Chapitre 11 √

Je fais volte-face, surprise, et fronce les sourcils face à cet homme qui me dévisage. Mon cœur loupe un battement et je reste figée devant lui.

Le prince.

— Je vous ai fait peur ?

Je fais non de la tête parce je sais que ma voix risque de se briser à tout moment.

Un silence s'écoule et il finit par déclarer :

— Vous étiez supposée me faire une révérence.

— Ah merde. Je sais pas les faire, comment je fais ? Je me baisse ?

Et j'essaie un quelconque mouvement qui montre juste à quel point je suis idiote.

Ma tentative de faire une révérence est pitoyable, même lui le remarque. Il m'observe comme si j'étais un chimpanzé sauvage qui faisait le clown. D'un côté, je le comprends. N'importe qui me trouverait bizarre. Mais d'un autre côté, il n'a pas encore compris que j'étais une fille assez marrante.

— Qui êtes-vous, Mademoiselle ? Toutes les autres sélectionnées se sont déjà présentées à moi sauf vous.

Il est encore plus impressionnant en chair et en os. Hier au repas, je le voyais assez mal mais là... Il est...
Hautain.

Beau.

— Alors ? Votre nom ?

Sa voix est un chant sacré pour les oreilles. Si ça ne tenait qu'à moi, j'aurais... Mais qu'est-ce que je raconte moi ?

De la bave coule sur ton menton, Sarah.

— Sarah Crawford, votre... C'est quoi le nom déjà ? Royauté ? Mon prince ?

— Mon prince ?

Il éclate de rire et se ressaisit vite. Ses yeux m'étudient avec curiosité et mon cœur bat la chamade. Je sais qu'intérieurement, il établit un profil et j'ai peur de correspondre à ses attentes, j'ai peur qu'il ne s'ouvre à moi.

— C'est Altesse Royale. J'aimerais bien vous autoriser à m'appeler Kaled, mais j'ai bien peur de faire des jalouses.

Oui, non merci.

— Pardonnez-moi, Votre Altesse Royale. Je n'ai pas l'habitude de m'adresser à des gens hauts placés comme vous.

Des gens pétés de thune.

Il hausse les sourcils. Comme s'il lisait dans mes pensées. Heureusement qu'il n'est pas dans ma tête celui-là. Je serais déjà en train de rôtir sur un bûcher comme un poulet pour insultes envers un membre de la famille royale.

— Eh bien, dites-moi tout Sarah, que faites-vous ici ?

Il s'avance et me tend son bras. À son regard, cela n'a rien d'une offre alors je le saisis, l'air crispée.

— Je me promène. C'est si bizarre que ça ?

— À dire vrai, c'est plutôt suspect. La plupart des sélectionnées passent leur temps à me chercher dans tout le palais mais vous, vous semblez ailleurs. Comme si quelque chose vous retenait.

Il hausse un sourcil avant de me dévisager complètement. Ses yeux s'attardent sur ma robe pour revenir vers mes yeux. J'ai l'impression qu'il sonde mon âme et c'est plus que perturbant. Je déglutis un nombre incalculable de fois et dois me faire violence pour répondre :

— J'ai juste un peu de mal à m'adapter. Je viens d'un petit village où tout le monde se connaît, vous savez. Je n'ai pas l'habitude de...

Je me tais. Je vais trop loin, je parle trop. Et pourtant, le prince m'incite à continuer comme si je lui confiais les secrets de l'univers :

— Continuez, ne vous gênez pas.

— Je n'ai pas l'habitude de toutes ces manières, de toute cette nourriture et de tous ces regards mauvais. Cela fait à peine un jour que je suis ici et j'ai déjà l'impression d'être de la chair à pâté pour les autres sélectionnées.

Un silence gênant s'installe durant lequel il ne cesse de me fixer comme si j'étais un mystère à élucider. Je lâche alors son bras en regrettant d'en avoir dit autant.

— Je vous avoue que la plupart me font peur, lance-t-il. Pour dix-neuf d'entre elles, je ne suis pas l'homme de leur vie. Et pourtant, il va bien falloir que je trouve chaussure à mon pied, malgré mes envies au départ.

Et quand il dit ça, ses yeux se lient aux miens.

— Vous ne voulez pas d'un mariage ?

— À l'initial, non. J'ai atteint l'âge de mes vingt-trois ans et mes parents ont estimé qu'il était temps de créer cette sélection.

Pourquoi me dit-il tout ça à moi ? Personnellement, je trouve que ça ferait plus fuir les sélectionnées qu'autre chose. Un prince ne rêvant pas de se marier. Et elles qui percevaient le prince Kaled comme un homme fort et sûr de lui, prêt à conquérir le monde.

— Dites-moi Sarah, hormis ces sélectionnées un peu trop agressives, le palais vous plaît-il ?

Non.

— Oui, beaucoup.

— Tant mieux.

J'ai l'impression qu'il ne me croit pas. Ma réponse lui paraît sûrement trop vague.

— Eh bien, ce fut un plaisir de faire votre connaissance, Mademoiselle.

Il s'abaisse pour saisir ma main et me faire un baise-main.

— Nous nous reverrons sans doute ce soir lors du dîner, Sarah.

Il me lance un dernier sourire avant de s'en aller pour rejoindre le palais. Où va-t-il ? Qu'est-ce qu'il a donc bien à faire en ce moment ? Je me demande s'il est débordé dans sa vie. C'est vrai, il est prince, mais quelles sont ses obligations ?

J'ai à peine quitté le jardin que je réalise de la conversation que l'on vient d'avoir. On a discuté. On a discuté, mon Dieu... Ariane m'avait conseillé de ne pas en faire trop, et je viens littéralement de déballer toute ma vie.

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