Chapitre 13: Ressentiment
Odessa
Le sexe, qu'est-ce que l'amour a à voir là-dedans? L'article sur mon téléphone dit:
"La distinction la plus couramment comprise entre le désir sexuel et l'amour est que cette forme de désir est purement physique et sexuelle, tandis que l'amour inclut le fait de se soucier de quelqu'un bien au-delà de sa fonction comme source de désir et de gratification sexuelle."
Mars aime mon corps, mais s'en ficherait sûrement s'il devenait froid et immobile pour toujours. Je ne sais pas pourquoi je me fais encore un trip à cause de ça. Je ne comprends pas non plus pourquoi j'ai recommencé et me suis pliée à ses trucs "additionnels". Je suis encore vivante, mais quand même. Je pensais vraiment que je n'étais pas du genre à avoir des coups d'un soir, ou plutôt des plans culs. Je ne sais pas, j'espère vraiment que je suis juste guidée par du désir sexuel, pour mon propre bien. Enfin, je le suis définitivement en partie, sinon je n'aimerais pas autant ça.
Pourtant, accepter ça, même le lendemain, c'est dur. J'en suis vraiment réduite à faire des recherches en ligne, pour gérer mes sentiments. Je ne retournerai définitivement pas dans le fauteuil d'un psy à cause de Mars. De toutes les façons même si Sirius et Mars me laissent faire je ne pourrais rien dire. Je m'assieds et grimace à cause de mes fesses. Mes morsures ne me font pas mal aussi facilement au moins. En me levant, cette fois je sens plus les effets de Mars dans mon bas-ventre. Ça ne me fait pas super mal, mais c'est assez bizarre. C'est ridicule. Je ne dirai rien pour éviter ses moqueries en plus de tout le reste.
J'espère que son dos lui fait mal.
Des heures après, à la fin de la journée, je me félicite d'avoir réussi à éviter Mars le plus possible et je me sens à nouveau normale physiquement. Soudain, je me surprends à repenser à ses lèvres, emprisonnant les miennes dans leur douceur et son beau corps me faisant du bien. Putain, je dois arrêter d'y penser. Ce n'est pas sain. Lui il ne se vante pas et n'en reparle même pas. Peut-être que j'ai foiré quelque part. Je n'aurais peut-être pas dû pleurer quand il m'a fessée.
Non, on s'en fout. Pourquoi je me soucie de faire du bien à un gars qui a planté un couteau dans ma cuisse et léché le sang? Je m'arrête de fixer la série sur mon téléphone que je ne regarde même pas. Je vais ouvrir le frigo et Mars sort de la chambre, que j'ai quittée quand je l'ai vu arriver pour se doucher. Il passe en disant:
-T'as cuisiné tout ce qu'il y avait à faire, je sais pas pourquoi tu regardes encore là-dedans.
Je me pousse pour le laisser prendre le jus d'ananas. Le seul copain que j'ai eu m'a révélé que j'étais la fille avec qui il trompait sa vraie copine. Il a fait ça après que je l'ai jeté, parce qu'il avait pété les plombs à cause de son objectif de coucher avec moi, alors que je n'étais pas prête. Le pire c'est que je m'en foutais. Je n'ai rien ressenti à part de la colère pendant un ou deux jours pour avoir été "l'autre fille". Mais maintenant, je suis en train de perdre la tête à cause d'un gars que je ne connais que depuis un mois et je ne sais plus combien de jours. Tout ça parce que je l'ai laissée mettre sa queue en moi. L'amour et les sentiments c'est de la pure merde. Je contracte ma mâchoire, Mars se met à me demander confus:
-Hey, ça va?
Je ne lui réponds pas et ne le regarde pas donc il s'approche, mais je tourne la tête et le mitraille du regard. Il fronce les sourcils décontenancé tout en plissant ses maudits yeux vivides et foncés. Je m'éloigne encore enragée.
