Chapitre 6
❝Welcome in Hell.❞
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Tout n'était que brouillard lorsque Yerin reprit conscience. Un mur de coton la séparait du monde réel, tout était flou, son ouïe comme sa vue. Cependant, sa respiration était calme malgré la privation de ses sens. Lentement, elle bougea ses doigts pour reprendre possession de son corps et cligna des paupières pour retirer ce voile sur ses yeux. Peu à peu se dessina devant elle un plafond blanc orné de moulures parfaitement travaillées, datant sûrement de quelques siècles, bien que Yerin n'était pas une experte dans le domaine de l'architecture. Sur le coup, elle resta là, à admirer, la bouche entrouverte sans penser à grand chose. Puis, peu à peu, ses souvenirs lui revinrent, notamment les derniers évènements. Les sept Juges, cette discussion glaçante, la façon dont elle leur avait répondu et... Taehyung.
A la pensée du blond, Yerin se redressa d'un coup, son coeur décidant de subitement accélérer quand celui-ci réalisa qu'il était passé à deux doigts de la peine capitale. Oui, la mort avait frôlé Yerin, caressant doucement sa peau et la menaçant de sa faux avec le sourire aux lèvres. Et pourtant, elle n'était pas passée sous sa lame car un seul homme avait décidé de l'épargner. Pour se calmer, la brune posa sa main sur son coeur et entra ainsi en contact avec quelque chose de soyeux qui attira tout de suite son regard. Sur sa poitrine était accrochée une broche portant une rose fraîche aux pétales de multiples couleurs. Rose, rouge, jaune, orange, bleu... Elle n'en avait jamais vu de telle et l'espace d'un instant elle oublia ce qui la faisait paniquer pour caresser la fleur qui était arrivée là sans qu'elle ne comprenne comment.
Maintenant qu'elle y pensait, elle avait déjà vu quelque chose de similaire. Que ce soit Cassandre ou bien les filles qu'elle avait croisé dans les couloirs en allant voir les Juges, toutes avaient une rose accrochée à leur poitrine, bien que les couleurs n'étaient pas forcément les mêmes. Celle de Cassandre, par exemple, était blanche. Est-ce que c'était une sorte de classification ? Yerin pensait à tellement de choses maintenant, tellement de théories qui se bousculaient dans sa tête alors qu'elle tentait de mieux comprendre ce lieu effrayant. Car oui, il n'y avait rien de plus effrayant que cet endroit, elle en était certaine maintenant qu'elle avait eu affaire aux maîtres de ces lieux. Des gens qui les traitaient comme du bétail et non pas comme des êtres vivants.
— Oh, vous êtes réveillée.
La brune sursauta, n'ayant même pas entendu la porte s'ouvrir. En redressant la tête, elle croisa le regard froid de Cassandre qui était toujours impeccable sur elle, les mains croisées contre son abdomen et droite comme un i. Par la même occasion, Yerin put prendre connaissance de la chambre dans laquelle elle était. Les murs portaient une tapisserie vert pomme avec quelques dorures. Le mobilier, très baroque, était blanc et élégant. Rien ne manquait. Une grande armoire, un bureau, une coiffeuse, un divan, un gigantesque lit... La brune était bouche bée par toutes ces choses qu'elle voyait pour la première fois mais apparemment, elle n'avait pas le droit de passer son temps à s'extasier puisque Cassandre la rappela à l'ordre d'un ton autoritaire.
— Préparez-vous, je vous emmène pour votre leçon.
— M-ma leçon ?
— Dépêchez-vous, je repasse dans dix minutes. Et n'oubliez pas de garder votre broche.
Yerin pencha la tête de côté alors que la rousse s'en allait, la laissant seule avec ses interrogations. C'était beaucoup trop étrange. Elle avait entendu parler de nombreuses fois d'un certain apprentissage qu'elle et les autres allaient devoir subir. Mais d'un coup, tout était bouleversé. Elle se retrouvait là, dans cette chambre, seule. Ses pensées se tournèrent vers son amie Daeun. Peut-être s'inquiétait-elle en ne la voyant pas revenir au dortoir ? La brune se mordit la lèvre puis se décida à se lever, supposant que sa tenue du jour devait se trouver dans l'armoire en face d'elle. Quelle fut sa surprise quand elle découvrit qu'elle avait le choix.
