Chapitre 31

Mon corps ne pouvait plus suivre ce que mon cerveau lui disait. Je voulais rester forte sur mes jambes, aussi dure que la pierre, mais la tension qui se faisait sentir sur chacun de mes muscles m'en empêchait. Je m'étais écroulée sur le siège passager de la voiture et alors que mon petit ami parlait, j'entendis se sifflement dans mes oreilles. Je ne l'entendais plus. J'étais figée et ce fut après plusieurs longues minutes que je réussis à murmurer quelques mots.

- Amène-moi chez toi s'il te plaît.

Jungkook hocha simplement la tête, voyant parfaitement qu'il n'avait pas la moindre once de mon attention, puis nous nous mîmes à rouler. Mes pensées étaient sombres, je ne cessais de penser aux mains de cet homme ignoble sur moi et de ressasser mes anciens souvenirs, réveillant mes vieux démons lorsque je me rappellai de la façon dont laquelle il m'avait volé ma virginité.

Oui, malgré toutes ces années qui s'étaient écoulées, je pouvais encore sentir mes entrailles brûler lorsqu'il s'était enfoncé en moi. Je me souvenais même de mes cris, non pas de plaisir, mais de détresse. J'avais crié, mais personne n'avait pu m'entendre. J'avais pleuré, mais là encore je fus seule, laissée-pour-compte, impuissante face au diable. Ce diable qui avait donné à ma vie un tout autre sens et qui avait de moi celle que j'étais.

J'étais complètement perdue dans mes pensées, quand tout à coup, je tribuchai, quittant aussitôt ma transe pour me rendre compte que je me trouvais déjà dans le studio de Jeon. J'étais enfin en sécurité et ce ne fut rien que lorsque je le compris que je me mis à pleurer, à genoux sur le sol, mon visage engouffré entre mes paumes.

- Bébé ! Bébé, tu t'es fait mal ?

J'entendis la porte d'entrée claquer violemment derrière moi, me faisant sursauter, puis je sentis le torse de l'homme que j'aimais se poser contre mon dos alors que ses bras forts m'entourèrent. Sa chaleur rassurante embrassa mon être en un rien de temps pour permettre à mes pleurs de se firent entendre davantage.

- Princesse, ne pleure pas, murmura-t-il dans le creux de mon oreille. Tu t'es fait mal ?

Mon silence fut douloureux pour lui. Il voyait mon état sans même savoir quel en était la cause et cela le fit souffrir. Ce jour-là, nous souffrîmes et pleurâmes comme si nous n'étions plus qu'un et malgré mes sanglots, j'en vins à me dire qu'il était fait pour moi.

- Parle-moi s'il te plaît... Tu peux tout me dire, chérie.

Jungkook m'aida lentement à me relever, me remettre sur pied, puis je sentis ses bras se refermer davantage sur mon corps qui ressemblait à celui d'une morte. Ma peau dorée s'était comme appâlie au contact de mon tortionnaire, tant et si bien que même les mains de celui que j'aimais ne purent me redonner des couleurs.

- Seth, parle-moi... Je t'en prie.

Mon petit ami posa délicatement ses mains sur mes bras, me retournant petit à petit avant d'enlever mes paumes de mes yeux. Avec douceur, il releva mon visage, nos yeux rouges et humides s'interloquant instantanément, avant que mon cœur ne se mette à s'alourdir dans ma poitrine.

L'homme qui se trouvait devant moi était le seul qui me donnait de l'espoir, néanmoins, je n'avais pas l'impression de le mériter. Comment, moi, une femme aussi dégoûtante, pouvais mériter un homme tel que lui ? Comment une femme impure pouvait être digne d'un homme aussi bon ? "Il doit être fou pour aimer quelqu'un comme moi." pensais-je en contemplant honteusement les yeux parfaits qui se trouvaient devant moi.

- Qu'est-ce qu'il y a ? S'enquit Jungkook, soucieux, en caressant mes joues. Valentine a encore essayé de t'intimider ? Qu'est-ce qu'il t'a dit ?

- Rien... Rien du tout mon ange, murmurai-je en posant mes mains sur son cou avant d'embrasser tendrement ses lèvres. Je vais aller prendre une douche. On pourra se regarder un film après si tu veux, OK ?

Dans ses yeux foncés, je pus voir de la pitié, ma petite et frêle silhouette ne lui donnant pas le courage de me confronter. Il avait tant de questions, cependant, pour moi, il se contenta d'hocher la tête, me permettant de m'éloigner sereinement de lui. J'ôtai difficilement ma robe et mes sous-vêtements, saisissant un des sweat-shirts de Jungkook et une serviette avant d'entrer dans la cabine de douche.

J'avais voulu resté forte pendant tout ce temps où je fus dans le champ de vision de Jeon, néanmoins, lorsque j'ouvris l'eau et que celle-ci se mit à se déverser sur moi, je ne pus m'empêcher de recommencer à pleurer. Je me sentais sale, souillée à la fois par mon passé et mon présent, et ce fut par automatisme que je repris mes habitudes d'autrefois.

Dans le plus grand calme, je m'agenouillai contre le carrelage trempé, laissant l'eau s'écraser violemment sur mon dos avant que je ne commence à frotter agressivement ma peau. Oui, je me sentais sale à cause de ces mains horrifiantes qui m'avaient une fois de plus touchées, alors je laissai mes ongles gratter mon corps sans relâche et en saigner ne m'arrêta pas.

