chapitre quarante-deux

C'EST AVEC UNE COMPOSITION FLORALE que Charles débarque dans l'immeuble milanais où habite la jeune femme, prêt à se faire entendre et à faire entendre ses excuses qui se confondent par dizaines dans son esprit. Il sait parfaitement qu'il ne pourra pas revenir en arrière et réparer les dégâts causés par son absence pour un évènement tenant à cœur à Willow, toutefois il sent qu'il peut se faire pardonner et seulement le temps le lui permettra.

Cela serait mentir de dire que le monégasque n'appréhende pas la réaction de l'anglaise. Premièrement, elle n'est pas au courant de sa venue, et deuxièmement, peut-être qu'elle est encore profondément énervée et déçue par ce qu'il s'est passé pratiquemment deux semaines plus tôt. Il grimpe les escaliers deux par deux en veillant à prendre soin des fleurs qu'il tient précieusement dans ses mains. Un vieillard lui a gentiment tenu la porte à l'entrée, sans ça il n'aurait pas pu mettre son plan à exécution et Charles se sent chanceux.

Il prend une grande inspiration avant de toquer à la porte une fois arrivé devant celle-ci, presque essoufflé par ces dizaines de marches avalées en peu de temps. Le pilote patiente sur le perron en réajustant les tulipes blanches qu'il compte lui offrir. Ses mains sont moites et il sent que les mots commencent à s'échapper de son esprit, et que si elle venait à ouvrir cette porte dans la seconde, il se retrouverait à balbutier des excuses comme un idiot.

Pourtant, lorsque la porte s'ouvre, le brun est surpris de ne pas voir le petit corps de sa compagne apparaître dans son champ de vision, mais bel et bien une carrure imposante, le dépassant nettement. Son sourire disparaît en une fraction de secondes et ses joues deviennent rapidement cramoisies en prenant conscience que cet homme, devant lui, n'est autre que le directeur général d'un des plus importants sponsors de la FIA, mais avant tout le père de la femme qu'il a déçu il y a de cela quelques jours.

Charles ne sait plus où se mettre en observant Harry s'adosser à l'embrasure de la porte, les bras croisés. Le monégasque a envie de fuir, ou de s'enterrer six pieds sous terre tant la gêne le gagne face à cet homme dont il avait oublié la carrure déstabilisante.

- C'est pour ?

- Je... je viens voir Willow monsieur, il balbutie.

Et souhaite se donner une claque pour réagir tel un adolescent de dix-sept ans rencontrant sa belle famille pour la première fois.

- Que lui vaut cette visite, jeune homme ?

- Je...

- Papa, c'est qui ?

Le simple son de sa voix parvient à faire frissonner le brun, frissons remontant jusque son échine. Il déglutit difficilement en fixant le regard dur du cinquantenaire qui ne répond pas à la question de sa fille. Willow débarque, les sourcils froncés. Son sourire manque à l'appel et le pilote s'en veut.

- Charles, elle souffle.

- Charles, répète son père avec un rictus.

- Papa c'est bon, tu vas le traumatiser là. Va dans le salon s'il te plaît.

Harry marmonne dans sa barbe avant de laisser les deux jeunes adultes. Willow ferme la porte de son appartement derrière elle, et les voici sur le palier. L'anglaise croise ses bras contre sa poitrine avec un air contrarié qui ne la quitte pas d'une semelle.

- Tiens, je t'ai acheté des fleurs, il tend le bouquet à la blonde qui le prend dans ses mains, ils n'avaient pas de tulipes oranges alors j'ai pris des blanches.

- Merci. Qu'est-ce que tu fais ici ?

- Je suis venu m'excuser. Enfin, m'excuser... je l'ai dit cent fois, mais je sais que parfois ça ne suffit pas.

- J'ai juste été déçue Charles, je sais que ça n'avait pas l'air si important vu de l'extérieur, mais cette annonce... c'était un peu l'officialisation d'un nouveau départ pour moi, qui pouvait me permettre d'enfin essayer de tourner la page concernant le deuil de Taylor. Et j'aurais aimé démarrer ce nouveau chapitre en ta présence.

- Je m'excuserai jamais assez pour ça Willow, pour avoir raté ça. Je veux juste être sûr d'être présent pour écrire les prochains chapitres avec toi et je peux t'assurer que c'est vrai.

La jeune femme soupire, tiraillée par des émotions qui se décuplent toujours en présence du brun. Ses prunelles claires la brûlent par cette sincérité et Willow sait que c'était parfaitement involontaire de sa part d'être absent pour ce nouveau départ.

- Je m'excuse aussi pour ce que je t'ai dit. Et j'ai menti.

- À quel sujet ?

