𝐕𝐈𝐈𝐈.
08; The secret Recipient
𝑨𝑰𝑵𝑺𝑰 𝑸𝑼'𝑨̀ 𝑺𝑬𝑺 𝑬𝑺𝑷𝑹𝑰𝑻𝑺 𝑸𝑼𝑰 𝑯𝑨𝑵𝑻𝑬𝑵𝑻 𝑳𝑬𝑺 𝑪𝑬𝑹𝑽𝑬𝑨𝑼𝑿. Il existait deux variétés fondamentales de folies : la lente et la rapide. 666 ne parlait pas de la différence entre crise et durée. Elle parlait de la qualité de la folie, du processus quotidien du devenir-maboul. La caractéristique prédominante de la forme lente était la viscosité. Lors des séances de psychologie de 666. Le temps était lent, il s'écoulait goutte à goutte à travers le filtre entartré de la perception épaissie. Sa température du corps était basse. Son pouls était faiblard. Son système immunitaire était à moitié endormi. Même ses réflexes étaient diminués, comme si sa jambe était trop lasse pour réagir à la sollicitation du marteau sur le genou. C'était la preuve fatal qu'elle ne souffrait pas de démence.
666 se demandait si elle avait des pensées trop pleines ou trop creuses ? Heureusement, elle n'avait jamais eu à trancher ce dilemme. Dans un cas comme dans l'autre, ça finissait par passer. Mais par passer où ? Elle se questionnait si cela était dans ses cellules, comme un virus attendant la prochaine occasion de sévir ? Endogène ou exogène, naturel ou culturel, tel était le grand mystère de la maladie mentale.
666 avançait posément, sur ses gardes. Son objectif était d'atteindre la la bibliothèque sans attirer l'attention. Au moment où elle déposa son pied dans la bibliothèque, ses yeux se posèrent sur l'horloge. Les aiguilles, qui tournaient à plein régime, s'immobilisèrent. Un cri lui parvint d'une antre ténébreuse : elle inspira longuement, pour chasser cette horrible mirage. Ce n'était rien, elle devait oublier comme le répétait le psychiatre Angus Bumby. Elle était devenue une musique de fond, un pot pourri de thème honnis.
Elle finit par franchir son jardin secret. Elle contourna quelques étagères débordantes d'ouvrages, prenant grand soin de ne pas buter contre le coin d'un meuble ou quelque objet tombé au sol. Laisser de côté la lampe à l'huile avait été prémédité : elle chercha avant tout à passer inaperçue, mais elle regretta presque son choix tandis qu'elle errait dans la vaste pièce dans une obscurité qui ne la laissait perceptibles que les contours et les surfaces proximales.
Le silence était si entier qu'elle aurait préféré entendre une vague de hurlement. Après avoir longé des mètres de livres alignés, elle atteignit finalement ce qu'elle chérissait depuis un moment. Ses mains coururent sur ses motifs de cuir, la surface dure du livre. Dans cette sombre prison l'inconnu s'était déclaré être son ami du conte de fée. De cette façon 666 s'était liée d'amitié.
Au fur et à mesure, le nombre de petits messages grandit. 666 tournait soigneusement les pages. Ces notes contenaient leurs ressentis après avoir lu certaines des histoires. Chaque fois qu'elle voyait une nouvelle réponse, la brune était heureuse, son cœur gonflait. 666 laissa valser son poignet sur la page.
L'histoire que j'aime le plus est « Arsène Lupin, gentleman cambrioleur ». Dès le début j'ai été séduite par Arsène. Tantôt là, puis ailleurs. L'art d'être un autre et de se volatiliser. Elégant, téméraire, éloquent, spirituel et audacieux.
Le jour d'après une réponse avait été laissé à sa suite.
D'emblée, nous sommes dans la légende : tout le monde connait Arsène Lupin, personne ne sait à quoi il ressemble, sauf le commissaire Ganimard.
666 fut appelé pour une séance avec le docteur Bumby, mais elle eut le temps d'écrire avec excitation.