Au bout de plusieurs minutes, mon enveloppe, elle que j'avais entretenu sans une once d'amour, ressemblait à nouveau à celle que j'avais gravé dans ma tête. Mon corps était à nouveau laid et meurtri, déchiqueté. C'était comme ça que mon apparence reflétait le mieux mon état d'esprit, totalement mutilé et pillé de toute beauté.

Mon corps, blessé de partout, brûlait d'une atroce chaleur au contact de l'eau bouillante qui m'arosait, cependant, je ne poussai pas une seule plainte. Cette douleur n'avait pas la moindre importance à côté de toute celle que je gardais pour moi depuis longtemps.

L'eau, quelque peu bienveillante, effaça encore et encore ces gouttelettes de sang qui se formaient sur ma peau à vif et dans un sens, je ressentais un certain sentiment de rédemption à cette souffrance. Comme si c'était là mon moyen de me purifier. En tout cas, c'était comme ça que je m'apaisais depuis mon quatorzième été.

- Seth ! Tu veux regarder quoi ?

Je sursautai en entendant la voix de mon petit ami. Il était si près de moi, tout juste de l'autre côté de la vitre opaque. Je me demandai directement de ce qu'il penserait de moi s'il me voyait dans un état aussi misérable, s'il regretterait d'aimer une personne aussi repoussante que moi, alors je ne pus le répondre.

- Princesse ! Tu m'entends ? J'ai envie d'un film drôle mais je sais que tu n'aimes pas ça. Qu'est-ce que tu veux regarder ?

Je ne pus prononcer le moindre mot, et je crus me protéger de cette façon-là, cependant, je n'avais pas pensé que mon mutisme puisse inquiéter Jungkook au point qu'il ouvre les portes de la douche.

- Pourquoi est-ce que tu ne réponds pas ? Demanda-t-il alors que la vapeur vint flouter sa vue.

- Ne me regarde pas Jeon ! Criai-je en me recroquevillant sur moi-même. BARRE-TOI ! LAISSE-MOI !

- Qu'est-ce qu'il te prend ? Pourquoi est-ce qu'il fait aussi chaud là dedans ? On dirait l'enfer !

Le noiraud ferma rapidement le robinet, me tirant hors de la cabine avant que ses yeux ne se posent sur mon corps que je m'embêtais à essayer de cacher avec mes mains.

- Seth, putain... Balbutia-t-il en remarquant les éraflures qui peuplaient ma peau. Pourquoi est-ce que tu t'es fait ça ? As-tu perdu la tête ? Parle ! BORDEL !

- Fous-moi la paix, Jeon.

Je n'avais plus la force pour me disputer avec lui. Je ne voulais pas gâcher la paix que vous avions depuis plusieurs semaines, pas ce soir-là, alors je me tus, enfilant le vêtement que je m'étais appropriée, avant de passer mes bras autour de sa taille. J'avais besoin de lui, pourtant, il me repoussa sèchement pour me toiser.

- Parle ou tu ne me reverras plus jamais.

- Tu me ferais ça ? Tu partirais loin de moi ?

Mon coeur tressaillit lorsque ma voix se coupa subitement. Ô oui, penser qu'il puisse être me laisser me fit du mal aussi. À croire que j'étais devenue l'être le plus faible au monde, puisque les larmes embrumèrent aussitôt ma vue.

- Si tu m'y forces... Je le ferais sans hésiter, DeLayne.

- Parfait... Murmurai-je en souriant incrédulement avant de caresser sa joue. Je t'aime, hein. Je t'aime vraiment, mon ange.

Je déposai un chaste baiser sur ses lèvres rosées, puis je le contournai. À contrecœur, je m'apprêtais à partir, ma main effleurant tout juste la poignée de la porte d'entrée, quand soudain, Jeon me retourna et me plaqua brusquement contre celle-ci, son poing venant s'écraser violemment près de ma tête.

- Tu étais prête à me laisser. Es-tu complètement dingue ? COMMENT EST-CE QUE TU PEUX ME FAIRE ÇA ? Tu n'as pas le droit de partir ! TU ES MA FEMME ET TU NE PARTIRAS PAS D'ICI TANT QUE TU NE M'AURAS PAS DIS CE QUE TU AS ! TU M'ENTENDS ?

J'étais à la fois effrayée et soulagée, néanmoins, ce fut en larme que je fixai ses grands yeux sombres, ne sachant pas vraiment que faire d'autre à ce moment-là que de lui donner une réponse à ses interrogations.

- Il m'a violé.

- Quoi ?

- J'avais quatorze ans quand Samuel Valentine m'a violé, dis-je tandis que ma voix craqua.

- Oh putain... Murmura-t-il en m'emprisonnant dans une étreinte forte et rassurante. Pardonne-moi... Pardonne-moi mon amour... Pardon... Je suis désolé... Tellement désolé.

Dans ma tête, ce scénario n'aurait jamais pu se produire, néanmoins, ce fut ce qui arriva, car au lieu d'être dégoûté de moi, Jungkook se mit à pleurer avec moi. Pour la toute première fois de ma vie, ma peine fut partager et bien que cela ne semblait pas être grand chose, pour moi c'était un pas vers la guérison.

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