de le suivre. Sans un mot, j'obéis et nous traversons les couloirs du palais, jusqu'à descendre des escaliers. Nous arrivons dans une sorte d'étage inférieur, plutôt peu éclairé puis il s'arrête devant une porte.

- Il est à l'intérieur.

Il se retourne pour s'en aller sans que je n'ai le temps de le remercier puis mon regard se pose sur le carreau de la porte. À travers, on peut apercevoir un grand bassin d'eau.

J'actionne ma main sur la poignée et entre dans la salle, qui tout compte fait, n'est pas immense à ce que je l'imaginais. Je ne savais même pas qu'il y avait une piscine dans un palais... Tout m'étonne maintenant.

J'avance au bord du bassin en faisant attention à ne pas me mouiller. Au fur et à mesure de mon avancée, j'entends des bruits réguliers. Il est en train de nager.

Mon regard se pose sur les muscles de son dos qui se contracte à chaque mouvement de papillon qu'il exécute. Il m'a tellement manqué, merde...

Je finis par rougir sans même m'en rendre compte et m'assois au bord. Il finit sa longueur, plonge un court instant et remonte à la surface. Il tourne légèrement la tête et m'aperçois. Sans dire un mot, il nage jusqu'au bord et s'accoude à celui-ci pour me regarder.

Ou plutôt me contempler. Je vois que ses yeux étudient chaque morceau de mon corps, chaque parcelle de ma peau, chaque respiration un peu trop rapide que j'exécute.

De mon côté, j'essaie de me concentrer sur autre chose que ses muscles mais c'est vraiment peine perdue.

- Tu m'avais manqué, Sarah.

Ce sont les seules paroles qu'il dit. Les seules mots sortis de sa bouche. Les seules mots qui me font tellement chavirer que je doute que mon cœur soit encore dans ma poitrine.

Je plonge mon regard dans le sien et réponds :

- On doit parler, tu sais.

- Tu me tutoies maintenant ? Après tout ce que tu as fait ? Après m'avoir laissé seul, le cœur brisé ?

- Je...

- Tais-toi, déshabille-toi et rejoins-moi dans l'eau. Et dépêche-toi. Dès que j'ai fini ma longueur, tu dois être dans l'eau ou sinon je viens te chercher.

Sur ses paroles aussi froides que la glace, il reprend sa longueur, nageant le plus rapidement qu'il peut. Je soupire. Hors de question que j'aille dans l'eau. Je n'ai pas de quoi me sécher et...

- J'ai fini. J'ai été rapide, tu ne trouves pas ?

Il monte l'échelle en voyant que je ne suis pas décidée à me baigner et s'approche de moi.

- Pas encore dans l'eau ? Je te jette ou je te déshabille ?

- Recule.

Aucun sourire de sa part depuis le début, je sais que je ne mérite pas de sourire mais bon, il est froid et distant depuis le début et je n'aime pas ça.

Il me fusille littéralement du regard alors je me contente de m'excuser pitoyablement :

- Je suis désolée.

- Pour quoi ? C'est ce que tu voulais, non ? Partir loin de moi, loin de ta sœur et vivre avec Aiden, tu le voulais et tu as réussi. Maintenant, tu vas faire comme si de rien n'était pendant un mois, puis je vais me marier avec la sœur de la fille que j'aime et tout ira mieux dans le meilleur des mondes.

- Attends, je t'en prie.

Il ne m'écoute pas et replonge, sans un mot. Et comme l'idiote que je suis, je lui attrape bêtement le bras à la dernière minute et finis dans l'eau.

Petit problème. Je ne sais pas nager.

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