***
Aujourd'hui au comptoir de bar je me frotte les yeux comme je le peux sans foutre en l'air mon maquillage. J'ai mal à la tête. Ça fait plus d'une semaine depuis "L'incident 2". Je dors à nouveau avec Mars sans me sentir stressée, ruminer, ou être assaillie de flashbacks et il me fout la paix. Malheureusement hier soir j'ai rêvé de cet endroit froid et chaotique. J'avais un tas de couvertures, mais j'avais froid et je me sentais seule derrière des barreaux. Je pleurais, mais personne ne venait me chercher. J'étais trop petite pour sortir de ce lieu à barreaux immense. Je ferme les yeux et inspire pour me retenir de pleurer. Je manque de tomber de ma chaise en sursautant quand j'entends près de moi:
-T'as fini ou tu veux du thé et de l'aspirine?
Mars s'est glissé à côté de moi, je ne sais pas quand et je ne l'ai même pas vu arriver. Je lui lance un sale regard. Il sourit doucement, montrant plus ses pommettes saillantes et étirant ses lèvres voluptueuses. Il me dit en se levant:
-Viens, loser, on va faire du shopping.
Malgré la modification de sa phrase, je reconnais la réplique de Mean Girls. Pour la première fois depuis un moment je me sens mieux avec lui. Je demande amusée:
-Tu connais le film?
Il répond:
-J'avais une sœur.
Mon sourire s'écroule en repensant au "avais". Il ricane et continue:
-Cette connasse n'est pas morte et on n'est pas liés biologiquement. Mais je me la taperais pas, même si sa vie en dépendait.
Je fronce les sourcils confuse par tout ça. Il me dit:
-Je t'en ai déjà trop dit, bouge Chouquette.
Je soupire et vais chercher ma veste. On sort de l'appartement, puis on traverse l'un des ponts menant au côté droit. Le tout dans un silence de mort avec Mars sur son téléphone et moi dans la bulle de mes écouteurs. Je les enlève et Mars range son téléphone, quand on sort de l'ascenseur transparent pour pénétrer dans le Nexus par un des côtés de son cercle extérieur. Le Nexus est composé d'allées dans les airs, à différents niveaux avec des magasins sur leurs côtés droit et gauche. Les allées sont reliées à la sorte de colonne vertébrale circulaire au centre du Nexus.
Celle-ci contient des escaliers et des ascenseurs pour changer d'étages. Tout autour en une autre sorte de forme circulaire connectée au reste du bâtiment c'est le cercle extérieur.
Il y a des allées bordant d'autres magasins tout aussi larges. C'est un peu comme un balcon entourant le reste. Aujourd'hui, c'est le plafond transparent qui nous éclaire, d'après la clarté de la lumière que je vois depuis l'allée du "balcon". On passe devant un hologramme publicitaire d'une femme posant devant le magasin.
Si elle n'avait pas cette aura bleue distinctive, certaines personnes auraient pu être dupées et commencer à lui parler. Elle est quand même aussi un peu grillée par le fait qu'elle ne porte qu'un bikini. S'il y a un truc sur lequel les religieux de la plupart des fois peuvent se mettre d'accord aujourd'hui c'est leur haine pour ces "dévergondées virtuelles". Je vois Mars tourner la tête vers l'hologramme blond aux formes voluptueuses. Même lui. C'est pas possible. Je lui dis:
-Tu devrais la retrouver, peut-être qu'elle vit ici si t'as de la chance.
Avec son sourire espiègle faisant briller ses yeux, Mars dit:
-Me donne pas d'idées.
Je soupire et il finit enfin par entrer dans un magasin de vêtements streetwear. C'est décoré, sobre et il y a des murs en brique. J'aime beaucoup certains de leurs trucs, mais j'ai déjà trop de vêtements. J'en ai même des similaires, comme le pantalon cargo que je porte, donc je reste calme telle une ancienne addict. Je me contente de regarder. Au bout d'un moment, Mars est encore sur l'avatar étant sa copie que l'on a faite à partir d'un scan de lui. Je m'éloigne un peu de lui sur l'écran et pense à aller m'asseoir, comme un mari ou un copain exaspéré, mais Mars demande sur un ton narquois:
-Tu t'ennuies Chou?
