Chapitre 4

Le lendemain matin, après avoir déjeuné dans la Grande Salle, Norbert et Leta se retrouvèrent vers dix heures et demie à la bibliothèque pour faire leurs devoirs ensemble. Ils s'installèrent dans le fond de la pièce, derrière une rangée de livres, en silence, de peur de s'attirer les foudres de la documentaliste, Madame Naphtaleney.

Leur devoir de soin aux créatures magiques sur les botrucs fut vite plié. En revanche, l'arithmancie fut une autre paire de manches. Norbert avait un niveau correct dans cette matière, mais Leta, elle, n'était pas très bonne. On pouvait même dire qu'elle était assez mauvaise, en fait. Au bout d'une vingtaine de minutes à lire et relire une opération pour chercher ce qui n'allait pas dans son calcul, elle râla :

- Tous ces chiffres m'embrouillent le cerveau, ça me donne la migraine. Pourquoi est-ce qu'on a pris cette matière, déjà ?

- Pour nous "ouvrir des portes", je crois ? répondit distraitement Norbert en notant un résultat sur son parchemin. Enfin je n'en sais rien. Mais qui sait, ça nous sera peut-être utile un jour ?

- Il y a intérêt, tiens ! Je voudrais pas me coltiner toutes ces opérations pour rien ! affirma vivement Leta.

- Mademoiselle Lestrange, l'interpella sèchement la bibliothécaire qui se trouvait deux rangées plus loin, je vous prierai de baisser d'un ton.

- Et moi je vous prierai de cesser d'empester, grommela Leta dans sa barbe.

Cela fit sourire Norbert, qui se pencha vers elle pour lui chuchoter :

- C'est moi ou tu n'es pas d'humeur aujourd'hui ?

- Perspicace, Newt, répondit la concernée en levant les yeux au ciel.

- Bon, laisse tomber l'arithmancie, on s'y remettra plus tard. On n'a qu'à travailler les sortilèges, ce sera plus amusant.

- Oui, enfin ce sera amusant quand on aura lu les pages 97-98 du manuel avant de pouvoir passer à la pratique, soupira Leta, pragmatique.

- C'est bon, assura Norbert, ces pages répètent la même chose que ce qu'on apprend depuis deux cours, et on les a déjà travaillées. On connaît la théorie par cœur ! ajouta-t-il.

- Et moi qui croyais que tu avais une bonne influence sur moi, sourit-elle, taquine.

- J'ai une très bonne influence, argua-t-il pince-sans-rire, je ne te laisse pas perdre ton temps.

À ces mots, Leta éclata d'un rire franc, tout de suite rejointe par Norbert. Il était difficile de croire qu'il y a quelques secondes encore, elle ronchonnait de dépit. C'était incroyable comme il suffisait de quelques mots à Norbert pour lui faire oublier sa mauvaise humeur et éclairer son faciès d'un sourire.

Discrètement, elle détailla le visage de son ami. Son sourire doux, ses adorables tâches de rousseur et ses yeux clairs et pétillants, emplis de bienveillance naïve, et son cœur accéléra. Ce garçon avait définitivement un pouvoir sur elle. Il provoquait en elle des réactions, des sensations, des sentiments inédits et sur lesquels elle n'avait aucun contrôle. Et elle ne se posait pas de questions, elle laissait faire. Elle se donnait corps et âme à Norbert, en toute confiance. Et en secret.

En sortant de la bibliothèque, Norbert s'arrêta pour farfouiller dans son sac.

- Qu'est-ce que tu cherches ? l'interrogea son amie. Tu as oublié quelque chose à l'intérieur ?

- Non, non, fit Norbert. Mais comme je me suis souvenu que ce sortilège, Orchideus, te posait un problème, je me suis dit que... Enfin, j'ai été cueillir un bouquet de pâquerettes. Pour te servir d'exemple, précisa-t-il.

- Oh, super ! C'est intelligent, lui sourit-elle.

- Merci, rougit-il légèrement sous le compliment. Tiens, dit-il en lui tendant le bouquet.

Un bouquet de pâquerettes. Juste un bouquet de pâquerettes, pour l'aider. Rien de plus. Et pourtant, Leta ne pouvait s'empêcher de penser au fait que Norbert venait de lui offrir des fleurs, qu'il avait pris la peine de cueillir lui-même ce matin-là. C'était un geste que l'on pouvait interpréter de beaucoup de façons, non ?

Chassant ces pensées parasites de son esprit, Leta offrit simplement son plus beau sourire à Norbert, et il en fut tout étourdi. Nul doute qu'il était devenu rouge jusqu'aux oreilles.

