Chapitre 6: Fureur
Odessa
J'ai mal à la gorge depuis hier, mais je suis surtout enragée. J'ai réussi à garder ma colère, mais elle va bientôt être libérée. Mars se lève du canapé où il faisait encore je ne sais quoi sur son téléphone. Il va sûrement téléphoner. C'est ce qu'il croit. Assise au comptoir de bar du côté cuisine, je sors rapidement les grands ciseaux du bas de ma brassière. Il aurait remarqué un couteau manquant dans le bloc en bois. Maintenant, c'est Mars le bloc à lame. Je me glisse doucement derrière lui dans le couloir. Il est encore sur l'écran et m'ignore. Je lève le bras. Malgré mes tremblements, avec les forces que j'ai, j'abat la lame vers le haut de son omoplate. Aussitôt, Mars laisse tomber son téléphone en émettant un son guttural suivi par un:
-Putain!
En regardant les ciseaux dépassant de son dos et son t-shirt se teintant de rouge, je recule rapidement. Il ne tombe pas ni rien. Il enlève les ciseaux logés vers le milieu de son dos en grognant d'une façon qui me fait trembler. Mon estomac se tord et mon cerveau se met sur une fonction primale seulement. Cours.
Je le fais et commence à tourner la clé de la porte d'entrée en priant pour être assez rapide. Soudain, je suis attrapée par le bras violemment et jetée à travers la pièce. J'ignore presque le choc aigu de la chute, à cause de l'adrénaline me faisant ramper pendant que mon cœur cogne. Je tente de me relever et il tire ma jambe violemment, me faisant presque tomber sur le menton en criant.
Il répond trop calmement maintenant:
-Tu peux crier, on est bien isolés ici. Tu te souviens?
J'ai des flashbacks de quand il m'a infligé la blessure qui commence à peine à guérir. Je me met à haleter de panique. Il me retourne , se met sur moi puis commence à serrer ses mains autour de mon cou. J'essaie de supplier, mais aucun son ne se forme. Il y a seulement ma terreur à l'idée de mourir, faisant battre mon cœur plus vite.
J'essaie en vain d'enlever ses mains, mais il est plus fort que moi. Il a dans le regard les mêmes flammes cruelles que je voyais quand il m'a attaqué hier. Mais c'est son calme les accompagnant qui me terrifie. Je ne pensais pas que c'était possible, mais il serre un peu plus. Je sens l'air s'échapper plus rapidement malgré mes efforts pour en avoir et les oreilles bourdonnantes j'entends:
-Refais-moi un coup comme ça et je te cognerai tellement fort que t'auras besoin des secours pour reprendre connaissance.
Je comprends à peine sa phrase et mes larmes coulent de peur, parce que je me vois déjà mourir. Tout est flou. Soudain, ça s'arrête et mon corps prend une grande inspiration. Je me mets à haleter un moment en toussant au point de presque vomir.
Dès que j'arrive à me lever, je cours le plus vite possible loin de Mars assis sur le canapé. Après avoir manqué de tomber en glissant sur du sang, je m'enferme dans la salle de bain. Je veux encore plus le tuer. Je me retiens de me remettre à pleurer, car ça n'aidera personne. J'essaie de me calmer contre la cabine de douche quand de forts coups à la porte me font sursauter. Je m'arrête de bouger et retiens ma respiration, puis sursaute en entendant:
-Si j'ouvre la putain de porte, tu vas le regretter! Sors!
Je me lève doucement et ouvre la porte en me retenant d'imploser de peur. Il est assis sur le lit, torse nu. Je suis toujours là à le regarder en tentant de déchiffrer certaines des cicatrices sur son torse athlétique, quand il me dit:
-Viens.
J'hésite, mais approche un peu et il me jette le kit de secours. Je l'attrape et il dit:
-Je peux pas soigner la saloperie que t'as faite logiquement, donc tu vas t'occuper de réparer ta connerie et j'ai pas intérêt à voir d'infection.
Je ne dis rien et il siffle:
-Bouge.
J'hésite, mais je m'assieds à côté de lui et il se tourne. Face à la partie ouverte et sanglante de son dos qui coule encore un peu, je grimace. Une partie de moi ressent de la culpabilité, mais une autre en est fière. Dans la boîte, je vérifie. Je déglutis avec ma gorge endolorie puis lui dis:
-J'ai presque fini l'antiseptique, il ne reste que de l'alcool.
Il réplique:
-Finis-en juste.