Je veux sa mort. Je réplique:
-Oui, j'en ai marre.
-En fait moi je crois plutôt que tu veux t'éloigner encore plus, pour t'arrêter de fixer mon avatar.
-C'est juste une copie de toi en pixels sur un écran, à qui tu mets des vêtements. C'est rien.
Toujours sur son écran, il insiste:
-À un moment, il en avait pas.
-Je vais pas m'exciter sur un avatar en sous-vêtements. Je suis pas aussi désespérée.
Mars est dos à moi, mais je devine son sourire. J'attends son commentaire sous-entendeur, mais il ne dit rien. Après un long moment, on sort du magasin, pour qu'il n'ait pris que deux sweats au prix ridiculement élevé.
Sur le chemin, j'ai du mal à me décider, mais finis par le faire. Je vais ouvrir le vase aux serpents, je veux savoir. En plus, peut-être que sa réponse sera le poids qui le fera un peu plus couler dans les raisons pour lesquelles c'est qu'une ordure détestable. Je demande:
-Mars?
Il pose son regard tacheté sur moi et répond:
-Hmmm?
Je me sens nerveuse sous son regard, comme si je ne l'avais pas carrément vu nu. C'est sûrement à cause de la question. Je demande:
-Est-ce que je suis ton "expérience"?
Il fronce les sourcils et s'arrête carrément. On crée un obstacle dans le flot de gens qui marchent, donc je vais sur le côté, près d'une vitrine. Il me suis et demande confus:
-Qu'est-ce que t'essaies de dire?
-Ce que Lena a dit. C'est-à-dire que je me demande si t'as pas voulu coucher avec moi, juste parce que tu voulais tenter. Enfin juste pour voir comment c'est avec une fille noire.
Ça sonne encore plus bizarre que je le pensais. J'ai l'impression d'être comme un "être" à part totalement différent des autres femmes. Mais il y a bien des gens qui me voient comme ça. Un "être" différent, dans le sens tordu. Cet idiot de Mars sourit doucement avant de me demander avec son regard narquois plissé:
-Pourquoi ça t'intéresse de savoir ça? Ça t'importe que je sois un connard ou pas?
Je me mords la lèvre et secoue la tête. Au moins, il semble avoir capté, mais putain je veux disparaître. Mars continue un peu plus sérieusement:
-Lena ne connait pas ma vie. T'es pas la première fille noire avec laquelle je couche et même si ça avait été le cas c'est pas pour ça que je l'aurais fait. J'aime juste les femmes, les sexy, t'es pas spéciale.
Je mords à nouveau ma lèvre, il trouve toujours le moyen de piquer. Au moins, je suppose que je ne suis pas si "standard" que ça, comme mon connard d'ex m'avait sorti vers la fin. Maintenant, je passe pour une folle. Je suis sur le point de reprendre le chemin pour partir quand il dit:
-Mais je comprends la question. Parfois, les gens aiment traiter les autres différemment à cause de leurs origines.
Je demande:
-Toi t'es quoi?
-C'est pas ton problème.
Je regarde ailleurs, mais il dit:
-Ouais, j'ai l'air différent, donc les gens trouvent pas facilement dans quelle case me mettre.
Je réponds:
-Au moins, t'as pas de case donc je vois pas le problème.
Il réplique:
-Le problème c'est que les enfants peuvent être des chieurs. Surtout quand ils ne savent pas où te classer. Il suffit que d'un seul...
Je me sens stupide. J'aurais pas dit ça à quelqu'un ressemblant à Sirius, parce que je sais comment les métisses peuvent parfois avoir du mal avec leurs différentes origines. Mais justement Mars, j'en sais rien, je ne sais pas comment il se sent en étant...quoi? Il pourrait être latino, mais quelque chose me dit que non. Peut-être natif américain, un natif d'ailleurs, polynésien? Je ne sais pas. Je lui demande:
-Tu sais pas ce que t'es en fait?
Il réplique:
-J'en sais assez pour ne pas avoir envie d'en parler.
Je hoche la tête et laisse tomber en disant:
-Désolé.
