𝐌𝐮𝐬𝐞⎟𝑀𝑦𝑡𝘩𝑜𝑙𝑜𝑔𝑦 (🍋)

◤ 𝐑𝐄́𝐒𝐔𝐌𝐄́ ◥

Taehyung était capable d'inspirer ses idées à tous les esprits créatifs confondus, ce qui faisait de lui la muse la plus douée parmi ses semblables.

Malheureusement, son interchangeabilité ne lui amenait que des missions dont personne ne voulait. Ainsi, Taehyung ne vibrait pas au contact des artistes, devenant aussi froid qu'une création artistique sans âme.

Jusqu'au jour où sa mission se nomme Jeon Jungkook, un réfractaire ; une mission délicate.

En revanche, si Taehyung échoue dans sa mission d'inspirer l'écrivain, la muse rendra sa plume et mourra.





Dans la dimension des humains, Taehyung se matérialisa dans la pièce. L'atelier était toujours le même, spacieux et incroyablement lumineux. Sur la petite estrade habituelle, personne n'était là, aussi se retourna-t-il en scrutant les environs. Il ne lui fallut pas longtemps pour que ses yeux capturent ce qu'il cherchait.

Devant une statue à moitié sculptée se tenait une femme à la chevelure flamboyante, collée à son cousin, ce dernier ayant un bras enroulé autour de sa taille de guêpe à même sa peau, l'autre main fermement accrochée à celle de la jeune femme caressant les formes de la statue, les modelant, les façonnant avec des gestes lents et sensuels. Ils étaient si proches que seul l'air avait une chance de s'immiscer entre leurs deux corps, leurs deux peaux complètement nues.

Ainsi, sous les yeux de Taehyung se trouvait un tableau vivant d'une muse et son artiste en parfaite symbiose.

Taehyung ne pipa mot et regarda son cousin guider les gestes de la rousse. Cette dernière, les yeux fermés, semblait totalement s'abandonner aux inspirations de Seokjin, laissant sa main agir pour affiner les courbes du corps de glaise devant lui, matrice dont il était taché par endroit et dont ses mains étaient couvertes.

« Tu sais que leur souffler par des mots ce qu'ils devraient faire, ça fonctionne, aussi Jin. Tu n'as pas besoin de la toucher. »

Son cousin tourna la tête dans sa direction et détailla sa vêture, lorgnant la chemise beige coincée dans un pantalon en cuir, traçant sa taille fine et épousant parfaitement ses jambes galbées. Il releva les yeux vers lui fit un petit rictus.

« Qu'en sais-tu Taehyung, tu n'as jamais suivi de sculpteurs.

— Non, mais des peintres oui, et je ne me suis jamais collé à eux pour guider leur pinceau. »

À regret, Seokjin se détacha de la jeune artiste qui continua de travailler son œuvre avec la même passion. Il le couva des yeux un instant.

Anthéa était prodigieusement talentueuse. Plus que tout, elle était incroyablement réceptive aux muses, en particulier à Seokjin. Ce dernier avait rarement été aussi en phase avec son artiste et jamais il n'avait pu aussi bien guider sa protégée. Anthéa s'abandonnait littéralement à l'inspiration qui lui venait, laissant les sensations pénétrer son corps. Alors oui, la muse aurait pu s'asseoir un peu plus loin et la guider par ses mots, mais avec elle, le contact marchait nettement mieux.

Elle était une tactile et Seokjin était bien mieux placé que Taehyung pour savoir ce dont la flamboyante sculptrice avait besoin.

Et puis, lui aussi aimait cette relation, il prenait du plaisir à transmettre ainsi ses idées et comme chacun sait : lorsqu'une muse prend du plaisir, elle effectuait magistralement son travail.

« Peu importe la façon dont je travaille, cela ne te regarde pas, mon cher petit cousin.

— Mh. »

Taehyung s'était assis sur un tabouret, les jambes élégamment croisées, un air d'ennui profond sur le visage. Depuis combien d'années, de siècles, le jeune homme était-il aussi blasé ? Seokjin soupira. Il ne comprenait pas le manque d'enthousiasme de Taehyung pour son travail. Lui-même l'exerçait depuis plus longtemps et il aimait vraiment cela, il était né pour être muse.

La joie de transmettre une idée, le plaisir de la voir être mise en œuvre et la reconnaissance étaient autant de côtés qu'il trouvait gratifiants. Mais rien de tout cela ne semblait intéresser son cousin. Pourtant, depuis tout petit, Taehyung adorait être une muse, se glissant dans le monde des hommes pour leur murmurer ses idées à l'oreille.

Et grand Zeus, son cousin était incroyablement doué, sachant s'adapter à la personnalité, au caractère de ses protégés. Contrairement à beaucoup de muses, toujours cantonnées aux mêmes types d'artistes ou de personnes, Taehyung était interchangeable. Sans doute était-ce pour cela qu'il héritait de beaucoup de missions dont personne ne voulait.

Peut-être était-ce pour cela qu'il était aussi blasé ; une muse nourrit son artiste, mais celui-ci la nourrit en retour et le lien que crée une relation à long terme est primordial pour cela. Seulement, Taehyung n'avait jamais eu la chance d'avoir ce genre d'expérience, d'être en totale symbiose avec son protégé.

Il espérait que cela serait le cas pour sa prochaine mission.

« Pourquoi m'as-tu demandé de venir, Jin ?

— J'ai ton nouvel ordre de mission.

— Pourquoi est-ce toi qui me le donnes ?

— Question de simplicité, lâcha-t-il en haussant ses épaules dénudées.

— Mh. »

Taehyung soupira.

« Alors, c'est quoi cette fois ? Je suppose que si Père ne me l'apprend pas lui-même, c'est qu'il s'agit encore d'une mission débile.

— Pour une muse, tu pourrais trouver une expression plus recherchée, rit Seokjin.

— Je t'emmerde, ça te convient mieux ? »

Seokjin prit un air faussement choqué.

« Voyons, enfin, cousin... ! »

Son cadet le regarda de ses yeux vides et lui tendit la main.

« Alors, tu me le donnes ? »

Seokjin soupira et lui tendit la sienne et, par enchantement, un parchemin y fit subitement son apparition. Taehyung s'en saisit, dénoua le ruban rouge soigneusement enroulé et commença à dérouler le manuscrit.

« Alors de quoi ai-je hérité ? Un autiste incroyablement doué pour le dessin, un schizophrène qui entend des voix, mais peint comme un dieu ? Un écrivain dérangé et déprimé, mais qui écrit que des merveilles sombres, à la Lovecraft ? »

Il lut rapidement et claqua la langue d'agacement avant de soupirer bruyamment.

« Putain, un remplacement ?

— Oui.

— Temporaire ?

— Comme il est stipulé.

— Puis-je savoir pourquoi Namjoon ne peut pas assurer le suivi de sa mission ?

— On lui a confié un autre protégé pour quelque temps.

— Kim Seokjin, me prendrais-tu pour un idiot ? », siffla-t-il.

Le brun haussa un sourcil. Lorsque son nom complet était prononcé par son cousin, cela n'augurait rien de bon.

« Que veux-tu dire ?

— Qu'une muse ne se fait pas remplacer à moins de ne plus supporter sa mission et... Et puis laisse tomber. Ça ou autre chose, de toute façon...

— Je croyais que tu avais une préférence pour les écrivains, que tu ne voulais plus de musiciens ou de peintres.

— Mh.

— Alors ? »

Taehyung fixa son cousin de ses grands yeux sans expression hormis un immense ennui. Seokjin le détailla. Cette expression le rendait hautement intimidant, le regard partiellement caché derrière ses mèches châtaines. Ce n'était pas bon pour une muse d'avoir ce genre de regard et pour toute autre que lui, Seokjin se serait inquiété, mais Taehyung était ainsi depuis si longtemps...

Il vit le châtain à la chevelure mi-longue et ondulée, lui arrivant à la base de la nuque, signer son ordre de mission, preuve qu'il acceptait son nouveau protégé. Cela lui permettrait de pouvoir interagir avec lui, de le voir, de le trouver où qu'il soit.

« Ta protégée s'est arrêtée, tu devrais y retourner, Jin. »

En effet, la rousse tournait autour de sa statue, l'observant, réfléchissant à la meilleure solution. La muse partit dans sa direction et Taehyung commença à se dématérialiser.

« Hé, cousin.

— Quoi ?

— Essaye de t'amuser. »

Le châtain commença à se dissiper, ses yeux noirs et vides fixés sur la silhouette nue de Seokjin. Puis, il disparut laissant derrière lui le parchemin que son aîné remettrait à son père. Le Kim soupira et revint se coller à Anthéa reprenant sa main gracile d'un doux geste aérien.

Elle le regarda et lui sourit tendrement, leurs cœurs battant à l'unisson dans une parfaite symphonie.

Il s'enivra de la présence de la jeune femme et oublia Taehyung, pour un temps.





Tandis que Seokjin se perdait dans la passion de son travail, le plus jeune des cousins regardait autour de lui le petit appartement dans lequel il venait de se matérialiser. Et rien qu'à la vue du pandémonium qui y régnait, il se dit que cette mission promettait d'être très intéressante.

Notez l'ironie.

Taehyung n'avait jamais compris comment quelqu'un pouvait espérer faire un travail correct dans un environnement non adéquat. Et les cartons de pizza abandonnés et des sachets de nourriture emportée sur la table, les vêtements jetés en vrac, les boules de papiers balancées çà et là, les piles de livres prêtes à s'écrouler au moindre coup de vent.

Non ce n'était pas du tout les conditions idéales pour avoir un véritable avenir en tant qu'écrivain. Selon la muse, pour avoir des idées ordonnées, il fallait commencer par l'être.

Il fit quelques pas dans la pièce ses mocassins résonnant sur le parquet, que lui seul pouvait entendre, observant de plus près son environnement, tâchant de passer outre le chaos. L'appartement n'était pas très grand, mais il était confortable. À sa droite, une grande baie vitrée donnait sur un petit balcon et la lumière entrait vivement dans la pièce. La vue était plaisante, pas de vis-à-vis dérangeant, au contraire, il voyait plusieurs petites maisons dotées de jardins luxuriants.

Pendant un instant, Taehyung se laissa absorber par la vue enchanteresse de la verdure, regardant des enfants jouer ensemble dans une parodie de bonheur qu'il trouva tout simplement irritante. Enfin, il n'était pas là pour ça.

Il détourna les yeux pour les reposer dans l'appartement.

Les murs étaient peints en blanc, certainement pour agrandir la pièce, peu de décoration, une grande bibliothèque débordant de livres – guère plus rangés que ceux des piles disséminées dans la pièce. Une petite cuisine ouverte sur la pièce principale où l'évier débordait de tasses vides, presque pas d'autre vaisselle, sans doute lié au fait que l'occupant de l'appartement semblait se nourrir essentiellement de pizzas et de nourriture emportée.

Il s'éloigna de la cuisine, un petit couloir sur la droite menait à la porte d'entrée. Face à elle, une autre porte, sans doute celle de la salle de bain, supposa Taehyung. Il ne s'y attarda pas et se dirigea vers le meuble où il allait passer le plus de temps : le bureau. Il était dans le même état que le reste, un ordinateur portable, une petite pile de feuilles tout droit sorties de l'imprimante, raturées, corrigées à la main.

Taehyung profita d'être seul pour saisir la feuille du dessus. Il lut les premières phrases.

Mouais, peut mieux faire.

D'un autre côté, Namjoon était peut-être une des meilleures muses pour un écrivain, mais ils avaient des idées très différentes, ainsi, leurs préférences de style étaient diamétralement opposées ; Namjoon prônait le récit prosaïque tandis que Taehyung aimait voir ses idées écrites avec lyrisme. Mais cela restait son avis personnel et tout dépendait du style et de la plume de l'écrivain.

Il entendit un grognement venir de la pièce à côté.

Bien, visiblement c'était là que se trouvait son nouveau protégé. Il décida donc d'aller voir à quoi il ressemblait, s'attendant au pire. Sa dernière mission l'avait mis au service d'un vieux pervers qui passait son temps à reluquer les femmes en douce. En effet, Taehyung n'avait servi à rien si ce n'est lui souffler de bonnes idées pour ne pas se faire pincer.

Avant ça, il avait eu cette fille complètement malade, une furie qui faisait des spectacles de danse avec ses abeilles et... oh, de toute manière, il n'avait eu que des malades mentaux depuis les cinquante dernières années. Toutes les missions, dont personne ne voulait, finissaient toujours par lui revenir.

Il supposait donc que son nouveau protégé serait aussi mentalement dérangé que les précédents.

Il fit donc un pas, enjambant un sac négligemment échoué au sol et pénétra dans la pièce attenante. Il s'agissait de la chambre à coucher, assez petite et surtout entièrement remplie par une immense armoire et un grand lit. Sur celui-ci était allongé un jeune homme et Taehyung sut instinctivement qu'il était son protégé. Sur le ventre, la tête coincée sous l'oreiller, torse nu, il semblait difficilement émerger de sa sieste. Taehyung contempla le dos musclé et la peau opalescente.

Superbe corps, pensa-t-il.

Seokjin aurait sûrement aimé s'en inspirer pour sa protégée. Avec un nouveau grognement, le jeune homme se retourna laissant voir un torse glabre et magnifiquement musclé, des abdominaux parfaitement dessinés et une peau tout aussi parfaite que côté recto, uniquement interrompue par une fine ligne de poils bruns se perdant sous la ceinture du survêtement. Il loucha sur son bras entièrement et une partie de sa main recouverts d'encre indélébile. Une œuvre d'art.

L'oreiller vola, passant au travers de Taehyung qui grogna avant de reporter son attention sur le brun et de rester bouche bée.

Incroyable... Il avait créé ce... Il l'avait dessiné... ! Inspiré !

Enfin, plus exactement il avait soufflé à une de ses protégés ces mêmes traits, ces lèvres élancées, mais gourmandes, ces grands yeux de biche brillante, tout à fait charmante et innocente, ce visage doux et bienveillant aux traits symétriques, parfaits, très masculins et divins.

Les deux seules différences étaient que cet être possédait un piercing à l'arcade sourcilière, un anneau ornant le coin de sa lèvre et de nombreuses boucles habillant les cartilages de ses oreilles. Il arborait des cheveux bruns, aussi longs que ceux de la muse, si ce n'est légèrement plus, dont deux lourdes mèches retombaient sur ses tempes et ses yeux, caressant partiellement ses joues opalines, alors que dans la peinture, il l'avait dessiné blond et vierge de tout artifice.