J'inspire nauséeuse et tremblante à l'idée de sa réaction, quand il aura encore plus mal. En plus est-ce que je devrais faire ça alors que ça coule encore? Je commence par essayer d'absorber le sang de la plaie avec une compresse que je mets sur la plaie et il tressaille au début. Sa respiration devient rauque. Il se tient tranquille malgré tout et quand les saignements ont l'air de s'être calmés, je prends l'alcool.
Je commence à nettoyer autour puis prends une petite inspiration et me lance. Au contact de l'alcool, il tressaute et les muscles sculpturaux de son dos ressortent avec leurs mouvements.
J'aimerais presque ça. Cette peur altérant ma respiration et mon rythme cardiaque, mélangée à la tension dans mon corps et les picotements entre mes jambes. Non. Ce n'est pas parce que ce n'est pas de la terreur que c'est mieux au point d'aimer ça pour s'adapter. Encore moins l'accompagner du reste. Je dois me reprendre. J'ai constaté que Mars a des cicatrices au torse, au flanc et aux abdos, mais je suis sa première cicatrice au dos. Ma fierté est à nouveau étouffée par la morale. À cause de sa souffrance le faisant respirer de façon irrégulière, je dis à Mars:
-Désolé.
Je sens la douleur dans sa voix quand il réplique durement:
-Je me fous de tes excuses.
Très bien. Il ne le mérite vraiment pas. Je crois que j'ai déconné avec l'alcool. J'ai dû enlever du sang coagulé qui stoppait le saignement, en plus ça a l'air profond. Je lui demande:
-Tu te sens bien là?
-Quoi?
-Ça continue de saigner et ça a l'air profond. Je sais pas ce que j'ai fait, je...
Il dit énervé:
-Putain qu'est-ce que t'as foutu?!
Je me remets à trembler et il commence à appeler avec son téléphone tâché de sang. Putain il va me faire tuer. Je crois que je vais vomir. Ça m'a bien fait passer l'envie "d'aimer ça". Au milieu de mon état, je l'entends vaguement dire:
-Dis à Icarus de venir, commence pas à casser les couilles je vais bien. Ok.
Il raccroche et je me retiens de pleurer tandis qu'il dit:
-Tiens la compresse, sauf si tu veux que j'en foute partout.
Malgré mes tremblements, je tiens la compresse. Après un moment me semblant être une éternité, je sursaute quand on sonne. Mars m'ordonne:
-Va voir. Si elle a des cheveux gris, fais-la entrer.
Je laisse ma tâche à contrecœur. Ça va continuer à saigner. Comment il tient? Je me lève et en évitant le sang par terre j'avance à reculons vers la porte. Je regarde par le trou. Il y a une femme noire à la peau marron un peu plus foncée que Sirius. Elle ne lui ressemble pas du tout non plus donc elle doit seulement bosser pour eux. Elle a des cheveux argent, malgré son âge apparemment moyen. Elle a un sourire et un sac à dos. J'inspire. C'est peut-être ma mort, mais je n'ai pas le choix. Je me retiens de pleurer en ouvrant. La femme est un peu plus petite que moi. Elle me sourit avec ses pommettes rondes et dit:
-Bonjour, je suis là. Je suis Kira.
Icarus. Je pourrais peut-être la battre et lui prendre son arme si je la trouve. En regardant sûrement le sang me recouvrant, elle ajoute:
-Heureusement que je suis là, oui.
Je bégaie:
-I...Icar...us?
-Exactement, toi aussi tu ne te sentirais pas mal?
Elle s'en soucie, elle va pas me tuer. À moins que Mars et ses acolytes soient vraiment tordus. Malgré ma gorge encore un peu douloureuse, je réponds:
-Non, je vais bien. Entrez.
Pendant que je ferme la porte sans tourner la clé au cas où, elle me lance:
-Tu peux me tutoyer...Mars?!
Il sort et la femme rit. Une chose folle se produit ensuite, Mars esquisse un sourire. Un beau sourire malicieux. Il dit:
-Hey Kira.
Cette dernière demande:
-Alors où tu t'es fait mal cette fois?
Il se tourne pour lui montrer son dos saignant et je retiens ma respiration en attendant qu'elle se jette sur moi. Elle commente:
-Wow. Comment...
Elle me regarde et mon air coupable a dû me livrer, parce que son expression devient prédatrice. À ma surprise, Mars lui dit:
-C'est bon, elle va pas réessayer.
La femme me décoche un autre sale regard, mais elle reporte son attention sur Mars à qui elle demande énergiquement:
-Bon, on ne doit pas perdre de temps. Je suis déjà surprise que tu ne titubes pas. Couche-toi sur le canapé...c'est un peu petit.
Je dis doucement:
-Le lit...
Elle approuve:
-Oui, voilà.