- Mon bonheur dépend de toi. J'ai vraiment passé deux semaines de merde, elle rigole amèrement, à ruminer dans mon coin tout en suivant ton week-end de course sans oser envoyer un message.

- Je ne l'ai pas fait non plus, il murmure en risquant une main sur sa hanche. Tu me pardonnes ?

La jeune femme hoche la tête en entourant sa nuque de ses bras, à deux doigts de lâcher le bouquet de fleurs qu'elle tient fermement dans sa main. Ses lèvres se posent sur celles du monégasque et elle soupire d'aise contre sa bouche. Ce contact lui avait profondément manqué durant ces dernières semaines et Willow est rassurée que tout s'arrange, afin de passer outre cette histoire.

- Tu m'as manquée, il dit en serrant son étreinte un peu plus fort afin de la rapprocher de lui.

- Tu m'as manqué aussi.

- Je voulais te le dire il y a deux semaines mais j'ai pas eu le temps. Pendant le grand prix à Barcelone, j'ai viré Éric.

- Tu rigoles ?

- Je te jure.

- Charles c'est fantastique ! Tu vas voir que ça va être bien plus simple, je sais que ça va être difficile parce qu'il a fait parti de ta vie durant des années malgré tout, mais tu verras que tout ira pour le mieux.

- Je sais pas, ce week-end j'avais pas de préparateur physique j'ai dû m'entraîner avec celui de Carlos, faut pas que ça me porte préjudice après.

- Ça ne peut qu'être bien, d'accord tu n'as plus de préparateur physique ou d'entraîneur pour le moment, mais au moins mentalement ça ira mieux. Tu as recommencé depuis la dernière fois ?

- Pas depuis avril, je t'appelais à chaque fois que j'en avais envie.

Willow sourit et se hisse sur la pointe des pieds pour sceller leurs lèvres une énième fois. La jeune femme est extrêmement fière qu'il ait enfin pris cette décision qui lui permettra de se concentrer uniquement sur la course et non plus sur cette peur constante d'affronter son préparateur physique.

- Je vais pouvoir rentrer dans ton appartement quand même ? Non pas que ton père me fait peur mais... si, il m'effraie vraiment. C'est différent de Monaco, là.

L'anglaise explose de rire en déposant un baiser sur la joue piquante du pilote due à sa barbe mal rasée, avant de s'écarter légèrement et de glisser sa main dans la sienne.

- C'est un vrai nounours, c'est juste que comme "deuxième impression", on va dire, tu as fait fort.

- Je devrais plutôt lui offrir les fleurs dans ce cas.

Willow ricane en pressant plus fortement sa main dans celle du brun. Charles ouvre la porte pour elle, n'ayant plus aucune main libre, toutefois il reste légèrement en retrait lorsqu'ils se dirigent vers le salon. Harry est confortablement installé sur le sofa, les yeux rivés sur son téléphone qui semble particulièrement intéressant. En entendant du bruit parvenir de l'entrée, il se détache de l'écran et se racle la gorge avant de se lever.

L'anglaise réprime un éclat de rire en sentant le pilote se tendre à ses côtés, tandis qu'elle lâche sa main afin de déposer les fleurs dont elle s'occupera après sur la table de la cuisine. Charles reste raide comme un piquet devant le père de sa compagne qui essaie de rester sérieux un minimum, essayant de ne pas se moquer gentiment de son gendre.

- Donc, maintenant que tout est rentré dans l'ordre, vous pouvez au moins vous dire bonjour.

Les deux hommes s'offrent une poigne de main sous l'œil avisé de Willow, qui patiente pour les premières paroles de son père. Charles est affreusement stressé. Bien qu'il ait rencontré Harry au grand prix quelques semaines avant, ce n'était que durant quelques minutes, par manque crucial de temps.

- Tu es tout tendu mon garçon, relâche-moi ces muscles un peu.

Charles lâche un rire un peu gêné avant de se gratter l'arrière de la tête, ne sachant que répondre à cela. Willow sourit face à la scène. Elle prétexte devoir aller chercher le courrier afin de les laisser entre eux, et si les yeux du monégasque pouvaient lancer des éclairs face à cette haute trahison, ils le feraient. Le brun déglutit une énième fois devant le père de la jeune femme qui porte un regard bien plus bienveillant que quelques minutes auparavant.

- C'est la première fois que ma fille me présente un garçon, alors concernant ce petit malentendu d'il y a deux semaines, ce n'est pas bien grave, j'avais eu bonne impression de toi à Monaco. Willow est une femme réfléchie, alors je lui fais confiance, tant que l'on me ramène ma fille comblée, et non brisée.

- Mon but n'est pas de lui faire du mal.

- Je me doute ! Alors, si on parlait plus sérieusement de formule un maintenant ?