Ces artifices plaisaient au châtain, satisfaisant son âme de muse.

C'était comme si la peinture réalisée une centaine d'années auparavant avait soudainement pris vie. C'était tout incroyable et invraisemblable.

Tout y était. Taehyung était pour le moins troublé. Pour être franc, il était même physiquement troublé, mais compte tenu de son habileté naturelle à se mentir, disons simplement qu'il avait un peu chaud, tout à coup, ce qui était somme toute parfaitement normal en été.

Et puis quoi, il était simplement sincèrement surpris par cette incroyable ressemblance, comme il est possible de l'être d'une coïncidence aussi considérable. Oh, bien sûr, dans l'inspiration qu'il avait soufflée à l'artiste, il avait apporté sa propre touche, mais il avait avant tout tenu compte des goûts de celle-ci. Ainsi, il était donc plus qu'évident que ce visage reflétait avant tout les désirs de la peintre et non les siens.

Et puis il était difficile pour une muse de savoir ce qui venait d'elle et ce qui ne l'était pas.

Et s'il se souvenait parfaitement de cette peinture, quand bien même en avait-il inspiré des centaines, depuis, c'est simplement qu'elle était particulièrement réussie et pas du tout parce que ce visage l'avait en quelque sorte hanté. Pas du tout.

Oui, cette peinture, il n'avait jamais réussi à l'oublier, elle l'avait poursuivi pendant plusieurs années et fut un temps, il lui arrivait d'apparaître dans le petit appartement où elle était conservée.

Mais par simple curiosité, évidemment.

Et puis, le temps passant, elle avait été détruite comme beaucoup d'autres œuvres avant et après elle. Taehyung n'avait plus eu que ses souvenirs pour contempler ce visage angélique et absolument parfait. Mais la disparition de cette peinture ne le toucha pas plus que cela, car une muse ne l'est jamais et lui, encore moins, évidemment.

Et non, il ne venait pas de penser que son ange se tenait devant lui en chair et en os, absolument pas.

Celui-ci se leva avec une grâce féline, exactement comme l'aurait soufflé Taehyung s'il avait dû décrire ses mouvements. En revanche, le bâillement qui suivit, bouche grande ouverte, bien bruyant et le grattement compulsif de cheveux comme un chien ayant des puces, suivi par une remise en place on ne peut moins élégante des parties intimes n'avaient définitivement rien à voir avec l'être sublime qu'avait peinte son ancienne protégée.

Quand la vie rejoint l'art, la déception est souvent au rendez-vous, pensa le châtain en emboîtant le pas à son nouvel auteur.

Celui-ci attrapa un tee-shirt sur le canapé et l'enfila. Taehyung fut surpris de constater qu'une légère contrariété s'éleva en lui à ce geste. Cela le surprit, mais il en conclut que, bien sûr, ce n'était pas le fait qu'il mette un tee-shirt qui était gênant, mais le fait qu'il le prenne du canapé prouvant ainsi qu'il avait l'habitude de vivre dans cette totale désorganisation.

Oui, voilà, c'était ça, exactement ça.

Pendant que la muse était perdue dans ses pensées, une quinzaine de minutes s'était écoulée et son protégé avait eu le temps de faire sa toilette, étant à présent bien réveillé et frais.

« Allez, Kook, il est temps de te remettre au boulot, murmura-t-il pour lui-même.

— Range d'abord », lança Taehyung.

Jungkook s'interrompit et regarda autour de lui.

« Hum, d'abord un peu de rangement. »

Taehyung hocha la tête et s'assit sur le bureau. Son protégé regardait autour de lui ne sachant visiblement pas par où commencer.

La muse soupira.

« Commence par jeter les boîtes de pizza vides, grogna-t-il, sa voix rauque et envoûtante, s'élevant dans l'air, se métamorphosant en une idée soufflée dans l'esprit de son protégé.

— Oui, bonne idée, d'abord la poubelle. »

Il se dirigea vers la cuisine, prit un sac et entreprit d'y jeter les déchets. Lorsque cela fut fait, il s'assit en soupirant sur le canapé.

« Bouge de là flemmasse, il reste du boulot », lança la muse.

Une ride de contrariété fit son apparition sur le front de Jungkook, mais il resta immobile. La même ride ne tarda pas à apparaître sur celui de Taehyung.

Pourquoi diable ne bougeait-il pas ?

Il soupira bruyamment. Décidément, d'un ange, il n'avait que le physique, pour le reste, il semblait être le dernier des imbéciles. Allait-il devoir tout lui détailler ?

« Range les vêtements qui traînent. »

Jungkook se leva et attrapa un pull qui avait été jeté sur le canapé cinq jours plus tôt. Il pensa qu'il devrait certainement devenir plus ordonné, seulement, franchement, le ménage n'avait jamais été sa tasse de thé. Quant au rangement, n'en parlons pas.

Il regarda autour de lui. À dire vrai, une fois débarrassé des boîtes de pizza vides et des sachets vides de nourriture, l'appartement n'était pas si en désordre que cela.

Il s'interrompit dans le pliage du pull. Oui, en fait, ça allait, pourquoi diable voulait-il ranger ? Depuis quand se préoccupait-il de ménage quand il avait un fichu chapitre à finir pour la fin du mois ?

Il secoua la tête, reposa le pull et vint à son bureau sous le regard ébahi, effaré de Taehyung.

Depuis quand un artiste allait-il à l'encontre de ce qui lui était soufflé ?

« Va ranger tes vêtements », répéta-t-il, un tic nerveux faisant sursauter un sourcil.

La voix était morne, mais une pointe d'irritation y était très nettement perceptible. Kim Taehyung détestait se répéter. Jungkook se releva, se retourna et s'arrêta. Un grognement s'éleva de sa gorge.

« Ah, mais non, j'ai du boulot, je ferai le ménage un autre jour ! »

Il se rassit, Taehyung se leva.

Bien. Là, il commençait à être passablement agacé. Il se pencha vers l'oreille percée de son protégé.

« Tu devrais ranger, cela t'aiderait à travailler plus efficacement, sans parasite. »

Jungkook se fit pivoter sur sa chaise et regarda son environnement.

« C'est vrai que travailler dans des conditions pareilles, ce n'est pas l'idéal. »

Taehyung hocha la tête. Enfin.

Le brun s'activa une bonne heure à ranger et à nettoyer le tout sous une incroyable quantité de soupirs, de marmonnements plaintifs. Plusieurs fois, Taehyung dut lui indiquer quoi faire. Finalement l'appartement était enfin propre. Le châtain était fier de lui, voilà comment une bonne muse devait faire son travail. Par ailleurs, il avait été plus que clément en lui épargnant le rangement des livres. Il se le réservait pour plus tard.

Ils allaient enfin pouvoir passer aux choses sérieuses. Après tout, Taehyung était une muse, autrement dit il était là pour inspirer les artistes dans leur art, pas pour leur ménage.

Seulement, le brun n'avait pas l'air d'être de cet avis, car à peine assis à son bureau, il se mit à bâiller. Il bougea la souris de son ordinateur et se mit de la musique. Jusque-là, Taehyung n'avait rien à dire, à chacun ses rituels.

Une demi-heure plus tard, l'imbécile brun ne s'était toujours pas mis au boulot et cela commença à sérieusement agacer le châtain.

Au lieu de travailler, il était allé se faire un thé, il avait ensuite lu et répondu à ses mails et présentement, il discutait via Instagram avec Poséidon sait qui. Pas étonnant que son texte ait été de médiocre qualité s'il n'y mettait pas un peu plus du sien.

« Il est temps de te mettre au travail, Jungkook. »

Il cracha le dernier mot. L'écrivain avisa l'horloge de son téléphone et réalisa qu'il n'avait vraiment rien fait depuis une bonne heure.

« Bon, allez Kook, il est temps de t'y mettre.

— C'est le moins qu'on puisse dire, fainéant », murmura Taehyung de sa voix grondante, passablement agacé.

Jungkook bâilla et cliqua pour ouvrir son texte.

« Oh, et puis merde. Ce n'est pas la peine, je m'y mettrai demain, tout ce ménage m'a épuisé. »

Il se leva.

« Quoi ? Non, non, tu vas ramener tes jolies petites fesses ici et bosser ! »

Bien sûr, puisque personne ne peut réellement entendre une muse – à moins qu'elle le veuille –, nous serons tous d'accord pour dire que la phrase prononcée précédemment était en réalité : « Quoi ? Non, non, tu vas ramener tes petites fesses ici et bosser ».

Bien sûr.

Jungkook fit un pas en direction de l'ordinateur et s'arrêta, plus tout à fait sûr de ce qu'il voulait faire. Mince, que lui arrivait-il, aujourd'hui ? Ce n'était vraiment pas dans ses habitudes d'hésiter ainsi sur ce qu'il voulait faire ou dans quel ordre agir. À dire vrai, depuis qu'il s'était réveillé de sa sieste, il ne se sentait plus tout à fait lui-même, plus complètement maître de ses décisions.

Il n'aimait pas du tout cette sensation. Du tout.

Il grogna de nouveau et décida de revenir à sa première idée : ne pas travailler ce soir. C'était inutile. Il attrapa son portable et composa rapidement un numéro.

« Hé, Jimin, quelque chose de prévu ce soir ? »

[...]

« Super, j'arrive. »

Évidemment, en rester sur les fesses n'était pas une expression que l'on pouvait utiliser pour décrire Kim Taehyung, n'empêche qu'elle collait nettement bien à sa tête du moment.

Néanmoins, un Kim étant un Kim, il se reprit. Il avait passé peu de temps avec ce brun, mais il avait déjà remarqué que donner des ordres directs ne semblait pas le meilleur moyen « d'inspirer » son protégé.

« Sortir est une chose, mais tu ne seras pas plus avancé demain, tu ferais mieux de t'y mettre. C'est dommage d'avoir autant rangé pour ne pas en profiter. »

Encore une fois, Jungkook s'arrêta, son blouson dans la main, ses clefs et son casque de moto dans l'autre. Était-ce vraiment sérieux de sortir ? Il était en retard et tout ce qu'il ferait ce soir serait ça de moins pour demain. Et puis franchement, n'était-ce pas dommage d'avoir fait tout ce ménage pour partir maintenant ?

Jungkook ouvrit de grands yeux, un rictus satisfait commença à faire son apparition sur les lèvres de Taehyung, mais il s'arrêta lorsque le brun se mit à rire à gorge déployée.

Il se frappa le front et tout en riant prononça à voix haute :

« Comme si j'en avais quelque chose à faire de profiter du ménage ? Sortir va me faire le plus grand bien, je suis vraiment en train de péter un câble, là ! »

Et sur cette dernière phrase, il sortit en claquant la porte derrière lui, laissant sans le savoir, une muse désabusée assise sur son bureau.

Bien, pensa Taehyung en calant sa langue contre sa joue, agacé. L'imbécile semblait bien trop normal pour qu'il n'y ait pas un vice caché. C'était un réfractaire, voilà pourquoi on le lui avait confié. Il ne fallait pas être un génie pour le comprendre.

Il disparut, bien décidé à aller dire deux mots à son cher cousin. Peut-être même à son père.



L'œil mauvais et un rictus menaçant, Taehyung fit son apparition dans les hautes sphères de la création, sur le seuil de la demeure familiale. Auréolé d'une aura exhaustivement meurtrière, le fils prodigue entra dans le bureau de son père où il eut la joie de trouver son cousin.

Les deux hommes s'interrompirent et fixèrent leur attention sur le jeune homme.

« Un réfractaire », lâcha-t-il d'une voix légèrement chantante et dangereusement calme.

Rien ne passa dans les yeux noirs qui lui faisaient face et un long silence suivit cette déclaration.

« Je ne pensais pas que tu le découvrirais aussi tôt, Taehyung », dit Seokjin en invitant son cousin à prendre place dans le dernier fauteuil libre.

D'un rapide mouvement de l'œil que seul un Kim était à même de percevoir, il déclina l'invitation.

« Il a fallu au moins trois semaines à Namjoon pour en arriver à cette conclusion. Au départ, il pensait juste qu'il s'y prenait mal. Tu ne dois particulièrement pas être en phase avec lui.

— Mh.

— As-tu réussi à lui faire écrire quelque chose ?

— Rien. »

Son père haussa les sourcils.

« Je l'ai fait ranger. »

Un mince gloussement s'éleva de Seokjin.

« Laisse-moi deviner, cousin : environnement prompt à la création. »

Taehyung lui lança un regard meurtrier.

Toujours mieux que de l'indifférence, pensa son cousin.

« Et ensuite ? reprit-il.

— Rien, impossible de le mettre au travail. Il a refusé de m'écouter, mais tu ne dois pas en être surpris, n'est-ce pas Jin ?

— Taehyung. »

Les deux cousins portèrent leur attention sur leur aîné.

« En effet, ce jeune homme est un réfractaire, mais... »

Il leva la main pour faire taire son fils qui allait rétorquer quelque chose.

« Comme toujours, il suffit de lui trouver la bonne personne.

— Visiblement, ce n'est pas moi et encore moins Namjoon.

— Indéniablement, répondit le chef de famille.

— Ce n'est donc pas un remplacement. Notre cousin ne reviendra pas le prendre en charge, constata Taehyung.

— Non, en effet », répondit son paternel.

Taehyung jeta un regard à son cousin qui put très nettement y lire le terme « menteur » ou peut-être était-ce plutôt « traître », Seokjin n'était pas sûr.

« Nous cherchons actuellement le meilleur profil pour prendre ta suite, si cela ne fonctionne pas.

— Pourquoi me l'avoir donné, alors ? Vous auriez pu attendre d'avoir trouvé la bonne muse. Vous et moi savons qu'il n'est pas bon pour un artiste d'être suivi par trop de personnes différentes.

— Certes, mais nous avions un profil idéal pour Namjoon et il n'était pas possible d'attendre.

— Oh, je vois. Autant le laisser à ce cher Taehyung alors, entre les débiles et les attardés mentaux, un réfractaire sera parfait pour son tableau de chasse, c'est ce que vous avez pensé, Père ?

— Taehyung, suffit. »

Le fils et le père s'affrontèrent, regard noir contre regard noir, aucun ne voulant céder.

« Taehyung », dit doucement Seokjin qui s'était levé pour poser sa main sur le bras de son cousin.