Elle suit Mars en évitant le sang séchant par terre. Je les suis, mais reste dans le couloir à écouter de loin, hors de vue. Je pourrais m'enfuir, mais je crois bien que c'est impossible. Ils me retrouveront et me mettront une balle dans la tête si ce n'est pas une autre option.
En plus, toute ma vie est ici, je ne pourrais pas attraper mes affaires essentielles. Je suis couverte de sang pour améliorer le tout. Du sang que j'ai fait couler. Sirius a dit qu'il pourrait me faire pourrir en prison s'il ne me tue pas et je lui rends la tâche encore plus simple. Kira dit à Mars:
-Ok, c'est un peu profond, donc je vais te recoudre. J'ai amené une perfusion que j'ai laissée dans la pod, mais tu ne m'as pas l'air trop mal. Je vais quand même te tester pour être sûr.
Mars répond:
-C'est rien, j'ai vu des gens pisser beaucoup plus de sang.
Elle réplique:
-Je n'en doute pas. Ok, je vais te piquer pour l'anesthésie.
Mars rétorque:
-Je connais le truc, fais-le juste. Je suis pas un gosse.
Elle se lamente:
-Oh là, là.
Après un moment plus rapide que je ne le pensais, elle dit:
-Voilà, j'ai fini de te recoudre...tu crois pas que ton amie nous a fait faux bond? Je n'entends rien.
Mars réplique:
-On n'est pas amis et je sais qu'elle n'est pas aussi stupide.
Il lève la voix en continuant:
-N'est-ce pas?!
Je suis tentée de leur faire croire que je suis partie, mais je ne devrais pas les énerver, ils sont deux. Je réponds:
-Je suis là.
Mars dit à Kira:
-Tu vois? Je savais qu'elle fouinait.
Je serre la mâchoire et m'éloigne. J'observe le sol maculé de sang, comme mes bras, mes mains, mes pieds. Ça tâche partout. Ça marque tout si facilement, comme ces gens ont ruiné ma vie en l'espace de quelques heures. Le tapis est noir, mais ça ne m'étonnerait pas que Mars y ait foutu du sang en allant sur le canapé gris qu'il a taché. Putain je le hais. J'ai commencé tout ça, mais je le hais. Kira m'approche et me donne un papier en disant:
-Je ne sais pas si tu vas rester avec lui longtemps et c'est pas mes affaires. Mais ne réessaie jamais de faire ça. Il peut te tuer, sérieusement. Aide-le à nettoyer la plaie. Elle doit être couverte et sèche. Rappelle-lui surtout de prendre ses médicaments, ce gosse déteste ça. Et il doit absolument manger ce qui est dans la liste pour se remettre, surtout la viande.
Moi? Nourrir Mars? Le forcer à prendre des médocs? Mais bien sûr. Malgré tout, je réponds:
-D'accord.
-Tu as de quoi t'occuper de sa blessure?
-Pas vraiment, j'irais ach...
Elle sort un arsenal médical de son sac et le met sur le comptoir de bar. Elle dit:
-Tu devrais être bien un moment. C'est mon moment pour partir. Bye Mars!
Il sort de la chambre et dis:
-Merci Kira.
La politesse? Chez lui? Eh ben. Kira lui répond:
-De rien, ne la tue pas.
Il rétorque:
-Hmmm.
Elle me fait signe en disant:
-Au revoir.
Quand je referme la porte, je regrette sa présence. Je suis tellement stupide, elle aurait aussi pu soigner ma blessure, même si elle va mieux. Mars l'en aurait peut-être empêchée. Je me remets à avoir la nausée à l'idée d'être seule avec lui après ce que j'ai fait. J'ai aussi ce sentiment d'incertitude, avec n'importe lequel de mes mouvements. Quand il retourne dans la chanson, je prends quand même la serpillère et le seau.
Je mets ma colère dans le nettoyage. Je n'ai jamais fait saigner quelqu'un et pourtant j'ai grandi avec des connards.
Quand j'ai fini le sol, je regarde le canapé et vais quand même m'asseoir du côté qu'il n'a pas taché. Comment je vais nettoyer ça? Des larmes chaudes coulent sur mon visage et je grimace avant de couvrir ma bouche pour étouffer mes sanglots. D'un coup, je sursaute en entendant Mars me dire:
-Quand t'auras fini de chialer, change-toi et n'oublie pas d'ouvrir la porte. J'ai commandé à manger et la douleur commence à empirer avant que les antidouleurs marchent. Donc j'irai pas ouvrir.
Il ricane et ajoute:
-T'es au courant que t'aurais pu me paralyser? Je devrais vraiment te buter.
Il s'en va et je respire lentement pour me calmer.
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