Mes cours de guitares ont lieu relativement loin, dans la ville à côté, mais c'était les cours les moins chers et ça se passe bien, donc ça en vaut la peine. N'empêche que le grand inconvénient reste l'heure tardive à laquelle je finis et ainsi je dois prendre le bus nocturne jusqu'à ma commune. En réalité, pour moi là n'est pas le problème. Non le problème c'est les Cinq-Cents mètres qui séparent de l'arrêt de bus de chez moi et que je dois parcourir chaque jeudi soir dans le noir le plus total, éclairé uniquement par la lampe de mon téléphone portable, étant donné l'état pitoyable de l'éclairage public de la ville, ça fait des années qu'ils promettent de régler le problème, mais mon quartier n'a pas encore eu le luxe d'avoir ses lampadaires réparés. Ces instants où je parcours cinq cents mètres sont les minutes les plus terrifiantes de ma vie. À tout moment un indivu sort de l'ombre et c'en est fini pour moi, vu comme je suis petite moi, et du haut de mes un mètre cinquante-six, mes capacités de défenses sont extrêmement limitées. J'ai bien songé à balancer ma guitare dans la gueule de quelqu'un, mais après mûre réflexion il est fort probable que je n'aurais pas le temps de même choper les sangles de ma caisse avant qu'il ne n'arrive malheur. Alors c'esr cinq cents mètres je les parcours avec une rapidité absurde, comme si j'étais poursuivie, en faisant gaffe à ne pas trébucher, et ce n'est pas tant que je suis chez moi avec la porte verrouillée que je m'autorise à respirer, j'enlève ma guitare et je glisse le long de ma porte pour reprendre mon souffle et méditer sur la chance que j'ai de ne pas avoir disparu ce soir-ci. J'ai survécu, mais rien ne dit que cette victoire n'est pas ma dernière. Enfin bon. Pour l'instant la vie continue. Je me lève et je monte à l'étage pour aller réchauffer mon dinner dans le cuisine.

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Vendredi matin se déroule normalement. Je remarque l'absence de Fred mais je n'y prête pas grande attention. On a anglais puis histoire et on enchaîne avec deux heures de français. La prof nous annonce que dans l'optique de nous entraîner un peu plus à l'oral puisque le brevet nous attend à la fin de l'année on va faire un exposé en binômes qui portera sur l'un des personnages des romans que l'on a étudiés cette année. La classe commence immédiatement à bavarder et je me tourne vers Katia, ma voisine de table, pour lui proposer une collaboration, mais Mme Estimieche nous arrête tout de suite dans notre élan et expliquant que pour aller plus vite elle a déjà formé les binômes et assigné les personnages. Ainsi je me retrouve avec le dénommé Paul à travailler sur Cyrano de Bergerac tiré de la pièce du même nom. Je me retrouve à côté de ce garçon à qui je n'ai pas adressé la parole depuis le début de l'année.

"Hmm bon... Tu as le livre au moins?" Je fais de mon mieux pour briser le silence.

"Nan déso, mais on peut partager, je le ramènerai la prochaine fois."

"Ok super, t'as des idées au moins?"

Il m'avoue qu'il n'a même pas lu le livre. Je soupire et je me mets à établir un plan. Je me file le gros du travail parce que sinon je sens qu'il va le bacler, mais après il à l'air de vouloir bosser sur cet exposé donc ça me rassure. À la fin de l'heure alors que la cloche sonne il me glisse un petit papier avec son insta dessus. "Pour parler de l'exposé" il me dit en sortant tandis que je range mes affaires.

Nat et Romain nous attendent dehors, nos deux classes ont EPS ensemble, et ensuite on se ruera à la cantine comme des bêtes sauvages.

"Salut!" Lançe Romain lorsqu'il nous voit enfin sortir de la salle de classe.

"Pas trop tôt les escargots..." Ronchonne Nat derrière lui. Ce dernier à enfin troqué son long manteau noir pour un vêtement plus léger, et pour cause, les températures sont drastiquement montées au cours du week-end et il ne cesse pourtant de pleuvoir, résultats les parapluies et manteau de pluie sont nos meilleurs amis.

"Gnagnagna" répond simplement Katia en remontant son sac à main sur son épaule. Elle est incroyablement stylée, avec des baskets neuves, un jogging dont elle a replié le large élastique pour donner à son haut déjà peu long un effet cropped. Elle s'est attaché les cheveux dans une solide mais jolie que de cheval et elle fait déjà lycéenne. C'est à se demander pourquoi elle traine avec Milllie, Roxanne et moi. Le style de Roxanne se résume à une combi de sport tandis que Millie n'a pas la moindre once de soin decernable dans son apparence, et oui c'est mon ami, je ne dit pas cela pour être méchante, mais elle en a conscience et elle a vraiment trop la flemme de se brosser les cheveux régulièrement etc. et puis moi.... Moi je fait bébé je pense. Mais bon, peu importe, il se trouve que Katia nous as élues comme ses besties et j'en suis honorée.

"Bon on y vas à ce cours de sport?" Reprends Romain, alors qu'on est juste debout dans le couloir mi-discussion.

"Merci Romain de nous rappeler les priorités!" Déclare Nat en chopant la main de Romain et la mienne dans l'autre. "En avant les amis!"

"Eh! Et moi j'ai pas le droit qu'on me prenne la main?" Rouspète Roxanne.

"Alors aux dernières nouvelles je n'ai que deux mains donc non, désolé. Et puis de quoi tu te plains? T'as pas un copain pour te tenir les mains?"

"C'est pas officiellement mon copain... On en est pas encore là je pense. Mais bientôt j'espère."