Sur le portant s'alignait un tas de robes différentes, couvrant un large panel de couleurs alors qu'en dessous, plusieurs paires de chaussures attendaient sagement qu'on les porte. Sur les côtés, dans de petits tiroirs, des accessoires comme des boucles d'oreilles ou bien des colliers, brillaient à la lumière du lustre allumé au plafond. Rapidement, Yerin ferma ceux-ci et se mordit la lèvre. Mince, il y avait tellement de choses ! Pouvait-elle vraiment se servir comme elle le désirait ? La jeune femme décida de plutôt rester sur la réserve, pour cette fois. Elle attrapa une robe bleu ciel à manches trois quart, cintrée à la taille et s'arrêtant au dessus de ses genoux. Puis, elle mit des talons noirs, simples. De toute façon il n'y avait rien d'autre que cela. A croire qu'il fallait tout le temps que les jeunes femmes ici restent perchées dix centimètres au-dessus du sol.
A peine avait-elle fini de se brosser ses cheveux que Cassandre toqua avant d'entrer. Yerin se tourna vers elle, posant rapidement l'objet sur la coiffeuse. La rousse la scanna de haut en bas avant de soupirer. Ses yeux se baladèrent dans la chambre avant qu'elle ne trouve l'ancienne robe qu'elle portait. Elle s'en approcha puis reprit la broche avant de se tourner vers la brune. Cette dernière se rendit compte qu'elle avait oublié de la mettre, comme l'avait demandé son aînée. Cassandre se dirigea vers elle puis accrocha la rose à sa poitrine avant de parler à voix basse, comme si elle lui faisait une confidence.
— Maintenant que vous avez votre broche, n'oubliez jamais de la porter. C'est un cadeau que vous fait le Maître.
— Le Maître ? Pourquoi la votre n'est-elle pas de la même couleur ?
— Ca suffit. Nous allons être en retard.
Sans un mot de plus, Cassandre sortit de la chambre et Yerin commençait à la connaître, elle n'allait pas l'attendre plus longtemps. Alors elle prit son mal en patience et trottina jusqu'à la rattraper. Ces questions lui brûlaient les lèvres mais la brune se retint de les poser une seconde fois. Elle sentait que cela n'allait pas passer auprès de la rousse qui marchait avec détermination vers leur prochaine destination qui était encore inconnue, par ailleurs. Soudain, Yerin remarqua quelque chose. Le regard des jeunes femmes qu'elle croisait avait changé. La veille, elle était regardée comme une paria et maintenant, elles lui accordaient un sourire simple, sans hostilité. Cela intrigua la brune, encore une fois. Décidément, cet endroit semblait être soumis à des règles qui lui échappaient.
Après quelques détours ci et là, les deux jeunes femmes arrivèrent devant une grande porte surmontée d'une tête de renard en or massif. Les yeux de l'animal étaient faits de ce qui semblaient être des saphirs qui fixaient quiconque voudrait entrer dans cette pièce. Cassandre fit un pas de coté puis indiqua la porte à Yerin.
— Vous pouvez entrer, on vous y attend.
Yerin fronça les sourcils mais ne répliqua pas. De toute façon, elle n'avait pas le choix, alors autant s'exécuter pour mieux comprendre ce qu'elle faisait ici. Lentement, elle se saisit de la poignée froide puis finit par entrer après avoir inspiré profondément. Dès son premier pas, elle sentit le sol tanguer sous ses pieds et sous ses propres yeux, l'environnement changea. Ce qui semblait être une chambre s'effaça brutalement pour laisser place à un grand bureau entouré de bibliothèques bien fournies. Fascinée par ce qui venait de s'opérer juste devant elle, Yerin laissa la porte se refermer derrière elle. Un rire la sortit de sa torpeur.
— Vous êtes tellement impressionnables, vous autres.
Yerin sursauta avant de se tourner vers cette voix qu'elle avait déjà entendu. Elle croisa alors le regard insondable qui s'offrait à elle. La brune reconnut tout de suite cette carrure svelte et ces cheveux blonds ramenés en arrière avec élégance. Il s'agissait là d'un des sept Juges et si elle se souvenait bien de son prénom, il s'appelait...
— Je suis Jimin. Ton professeur pour les prochaines semaines.
— Mon professeur ? A-attendez, mais vous êtes un Juge-
— En effet.
Le blond eut un léger rire en constatant le regard confus de Yerin. Il y avait de quoi l'être. Pourquoi un Juge s'amuserait à jouer les professeurs alors qu'il y avait probablement tout un tas de personnel pour le faire à sa place ? Avec grâce, le jeune homme se redressa puis s'étira, expliquant calmement la situation.
— Comme tu as pu le voir, certains de mes frères n'apprécient pas la situation dans laquelle tu te trouves. Et comme tu le sais également, d'autres ne sont pas contre et veulent voir ce que tu as à offrir.
Jimin esquissa alors un sourire en coin et plissa ses yeux sombres, les plantant droit dans ceux de Yerin qui demeurait immobile, enregistrant chaque information qu'il lui donnait.