Celui-ci ne détourna pas le regard, mais le brun savait qu'il avait son attention.

« Ce n'est pas pour te punir, mais bien parce que tu es une des muses les plus douées, si ce n'est pas la plus douée, que nous te l'avons confié. »

Taehyung porta enfin son attention sur lui, un rictus qu'on ne pouvait qualifier autrement qu'ironique sur les lèvres.

« Mais bien sûr.

— Je sais que tu ne veux pas le reconnaître cousin, mais tu es un prodige, un gén...

— J'en ai assez entendu. »

Taehyung serra les poings et contracta la mâchoire, il en avait assez de tout cela, ces missions ridicules, cette vie vide de sens.

« Puisque je n'ai pas le choix, j'irai au bout de cette mission, mais ce sera la dernière.

— Que veux-tu dire, fils ? demanda son père, subitement inquiet.

— Vous avez très bien compris.

— Taehyung ! scanda son père.

— Tu ne peux pas faire ça... ! murmura Seokjin, alarmé.

— Je peux le faire et je vais le faire. Je rendrai ma plume une fois cette mission ridicule terminée. »

Sur ces dernières paroles, il se dégagea brusquement de la douce emprise du brun et sortit.

« Taehyung, reviens ici ! », cria son père.

Mais le jeune homme s'était déjà volatilisé dans la dimension des humains. Seokjin s'effondra au sol. Tout était de sa faute, c'était son idée. Son oncle le rejoignit et l'aida à se relever.

« Mon oncle, je suis désolé !

— Mon garçon, tu as fait ce qui t'a semblé le mieux et je t'ai encouragé.

— Mais si Taehyung rend sa plume, il va... il va... »

L'oncle clôt douloureusement les paupières et l'aîné des cousins se prit le front d'une main, il n'arrivait même pas à le prononcer. S'il rendait sa plume, son cousin adoré en mourrait au terme d'une longue agonie. Lorsqu'une muse n'inspirait plus, elle dépérissait et, en commettant cet acte, Taehyung perdrait sa faculté à communiquer avec les humains et par la même occasion, sa vie.

Mais sa mort prendrait du temps, elle serait longue et douloureuse. Il n'avait été témoin de cela qu'une fois dans sa vie et il savait qu'il ne survivrait pas s'il devait voir son Taehyung dépérir en agonisant jusqu'à s'éteindre tout en souffrant le martyre.

Il n'aurait jamais pensé qu'il irait jusque-là, il savait que son cadet n'était pas heureux, il savait qu'il fallait faire quelque chose avant que la situation dégénère et que son jeune cousin en vienne à ce type de décision extrême, il n'avait certainement pas prévu que le fait d'inciter son oncle à lui confier cette mission puisse accélérer le phénomène.

Il reporta son attention sur ce dernier, il semblait très calme, mais un léger tic agitait sa paupière droite, signe de sa nervosité. Il ne voulait pas perdre son fils, non plus. Même s'il ne le montrait pas, Taehyung, Seokjin et même Namjoon étaient ses derniers trésors et il était hors de question qu'il perde l'un d'eux.

« Mon oncle, j'étais tellement sûr de moi. Je vous assure que ce garçon est l'incarnation vivante de ce portrait.

— Je sais Seokjin, je sais. Ce portrait... »

Taehyung avait été obsédé par cette peinture. C'était bien une des rares choses qui était parvenue à provoquer chez lui autre émotion que de la colère ou de l'indifférence. La muse ignorait sans doute qu'ils étaient au courant de son attachement pour ce portrait et ce visage, mais ils savaient. Et ils n'avaient pu que remarquer que son détachement s'était aggravé lorsque l'œuvre avait été détruite.

Depuis, Seokjin avait cherché un moyen d'intéresser de nouveau son cousin à quelque chose. Il avait même pensé inspirer un de ses artistes à recréer la peinture ou en faire une sculpture, mais l'idée n'étant pas de lui, cela lui était impossible.

Il serra les poings de rage, il avait été tellement sûr de lui.

C'était Namjoon qui avait parlé de son cas à Seokjin, les deux cousins étaient très proches et échangeaient souvent sur leurs protégés respectifs. Le premier enviait le second pour avoir trouvé Anthéa et pouvoir vivre une telle relation quand lui désespérait de pouvoir faire rentrer la moindre idée dans cette foutue caboche brune.

Seokjin s'était d'abord moqué de son cousin, mais finalement, lorsque celui-ci avait enfin évoqué le terme de « réfractaire », il l'avait accompagné pour voir. Et quelle n'avait pas été sa surprise en voyant Jeon Jungkook. Aussitôt le plan avait germé dans son cerveau. Pour lui cet écrivain ne pouvait être que l'Anthéa de Taehyung.

Grande Héra, son cousin avait lui-même inventé ses traits. Il avait donc prévu de résoudre deux problèmes ; celui de Namjoon qui ne pouvait décemment pas rester avec un protégé réfractaire et celui de Taehyung. Le plan avait paru tout aussi logique à son oncle. Aussi avait-il donné son accord à la condition que Seokjin annonce lui-même la « bonne nouvelle » à son fils.

« Qu'allons-nous faire ? demanda son neveu.

— Trouver une solution pour convaincre mon fils. »

Seokjin ne put retenir le petit souffle méprisant qui s'échappa de sa bouche.

« Et puis, en un jour, il a fait mieux que votre cousin, il a réussi à lui faire faire le ménage.

— Visiblement, cela a déjà été assez difficile.

— Oui, mais il semble que ce Jeon Jungkook parvienne à entendre ton cousin même s'il ne veut pas l'écouter. Il tient peut-être à Taehyung de trouver la meilleure manière de communiquer avec son protégé.

— Je vous trouve bien calme, mon oncle.

— Mon garçon, que ce soit avec ou sans son accord, je ne laisserai jamais Taehyung rendre sa plume, dus-je pour cela l'enfermer au contact d'humains s'il le faut. Pas tant que je serais vivant.

— Moi non plus...

— Bien, en attendant, je vais quand même devoir lui trouver un remplaçant au cas où.

— Ne vous pressez pas.

— Je sais, mais tu sais aussi bien que moi qu'il n'est pas bon pour Taehyung de rester trop longtemps au contact d'un réfractaire. C'est une autre sorte d'agonie. J'ai espoir que mon fils réussira là où votre cousin a échoué. Cependant, je n'exclus pas que ces premières réussites soient uniquement dues au changement de muse. Il y a donc un risque que, par la suite, ce Jungkook développe une résistance envers Taehyung. »

Seokjin baissa la tête.

« Je sais. »

Et Taehyung aussi, pensa-t-il. Il sait que nous allons devoir le remplacer.

Cela aurait pourtant été si simple de ne jamais trouver quelqu'un pour prendre la suite et obliger son cousin à rester lié à Taehyung pendant tout le temps de sa vie, aussi courte qu'une vie humaine puisse paraître aux yeux d'une muse...



Le lendemain matin, Taehyung fut de nouveau au chevet de son protégé qui dormait comme un bienheureux. Il était rentré affreusement tard, au grand déplaisir du châtain qui, afin d'éviter une rencontre inopinée avec son père ou son cousin, avait préféré rester dans la dimension des humains.

Aussi avait-il passé une partie de la nuit à attendre que son protégé veuille bien ramener ses fesses chez lui. Il avait rapidement fait une croix sur le fait de le faire travailler, même si la nuit était souvent propice à l'inspiration : moins de bruit alentour pour parasiter le message des muses.

Mais tout ce qu'il avait pu faire, c'était regarder le brun se déshabiller et s'effondrer dans sa couette pour s'endormir comme une masse.

La muse avait soupiré et s'était assise à la tête du lit, la bouille de son protégé tout contre ses jambes. Sans même y penser, il avait passé sa main dans la soyeuse chevelure brune réfléchissant encore et toujours à une idée pour mieux communiquer avec Jungkook.

Au matin, il n'avait guère avancé dans ses réflexions.

L'idée qui avait germé dans son esprit, il ne la regrettait pas, bien au contraire, cela faisait un moment qu'il y pensait. Bien sûr, il l'avait jusque-là écartée, car il n'était pas homme à abandonner. Seulement... Il se trouvait face à un réfractaire. Et c'était la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase. Alors aux grands maux, les grands remèdes...

Il n'en pouvait plus de toutes ces missions, toutes plus insanes les unes que les autres.

Et voilà qu'il héritait... du sublime visage qu'il avait créé et qui l'avait tant séduit, certes, mais un réfractaire, tout de même.

Son regard se posa sur la frimousse d'ange dont le souffle léger et régulier venait caresser sa jambe. Comment un être avec un visage pareil pouvait-il être aussi...

Taehyung soupira, peut-être l'avait-il jugé un peu vite, à dire vrai, il n'avait passé que quelques heures en la compagnie de Jungkook. Quoiqu'il en soit, il ferait mieux d'éviter de le prendre en grippe dès le départ, il était coincé avec lui pour un moment.

Il savait que son père et Seokjin attendraient le plus longtemps possible pour le remplacer, mais le laisser sur cette mission n'était pas non plus une solution viable.

Pour autant, il allait essayer de faire rentrer quelque chose dans cette caboche. Après tout, aussi réfractaire que lui eût paru Jungkook hier, il avait quand même réussi à lui faire faire un brin de ménage. D'après ce qu'il avait cru comprendre, Namjoon n'avait même pas été capable de se faire entendre. Il soupira. Tout ceci était fatigant, il en avait marre de cette vie, de ce devoir, de ce nom que tout le monde s'évertuait à lui coller à la peau.

Pourquoi étaient-ils aussi insensibles à son cas, sous prétexte qu'il était l'un des plus doués, pour lui refiler que des missions qui ne le faisaient guère vibrer ? Après s'étonnaient-ils qu'il veuille rendre sa plume ?

Il fut coupé dans ses réflexions par un bâillement. Jungkook se réveillait enfin.

Comme la veille, il le regarda se lever, ses yeux s'égarant sur la peau délicieusement opaline, les tatouages sur le bras et la musculature saillante. À simple titre indicatif, bien évidemment.

Le brun se dirigea directement dans sa salle de bain et Taehyung entendit le son de l'eau. Il s'écoula encore une bonne heure, le temps qu'il s'habille, déjeune et enfin, il daigna allumer son ordinateur.

Dans un premier temps, il se contenta de recopier les corrections qu'il avait faites à la main. Puis, il attaqua la relecture. Et c'est là que les choses se compliquèrent. Taehyung commença à souffler des idées à Jungkook, celui-ci les entendait, il lui arrivait même de les écrire, mais il finissait par toutes les effacer.

« Mais non, je t'ai dit qu'il devait commencer par le bar, soupira Taehyung.

— Ah oui, il va d'abord aller au bar. »

Jungkook hocha positivement la tête, mais reprit à voix haute.

« Mais non, ça fout le reste en l'air si je fais ça.

— Bien sûr que non.

— Allez, Kook, réfléchis. OK, je commence par la salle de sport.

— Mais non ! », grogna Taehyung en frappant légèrement le bois sous sa main.

Il s'assit un peu plus confortablement sur le bureau et approcha sa bouche de l'oreille de Jungkook, s'oubliant un instant dans l'odeur suave du jeune homme. Il clôt les paupières pour la savourer.

À réfléchir à ce qu'il allait lui dire, bien sûr.

« Si tu commences par le bar, ce sera plus logique qu'il ne reconnaisse pas Lilian, alors que dans la salle de sport, il va forcément tomber sur elle puisqu'elle y passe son temps. Commence donc par le bar. »

Les mains de Jungkook s'arrêtèrent au-dessus du clavier alors qu'il allait taper son premier mot.

Peut-être devrait-il quand même écrire la scène du bar avant, il y aurait toujours moyen de s'arranger par la suite et puis, oui, il avait fait de Lilian une fanatique de musculation, ce serait étonnant que son personnage ne la croise pas. D'un autre côté, la salle de sport était grande, il était plus que possible qu'il la rate et puis...

« Le bar, le bar, le bar », murmura Taehyung, toujours collé contre son oreille.

Il se sentait parfaitement stupide à cet instant, quasiment collé à son protégé à lui murmurer son idée comme un mantra idiot et ridicule. Jungkook grogna faiblement et se gratta la tête comme s'il voulait s'arracher les cheveux.

« Ce n'est pas possible ! OK, Kook, calme-toi. »

Il ouvrit son tiroir et en sortit une mini maraca. Taehyung regarda cela d'un œil inquiet. Jungkook se mit à l'agiter de façon quasi maniaque créant un rythme hypnotique qui le mettait en transe et, généralement, l'aidait à travailler. Il ferma les yeux un moment et se remit au travail. Cette fois-ci, ça coulait mieux, pendant une bonne trentaine de minutes, il parvint à écrire sans soucis. Il savait exactement ce qu'il voulait mettre dans cette scène.

Ce qu'il ignorait, c'est qu'il y parvenait pour la simple et bonne raison que, pendant les cinq premières minutes, Taehyung était resté à le regarder comme s'il avait un fou devant lui. Qui pouvait se concentrer avec un son aussi énervant dans les oreilles ?

Les dix minutes suivantes, il avait essayé d'occulter l'instrument. Au final, il avait fui dans la chambre où il s'était assis sur le lit, jambes en tailleur pour inspirer puis expirer et faire le vide.

Quand il revint dans le salon, Jungkook agitait toujours l'instrument, il semblait beaucoup plus calme. Au fait, pourquoi s'acharnait-il à essayer de faire passer une idée à un réfractaire ? Il leva les yeux au ciel et reprit sa place sur le bureau.

La torture continua pendant quelques heures supplémentaires durant lesquelles Taehyung essaya du mieux qu'il put de faire son travail. Il passa la soirée avec Jungkook, alors qu'il ne restait jamais autant de temps avec un de ses protégés. Généralement, ceux-ci étaient si dérangés qu'il préférait les éviter le plus possible et n'apparaissait que lorsqu'ils se mettaient au travail.

Cependant, il souhaitait éviter de retourner dans la dimension des muses pour le moment. Évidemment, si son cousin ou son père voulait le trouver, il leur serait facile de le faire en pointant leur nez ici.

Jungkook s'était – encore – commandé un plat de poulet frit et de nouilles, non sans avoir longuement hésité entre cela et un repas équilibré, sain, bon pour la santé et le travail. Mais encore une fois, Taehyung avait lamentablement échoué.