"Pfff vous êtes compliqués à vouloir y aller lentement" Millie roule des yeux. Le visage de Roxanne m'indique qu'elle est vexée par cette remarque et je ne fait une note mentale qu'il faudra que je la rassure plus tard que comment elle tombe amoureuse et se met en couple, ça ne regarde que elle et Fred, ni Millie, ni moi d'ailleurs. Je devrais probablement parler de Millie de son manque de tacte. C'est pas le même chose de critiquer et de dire que toi tu aurais fait différemment en rassurant Roxanne que chacun ses choix et qu'elle respectait ce choix en question.

"Bah en attendant tu as bien deux charmantes filles à qui tu peux serrer les mains pour nous emboîter le pas non?" Fait remarquer Romain qui était relativement silencieux depuis un petit moment.

Roxanne lui sourit, et son sourire glisse vers un air plus espiègle. Elle chope les mains de Katia et Millie et s'avance rapidement! "En avant mes amies! On va retrouver Fred et crusher ce cours de sport! On a pas besoin des trois autres gogoles là !"

Je rigole et, avec Nat et Romain on les dépasse avec Nat qui balance nos bras si haut que l'on peine à garder les pieds sur terre (enfin surtout moi). Et alors qu'on marche à travers les couloirs trois par trois, forçant les autres élèves à céder le passage l'airs ahuris, je me dis que tant que je suis entourée par des gens géniaux comme Nat, Romain, Roxanne, Millie et Katia, alors mes peines et mes souffrances, l'absence de mon père, mes conflits familiaux et mon amour non réciproque pour ma meilleure, oui tout cela est un peu plus supportables avec eux autour de moi.

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Insupportable. Ça me stresse au plus haut point, à tout moment je meurt d'un arrêt cardiaque là. L'exposé est à rendre pour dans deux jours et même si Paul a une volonté de travailler, vu qu'il n'a pas lu le livre c'est moi qui me retrouve à faire la plupart du travail. Le seul point positif c'est sa gentillesse. Il me remercie constamment, il s'excuse même un peu trop et il essaie de s'investir et dit qu'il parlera beaucoup lors de la présentation pour compenser. Il m'a même souhaité bonne nuit avec un petit coeur hier soir. Au début cela m'a paru bizarre mais après réflexion je me suis dit que c'était super mignon de sa part et que j'étais sans doute en train de me faire un nouvel ami! Wow! Ça faisait longtemps que j'ai pas eu un nouvel ami mec (s'il l'on ne compte pas Fred mais c'est un peu un cas à part lui), parce que depuis on va dire la quatrième j'ai l'impression que filles et garçons se distancent de plus en plus, on est plus vraiment des enfants et les points communs sont plus rares. C'était vachement plus facile de me lier d'amitié avec Nat et Romain quand on était plus jeune et heureusement parce que je ne saurais pas ce que je rate si je n'étais pas leur amie. Suite à ce petit message de bonne nuit bien amical je lui ait répondu la pareil. Bonne nuit avec un coeur. J'ai vraiment hésité à mettre le coeur, mais je l'ai mis finalement, c'était seulement parce que je stressais à l'idée qu'il se sente con d'avoir envoyé un coeur et de ne pas en avoir reçu un en retour... Ce genre de choses moi ça me stress énormément alors je voulais lui éviter cette situation. Il y a un grand orage prévu demain soir, et par précaution j'ai décidé de travailler sur un PowerPoint local plutôt que Google Slides auquel je n'aurais sûrement pas accès si le wifi coupe dans l'orage. Je veux absolument pouvoir boucler l'exposé demain soir, et encore, j'ai déjà fait une grosse partie donc ça devrait aller.

N'empêche que ce foutu exposé ce n'est pas le seul truc que j'ai en tête en ce moment. Le mariage. Le foutu mariage de Thibault et maman. J'ai envie, et je dis ça réellement, j'ai tellement envie d'être heureuse pour elle mais je n'y arrive pas. Maman et Thibault sont hyper sérieux et investi dessus en plus. Ils commencent à réfléchir à une date et à choisir leurs vendeurs et regardent sur des sites pour trouver le lieux le plus romantique. Moi je ne peux que m'inquiéter, angoisser, stresser. J'ai eu la réalisation que Maman était si heureuse parce que c'était son premier mariage, et tout cela ça m'a fait pleurer parce qu'on fond de moi je me dis que c'est mon père qui aurait dû être là et pas Thibault. Pourquoi je ne peux pas avoir une famille normale? Comme celle de Roxanne. Avec des parents qui s'aiment et c'est pas compliqué. Je n'en peux plus de tout cela, j'ai l'impression que je vais exploser, sans compter le tracas causé par Roxanne et Fred... Ah oui c'est vrai, je voulais rassurer Roxanne l'autre jour... Je ne l'ai pas fait. Quelle merde je suis. Ce serait trop bizarre, trop cringe de mentionné ce moment quelques jours plus tard non? Ou elle a vraiment besoin du soutien? Je sais pas. Ça me stresse. Je stresse tellement que je me suis blessée en rongeant mes ongles ce matin. Je sais que c'est pas élégant et c'est plutôt crade de se ronger les ongles mais je n'y peut rien, c'est mon unique moyen de m'empêcher de faire une connerie quand je suis angoissée ainsi. J'espère que rien de merdique va venir compliquer ma semaine. J'ai vraiment pas besoin de ça. Si jamais quelque chose se déroule mal je pense sincèrement que je vais finir par craquer.

ˡᵉ ᵇⁱⁿᵒ̂ᵐᵉ | 1910 ᵐᵒᵗˢ

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