— J'en fais partie. En vérité, je déteste le gâchis. Dans ce monde, il est possible de faire du profit avec n'importe quoi. Je vais donc me charger de ton éducation.
— Vous parlez encore comme si nous étions des animaux... grogna à voix basse la jeune femme qui ne baissa pas le regard.
— En effet. Après tout, c'est ce que vous êtes, à nos yeux.
Le regard horrifié et en colère de Yerin arracha un nouveau rire au Juge qui se décida à contourner son bureau pour s'assoir à son siège imposant. La chaise en face de lui recula brutalement jusqu'à la brune qui sursauta. Qu'est-ce que c'était ? De la télékinésie ? Ou quelque chose dans le genre ? Papillonnant des paupières, elle releva la tête vers le blond qui lui fit un simple signe du menton pour lui demander de s'assoir. Yerin posa alors sa main sur le dossier de la chaise et le parcourut du bout de doigts. Elle commençait petit à petit à récolter les pièces de ce grand puzzle. Il était maintenant évident que les Juges n'étaient pas des personnes normales et avaient donc quelques raisons pour penser que les jeunes femmes ici, en effet, étaient du bétail. Peut-être par rapport à leur pseudo-supériorité qui était constituée par leurs étranges pouvoirs ou bien par rapport à ce qu'ils décideront de faire d'elles plus tard. Dans tous les cas, ce n'étaient pas des personnes à prendre à la légère.
— Qu'est-ce que vous êtes ?
Une lueur s'alluma dans les yeux du jeune homme alors qu'elle croisait son regard. Elle était morte de trouille face à lui, car elle savait qu'il possédait des capacités qui lui étaient inconnues. Mais elle ne voulait pas fuir, ni être une petite souris soumise, hochant la tête à chaque ordre. Elle voulait des réponses, savoir contre qui elle devait se battre. Le temps était comme suspendu après cette question, comme s'il retenait lui-même son souffle en attendant les prochaines paroles de Jimin. Et pourtant, ce dernier se contenta d'éclater de rire, couvrant ses yeux de sa main.
— Jungkook avait raison, tu es vraiment très drôle ! Je pensais que cet avorton n'écoutait que ses instincts, mais finalement...
Le blond reprit son souffle et se tourna vers Yerin qui se figea sur place, apercevant entre les doigts de sa main un oeil brillant d'un bleu surnaturel, comme un saphir en plein soleil.
— ... Tu es très intéressante, Yerin.
Cette vision sortie tout droit d'un cauchemar s'évanouit la seconde d'après, l'iris de Jimin reprenant sa couleur naturellement sombre. La jeune femme posa sa main sur son coeur qui battait la chamade. Elle avait envie de partir se réfugier quelque part mais elle décida plutôt de s'assoir, les yeux dans le vide. Merde, qu'est-ce qu'elle venait de voir ? L'espace d'un instant, le Juge semblait être... Oui, c'était ça.
Il semblait être sorti tout droit des Enfers.
— Nous avons assez discuté. Commençons à présent notre leçon. Mais avant cela, je me dois de te dire ce pour quoi vous êtes toutes formées.
Yerin ne releva pas la tête. Elle sentait le regard malicieux de Jimin sur elle, qui n'avait qu'une hâte, lui révéler l'horrible vérité. Il passa lentement sa langue entre ses lèvres, comme un prédateur face à sa proie puis il plissa les yeux, ne voulant pas manquer une once de la réaction de la brune.
— Dans ce grand château, nous formons des jeunes femmes qui ont pour vocation d'être vendues à des individus dont les richesses dépassent ton imagination. Servantes, conseillères, maîtresses ou simples jouets sexuel, peu nous importe ce à quoi vous allez servir. Notre but est de vous donner la formation la plus complète afin que vous puissiez satisfaire nos clients.
Le souffle de la brune se coupa brutalement. Ses yeux s'écarquillèrent. L'information tourna encore et encore dans sa tête, la voix de Jimin l'obséda quelques instants alors qu'elle assimilait ce que cela voulait dire. Toutes ces jeunes femmes ici allaient être vendues. Cela expliquait maintenant pourquoi elles étaient traitées comme de simples animaux. Car dans un premier temps, ils ne les avaient jamais vu comme des êtres à part entière.
Horrifiée, Yerin leva la tête vers Jimin qui se contentait d'arborer un sourire satisfait. Elle allait être formée. Et vendue. Vendue. Vendue. Vendue.
Vendue comme un objet. Un jouet. Un être sans volonté ni conscience.
Et à cet instant, Yerin comprit de quelles ténèbres Jungkook parlait la première fois qu'elle l'avait rencontré.
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