Il s'était donc assis sur le canapé, regardant le brun bouger, remuer, zapper. Grand Hadès, ce type ne s'arrêtait-il donc jamais ?

Non.

Jungkook traîna une partie de la soirée devant la télé, ne s'arrêtant réellement sur aucun film. Taehyung finit par faire abstraction des mouvements à côté de lui, se perdant de nouveau dans ses pensées. Il s'oublia un long moment, occultant que l'agitation à côté de lui avait cessé et que la chaîne était la même depuis un moment.

Il finit par se tourner et découvrir le jeune brun endormi en boule. Taehyung se perdit dans la contemplation de ses traits. Il était si différent lorsqu'il dormait, lorsque ses lèvres s'entrouvraient légèrement pour laisser passer son souffle frais et doux. Il se leva et s'accroupit devant lui et, une fois de plus, sa main vint se perdre dans les mèches brunes barrant son visage d'ange qu'il écarta délicatement.

« Jungkook, tu devrais aller te coucher », murmura la muse.

Le brun sourit doucement frottant sa joue contre la main chaude du châtain qui esquissa un magnifique sourire sans même qu'il s'en aperçoive.

« Jungkook », murmura-t-il de nouveau se penchant un peu plus jusqu'à se retrouver à quelques centimètres du sublime visage.

L'autre ne réagit pas, mais la jeune muse, une fois de plus, contemplait le jeune homme, toujours aussi fascinée de voir le portrait qu'elle avait longtemps contemplé et aimé respirer devant lui, de voir les paupières bouger légèrement, mues par ses rêves, les mèches de cheveux s'acharner à revenir caresser le front et dissimuler les paupières, les joues légèrement roses, les lèvres légèrement entrouvertes, la mâchoire carrée qui ne cessait de l'émerveiller.

Presque inconsciemment, Taehyung caressa l'angle saillant de sa mâchoire. Il avait pris le soin de souffler ce trait à la peintre. Chaque trait qu'il avait imaginé, inventé, créé était sous ses yeux, vivant.

Ses doigts se baladaient maintenant sur les joues caressant la peau laiteuse et soyeuse.

« Jungkook, murmura-t-il de nouveau, va te coucher. »

Le brun marmonna, Taehyung s'approcha davantage pour l'entendre, tâchant de lire sur ses lèvres. Il focalisa son attention sur elles, ne parvenant pas à comprendre ce qu'elles articulaient. Elles bougeaient, pleines et roses. Taehyung ne voyait plus qu'elles, leur rebondi, la petite dépression en leur centre, le doigt de l'ange, la forme charnue de la lèvre inférieure dont le coin était orné de cet anneau argenté dont Taehyung ne cessait de loucher dessus.

Il s'abaissa un peu plus, sa propre bouche frôlant celle de l'endormi. Il ferma les yeux, se concentrant sur le souffle de Jungkook qui se mêlait au sien. Soudain, la muse bondit du canapé, interdite, regardant à droite et à gauche comme inquiète d'être prise sur le fait.

« Ça suffit ! Lève-toi, feignasse et va te coucher ! », cria-t-il pour être sûr de se faire bien entendre.

Jungkook sursauta, regardant à son tour de chaque côté, perdu. Il n'arrivait pas à se souvenir de ce qu'il venait de rêver, mais il sut qu'il s'y sentait bien et qu'il aurait voulu ne pas se réveiller. Il se traîna jusqu'à la salle de bain, se brossa les dents, fit un brin de toilette et s'écroula dans son lit.

Taehyung resta dans le salon toute la nuit, refusant de mettre un pied dans la chambre.

Le lendemain ressembla à s'y méprendre à la veille ; les nerfs de la pauvre muse étaient de nouveau mis à rude épreuve. Elle essayait de faire preuve de tout son talent et de toute sa patience pour effectuer au mieux sa mission. Et ce n'était vraiment, mais vraiment pas peu dire.

En effet, la technique ayant bien fonctionné la veille, Jungkook avait gardé son instrument de torture à la main et l'agitait régulièrement lorsqu'il avait un doute. Par doute, comprenez les idées que lui soufflait Taehyung qui semblaient souvent en totale contradiction avec ce que l'écrivain avait décidé de faire.

Et lorsque le rythme hypnotique régnait dans la pièce, le jeune auteur parvenait enfin à faire le vide et à se concentrer. Taehyung ne comprenait pas comment son cousin Namjoon n'avait pas abandonné avant si Jungkook lui avait fait subir la même torture. Ou peut-être que cette délicate attention lui avait été exclusivement réservée, ce qui était probable puisque Namjoon ne parvenait pas à se faire entendre du brun.

Ou peut-être était-ce la cerise sur le gâteau, le petit bonus dont Seokjin avait oublié de lui parler. Son satané cousin en aurait bien été capable. Après tout il lui avait bien menti concernant cette mission. Il ne comprenait d'ailleurs toujours pas très bien pourquoi, Seokjin savait bien qu'il finirait par comprendre que Jungkook était un réfractaire, c'était un vrai secret de polichinelle.

Alors, quelles avaient été les motivations de son cousin concernant cette mission ?

Une fois de plus, le fil de sa pensée fut interrompu par le bruit de maracas. Il s'éclipsa.

« Lâche cette fichue maraca, par Hestia ! », hurla Taehyung.

Il n'en pouvait plus, ce bruit répétitif allait le rendre fou, ce tchitt-tchitt régulier comme le sifflement d'un serpent, il commençait à l'entendre même lorsque le brun ne l'agitait pas. Cela faisait quatre jours, quatre longs, très longs, épouvantablement longs jours qu'il subissait régulièrement, très régulièrement, épouvantablement régulièrement cette torture.

Il essayait de faire passer ses idées comme il le pouvait, malgré le parasitage intensif que son protégé lui faisait subir. Mais Taehyung était têtu, il ne comptait pas abandonner quand bien même c'était sa dernière mission. Surtout parce que c'était sa dernière mission.

Il s'arrêta un instant sur cette pensée.

Mais la maraca retentit de nouveau, en même temps que Jungkook tournait sur son siège. Il regarda l'instrument de musique. Le châtain avait hésité à le jeter de lui-même, vraiment c'était très, très tentant, horriblement tentant, affreusement tentant. En réalité, il allait le faire, ce soir dès que Jungkook serait couché il le prendrait et le jetterait.

Oui.

Non, finalement, il allait le faire maintenant, tant pis si le brun se demandait comment un objet pouvait disparaître tout à coup par enchantement. Mais, alors qu'il allait la saisir, Jungkook la posa. Taehyung soupira et ferma les yeux pour savourer le silence, son ouïe jouissant presque.



Jungkook se grattait la tête à la recherche d'une idée, n'importe laquelle, en dehors de celles complètement idiotes qui lui passaient de temps en temps par l'esprit. C'était une vraie torture ; être là devant cette page, écrivant un mot, l'effaçant.

Bon Dieu, il ne pouvait pas être aussi mauvais que ce qu'il avait écrit ces derniers temps ? Et puis, il n'arrivait plus à mettre la main sur sa maraca, cela faisait deux jours et depuis, il était de nouveau sujet à ces drôles d'hésitations.

Ah, il n'arriverait jamais au bout de son fichu chapitre et ce n'est pas comme s'il avait la vie devant lui ! Non, non, il avait environ quinze jours et.... Il soupira. Encore combien de pages à écrire ?

Le sortant momentanément de ses dramatiques réflexions, son interphone sonna et les fit sursauter, lui et sa muse qui boudait ?... Non, avait une moue... une expression faciale qui aurait pu éventuellement, voire très vaguement passer pour une bouderie. C'est cela, oui.

Jungkook se leva joyeusement, tout content d'avoir une raison, même temporaire, de s'éloigner de son ordinateur.

« Ouais ?

— Jungkook ?

— Qui d'autre ? répondit celui-ci en riant ayant déjà reconnu la voix grave et traînante de son interlocuteur.

— Qu'est-ce que j'en sais, moi ? Tu m'ouvres ? »

Un buzz plus aigu retentit et Jungkook raccrocha en entendant le « c'est bon ». Taehyung soupira. Il ne manquait plus que cela, une visite et regardez-le-moi, cet imbécile de brun, tout content d'avoir une bonne raison pour ne plus rien écrire.

Le bruit typique d'une porte qui s'ouvrait et qui se refermait retentit et la muse se tendit pour apercevoir le nouveau venu. Celui-ci fit son arrivée d'un pas lent et mesuré, les mains dans les poches. Jungkook vint l'accueillir d'une brève accolade et partit directement dans la cuisine tandis que le jeune homme s'asseyait directement sur le canapé, les jambes sur la table basse.

Un habitué des lieux, remarqua la jeune muse.

Tandis que son protégé s'activait dans la cuisine, il s'approcha de plus près. Le jeune homme bâilla.

Encore un courageux, pensa Taehyung. Pourtant, il pouvait déceler derrière cet air las, une intelligence tout à fait hors-norme. Ce type devait être un vrai génie, il ne parvenait pas à le cacher complètement quand bien même y travaillait-il. Cela brillait dans ses prunelles.

Le brun revint dans la pièce avec un verre d'alcool qu'il posa devant l'invité et une tasse de café pour lui. Les deux garçons s'installèrent tranquillement, Jungkook bien ancré de son côté du canapé, assis en tailleur.

« Alors Yoongi, quoi de neuf ?

— Pas grand-chose.

— Mmmh. »

Ils se turent un moment, chacun buvant une gorgée de liquide. Yoongi posa sa tête en arrière sur le dessus du canapé et ferma les yeux. Ils ne semblaient nullement gênés par le silence ambiant, semblant être habitués à rester tous les deux à ne rien dire ni rien faire.

De son côté, Taehyung était plutôt troublé, pour la première fois depuis qu'il avait commencé à suivre Jungkook, celui-ci était calme en dehors de ses heures de sommeil : pas de tic nerveux, pas de mouvements intempestifs et – oh, Déméter, oh bonheur – pas de maraca.

De toute manière, Jungkook ne pouvait plus mettre la main sur ces créations de Hadès. Un rictus très satisfait étira ses lèvres à cette douce pensée.

Il regarda de plus près ce Yoongi. Comment faisait-il ? Qui était-il pour le brun ? Un long soupir retentit et Jungkook s'abaissa légèrement, les coudes sur ses genoux et les deux mains sur sa tête. Yoongi tourna son visage vers lui et vint passer sa main dans les mèches brunes.

La tendresse du geste était vraiment surprenante pour Taehyung. Tout autant que cette étrange intimité qui se dégageait du couple. Pourtant, ils ne s'étaient pas embrassés depuis l'arrivée du châtain, alors qu'étaient-ils l'un pour l'autre ?

« À ce point-là ?

— Oui... Je n'arrive à rien. Tout ce que j'écris est mauvais. »

Un doux sourire illumina les traits de Yoongi, celle-là, il la connaissait, ce n'était pas la première fois.

« Je suis sûr que ce n'est pas aussi terrible que ça.

— Parce que tu n'as pas lu, soupira Taehyung en levant les yeux au ciel, même si personne ne l'entendit.

— Si, c'est mauvais, très mauvais. Je... c'est comme si j'avais perdu l'inspiration, dit Jungkook en relevant doucement la tête, ses grands yeux brillants fixant son ami au travers d'un rideau de cheveux noirs d'encre.

« Toi, ne plus avoir d'idées ?

— Ce n'est pas ça le problème. J'en ai, mais elles s'embrouillent, elles sont contradictoires. »

Il soupira de nouveau et reposa sa tête sur ses mains. Yoongi continua ses caresses.

« C'est parce que tu refuses de m'écouter, idiot », grogna Taehyung en s'asseyant sur le bras du canapé à côté de Jungkook, le couvant légèrement.

Il avait beau être remonté, cela l'ennuyait de voir son protégé dans cet état. Cette situation n'était bonne ni pour l'un ni pour l'autre.

Finalement, il ne faisait que l'embrouiller en lui délivrant ses conseils. Pour autant, il ne pouvait pas se taire et le regarder. Pour être franc, une partie de lui, qui n'avait absolument pas voix au chapitre n'avait rien contre l'idée de passer des heures à détailler ses traits si parfaits, à s'abreuver de ce visage divin, comme auparavant sur la toile. Il était même complètement pour, mais comme dit précédemment, Taehyung ne comptait ni écouter cette idée ni même reconnaître son existence.

« Au moins, ça veut dire que tu es toujours inspiré, reprit Yoongi.

— Mouais. »

Une sonnerie retentit et le châtain attrapa son portable tout en continuant à jouer dans les douces mèches brunes.

« C'est Hoba, dit-il en lisant le message qu'il venait de recevoir. Nous avons rendez-vous pour un ciné.

— Hum.

— Tu veux venir avec nous ? », demanda Yoongi d'une voix douce en se tournant vers Jungkook.

Taehyung allait rétorquer un « non, il a du travail à faire » lorsque son protégé le coupa dans son élan.

« Non, j'ai du boulot, ce ne serait pas sérieux », soupira-t-il.

Eh bien ! Pour une fois que nous sommes d'accord, pensa Taehyung.

Yoongi se leva, mais reposa son regard sur la boule brune sur le canapé. Il n'aimait pas voir Jungkook ainsi, mais il savait que ça ne durerait pas. Il remontait toujours la pente. Il s'agenouilla à côté de son ami qui tourna la tête vers lui.

« Kook, fais confiance à ta muse.

— Ma muse ?

— Oui.

— Qu'est-ce que tu veux dire ? »

Yoongi lui adressa un regard tendre.

« Ma mère dit que nous avons tous un ange gardien qui veille sur nous, mais que vous, les artistes, vous avez une muse, un être supérieur qui vous inspire. »

Jungkook se redressa.

« Ouais, ben la mienne doit être syndicaliste et en train d'organiser un piquet de grève avec ses petits camarades. »

Yoongi éclata de rire. Par contre, Taehyung ne riait pas, non, que nenni, bien au contraire. Toute la compassion qu'il avait éprouvée deux minutes plus tôt pour son protégé était en train de se faire la malle à vitesse grand V.

« Sérieux, Yoon ! Je préfère me dire ça sinon ça veut dire que j'ai hérité d'une muse vraiment mauvaise.

— Quoi ? Mais quoi ? Comment oses-tu dire ça ! Espèce de petit... »

Un frisson parcourut Yoongi et Jungkook, un courant glacial les frappant l'un comme l'autre. Bien sûr, ils ignoraient que ce qu'ils ressentaient était l'aura de colère qui entourait Taehyung qui fulminait et faisait preuve de tout son talent et de son indéniable génie dans l'invention de nouvelles insultes pour qualifier le brun.