Rapidement, ils marchèrent vers une salle de classe vide qu'ils avaient l'habitude d'utiliser pour leurs entraînements et qui se situait au deuxième étage, Leta s'accrochant toujours à son bouquet comme si c'était la pierre philosophale. Après avoir emprunté un certain nombre de couloirs, un raccourci, et bataillé avec les fourbes escaliers en pierre du château, le tout en bavardant gaiement, Norbert et Leta étaient presque arrivés quand ils tombèrent sur Venom et Finnigan au détour d'un couloir. Leur regard était un peu trop mauvais au goût de Leta, qui leur lança :

- Qu'est-ce que vous regardez, bande de gnomes ?

- Une malade mentale, répliqua Finnigan du tac-au-tac. C'est affreusement moche.

- Tu dois parler de ce que tu vois dans ton miroir, se moqua Leta. Je vais te répéter plus clairement ce que je voulais dire : ne pose pas tes petits yeux vicieux sur moi, la gnome, dit-elle en reprenant sa marche.

- Lestrange, la rappela Venom, tu ferais mieux d'éviter de traiter mes amis de gnome si tu ne veux pas que j'aille apprendre au professeur Black que tu m'as insultée de tu-sais-quoi.

Leta s'arrêta, tourna sa tête vers la Gryffondor et haussa un sourcil.

- Je ne t'ai pas insultée de Sang-de-Bourbe.

- Tu as failli, l'accusa-t-elle. C'est pareil.

- Non, ce n'est pas pareil, s'énerva Leta en élevant la voix.

- Peu importe, balaya Venom d'un geste de la main, de toute façon, ça n'étonnera personne. Qui croiront-ils, à ton avis, entre moi, et la fille qui a failli se faire renvoyer parce qu'elle fabrique des trucs pas nets avec des chartiers ?*

- Ça suffit, petite imbécile ! s'emporta Leta en dégainant sa baguette.

Norbert, qui jusque-là était resté en retrait, fut bien obligé de réagir et se jeta sur Leta pour la retenir en arrière. Le regard furibond, le souffle erratique à force de se débattre, Leta tentait de diriger sa baguette sur Venom, mais sans succès. Norbert avait plus de force. Certes, ce n'était pas la première fois que son amie s'emportait. Pourtant, il ne savait toujours pas vraiment comment gérer ce genre de situation, et se contenta de la maintenir de façon à ce qu'elle ne puisse pas faire subir à Venom le même sort que Nick-Quasi-Sans-Tête.

- Leta ! Leta, calme-toi, s'il te plaît, supplia Norbert qui paniquait légèrement.

Quand elle entendit la voix du garçon vaciller, Leta se figea.

Elle ne voulait pas lui faire peur. Elle prit une longue inspiration, puis expira doucement, en essayant de refouler ce sentiment qui lui donnait l'impression que sa poitrine allait exploser si elle ne faisait pas ravaler sa langue à Venom sur-le-champ. Norbert, qui lui maintenait toujours les bras en arrière, lui chuchota :

- Ça ne vaut pas la peine de s'énerver pour ça, vraiment. Elle ne sait même pas de quoi elle parle. Ignore-la.

Suivant son conseil, Leta tenta de concentrer sa vue ailleurs que sur l'objet de sa colère qui s'éloignait en lui jetant des regards dédaigneux, et ses yeux se posèrent sur un bouquet de pâquerettes. Son bouquet de pâquerettes, au sol, en piteux état. Et sa colère redescendit d'un coup, laissant place à une grande tristesse. Une tristesse dont elle ne comprenait pas l'origine. Pourtant, la vision de ces quelques fleurs, là, au sol, la rendait immensément triste.

- Oh, non, souffla-t-elle.

Norbert suivit son regard. Doucement, il relâcha son emprise, s'assurant qu'elle ne sauterait pas à la gorge des deux jeunes filles, et la tira doucement vers les petites fleurs blanches. Il ramassa une pâquerette en bon état, et la lui donna.

- Tout va bien, lui assura-t-il.

Il avait planté ses yeux clairs dans ceux de Leta. Et elle ne put que le croire. Alors, pour se faire pardonner, elle murmura : "Orchideus", et lui donna le lys qui en résultat. Et Norbert sourit.

*En effet, Leta avait failli se faire renvoyer de Poudlard à cause d'une expérience sur des chartiers qui avait mal tourné, et un de ses camarades avait été blessé. Norbert l'avait couverte en disant que c'était lui le responsable, et il avait échappé au renvoi grâce au professeur Dumbledore.
Je me suis documentée :)

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