C'est vrai. Tout le monde connaît le personnage d'Arsène Lupin, mais malgré cela, il reste chez lui un aspect mystérieux que j'ai aimé entrevoir. Personne ne sait exactement d'où il vient de folles rumeurs courent sur sa véritable identité. Quel est l'histoire la plus triste ?
Elle lu le retour, l'écriture semblait avoir été précipité comme si son ami des contes de fée était pressé.
La petite sirène.
666 réfléchit avant de noter.
Possible. Peut-être est-ce parce que je ne sais pas grand chose sur l'amour. Je ne comprends pas pourquoi la petite sirène ferait un aussi gros sacrifice pour sauver un étranger.
La brune attendit avec impatience la réponse qui ne tarda pas à apparaître.
Je pense que ça pourrait être parce que le prince était vraiment beau, mais n'est-ce pas pour cette raison que l'histoire est triste ?
666 écrivit si vite qu'elle faillit déchirer le papier.
Je n'aime pas ce stupide prince qui confond même son sauveur. Je préfère le cambrioleur gentleman, même si son visage devait ressembler à celui de Quasimodo.
Un message se dessina durant les jours qui s'écoulèrent.
Alors qu'en serait-il si le gentleman cambrioleur était beau ?
La jeune femme parrut réfléchir, le stylo en l'air, un doux sourire rêveur naquit sur son visage.
Je n'aurai pas d'autres choix que de bien cacher mon coeur. Pour ne pas me le faire voler.
666 avait mené une expédition pour résoudre le mystère autour de l'identité de son ami du conte de fée, sans succès. La bibliothèque venait de revêtir son manteau le plus sombre, celui dont se parlent les ouvrages qui avaient tant à cacher, surtout les secrets les plus terribles dont ils avaient un jour été témoins. Pas de ceux qui se murmuraient à propos de l'amour entre Lancelot et dame Guenièvre, non. Ni entre Merlin et dame Viviane, mais de ceux d'une tout autre nature qu'il valait mieux ne pas connaître. 666 s'adossa au mur pour débuter sa lecture, celle du conte brutal Barbe bleue.
Il était une fois un homme riche qui était doté d'une barbe bleue lui donnant un aspect laid et terrible. Dans la maison voisine à la sienne, vivait une famille avec deux belles jeunes filles. L'homme dit à leur père qu'il aimerait épouser l'une d'elle. Chacune des filles le rejeta. Elles détestaient qu'il ait une barbe bleue et le fait que de nombreuses femmes aient disparues après un mariage avec lui. Barbe bleue invita les filles, leur mère et leurs amis à rester dans sa maison pendant une semaine. Ils s'amusèrent et dirent "à votre santé" chaque jour.
Les femmes qui avaient passé un moment agréable ne détestaient plus Barbe bleue. Elles lui chantèrent des louanges. Et, le mariage de l'aînée des soeurs et de Barbe bleue arriva naturellement. Elle était une mariée comblée, Barbe bleue dut voyager dans de lointaines contrées. Il lui confia un trousseau de clefs ouvrant toutes les portes, mais il y avait un cabinet où il lui était formellement interdit de pénétrer.
Curieuse, elle enfreint la règle, et y découvrit l'horreur. Du sang épais provenait des cadavres des anciennes femmes mariées à Barbe bleue. Terrifiée, elle laissa tomber la clef dans le sang. Elle essaya de nettoyer la tache en vain, la clef était magique. Barbe bleue revint à l'improviste et découvrit la trahison de sa femme. Furieux, il s'apprêtait à l'égorger, comme ses précédentes épouses. Ce jour-là, la malheureuse attendait la visite de ses deux frères et elle supplia son mari de lui laisser assez de temps pour prier. Le monstre lui accorda un quart d'heure. Lorsque Barbe bleue s'apprêta à l'exécuter, la tenant par les cheveux, les frères surgirent et le tuèrent à coups d'épée.
La rescapée hérita de la fortune de son époux, aida sa sœur à se marier et ses frères à avancer dans leur carrière militaire. Elle épousa un homme bon et honnête qui pourrait l'aider à oublier. 666 eut une fugace réflexion lors du récit. Si elle était la femme d'un homme avec une barbe laide, si elle avait ouvert la porte interdite, aurait-elle attendu le retour de Barbe bleue ?
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