Et un sourire prend immédiatement possession des lèvres du brun sans qu'il ne puisse le contrôler. Les voici partis dans une discussion mouvementée entre un pilote et un passionné, et lorsque Willow regagne son appartement, elle est surprise d'entendre cette discussion animée entre les deux hommes.

Elle est soulagée par cela, elle qui était stressée à l'idée de présenter un homme à son père pour la première fois il y a quelques semaines.

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Willow a pris le temps de faire visiter son nouvel appartement à Charles après le départ de son père, et le brun est satisfait de savoir qu'elle se sentira bien dans son nouveau domicile. Le monégasque s'est d'ailleurs empressé de tester le lit en sautant dessus, faisant sauter une latte pour le plus grand malheur de la jeune femme qui n'a pas manqué de lui râler dessus avant de lui faire réparer son pauvre lit.

Les voici allongés sous les draps, dans les bras l'un de l'autre et Charles soupire d'aise, cette sensation lui ayant fortement manqué à Montréal. Le pilote se remémore soudainement d'une de leur précédente discussion et demande curieusement :

- Au fait, tu m'avais parlé d'une surprise avant le grand prix de Barcelone...

- Ah oui ! Rassure-moi, tu n'as rien de prévu le dimanche vingt-cinq juin ? elle demande innocemment en ouvrant le tiroir de sa table de chevet.

- Dans cinq jours ? Normalement non, puis le dimanche c'est sacré, j'essaie toujours d'éviter Maranello.

Elle se redresse afin de se positionner en tailleur, les mains derrière le dos. Charles hausse un sourcil en apercevant ce sourire malicieux qui ne la quitte pas. Il se redresse à son tour, lui faisant face. Le monégasque sourit bêtement en observant l'excitation de la blonde qui semble ne plus tenir en place. Simplement, elle lui tend une enveloppe, et aussitôt ses sourcils se froncent.

Précautionneusement, il attrape celle-ci et la détaille, laissant le suspense prendre possession de la pièce, rendant la jeune femme complètement impatiente.

- Allez, ouvre ! Elle râle.

Charles rit de sa bêtise et s'empresse de déchirer l'enveloppe sans avoir la moindre hypothèse de ce qui puisse se cacher à l'intérieur. Deux bouts papiers cartonnés apparaissent sous ses yeux et lorsque le monégasque les prend en mains en s'attardant sur ce qu'il y a marqué dessus, il relève rapidement la tête, complètement abasourdi.

Directement, ses bras viennent s'envelopper autour du corps de la jeune femme qu'il fait basculer sur lui pour la serrer dans ses bras avec puissance, tant il est heureux. Willow éclate d'un rire cristallin dont Charles ne se lasse jamais et le pilote se redresse, ne parvenant pas à y croire.

- Je t'aime, tu le sais ?

- Seulement pour avoir dégoté ces places de concert ? Elle taquine.

- Comment tu as eu les places ?

- J'ai acheté ces places il y a des mois, parce que j'aime bien certaines chansons- sûrement pas autant que toi évidemment-, et j'hésitais à les revendre puisque mi-avril, Crystal m'a dit que finalement elle ne pourrait pas venir. Depuis je les garde précieusement et quand tu m'as avoué que c'était ton groupe préféré, j'ai pris ça comme un signe du destin.

Charles ne peut se défaire de ce sourire qui trône sur ses lèvres, tellement immense que sa mâchoire est rapidement endoloris. Le brun ressent le besoin constant de prendre l'anglaise dans le creux de c'est bras et ce n'est pas pour lui déplaire, bien au contraire. Le monégasque n'en revient pas. Jamais il n'avait eu l'occasion de voir en concert son groupe favori, à cause des grands prix ou des entraînements à rallonge. Et aujourd'hui, Wilow lui offrait cette opportunité, enfin, de voir Coldplay en concert et jamais il ne pourra la remercier parce que des remerciements ne seront jamais assez face à cette joie immense qui parcourt toutes ses cellules.

Willow n'était pas un coup de foudre. La foudre est trop violente. Willow est un coup de soleil léger, qui le fait rougir doucement, rendant ses joues rosées. Il a attrapé un coup de soleil. Et c'est encore plus sublime qu'un coup de foudre.

Willow pourrait tuer pour apercevoir une fois supplémentaire ce bonheur traversant les iris du brun. Ses yeux pétillent et elle est comblée. Car dans ses bras, trône l'œuvre d'art la plus sublime du musée.

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on sent la fin venir :(
il reste un chapitre avant l'épilogue :(

sachez que le dernier chapitre, l'épilogue ET le bonus seront bien plus courts que le reste de l'histoire, puisque ça va à L'ESSENTIEL, et c'est pour boucler toutes les boucles on va dire.

ça me rend triste de les quitter :(
à jeudi !

-alcools

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