Yoongi se leva et déposa un baiser sur le front de son ami.

« Fais gaffe, tu es en train de virer ta cuti, Yoon. »

Un sourire fit son apparition sur les lèvres de ce dernier.

« Ça ne risque pas. Mais, si jamais, je te ferai signe. »

Jungkook éclata de rire. À dire vrai, si Yoongi avait été gay, il ne faisait aucun doute que les garçons auraient été en couple. Étonnement, ils n'étaient pas le meilleur ami l'un de l'autre, Yoongi avait Hoseok et Jungkook avait Jimin, mais c'est sans doute ce qui faisait la force de leur relation.

Lorsqu'il était en présence Jimin, Jungkook était un vrai phénomène de foire, sautant, courant, criant, le petit blond collé à lui et chacun entraînant l'autre dans les pires situations. Avec ce duo, il n'y avait pas un pour rattraper l'autre.

Mais avec Yoongi, Jungkook était calme et très posé. C'était grâce à lui qu'il avait commencé à écrire, le châtain lui ayant conseillé de mettre par écrit ses pensées sombres. Il était un des rares pour lesquels Jungkook s'était ouvert, montrant une autre face que le grand sourire qui lui avait longtemps servi de masque. Depuis, ses amis avaient découvert un autre visage du brun et eux aussi avaient grandi.

Pourtant, Jungkook ne se sentait lui-même qu'en présence de ce génie paresseux. L'inverse était tout aussi vrai, l'écrivain parvenait à faire ressortir le meilleur de son ami. Et plus de cela, ils en avaient tous les deux conscience.

« Allez, j'y vais.

— Ouais et moi je vais bosser et tâcher de ne pas trop pondre d'horreurs. »

Yoongi sortit et Jungkook soupira.

« Allez, on s'y remet, Kook. »

Il s'assit à son bureau et relut le paragraphe précédent.

Taehyung tournait en rond dans l'appartement, claquant rageusement ses mocassins contre le parquet en marmonnant mille et une façons de tuer ce... ce....

Raah !

Il expira calmement, s'énerver ne menait à rien, il aurait beau hurler, crier, rien ne changerait et Jungkook ne l'écouterait toujours pas. De plus, ce n'était vraiment pas son comportement habituel, car d'ordinaire, il était calme, très calme, même. Comment faisait cet imbécile d'ange magnifique pour parvenir à le mettre dans des états pareils ?

Bien sûr, il lui arrivait de s'énerver, mais il était du type colère rentrée, colère interne qui ronge, qui grossit et s'insinue dans toutes les fibres du corps. Mais lorsqu'il était avec cet idiot, elle ressortait et explosait contre son gré, comme mue d'une volonté propre.

Il soupira et finit par retourner s'asseoir sur le bureau et fixa son imbécile de protégé.

Celui-ci se mordillait les lèvres tout en se relisant et Taehyung trouvait cela absolument craquant. Mais bien sûr, il n'allait certainement pas admettre qu'il le pensait. Cependant et malgré tout le contrôle qu'il avait sur sa personne, son esprit, lui, ne lui obéissait pas du tout.

Il était donc assailli par des images où le brun mordillerait ses lèvres pour une tout autre raison : flashs rapides de peaux nues, de gémissements contenus, de mains se caressant, de jambes entremêlées, de lèvres passionnément fusionnées.

Il ferma les yeux un instant pour chasser ses pensées, mais le soupir de découragement que poussa Jungkook se calquait parfaitement sur une image du brun en train de soupirer lascivement de plaisir, eut raison de Taehyung. Il sentit son sexe se gonfler légèrement. Il expira doucement pour se calmer et évacuer ses... désirs ?

Dix petites minutes suffirent pour qu'il les ait enterrés sous une bonne couche d'énervement et d'injures.



Taehyung désespérait. Il avait tout essayé, les ordres, les conseils, il avait tenté de lui parler pendant son sommeil, tout y était passé. Il était même allé repêcher des livres à ce sujet, mais rien n'y faisait ! Oh oui, Jungkook l'entendait, il l'entendait même très bien ! Seulement, il refusait de suivre une seule de ses idées !

Et bien sûr, car cela aurait été trop simple, il ne prenait pas non plus l'inverse, non, il partait ailleurs, à l'extrême opposé de l'opinion de Taehyung : généralement, n'importe où.

Deux semaines complètes étaient passées et l'un comme l'autre commençait à tourner en rond. Les amis de Jungkook, que Taehyung avait eu la joie de tous les voir défiler les uns après les autres. Ils s'inquiétaient parce qu'ils avaient rarement vu le brun ayant autant de mal à écrire.

Et plus sa deadline approchait, plus son humeur noircissait.

Taehyung était retourné dans la dimension des muses plusieurs fois, la première étant lorsque ce Jimin avait passé la soirée chez son protégé. À peine vingt minutes avaient suffi pour que Taehyung s'enfuie à toutes jambes.

La raison ? Elle était bien simple ; il avait eu l'impression d'avoir deux Jungkook, c'était définitivement trop pour lui. Par contre, il devait reconnaître que dès que Yoongi était là, son protégé était beaucoup plus agréable. Il avait même réussi à lui faire passer une idée.

Il avait failli crier au miracle et s'agenouiller pour remercier Aphrodite. Sauf qu'un Kim étant un Kim, jamais il ne s'abaisserait à ce genre de prosternation.

Seulement, le petit génie ne s'était montré que trois fois sur ces deux semaines, un peu court pour que Jungkook parvienne au terme de son projet.

Depuis, ils étaient retombés dans leur routine et Taehyung ne s'était sans doute jamais autant énervé de sa longue vie. Il n'en pouvait plus du brun, il ne le supportait plus, ni ses jérémiades ni ses plaintes ni... tout. Rien.

Il avait même décidé d'aller en parler à son père, lui expliquant froidement la situation. Celui-ci l'avait attentivement écouté et lui avait annoncé qu'il n'avait pas trouvé de profils intéressants, pour le moment. En attendant, puisque Taehyung avait signé le contrat le reliant à Jungkook et que son père n'accepterait pas de signer un ordre de remplacement ce qu'il avait dû faire pour Namjoon, il n'avait pas le choix.

Taehyung n'avait rien dit, il avait serré les dents et les poings et l'avait intérieurement maudit. Il avait disparu de la demeure familiale, bien décidé à ne plus y remettre les pieds pour un long, très long moment.

Il était revenu chez Jungkook encore plus énervé. Il savait que son père ne voulait pas le voir rendre sa plume, il savait que ni lui ni Seokjin ne le laisseraient facilement sortir de cette mission, qu'ils n'accepteraient jamais sa décision. Ce n'était donc pas réellement une surprise. Mais cela ne les regardait pas. Et le forcer dans cette situation pitoyable où son talent était gâché par cet idiot, incapable d'écouter les paroles censées de sa muse, n'était pas une solution.

Cela n'avait aucun sens et les mettait lui et Jungkook sur les nerfs.

Depuis son arrivée, le brun dormait mal, remuait, s'agitait pendant son sommeil. Les seuls moments où il dormait calmement étaient lorsque Taehyung lui caressait les cheveux. Seulement, ces derniers jours, il était lui-même tellement agacé qu'il ne trouvait plus de réconfort à le faire et préférait ne pas rester en présence du brun lorsque cela n'était pas nécessaire.

Même l'étrange attraction qu'il avait ressentie pour son protégé ne semblait plus fonctionner tant il n'en pouvait plus.

Il laissait donc l'écrivain ruminer et s'agiter toute la nuit. En conséquence, Jungkook se levait tard, des cernes sous les yeux et une mine de plus en plus pitoyable.

Cette situation ne pourrait pas durer.



Une fois de plus, ils étaient tous les deux au bureau, Jungkook se rongeait les ongles devant son curseur qui clignotait désespérément et Taehyung s'était tellement passé les mains dans les cheveux que ceux-ci étaient gonflés et complètement désordonnés.

Jungkook soupira, se demandant ce qu'il lui arrivait ces derniers temps. Il repensa à ce que lui avait dit Yoongi une des dernières fois où ils s'étaient vus et sourit.

« Bon. Hé, la muse ! Si tu es là, il serait sérieusement temps que tu te mettes au boulot et que tu m'inspires, parce que là franchement, c'est pitoyable. »

Taehyung hurla un « Quoi ! » que l'autre n'entendit évidemment pas. Alors ça, c'était franchement gonflé. Cela faisait des jours qu'il s'acharnait à lui donner une multitude d'idées toutes plus brillantes les unes que les autres, mais que cet imbécile, ce crétin, ce perdant rejetait en bloc.

Pendant ce temps-là, Jungkook continuait son petit monologue qu'il trouvait amusant.

« Écoute, peut-être que tu débutes en tant que muse et je suis désolé, ma fille, mais tu vas être recalée : tu es trop mauvaise.

— Comment oses-tu petit... »

Taehyung serra les dents. C'était trop et l à, maintenant, tout de suite, il allait expliquer à cet idiot fini sa façon de penser. Dans un excès de colère, il se matérialisa sur le bureau du brun, ses yeux lançant des éclairs.

De toute façon, il n'avait rien à craindre, c'était sa dernière mission, l'imbécile l'oublierait dès qu'il aurait rendu sa plume.

« OH PUTAIN ! »

Jungkook recula dans un bond faisant rouler sa chaise qui alla violemment buter contre le mur derrière lui.

« Mais... Mais, tu es qui toi ? », hurla-t-il son visage ayant perdu une bonne partie de ses couleurs, ses yeux écarquillés.

Taehyung garda son masque impassible même si intérieurement il était plus que ravi.

Il fait moins le malin, pensa-t-il.

« Imbécile. On ne t'a jamais dit que ce n'était pas poli de montrer du doigt ? lâcha-t-il d'un ton supérieur.

— Pardon ? Comment tu m'as appelé ?

— Imbécile ?

— Mais je t'emmerde, connard ! Tu es qui pour me parler comme ça, sérieux ! »

Taehyung eut un petit rictus amusé. Regardez-moi ça : un instant, il est blanc comme un linge devant sa soudaine apparition et maintenant il est rouge de colère. Fascinant. Il était fascinant.

« Je suis Kim Taehyung, ta muse.

— Quoi ?

— Tu sais celle que tu insultes depuis tout à l'heure, celle qui devrait être en train de faire grève plutôt que de bosser. Hm ? »

Jungkook se recula. Visiblement, ce type n'était pas sain d'esprit, oui, ça devait être un fou, un malade échappé d'un asile et qui était arrivé chez lui par... enchantement ?

Non, attendez, ce n'était pas possible, ça ! Si ?

« Comment... Mais comment vous êtes arrivé là ?

— Tiens tu me vouvoies maintenant.

— OK, monsieur Kim, je suis désolé, je me suis un peu emporté, d'accord ? »

Précautionneusement, il reculait vers la table du salon et son portable. La police, le numéro de la police, est-ce qu'on fait le même sur un portable ?

« Si tu appelles la police, on te prendra simplement pour un fou. Personne ne peut me voir en dehors de toi, sauf si je le décide.

— Oui, oui. »

Pour autant le brun reculait toujours, jaugeant l'intrus.

Ils faisaient la même taille, mais le châtain était moins carré, Jungkook estima donc être plus fort que lui. Néanmoins, son visiteur magique avait l'air d'être du type nerveux et il avait appris à se méfier de ce genre de personne.

Il le quitta des yeux un instant pour attraper son portable, mais au lieu de le sentir, il toucha une main douce et chaude.

« Ah !

— C'est ça que tu veux ? lui demanda Taehyung en agitant le mobile sous le nez de son propriétaire.

— Comment... ? Mais, comment... ! »

Les grands yeux allaient et venaient de son bureau où Taehyung se tenait encore une seconde avant au châtain qui ne pouvait cacher sa joie.

« Simple téléportation.

— Hein ?

— C'est très simple, reprit le châtain, de nouveau sur le bureau de Jungkook.

— Oh putain ! »

Il hurla et s'enfuit en courant dans sa chambre dont il ferma la porte à clef. Oui, c'était un geste poltron, oui il avait l'air d'un froussard, et alors ?! C'était la première chose à laquelle il avait pensé, ça et le fait que l'autre devait être un fantôme. S'il y a bien une chose qui foutait une trouille bleue au brun, c'était les revenants et tout ce qui touchait de près ou de loin au paranormal.

Et là, franchement, ça y ressemblait beaucoup trop à son goût.

Taehyung, quant à lui, ne s'attendait vraiment pas à cette fuite spectaculaire. Il leva les yeux au ciel, malgré lui amusé par cette fuite qu'il jugeait très lâche et inutile et s'approcha de la porte.

« Sors de là, idiot.

— Non !

— Alors, c'est moi qui rentre. »

Taehyung se matérialisa dans la chambre et tapota l'épaule de Jungkook qui hurla de plus belle.

« Oh, mon Dieu, je suis en train de devenir putain de fou !

— Pauvre humain. Tu n'es pas fou, tu as simplement la chance de voir ta muse en chair et en os. »

Jungkook, bien sûr, n'en croyait pas un mot parce que les muses étaient comme les lutins et les fées : des créatures mythiques qu'on ne croise pas dans la réalité et encore moins dans son salon ou présentement dans sa chambre. Il s'éloigna donc de Taehyung tout en réfléchissant à une explication rationnelle.

Première hypothèse, il était en pleine hallucination, sans conteste due à un surmenage.

Seconde possibilité... Voyons, y avait-il une autre raison ? Il devait bien y avoir au moins une autre, il ne pouvait pas juste être fou... Une sorte de caméra cachée ?

« C'est une blague ? Mes amis vous ont payé pour me faire un gag ?

— C'est une plaisanterie ? grogna Taehyung. Il faut vraiment être le dernier des crétins pour croire à une pareille chose.

— Hé ! C'est bon, les insultes ! Je ne vous connais ni d'Ève ni d'Adam, vous débarquez chez moi de nulle part et vous vous permettez de me traiter de tous les noms ! Va falloir arrêter, maintenant !

— Pas tous, uniquement ceux en rapport avec ton manque criant d'intelligence », répondit Taehyung du tac au tac.

Jungkook serra les poings en émettant une sorte de grognement primitif. Ce type commençait sérieusement à lui taper sur le système et il avait autre chose à faire.

