♡ 𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐚𝐭𝐫𝐞 ♡

Chapitre quatre.


𝕳𝖊𝖗𝖒𝖎𝖔𝖓𝖊 laissa échapper un soupir lorsqu'elle posa un pied sur la terre ferme après un trajet mouvementé dans la diligence qu'elle avait été forcée de partager avec l'insupportable Drago Malefoy et la timide Susan Bones. Anthony était derrière eux, les fixant avec ennui et supériorité. Comme l'avait fait remarquer Drago, elle aussi avait du mal à supporter la Serdaigle, et il devenait urgent de remettre les points sur les i afin de lui faire comprendre qu'ils étaient tous égaux, ici. Susan, durant le voyage, n'avait eu cesse de leur rabâcher leurs responsabilités avec une pointe de stress, et le Serpentard, de lever les yeux au ciel lorsqu'Hermione manifestait son impatience devant le discours de la jeune Bones. L'air était lourd et le vent presque inexistant : il faisait chaud et moite. Hermione se surprit à espérer que la température baisse d'ici quelques jours. Ça rendait les autres plus irritables que ce qu'ils étaient déjà. Même elle ne dérogeait pas à la règle, elle avait conscience de son stress débordant.

⸺ Enfin arrivés ! Je pense que le professeur McGonagall va nous servir un long discours et bien nous afficher pour notre premier jour.

⸺ Granger, Granger, Granger ! Tu es insupportable. Ne peux-tu pas cesser de stresser et de parler de nos responsabilités ? Tu vas me refiler la Dragoncelle, ironisa une voix narquoise dans son dos.

⸺ Oh, excusez-moi d'être réaliste, monsieur Malefoy, répliqua-t-elle avec un agacement non feint.

Sans attendre sa réponse, elle se dirigea à grandes enjambées vers le château, et arriva parmi les premiers élèves à l'entrée. Comme elle s'y attendait, un protocole de sécurité très strict avait été mis en place : les professeurs McGonagall et Flitwick faisaient passer les élèves un à un, les interrogeant à tour de bras, rayant des noms sur leurs listes. Elle haussa les épaules : inutile de s'impatienter, elle finirait bien par rentrer. Elle était loin d'être pressée, de toute façon. Elle se mit à se balancer sur ses jambes comme elle en avait l'habitude, et, après quelques minutes d'attente à entendre Anthony Goldstein marmonner derrière elle, ce fut son tour.

⸺ Oh, bonsoir, mademoiselle Granger, chantonna le professeur de sortilèges de sa petite voix fluette. Attendez ici, vous rentrerez dans la Grande Salle par la porte des professeurs avec les autres Préfets. Nous tenons à tous vous présenter aux autres élèves, cette année étant un peu spéciale...

Spéciale. Ce mot semblait rigide, formel. Bien mal choisi. Ça sonnait... faux. Comme tout ce qui avait suivi la fin de la Guerre, d'ailleurs. Des mots au goût de fausseté pour se leurrer, pour faire comme si tout allait bien, alors que chacun savait que ce n'était pas vrai. Les gens n'étaient pas heureux, après cette Guerre. Pourquoi faire semblant ? La logique de la nature humaine échappait à Hermione, qui ne comprenait pas. Ce monde était beaucoup trop absurde.


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Hermione ferma les yeux durant quelques secondes. La nouvelle directrice de Poudlard venait de terminer son discours, et la jeune Gryffondor attendait, debout, sur l'estrade, aux côtés de Susan et Ritchie, sur la ligne parfaite que formaient les Préfets. Les élèves étaient en colère, et cela se sentait : la majorité d'entre eux protestaient, criant avec véhémence leur mécontentement par rapport aux nouvelles mesures en vigueur. Au vu de la hauteur du plafond - et ce, même s'il était magique - le son se répercutait sur les murs, et occasionnait un mal de tête plutôt désagréable pour certains.

