𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟗


-'๑'-ೃ 𝘋𝘰𝘯'𝘵 𝘭𝘰𝘰𝘬 𝘢𝘧𝘵𝘦𝘳 𝘵𝘩𝘪𝘴.


C'était étrange, ces ténèbres. Le ciel était si noir, si profond, infini à travers les yeux de Nahee qui observait l'étendue voluptueuse d'un regard à demi-ouvert. A mi-chemin entre le rêve et la réalité, elle ne sentait même pas la fine couche d'eau dans laquelle elle baignait. Non, sa seule pensée se dirigeait vers ce qui se trouvait face à elle. Les ténèbres éternelles au-dessus de sa tête. Et à cet instant, elle ne savait pas s'il s'agissait d'un voile protecteur ou d'un mur prêt à l'écraser. 

L'air était froid et humide, agréable contre sa peau tiède. Elle ne pensait plus à rien et pour tout dire, elle n'arrivait même pas à se souvenir de ses tourments. Ils ne les avaient pas suivi jusqu'ici, ce monde à part. Lentement, la blonde leva la main, pour aucune raison. Peut-être pour saisir l'obscurité qui s'apparentait à un or sombre au creux de sa paume. Mais alors qu'elle était à deux doigts de toucher ce qui l'attirait tant, les ténèbres se contractèrent sur elle-même et reculèrent avant de trembler. 

Quel phénomène étrange. 

Soudain, l'eau sur laquelle elle se tenait se mit elle aussi à changer, se métamorphosant en un liquide bouillonnant. Sa température jusqu'ici fraîche grimpa brutalement jusqu'à brûler la peau de Nahee qui couina avant de se mettre sur ses deux pieds pour éviter de bouillir elle aussi. Les sourcils froncés, elle tenait son bras encore meurtri et regarda autour d'elle, sortie de sa transe récente. 

Qu'est-ce que c'est, cet endroit... ? 

C'est toi. 

La jeune femme sursauta et se retourna avant de tomber face un grand miroir. Son reflet souriait mais ce n'était décidément pas ce qui attira l'attention de Nahee. Avec précaution, elle s'approcha et tendit la main vers l'objet, hypnotisée. A l'arrière plan de son reflet, les ténèbres étaient percées par des flammes hautes et l'eau devenait vapeur à une vitesse surnaturelle. Les mains des deux Nahee se rejoignirent. Leur contact n'était pas froid comme la glace, bien au contraire. La blonde pouvait sentir la chaleur de la peau de son vis-à-vis. 

Moi ? 

Ce que tu vois autour de nous n'est autre que ce qui te compose. Les ténèbres de Nyx et Érèbe se sont unis pour te donner naissance. 

— Alors pourquoi... pourquoi les flammes ? 

L'autre Nahee se retourna vers l'incendie dans son dos qui crépita plus fort encore sous l'attention des deux jeunes femmes aux physiques similaires. Comme si le feu voulait hurler, sortir de cette prison de l'esprit pour venir tout dévaster. Tout brûler pour recommencer de zéro. Après ce petit temps, le reflet se remit à parler. 

C'est la Nemesis. 

La Nemesis ? 

Tu comprendras ce que c'est bien assez tôt. 

La blonde fronça les sourcils, perturbée. Ce mot avait raisonné jusqu'au plus profond de son âme, comme un mot interdit venu du tréfonds des âges pour revenir hanter les vivants. Elle ouvrit la bouche pour reprendre mais l'autre posa son index sur ses lèvres, lui faisant signe de se taire. 

L'instant d'après, le grand miroir s'effondrait sur elle. 

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Nahee sursauta, ouvrant grands les yeux. Son coeur battait la chamade et sa respiration était saccadée alors qu'elle sentait que tout son corps était en sueur. La blonde déglutit puis se redressa dans le lit avant d'enfouir sa tête dans ses mains en inspirant profondément. C'était un rêve ? Cela avait un arrière goût plutôt amer, pour un rêve. Quelque chose clochait dans cette vision, elle sentait qu'il y avait un message caché, là-dedans.

Bien dormi ? 

La blonde soupira et ne se donna même pas la peine de se retourner pour constater que Yeonjun se trouvait allongé dans son dos, apparu là à peine quelques secondes plus tôt. Il la surveillait inlassablement et elle n'était plus étonnée de ses apparitions intempestives. 

Je ne sais pas... Il y a quelque chose de bizarre. 

Tu veux dire, à part être une déesse et avoir fait naître le jour en pleine nuit ? 

Malgré elle, Nahee ne put retenir un rire. Yeonjun avait le don pour ne jamais être trop sérieux. Des fois, cela faisait du bien de ne pas être entourée de vieilles entités psychorigides. La jeune femme se retourna vers son acolyte et s'entoura de sa couette. 

Qu'est-ce que tu sais de la Nemesis ? 

A la prononciation de ce simple nom, le sang de Yeonjun se glaça et ses yeux perdirent de leur éclat. Lentement, il se redressa sous le regard étonné de Nahee. Elle ne l'avait jamais vu ainsi. 

Terrifié. 

Comment connais-tu l'existence d'un tel pouvoir ? 

Je... J'en ai rêvé. 

Tu en as rêvé ? Comment ? 

J'ai... J'ai parlé à une sorte de double, elle m'a dit que ce qu'il y avait autour de nous était ce qui me composait et... Derrière elle, il y avait un incendie, incontrôlable. C'était la Nemesis, d'après elle. 

Yeonjun déglutit puis sortit du lit rapidement mais Nahee l'attrapa par le poignet pour le retenir. Après tout, sa réaction venait d'éveiller sa curiosité. Le blond se figea et se tourna vers elle, lui lançant un regard glaçant. Mais ce n'était pas cela qui allait l'impressionner. 

Dis m'en plus. 

C'est hors de question. 

Quoi ? 

Je n'ai absolument rien à te dire sur ça. Maintenant lâches moi, je dois aller voir ma Reine. 

Nahee se renfrogna, fronçant les sourcils alors qu'elle le lâchait petit à petit. Allait-il tout rapporter à sa mère ? Elle aurait dû se douter que sa présence était autant une sécurité qu'une surveillance. Au début, cela ne l'avait pas tant dérangé mais petit à petit, elle prenait conscience de ce que cela impliquait. La déesse serra les dents pour s'empêcher de lui dire sa façon de penser. Elle n'avait pas la force de se disputer avec lui dès le réveil et surtout, elle préférait lui obéir bien gentiment pour le moment. 

Le temps qu'il allait utiliser pour aller voir Nyx serait comme du pain béni pour Nahee qui allait pouvoir faire ses recherches de son côté. 

Très bien. Va. 

Je ne plaisante pas Nahee. Laisse la Nemesis dans l'ombre, cela n'apportera jamais rien de bon de toute façon. 

— J'ai compris ! s'énerva la blonde. Maintenant va-t-en. 

Yeonjun leva les yeux au ciel et disparut en une brume noire qui se dissipa quelques secondes plus tard. La blonde ramena ses genoux contre elle, réfléchissant déjà à comment mettre à profit son temps. Et pendant qu'elle le faisait, elle ne réalisa pas que dans son dos, les fleurs apportées là par ses amis venait de faner, asséchées. 

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