« Écoutez, je ne sais pas ce que vous êtes venu faire ici, mais je n'ai vraiment pas le temps. Alors si vous voulez bien partir, ça m'arrangerait maintenant.

— En aucun cas. Je suis là pour t'aider à écrire.

— Je n'ai pas besoin d'aide, alors maintenant...

— Écoute-moi, tête de pioche. D'une, tu en as besoin et de deux tu me l'as demandé.

— Ouais c'est ça. Et quand ?

— Juste avant que j'apparaisse et que tu t'enfuies ici comme une demoiselle en détresse. »

Taehyung se dématérialisa lorsque le poing du brun fit son chemin vers son visage. Il rattrapa par réflexe son protégé que la disparition soudaine de cible était sur le point de faire chuter.

« Attention, imbécile. »

Malgré l'insulte, le ton était doux et concerné et Jungkook y répondit par réflexe.

« Merci.

— Mh. »

Ils se turent, aussitôt troublés par ces soudains échanges de politesse. Ce fut à cet instant qu'ils réalisèrent que le brun était toujours dans les bras du châtain. Ils se séparèrent brusquement et se fixèrent.

« OK, reprenons calmement », dit Jungkook en s'asseyant sur son lit.

Taehyung retint à grande peine la remarque acerbe qu'il avait vraiment très très envie de dire.

« Tu prétends être ma muse, c'est bien ça ?

— Tu es sourd, idiot ou les deux ?

— Ça suffit, maintenant ! Tu crois que ton apparition soudaine est facile à appréhender, peut-être ?! »

Il marque un point, pensa Taehyung.

Il était vrai que voir débarquer chez soi un être mythique avait de quoi surprendre. Jungkook, de son côté, réfléchissait. Est-ce que le simple fait de parler à cette apparition, même envisager que ce type puisse dire la vérité, ne démontrait-il pas qu'il avait pété un câble ?

D'un autre côté, qu'il se pose la question ne prouvait-il pas le contraire ?

Quoiqu'il en soit, cette histoire de muse...

« Je n'y crois pas.

— Que je suis ta muse ?

— Ouais.

— Pourtant, c'est la vérité.

— Ça reste à prouver.

— Et comment ? Je ne suis pas un sorcier, je ne vais pas faire apparaître quelque chose par enchantement.

— Qu'est-ce que j'en sais, moi ?

— Certainement rien, vu ton manque flagrant de culture.

— Et toi, ton manque de tact est une preuve en soi que tu mens.

— Je suis ta muse, je suis là pour t'inspirer, pas te lancer des fleurs.

— Oui, eh bien, je te rassure, j'ai bien remarqué.

— Mh. »

Taehyung se leva.

« Bon, tu vas te remettre au boulot. »

Mais une fois de plus, Jungkook ne l'écoutait pas. Il se leva et tourna autour de Taehyung prêtant pour la première fois réellement attention au physique – très très avantageux à son humble avis – de la jeune muse.

En toute honnêteté, cet homme était incroyablement beau. Comme il l'avait remarqué précédemment, ils faisaient quasiment la même taille, une carrure svelte et finement musclée, le contraste de ses cheveux et de ses yeux sur sa peau tannée étaient particulièrement gracieux.

Il ressemblait plus à une gravure de mode qu'à une muse. Enfin, telle que se le représentait Jungkook.

« Je... je n'imaginais pas que les muses pouvaient avoir cette tête-là. »

L'écrivain se tenait derrière lui, aussi ne put-il pas voir son regard gourmand et appréciateur sur son postérieur. Le ton n'ayant pas reflété l'appréciation des yeux, Taehyung ne retint que la phrase, vexante en soi.

« Pardon ?

— Excuse-moi, mais si j'avais dû décrire une muse, j'aurais... Je ne sais pas, pensé à une blonde avec une forte poitrine, un peu comme la vision d'une déesse grecque. »

Taehyung se passa la langue contre la joue, agacé et renifla de mépris, puis se concentra. Dans un « pouf » sonore, il transforma son apparence en celle de Gaïana, cheftaine actuelle des muses et surtout, première blonde à forte poitrine à laquelle il avait pensé.

« Plus comme ça ? »

Jungkook lorgna l'imposante poitrine.

« Euh... Oui, comme ça... La vache, quelle paire de seins. »

Taehyung soupira. Il était sûr que l'autre pervers aussi aurait adoré qu'il lui apparaisse et se transforme en blonde à gros seins devant lui. Il devrait peut-être faire en sorte que son jeune protégé rencontre ce pervers de malheur.

Les humains étaient-ils donc tous pareils ?

« Tu vois que tu peux faire des tours de magie.

— Ce n'est pas de la magie, mais une simple transformation.

— Eh bien, de mon point de vue, c'est la même chose.

— Puisque je te dis que ça ne l'est pas.

— Tu comptes rester comme ça, dorénavant ?

— Si cela peut t'inspirer.

— Non, ça va, merci. »

Taehyung reprit son apparence normale. Là, encore, il ne vit pas le regard content de son protégé qui le trouvait bien plus inspirant sous cette forme, quand bien même ce n'était guère des idées pour son roman qui lui venaient en tête.

« Alors, dis-moi ? À quoi tu ressembles en vrai ?

— Quoi ?

— Oui, je suppose que cette apparence n'est pas réelle.

— Bien sûr que si !

— Ah bon ?

— Oui. Pourquoi... ?

— Oh, non rien ! Je pensais que c'était comme pour la blonde à forte poitrine.

— Tu peux préciser ?

— Eh bien, une sorte de fanta... »

Il s'arrêta.

Il n'était pas vraiment sur le point d'annoncer platement à l'autre qu'il avait l'air d'un fantasme sur patte, n'est-ce pas ? Parce que ce n'était vraiment pas le genre de chose qu'il avait l'habitude de faire et que...

Enfin, ça ne se fait que si on a envie de faire savoir à l'autre qu'il nous plaît. Oh, bien sûr, avoir interrompu sa phrase à ce moment-là, c'était quasiment trop tard !

Que faire, que faire ?

Tactique une : changer de sujet.

« Bref, maintenant que tu as pointé ton nez, on va peut-être pouvoir bosser. Tu vas me montrer si tu es bien ce que tu prétends être et m'inspirer. »

Il sortit de la pièce et vint récupérer sa chaise, la faisant rouler vers son bureau avant de s'y asseoir. Taehyung n'ayant pas bougé de sa place, digérait rapidement l'ensemble des informations qu'il venait de recevoir : la phrase suspendue, mais dont il pouvait sans difficulté comprendre la fin, la signification de cet arrêt, le changement de sujet, l'ordre à peine caché et la critique encore moins camouflée.

Il suivit le brun qui était déjà face à son ordinateur.

« Alors ?

— Alors quoi ?

— Donne-moi des idées. »

Taehyung leva les yeux au ciel et vint reprendre ce qui était désormais sa place sur le bureau.

L'échange de point de vue commença et avec lui, la guerre entra dans sa deuxième phase : l'attaque directe et frontale.



Les jours suivants, Taehyung apparut chaque fois que Jungkook se mettait au travail, donnant directement ses idées au jeune brun qui les accueillait généralement avec dédain. Autant dire que les relations entre le protégé et la muse avaient été plus que houleuses, l'un partant dans la chambre en claquant la porte, l'autre disparaissant dans la dimension des muses, parfois les deux en même temps.

Mais, toujours, ils revenaient au bureau et encore et toujours se mettaient au travail.

Jungkook avait exceptionnellement obtenu une semaine de rab. Son histoire était publiée dans un magazine hebdomadaire et son éditrice avait accepté d'échanger avec un autre auteur pour cette fois, mais elle avait été très claire, passé ce délai s'il ne livrait pas son chapitre, il serait licencié.

Et s'il passait plus de temps à se disputer avec Taehyung, plutôt qu'à écrire, il n'était pas près de tenir ses promesses, voilà ce qu'il pensait sans écouter un mot de ce que la jeune muse lui expliquait.

Il essaya de se concentrer sur ce qu'il devait faire, sur ce qu'il devait écrire, mais les remarques incessantes de Taehyung l'empêchaient de faire le vide. Qui aurait dit que ce bâtard froid pouvait être aussi expressif ? Toujours à faire une critique par-ci, un reproche par-là ! À croire que Jungkook était incapable d'aligner plus de deux mots qui puissent rentrer dans les critères d'excellence de Taehyung !

Il n'en pouvait plus et pour preuve, il venait d'écrire n'importe quoi, changeant d'idées en plein milieu de sa phrase.

« Concentre-toi un peu.

— Mais enfin, comment veux-tu que j'y arrive si tu parles tout le temps !

— Il faut bien que je te dise quoi faire !

— Mais je n'ai pas besoin que tu...

— Je suis ta muse, c'est mon travail.

— Eh bien, trouve un moyen de le faire autrement !

— Ah oui et comment ?

— Je n'en sais rien moi, merde, c'est toi la muse ! »

Le visage de Taehyung se ferma un peu plus, mais les mitraillettes dans ses yeux tiraient à tout va.

« Alors, c'est ça, vous les muses, vous vous contentez de poser vos jolies petites fesses dans un coin et vous passez votre journée à dire ce qu'il faut faire pendant que nous on s'échine !

— Non, mais j'hallucine... Tu as l'impression que je ne fais rien, là ? Je m'acharne à te donner des idées que tu rejettes en bloc tout simplement parce qu'elles viennent de moi !

— Non, parce qu'elles sont mauvaises !

— Mauvaises ! Mauvaises ! »

Taehyung se leva et commença une fois de plus à pester tandis que Jungkook s'oubliait un instant à regarder le jeune homme qui lui servait de muse. Taehyung n'était jamais aussi beau que lorsqu'il s'énervait ainsi. Pas que Jungkook aime l'entendre se plaindre, mais ses traits s'animaient bien plus que lorsqu'il se contentait de lâcher ses idées, un masque de mépris et de supériorité bien en place sur le visage.

Le pire était cette expression de profonde indifférence que Jungkook avait réussi à capturer une ou deux fois alors que le châtain ne se savait pas observé.

Taehyung était indéniablement sublime, Jungkook n'avait jamais vu une personne aussi divinement gracieuse. Le contraste de sa peau et de ses mèches, ses yeux aussi noirs et profonds que la nuit, ses traits fins, doux et en même temps typiquement et fortement masculins, le rendant intimidant et lui donnant une allure austère, ses longues mèches châtaines savamment coiffées lui allaient à merveille.

Jungkook se perdit un instant sur les cheveux qui caressaient le visage parfait de sa muse, taquinant une lèvre que le brun aurait volontiers goûtée.

Ce qui l'amena à se concentrer sur la bouche du châtain et sur les mots qui en sortaient :

« J'ai tout fait, je t'ai conseillé, ordonné, je t'ai même parlé la nuit pendant ton sommeil...

— Quoi ?! hurla Jungkook.

— Quoi, quoi ?

— Comment ça, la nuit pendant mon sommeil ? Tu... tu veux dire... que tu peux être là même quand je ne travaille pas ?

— Évidemment, qu'est-ce que tu croyais ? Que j'ai mis un radar sur ton bureau qui m'alerte dès que tu t'en approches et j'apparais par enchantement ? », fit-il en levant les yeux au ciel, exaspéré.

Seulement, lorsqu'il les reposa sur son protégé, il hallucina. À priori, oui, Jungkook avait imaginé quelque chose dans ce genre.

« Non, mais tu crois quoi, qu'on a des pouvoirs magiques ?

— Je n'en sais rien moi, je n'y connais rien aux muses.

— Eh bien, non, il n'y a rien de tout ça », lâcha-t-il sur le ton de l'évidence et quelque peu moqueur.

Jungkook était vexé. Qu'est-ce qu'il en savait lui ? Si le travail de Taehyung était de l'inspirer, il était logique qu'il n'apparaisse que lorsqu'il écrivait, soit lorsqu'il avait besoin d'inspiration, non ? Un plus un égal deux, c'était aussi simple que ça ! Comment pouvait-il prévoir que l'autre avait la possibilité de se balader chez lui en dehors de ses heures de travail et qui plus est pendant ses heures de repos, enfin ?

D'ailleurs...

« Oui, mais ça n'explique pas ce que tu faisais dans ma chambre pendant que je dormais.

— Mon travail.

— En me susurrant des mots doux à l'oreille ?

— Non, en te faisant des propositions, triple andouille.

— C'est ça, c'est ça. Et tu en as profité pour me reluquer, je parie ?

— Pardon ?

— Oh ! »

Jungkook hoqueta adorablement en plaçant ses mains devant sa bouche en rosissant.

« Quoi ?

— Tu... Tu as regardé pendant que j'étais sous la douche ?

— Non, mais ça ne va pas ? Je ne suis pas un pervers ! »

Jungkook remarqua tout de même les rougeurs sur les joues de la jeune muse. Elles ne pouvaient avoir que trois explications : soit il l'avait fait, soit il avait pensé à le faire, soit il n'y avait pas pensé, mais que l'idée lui plaisait. Dans tous les cas, il ne semblait pas dégoûté à cette idée. Loin de là, même.

« Alors pourquoi tu rougis ? », demanda-t-il d'une voix plus suave et plus taquine.

Ce ton troubla Taehyung, mais il était bien décidé à ne rien en laisser paraître. Il ne laisserait décemment pas un humain le toucher, quand bien même Jungkook parvenait à le faire agir en complète contradiction avec sa nature profonde.

« Idiot », souffla simplement Taehyung ne sachant que lui répondre.

Y avait-il même une réponse décente ?

« Ne me traite pas d'idiot, idiot toi-même ! »

Chacun croisa les bras sur son torse et détourna la tête. Encore une fois, ils étaient parfaitement en phase, seulement, ils étaient bien trop occupés à bouder pour s'en apercevoir.

Enfin, l'un à bouder et l'autre à.... avoir une expression faciale qui pourrait éventuellement... Et cætera.

Jungkook soupira et se replaça face à son ordinateur.

« Quoiqu'il en soit, trouve un autre moyen si tu veux vraiment m'aider et je te rappelle que le délai pour rendre mon chapitre s'approche de plus en plus.

— Je le sais bien, mais qu'est-ce que tu veux de plus ? Que je te fasse l'amour, peut-être ?

— Écoute, pourquoi pas. Ça me détendrait, tiens. »

Taehyung haussa un sourcil.

« Non, mais ça ne va pas la tête ?