C'est honteux ! D'abord ça, et après, ce sera quoi ? Je veux pouvoir passer une année normale, moi ! Je suis d'accord ! C'est complètement ridicule ! C'est dégueulasse pour les nouveaux élèves ! Pour tous, tu veux dire !

Elle baissa la tête, posant sa main sur son front. Ritchie posa une main sur son épaule.

⸺ Ça va, Hermione ? Tu te sens bien ?

Elle secoua la tête, n'entendant même pas le Sonorus qui venait d'être lancé. Puis un cri plus fort que les autres se fit entendre.

⸺ Taisez-vous !

Aussitôt, le silence se fit. Padma fixait l'assemblée avec découragement, le bout de sa baguette contre sa gorge, afin d'amplifier sa voix. Les professeurs semblaient plutôt satisfaits de cette prise d'initiative, ils semblaient tous fatigués. Ils devaient tous l'être d'ailleurs. Le contraire aurait été étonnant.

⸺ Vous voyez ? continua la belle Serdaigle avec autorité. C'est pour éviter ce genre de choses que ce protocole de sécurité a été mis en place. Ces nouvelles règles ne vont durer que quelques mois, comme cela vous l'a été expliqué. Si vous ne voulez pas que cela dure toute l'année, respectez-les ! Cessez de vous plaindre quelques instants, ne croyez-vous pas ? Dois-je vous rappeler que nous sortons d'une Guerre ? Une Guerre ! Des manifestations de violences ont déjà eu lieu alors même que les cours n'ont pas commencé. Nous souhaitons éviter que ce cauchemar recommence. Soyez donc respectueux les uns avec les autres, c'est tout ce que l'on vous demande.

Il y eut quelques grommellements, un rapide discours de l'infirmière prévenant qu'elle ne tolérerait pas les affrontements entre étudiants cette année, puis la directrice invita les Préfets à aller s'asseoir à leurs tables respectives. Hermione chercha Ginny du regard : la jeune fille discutait avec Neville, vers les premières places. Elle se glissa à côté de ses amis.

⸺ Oublions ce mauvais moment. J'ai faim, moi !

Elle commença consciencieusement à mâcher un bout de rôti, quand un sourire naquit sur ses lèvres sans qu'elle ne s'en rende compte. Une nouvelle année commençait. Il fallait prendre ça avec positivité. Elle verrait bien ce qui arriverait, de toute façon.

Aussi, dès la fin du repas, elle prit la tête du groupe des Gryffondors, alors que Ritchie Coote se plaçait tout en arrière pour fermer la marche. Elle présenta les dortoirs aux nouveaux élèves après être passée à côté des douches, et elle eut soudain l'impression d'être un guide touristique. Elle décida d'abréger.

⸺ Enfin ! Vous découvrirez bien l'école par vous-mêmes. En tous cas, si vous avez des questions, c'est à moi qu'il faut s'adresser en premier lieu. Je vous souhaite à tous une bonne nuit, le couvre-feu est à vingt-et-une heures trente en semaine, et vingt-trois heures les vendredis et samedis. J'attire votre attention que les Préfets-en-chef sont tenus, cette année, de tenir des tours de garde nocturnes dans le château, et que les petits malins qui ont pour idée de se balader dans l'école après le couvre-feu s'exposent à de gros ennuis. De très gros ennuis. Je ne vous conseille donc pas de braver les interdits. Me suis-je bien fait comprendre ?

Les élèves acquiescèrent. Elle leur sourit, puis tapa dans ses mains.

⸺ Bonne nuit à tout le monde, dans ce cas !