Je ne sais absolument pas pourquoi je me jette en pâture, mais je lui dis avec un léger sourire:
-Ça s'est pas mal passé au niveau de tes gênes au moins. Être différent c'est pas négatif, moi des fois ça me dérange pas. Sirius, lui, est métisse justement, non?
Mars confirme ennuyé:
-Ouais, on a ça en commun, mais lui il a vraiment deux communautés, vu qu'il est à moitié noir. Enfin un truc du genre, je sais que le monde en est une, mais t'as compris.
Donc Mars a deux origines, mais il n'est pas en partie noir...je ne comprends pas le "vraiment". C'est tout un mystère. Je réponds:
-C'est pas parce que t'es noir que t'as toujours une communauté...
Il me demande:
-Si t'as l'impression que t'en as plus, il y a forcément un moment où t'en avais non?
-Oui, mais on faisait pas des rondes en chantant kumbaya tout le temps non plus.
Il réplique:
-Mais que tu le veuilles ou non t'en feras toujours partie parce que c'est ce que t'es non?
-Oui, mais tu m'as compris.
Il hoche la tête il demande:
-Mais le reste du temps, c'était bien d'être en communauté non? Tu te sentais bien avec des gens qui pouvaient te comprendre. Et même aujourd'hui si t'avais un problème ils auraient plus de chance de venir t'aider par solidarité, non?
-Oui, sûrement...
Il conclut:
-C'est la différence, toi et Sirius vous avez ça. Moi, j'ai pas grand-chose. Je vais prendre à boire. L'endroit pour les sandwichs est là-bas.
En d'autres mots: "fous-moi la paix". C'était lourd, tout ça. Je devrais me remettre à être muette. J'entre dans la sandwicherie et commande deux paninis au bœuf barbecue. J'ai pris ce que j'aimais pour Mars et c'est peut-être une erreur. Mais la sauce a un goût un peu sucré et on boit bien tous les deux du jus d'ananas. Je sors et marche un peu, mais m'arrête.
Un peu plus loin sur le côté Mars parle avec une fille aux cheveux bruns bouclés. Je m'approche un peu et il sourit. J'y crois pas, je l'ai rarement vu aussi content, même avec tous les gens qui ne sont pas moi. Je recule prête à partir avec une morsure honteuse au cœur, mais la fille se tourne. Elle me repère et me fait clairement signe de venir. Je le fais à reculons. La fille aux beaux yeux clairs me dit animée:
-Bonjour, tu dois être Paris?
Je mens assez vite en répondant:
-Oui?
Elle dit en souriant:
-Eh bien c'était cool de t'avoir rencontré bye.
C'était rapide, bizarre et elle avait l'air contente, malgré le fait que ce soit mort pour elle on dirait. C'est à cause de Mars qu'elle a fait son numéro avant de disparaitre? Je demande à Mars:
-Qu'est-ce que tu lui as dit?
Avec un sourire malicieux, il répond en français:
-Que j'aime beaucoup Paris.
Le message artificiel créé avec cet accent presque parfait me donne des frissons. J'aurais dû choisir espagnol au collège pour ne pas avoir à comprendre. Je me reprends puis ricane et dis:
-Pourquoi t'as fais ça? Tu voulais pas te la taper? Elle? Vraiment bizarre.
L'amusement sur le sourire de Mars me fait réaliser que je parle trop. Merde. Il me répond:
-Oui, elle est bonne, mais elle me rappelle une pétasse que je connaissais.
J'écarquille les yeux à l'insulte que j'ai pourtant entendue des milliers de fois au moins. Il l'a dit avec tellement d'hostilité aussi. Je souris doucement et demande:
-Ton ex?
Il me transperce avec le vert laser de ses yeux puis demande:
-T'es médium ou une connerie du genre? Tu veux un cookie comme récompense?
Je ne dis rien et il boit à la paille avant d'ajouter:
-Cette fille est morte de toute façon.
Traversée de frissons j'écarquille les yeux et secoue la tête. Il me dit ennuyé:
-Me regarde pas comme ça, on n'aime pas les balances. Première et dernière fois que je fais confiance à une femme.
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