— C'est toi qui l'as proposé, je te signale. Et puis quoi, aucune muse ne l'a fait avant toi ?

— Là, n'est pas la question !

— Ah, ah ! Donc que vous le faites ! »

Taehyung rougit de nouveau. Oui, certaines muses le faisaient. D'ailleurs, il se demandait si son cousin et cette demoiselle rousse...

Il chassa cette pensée.

« Mh.

— Avec qui as-tu déjà couché ? Des gens célèbres ?

— Débile profond, marmonna-t-il dans sa barbe.

— Quoi ? Qui ?

— Tu es un débile profond, répéta-t-il, plus fort.

— Tu n'as pas bientôt fini de m'insulter ? bougonna-t-il.

— Avec qui j'ai couché ne te regarde pas, je ne te demande pas la liste de tes ex-amantes.

— Encore heureux, c'est personnel ! répondit le brun outré.

— Quoi !

— Quoi, quoi ?

— Exactement, c'est personnel ! Pourtant, tu n'es vraiment pas gên...

— Tu... le coupa-t-il.

— Je n'ai pas fini de parler ! Comment oses-tu me dire que c'est personnel après m'avoir posé la même question une minute plus tôt ?

— Je t'ai juste demandé si tu avais couché avec des gens célèbres, je ne t'ai pas demandé qui.

— Ne joue pas sur les mots, grogna-t-il.

— Mais ce n'était qu'une simple question !

— Oui, eh bien, ça ne te regarde pas. »

Jungkook marmonna quelque chose tout en parodiant l'attitude méprisante du châtain. Ils se turent un instant. Puis, l'écrivain reprit avec un petit sourire amusé et taquin.

« Hé. Tu devrais en profiter, parce que si tu couches avec moi, tu auras quelqu'un de célèbre à noter sur ta liste.

— Toi, pauvre naze ?

— Oui, moi, muse incompétente. Bientôt, je serai un des auteurs les plus reconnus de ma génération !

— Pas si tu continues à être aussi mauvais.

— Si tu faisais correctement ton travail, on n'en serait pas là.

— Mais, je le fais, c'est toi qui es trop mauvais.

— Tu ne fais que parler, je ne peux pas me concentrer et...

— Nous sommes revenus au point de départ ! », hurlèrent-ils d'une même voix.

Ils se turent surpris, les bras croisés sur la poitrine dans une attitude défensive. Chacun réfléchissait de son côté. Taehyung s'interrogeait : était-ce réellement une mauvaise idée ? Après tout, de tout temps, des muses avaient eu des relations intimes avec leurs artistes pour les inspirer.

Taehyung trouvait cela simplement rabaissant. Une muse vraiment talentueuse n'avait pas besoin de toucher son protégé pour lui transmettre ses idées et encore moins coucher avec lui.

Et puis Taehyung n'était pas une personne de contact, même avec les siens, il craignait qu'on le touche, il n'aimait pas l'intimité avec une autre personne. Les rares fois où cela lui était arrivé, il s'était enfui aussitôt son plaisir obtenu. Pourtant, tandis qu'il regardait le brun bouder dans son coin en mordillant son piercing, la tentation était vraiment prenante.

Après tout, il avait tout essayé sauf ça....

Pouvait-il abandonner sans avoir tout tenté ?

« D'accord, abdiqua-t-il.

— D'accord ? répéta le brun en se retournant vers lui.

— Mh.

— Pour une muse, tu ne pourrais pas être aussi éloquent que les idées que tu me souffles ? »

Taehyung leva les yeux au ciel, remballant toute sa réflexion précédente pour la ranger dans une caisse sur laquelle il cloua une pancarte : « Ne pas toucher, abruti fini ».

« Mauvaise idée, souffla-t-il, finalement.

— Quoi ?

— Je dis que c'est une mauvaise idée ! cria-t-il. Ça ne changera rien, tu es un réfractaire !

— Un quoi ?

— Un réfractaire, dit plus calmement Taehyung.

— C'est-à-dire ? demanda le brun.

— Ça veut dire ce que ça veut dire : tu es réfractaire aux muses, nous ne parvenons pas à t'inspirer. Tu résistes avec force et tu te rebelles contre ce que nous sommes. »

Jungkook ouvrit de grands yeux avant de froncer les sourcils.

« Et c'est courant, ça ?

— Absolument pas.

— Ah.

— Et heureusement, murmura-t-il.

— Pourquoi ?

— C'est mauvais pour nous d'avoir des protégés réfractaires.

— C'est-à-dire, mauvais ? Explique les choses plus clairement, enfin !

— Dangereux, soupira-t-il en roulant des yeux.

— Dangereux comme "ça met ta vie en danger" ?

— Mh.

— Mais explique ! Tu n'es vachement pas éloquent, pour une muse !

— Je ne suis pas ta boniche, Jungkook. »

Ce dernier grogna, le châtain avait vraiment le don d'attiser ses nerfs, mais là, maintenant, tout de suite, il voulait avoir le fin mot de cette conversation. Il y avait quelque chose qui ne lui plaisait pas du tout et cela l'inquiétait, malgré lui. Aussi, ravala-t-il, juste un peu, sa fierté.

« S'il te plaît. »

Taehyung soupira et reporta ses yeux dans ceux de Jungkook, étonnamment doux et concernés.

« Une muse doit inspirer pour vivre, si nous n'y arrivons pas, nous dépérissons. Avec un réfractaire... tu as compris tout seul, je suppose. »

Jungkook se tut. Il s'assit et le silence se fit dans la pièce.

« Hé... ?

— Mh ?

— Tu veux dire que je suis en train de te... tuer ? »

Taehyung détourna la tête en s'éloignant, mais Jungkook se leva et le rattrapa.

« Attends, Taehyung. Réponds-moi », demanda doucement le brun.

Sa main était toujours sur le bras de la muse. Il pouvait sentir la douceur de sa peau, mais il était trop inquiet de sa réponse pour s'y attarder, aussi plaisante que soit cette sensation.

« Oui et non.

— Mais je refuse toutes tes idées !

— Pour le moment, je suis vivant non ?

— C'est décidé ; partir de maintenant, je vais écouter tes propositions et en tenir compte », lâcha-t-il, sérieux.

Le châtain remua négativement la tête.

« Ça ne marche pas ainsi, tu ne peux pas te forcer. Sans parler du fait que tu ne devrais même pas savoir tout ça, tu n'aurais même pas dû me voir ou savoir que j'existe.

— Alors, pourquoi t'être montré à moi ?

— J'ai décidé de rendre ma plume, après toi.

— Ce qui veut dire ?

— Tu m'oublieras lorsque je...

— Lorsque tu... ?

— Disparaîtrai.

— Quoi ? Mais enfin, pourquoi tu disparaîtrais ! »

L'inquiétude brillant dans les grands yeux de biche troubla Taehyung. Il ne voulait pas voir ça. Puis pourquoi discutait-il de cela avec lui ? C'était sa vie, il n'avait pas besoin de se justifier et surtout pas auprès de ce magnifique imbécile au visage d'ange !

« Taehyung, pourquoi veux-tu disparaître ? répéta-t-il, d'une voix douce et concernée.

— Jungkook, grogna-t-il, excédé et surtout, intimidé par le ton doux. Ça ne te regarde pas, alors si tu veux coucher avec moi, c'est maintenant ! »

Le regard noir s'était fait dur, froid et le défiait.

« Bien, répondit froidement Jungkook, l'expression ferme.

— Bien. »

Ils se dirigèrent vers la chambre, chacun portant une mine renfrognée sur le visage. Taehyung s'arrêta devant le lit et Jungkook un peu plus loin. Ils se regardèrent et détournèrent les yeux si vite qu'ils ne virent pas l'autre en faire autant.

Tout à coup, ils étaient intimidés, ne sachant pas comment commencer, gênés par le manque de spontanéité de la situation.

« On devrait peut-être enlever nos vêtements, non ? balbutia le brun.

— Mh. »

Chacun de leur côté, ils se dévêtirent, n'osant toujours pas regarder l'autre. Lorsqu'il fut en sous-vêtements, l'écrivain se retourna et fixa sa muse. Celui-ci était nu et le brun déglutit péniblement. Il était tout simplement splendide. À le voir ainsi, il n'eut plus aucun doute ; Taehyung était définitivement une créature divine, il était bien trop parfait pour être humain.

Sa peau caramel semblait scintiller à la lumière et Jungkook se demanda s'il oserait poser ses mains sur lui. Son sexe n'était pas dressé tout comme le sien, pourtant cette masse entre les jambes fuselées et hâlées lui donnait à la fois envie et le retenait à sa place.

Comment serait-ce de faire l'amour avec lui ? Il n'était pas réellement humain, même si son corps en avait les attributs. Et s'il ne parvenait pas à le faire jouir ? Est-ce qu'une créature divine jouissait ? Toutes ces questions et bien d'autres tournaient dans sa tête tandis qu'il se défaisait de son dernier vêtement.

Presque timidement, Jungkook finit par s'approcher. Il se racla la gorge pour attirer à lui l'attention de la jeune muse. Tous deux n'osaient pas se regarder dans les yeux, les joues légèrement rouges. Jungkook n'était pourtant ni vierge ni prude, mais il était étrangement impressionné à l'idée de toucher ce joyau.

Enfin, il se décida à faire un pas de plus, une dizaine de centimètres restaient entre leurs deux corps.

Délicatement, il avança sa main qui tremblait légèrement, d'excitation ou d'appréhension, il n'était plus très sûr, du sublime visage face à lui. Il déglutit péniblement, la tension se faisant douloureuse. Il posa le bout de ses doigts sur la joue hâlée et Taehyung tourna enfin ses yeux vers lui. Mais Jungkook ne le fixait pas ; il était hypnotisé par sa propre main, large, tatouée et opaline sur cette peau fine, soyeuse et tannée. Il avait besoin de cette vision pour réaliser qu'il le touchait. Il touchait un être littéralement divin. Il touchait Taehyung.

Il abaissa au ralenti sa paume jusqu'à ce qu'elle vienne épouser la mâchoire saillante et parfaite de la muse. Il s'égara un instant dans la chaleur de leurs deux peaux, puis retira sa main. Les billes obsidiennes abandonnèrent la peau couleur de miel pour aller se perdre dans la nuit intense de ses yeux.

Taehyung fit un pas, ne laissant entre leurs corps que quelques centimètres.

L'écrivain avait chaud comme jamais, mais il tendit son visage vers celui de la muse et déposa ses lèvres avec une douceur et une infinie tendresse sur celles du châtain. Il recula doucement, ses yeux perdus dans ceux de l'autre, un million de sentiments et de sensations passant entre eux. Jungkook l'embrassa de nouveau, frissonnant en sentant la réponse timide de son futur amant.

Il recommença, laissant leurs lèvres se goûter, se frôler, s'attraper, sans que leurs langues se touchent encore, sans que leurs corps le fassent. Jungkook n'avait jamais ressenti des sensations aussi puissantes et enivrantes, son cœur battait la chamade au point qu'il se sentirait presque partir dans l'inconscience.

Cela s'intensifia lorsqu'enfin, ils approfondirent doucement leur baiser, se donnant de légers coups de langue avant de lentement les laisser s'enrouler l'une autour de l'autre. Ils restèrent un long moment sans aller plus loin et Jungkook aurait pu se contenter de cela pour l'éternité. Les baisers de Taehyung, sa bouche, son goût, le bruit enivrant de leurs lèvres qui se prenaient, se reprenaient encore et encore.

La jeune muse fut la première à toucher l'autre, posant une de ses mains sur la hanche lactescente et étonnamment fine, sa main venant se perdre dans les longues mèches sombres comme elle l'avait déjà fait tant de fois. Son protégé l'imita et vint mouler son corps au sien, leurs verges maintenant dressées se nichant doucement contre leurs abdomens, les faisant timidement haleter.

Les mains restèrent sages, ils voulaient savourer la sensation d'une autre peau contre la leur, s'embrassant toujours, mais se concentrant sur leurs autres sens. Puis, les doigts toujours un peu tremblants, mais de plus en plus assurés, Jungkook se mit à caresser son vis-à-vis qui en fit autant. Ils prirent leur temps, découvrant et savourant chaque centimètre carré de peau, survolant, effleurant, feuilletant ces nouvelles pages de sensations afin d'en graver chaque parcelle dans leurs esprits et dans leurs chairs.

Finalement, le brun saisit tendrement la main hâlée et entraîna Taehyung sur son lit et ils s'allongèrent côte à côte. Avec cette même patience, cette même douceur, ils prirent le temps de se découvrir davantage, laissant leurs doigts, leurs langues jouer sur leurs peaux, sur ses replis, ses pointes, ses creux et ses courbes.

De doux gémissements s'échappaient d'eux, souffles légers de leur plaisir s'envolant délicatement dans la pièce pour les entourer de leur chaleur. Jungkook continua de prendre les choses en main, surplombant et s'allongeant légèrement sur le corps parfait de la jeune muse, sans s'appuyer de tout son poids. Il le parcourut sur toute sa longueur déposant des baisers et des caresses sur son chemin, laissant une traînée brûlante sur la peau vibrante et frissonnante de la muse.

Ce dernier était dans une autre sphère, jamais il n'avait pris conscience de son corps à ce point. Il découvrait des zones qu'il ignorait, des plaisirs inconnus jusque-là. Tout son être se pliait aux désirs de l'autre : se soulevant, s'abaissant, se tendant, se cambrant, se donnant. Cela n'avait rien de purement sexuel parce que ce n'était pas uniquement cela, Jungkook dévorait littéralement sa chair et avec lui, une partie de son âme.

Il s'abandonnait, il n'en saisissait pas la raison, mais il n'avait tout simplement pas envie que cela cesse, il voulait sentir les mains de Jungkook, sa langue, son souffle, ses dents, le reste de son corps. Sa peau sur lui encore et encore et encore. Il gémissait doucement, encourageant son protégé qui s'oubliait devant l'époustouflant spectacle de cet être irréel qui s'offrait à lui.

Tout en Taehyung était extraordinaire, inouï. Son goût, la texture incroyablement soyeuse de sa peau, la façon dont son corps réagissait au moindre de ses contacts, dont ses reins se cambraient contre lui, dont son sexe humidifiait son ventre plat et finement musclé. Il aurait pu faire cela pendant des heures, mais il avait besoin plus. Il voulait goûter à la dernière zone, celle qu'il n'avait fait qu'effleurer jusque-là.