Elle ouvrit les portes des dortoirs et jeta un coup d'œil aux fiches de répartition : elle se trouvait encore dans le plus petit dortoir de son aile, et le partageait avec Ginny et Parvati. C'était une bonne nouvelle ; elle n'aimait pas partager son espace avec beaucoup de monde. Avec les nombreux élèves morts durant la Guerre, le Ministère avait décidé de laisser les élèves faire des vœux concernant leurs colocataires, car deux mois de vacances pour recréer tout le règlement de Poudlard avait semblé beaucoup trop court à Kingsley Shacklebolt. Durant sa première année, elle avait dû partager son dortoir avec Lavande Brown, Parvati Patil, Fay Dunbar et Ginny, qui n'avait plus de place dans les chambre de l'aile de son année. À vrai dire, c'était là qu'avait réellement commencé leur amitié : elles pouvaient se voir souvent, échanger, se confier leurs secrets. Mais partager son espace avec quatre autres personnes ayant une vision du rangement très différente de la sienne, cela peut vite virer à la dispute... Il y en avait d'ailleurs eu quelques-unes au fil du temps. Mais rien de bien grave.

Hermione secoua la tête, essayant de chasser de ses pensées les souvenirs d'avant la Guerre. Après avoir rangé grossièrement toutes ses affaires, elle lança à ses colocataires qu'elle allait prendre une douche, et sortit de la salle commune avec sa robe de chambre sous le bras. Elle monta quelques étages, fit signes aux derniers retardataires de monter dans leurs salles communes, puis entra dans la salle de bain des Préfets, après être passée à côté de la statue de Boris le Hagard, dont le nez avait été cassé durant la Bataille de Poudlard.

Bien sûr, elle connaissait déjà cette salle, elle y avait eu accès à partir de la cinquième année, le moment où elle avait été nommée Préfète, en compagnie de son ami Ronald Weasley. Cette pièce ayant été salement amochée durant la Bataille de Poudlard, la décoration avait quelque peu changé. Des bouquets de fleurs blanches tapissaient les rebords des murs carrelés, et des piles de serviettes de bain attendaient dans un meuble de bois brillant. Elle en prit une et, entrant dans un des vestiaires prévus à cet effet, se déshabilla en observant la nouvelle décoration mise en place : elle changeait chaque année, à l'exception des vitraux de verre, notamment celui de cette fichue sirène. Hermione avait déjà remarqué qu'elle lançait sans cesse des regards charmeurs à quiconque venait prendre un bain ici. Ça en devenait agaçant, parfois. On se sentait en permanence observé.

Elle s'attacha les cheveux et s'entoura de sa serviette après avoir enfilé son maillot de bain, puis se dirigea vers le bassin. Plusieurs Préfets y discutaient, profitant des différentes options que les robinets proposaient : en ce moment, Padma se trouvait sous le jet de mousse au parfum lilas, et Ernie était assis sur le bord. Anthony et Millicent discutaient en nageant, et l'aigreur qui parvenait de leurs échanges se sentait à plusieurs mètres. Drago était en train de monter sur le plongeoir, tel un petit enfant, et Hermione sourit.

⸺ Bonsoir à tous, lança-telle, formelle. Comment allez-vous, ce soir ?

⸺ On tente d'oublier le banquet. Cette salle de bains est vraiment relaxante, on dirait une piscine municipale, comme chez les Moldus.

⸺ On est au moins d'accord sur ce point, lança le Préfet-en-chef de Serpentard en sautant dans l'eau, ne manquant pas d'éclabousser Hermione au passage, qui venait de s'asseoir sur le bord du bassin de marbre.

⸺ Tu ne sais même pas ce qu'est une piscine municipale, Malefoy, fit remarquer la Gryffondor en grommelant ostensiblement.

Il secoua la tête et replongea sous l'eau avant d'en ressortir.

⸺ En effet. Est-ce vraiment nécessaire ? Si c'est aussi chouette qu'ici, je suis prêt à reconnaître que les Moldus ne sont pas aussi bêtes que ce que je pensais.

Il offrit un grand sourire à l'assemblée, mais Hermione ne le lui rendit pas. Bien que le jeune homme soit un excellent comédien, elle avait bien compris que cette façade de bonheur n'était que fausseté. Elle, mieux que personne, avait compris que les gens n'étaient pas réellement heureux. Et, au vu d'à quel point la Guerre avait brisé Malefoy, il devait souffrir bien plus que la majorité des gens.

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