Taehyung l'encouragea un peu plus bruyamment sans prononcer un seul mot, simplement par sa respiration plus hachée, ses gémissements un peu plus prononcés. La muse s'oublia un peu plus dans la douce chaleur qui entourait son membre palpitant, dans la moiteur délicieuse qu'était la bouche de Jungkook, sous sa langue, son bijou à la lèvre et ses dents qui l'emportaient toujours un peu plus loin. Il le mena si proche de l'orgasme que Taehyung eut du mal à reprendre contact avec la réalité. L'entièreté de son corps criant, suppliant pour être délivré. Mais la frustration était presque aussi bonne que sa libération, son excitation atteignant un niveau qu'il n'avait jamais connu ou même imaginé.

Il voulait que Jungkook continue, mais il était tout bonnement incapable de trouver les mots pour le lui demander.

« Tourne-toi, Taehyung... », lui souffla-t-il.

Il ne put qu'obéir.

Son amant se perdit un instant dans la contemplation de cet être magnifique étendu devant lui, sa peau tannée s'était couverte d'une fine humidité telle une rosée matinale, fraîche et légère.

Il entreprit de posséder chaque parcelle de peau de ce côté, embrassant, caressant, agaçant, mordillant, léchant. Petit à petit, ses caresses l'emmenèrent au moment où ils s'uniraient physiquement. Taehyung frémit un peu plus lorsque les mains se posèrent sur ses hanches et se laissa préparer en douceur.

Son corps s'ouvrit pour son amant, le laissant prendre possession de lui, le compléter. Avec la même douceur et la considération qu'il avait montrée jusque-là, Jungkook commença à se mouvoir en lui permettant aux exquises sensations de grandir en eux. Il s'allongea sur Taehyung, glissant son nez dans le cou, à la naissance des cheveux châtains et s'enivra avec volupté de son odeur suave, capturant doucement les mains de Taehyung, crispées de part et d'autre de son corps, sur le coussin, pour y entremêler leurs doigts. Le muse serra fortement sa poigne sous les sensations qui l'assaillirent sans qu'il puisse contrôler les vagues intenses de plaisir.

Taehyung pantelait, haletait, enfonçant par moment son visage dans l'oreiller, le mordant à d'autres pour étouffer ses bruits de félicité. Il entendait la respiration de Jungkook à son oreille qui affolait davantage son âme, complétant ses sens, les rendant insensées. Il oubliait tout, il ne savait plus rien, il n'était que sensation et plaisir, n'ayant conscience que du corps qui brûlait le sien, qui le faisait sien.

Jungkook n'en revenait pas. Il avait eu plusieurs amants et il avait toujours pris son temps pour faire l'amour. Il était un épicurien, il voulait profiter de chaque moment, de chaque caresse, mais jamais, jamais il n'avait ressenti quelque chose d'aussi exquis, de hautement délectable.

La façon dont le corps de son amant se moulait au sien, dont il suivait naturellement la courbe de ses mouvements était l'expression physique de ses fantasmes les plus profonds. Cette union, cette fusion qu'il avait toujours secrètement rêvé de vivre, mais que la réalité avait détruites, il l'avait actuellement avec Taehyung.

Cette pensée affola encore plus ses sens qui brûlaient sous la morsure incandescente de son plaisir qui se répandait en lui et emportait tout sur son passage. Il mordilla l'oreille de Taehyung avant de lui susurrer des mots, il ne savait guère lesquels, des noms, des verbes, des phrases, des choses qui n'avaient peut-être aucun sens, mais que Taehyung semblait comprendre.

Violemment, le plaisir se fit grondant en eux, leurs corps y répondant à l'unisson. Le châtain écoutait la voix du brun, ses intonations rauques qui lui murmuraient sa concupiscence et son amour.

« C'est si bon, Taehyung... Tu es si bon, si parfait... Ton corps autour de moi est si... est-ce parce que tu es un être divin ? Tout est incroyable et irréel... Tout... Toi... », gémit-il sous les fortes émotions qui lui étreignaient l'âme.

— Je ne sais pas, haleta-t-il de son souffle haché et par les assauts qu'il subissait. Je n'ai jamais touché un humain avant toi... »

À l'entente de cette assertion, Jungkook suspendit son mouvement, frappé par un sentiment de possessivité qui lui était totalement étranger, mais qui était si violent qu'il le fit presque suffoquer. Il hoqueta avant de grogner de pur plaisir contre la peau humide de son amant. Plaisir que lui procurait cette place dont il était le premier et le dernier à prendre.

Il savait que Taehyung ne mentait pas et qu'il était le premier humain à profaner le temple sacré de son corps. Et il voulait être le seul, il ne laisserait personne, jamais, poser ses mains sur lui, personne goûter sa peau, sentir son odeur, connaître l'idéal de son corps et de cet antre chaud qui l'accueillait et l'entourait à la perfection.

Il agrippa Taehyung et se redressa afin de s'asseoir sur ses talons. La jeune muse se retrouva assise sur lui. Jungkook le serra contre lui à l'en étouffer, comme pour l'imprimer à jamais dans sa chair.

« Rien qu'avec moi Taehyung, rien qu'avec moi, articula-t-il difficilement, le timbre de voix tremblant sous les émotions qui l'assaillaient.

— Oui... Oh, que oui », souffla-t-il l'expression sereine et un petit sourire ornant ses lèvres, le cœur en proie à une émotion exaltée en réponse à cette allégation possessive.

Jungkook posa sa paume sur le front de sa muse et lui fit doucement pencher la tête en arrière puis sur le côté, désirant s'emparer avec fougue de ses lèvres.

« Rien qu'avec moi Taehyung, répéta-t-il en grognant presque, le fixant dans les yeux.

— Oui, Jungkook... Rien qu'avec toi, lui répondit-il en retour, les prunelles gorgées d'une intensité qui fit frémir le brun.

— Pour toujours, souffla-t-il, en douceur.

— L'éternité... »

Ses yeux brûlaient d'une fièvre, d'un besoin impérieux, celui de se perdre dans l'être aimé. Il rallongea Taehyung en le retournant face à lui et reprit ses mouvements.

Petit à petit, ils s'approchèrent de leur délivrance, leurs respirations de plus en plus erratiques et irrégulières. Puis, comme dans son fantasme, comme pour achever à la perfection leur ébat, ils s'exaltèrent en osmose, en parfaite symbiose, dans une fusion impeccable, se contractant d'un même mouvement, leurs corps se collant davantage et ils poussèrent un même cri indécemment voluptueux sous l'explosion incendiaire qui les emporta dans son tourbillon.

Jungkook n'avait plus conscience du temps, ni du lieu, ni de ce qui l'entourait. Il aurait pu être dissous dans cet achèvement, dans l'absolu et l'infini de leur plaisir, il n'en aurait même pas eu conscience.

Lorsqu'il reprit ses esprits, il était allongé sur Taehyung dont le corps était encore secoué de spasmes et de violents frissons. Il se retira lentement et embrassa langoureusement son cou et joua un instant dans les mèches châtaines. L'expression de Taehyung était exquise, sereine, profondément satisfaite. Détendue. Il semblait amorphe, mais lorsque le jeune écrivain voulut bouger, il le retint.

« Attends. Reste...

— Je n'allais nulle part », murmura-t-il, attendri.

Jungkook demeura sur son amant et enfouit sa tête contre le cou hâlé. Ils se prodiguaient de caresses aériennes, flattant les cheveux et la peau encore frissonnante par endroits, jusqu'à ce que leurs respirations se calment. Le brun était si bien, ainsi blotti contre la muse et laissa son esprit dériver.

Soudain, il hoqueta de surprise et se releva légèrement, surprenant Taehyung :

« Je sais !

— Mh ?

— Oh, mon Dieu... ! souffla Jungkook les yeux dans le vague avant de les poser sur ceux curieux de son amant. Je sais exactement comment écrire mon chapitre ! »

Il se leva en trombe.

« C'est incroyable, tout est clair ! Tout est limpide ! C'est... c'est génial... ! », murmura-t-il ébahi et émerveillé, en ayant toujours les yeux dans le vague, semblant en pleine connexion avec ses idées déferlant par milliers et de manière la plus claire et fluide qui soit.

Il sortit de la chambre et revint un instant plus tard son ordinateur portable dans les mains, s'extasiant toujours de la multitude d'idées qui traversaient son esprit.

Taehyung était trop las pour être vexé ou surpris. Cependant, il parvint à se féliciter parce qu'il avait visiblement trouvé la solution pour inspirer Jungkook. Pourtant, il n'aurait jamais parié dessus, quand bien même de nombreuses muses avaient utilisé cette méthode et que son efficacité avait été prouvée maintes fois à travers les siècles.

Surtout les muses qui trouvaient leur moitié, offrant l'éternité à l'artiste dont il est question.

Finalement s'il suffisait de lui faire l'amour pour que l'inspiration lui vienne, qui était Taehyung pour s'en plaindre ? Et s'il devait le faire tous les jours ou plusieurs fois par jour pour que son protégé maintienne ce niveau d'exaltation, il le ferait avec plaisir.

Après tout, c'était son travail.

Et s'il suffisait que Jungkook lui fasse l'amour pour qu'il se sente vivant, qui était Taehyung pour s'en plaindre ? Et s'il devait le faire tous les jours ou plusieurs fois par jour pour chasser l'ennui et la morosité, il le ferait avec joie.

Après tout, c'était son travail.

Si Jungkook voulait une muse utile et efficace, il fallait bien qu'il donne un peu de lui.

L'écrivain s'assit dans le lit et remonta la couverture sur eux.

« Ça ne t'ennuie pas trop que je... demanda-t-il en pointant son écran.

— Au contraire. Écris, lui sourit-il doucement.

— Merci », souffla-t-il en se baissant pour lui déposer un baiser aérien sur le front, faisant doucement sourire le châtain, accaparant un moment l'attention du brun sur lui, émerveillé devant sa beauté irréelle.

Il commença aussitôt à pianoter à une vitesse folle, les mots s'enchaînant les uns après les autres, coulant seuls, comme s'ils existaient par eux-mêmes, comme si Jungkook n'était plus maître d'eux, mais qu'ils se servaient de ses mains comme d'un simple outil pour être transcrits, comme si la volonté qui l'animait à ce moment-là n'était plus la sienne, mais celle de son histoire qui se mettait à vivre par elle-même, à exister en tant qu'entité dotée de sa propre conscience, de sa propre volonté.

La sensation était hautement grisante et il se laissait porter par le flux de phrases, euphorique.

Taehyung le regarda faire un instant. Il connaissait ce visage ; c'était celui qu'il rêvait de faire apparaître sur la face de son protégé.


Celui de l'artiste nourri par son œuvre, celui qu'une muse attend pour lui prouver qu'elle a fait son travail de façon magistrale.


Un mince sourire fit son apparition, faisant briller ses yeux de reconnaissance envers Jungkook et de fierté envers lui-même.

Il vint se coller à son amant, uniquement parce qu'il ne pouvait décemment pas rester couché sur les traces de son plaisir. Et lorsqu'il se blottit contre le brun, ce fut uniquement parce qu'il avait un peu froid. Oui, c'était cela.

Mais, lorsqu'il sourit de nouveau, il sut pertinemment bien que c'était parce qu'il était profondément heureux comme cela ne lui était plus arrivé depuis une éternité.

Jungkook s'interrompit un instant en sentant le soupir de contentement du brun contre sa hanche et tendrement, il repoussa une mèche châtaine avant de caresser doucement la joue hâlée encore légèrement rosée. Il sourit en le sentant se coller un peu plus à lui, tel un félin. Il ronronnerait presque. Puis, il se remit vite au travail, ne pouvant stopper les merveilleuses et parfaites idées qui se bousculaient dans son esprit.

Taehyung s'endormit, bercé par le son que faisaient les doigts de Jungkook sur le clavier, par sa chaleur, par son odeur. Par sa présence et la sérénité qui émanait d'eux.

Il ne vit pas deux yeux noirs rayonnants et le sourire profondément heureux et soulagé de son cousin le contempler.



𝑸𝒖𝒆𝒍𝒒𝒖𝒆 𝒑𝒂𝒓𝒕, 𝒅𝒂𝒏𝒔 𝒍𝒆𝒔 𝒉𝒂𝒖𝒕𝒆𝒔 𝒔𝒑𝒉𝒆̀𝒓𝒆𝒔 𝒅𝒆 𝒍𝒂 𝑪𝒓𝒆́𝒂𝒕𝒊𝒐𝒏

« Mon oncle, vous pouvez annuler la recherche de remplaçant pour Taehyung.

— Vraiment ?

— Oui. Et ne comptez pas sur lui pour de prochaines missions. Je dirais qu'il sera occupé pendant un très long moment.

— Que veux-tu dire, mon garçon ? »

Un rictus amusé apparut sur les lèvres charnues et parfaites du Kim qui prenait la direction de la sortie. Il n'oubliait pas qu'une magnifique rousse l'attendait. Il se galvanisait de la revoir.

Son éternité.

« Seokjin, dis-le-moi. »

Il se retourna, fixa son oncle un instant et lança en sortant de la pièce.








« 𝐿'𝑒́𝑡𝑒𝑟𝑛𝑖𝑡𝑒́, 𝑚𝑜𝑛 𝑜𝑛𝑐𝑙𝑒. »










𝐓𝐇𝐄 𝐄𝐍𝐃
𝑀𝑢𝑠𝑒, 𝑓𝑒́𝑣𝑟𝑖𝑒𝑟 𝟸𝟶𝟸𝟹







(Je sais que tu le sais, mais certains ne savent peut-être pas, so here we go : Zeus, Poséidon, Héra, Hadès, Hestia, Déméter, Aphrodite : 7 dieux et déesses parmi les 12 dieux et déesses de l'Olympe.)

La fin est mièvre, incroyablement mièvre, mais j'aime leur relation 🥹

Qu'as-tu pensé de cet OS ?

Il est celui dont je suis le plus fière, jusqu'à présent (ma muse m'a inspirée 😂).

À très vite pour un prochain OS ! Ça parlera (peut-être, tout dépend de ce que mon cœur choisira) de guerre, d'anges et de démons...

Et de jus de citron pressé.

Maybe. Si je ne change pas d'avis à la dernière seconde. 🌝


𝑾𝒊𝒕𝒉 𝑳𝒐𝒗𝒆, 𝑫𝒂𝒓𝒌 𝑬𝒚𝒆𝒍𝒆𝒕 🖤

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