Chapitre 65
CINQ MOIS PLUS TARD :
— Le premier qui chante Papa Noël, je lui fais manger les huîtres de Mamie.
Rewind se lève solennellement pour ponctuer sa phrase. Mamie relève la tête à ses mots et s'exclame :
— Qu'est-ce qu'elles ont mes huîtres ? Elles ne sont pas bonnes, c'est ça ?
— Elles sont délicieuses, la rassure Eileen en posant sa main sur son bras.
— Un peu pimentées à mon goût.
— Tu as mauvais goût, donc ce n'est pas étonnant que tu n'aimes pas ce délice, ricane Ander en plantant sa fourchette dans le gratin.
— Ander, comment va Patrick ? Oh, j'oubliais, il est mort.
— Rewind ! s'offusque Bianca. Cela ne se dit pas.
Ander détourne le regard en adressant une grimace à son compagnon de toujours.
Peu après le Jeu des Roses, nous avons chacun rejoint notre train-train habituel. Eros et moi avons convenu de rester à Lucrenda pour le moment, en attendant que les choses avec Kereya se tassent.
Nous avons eu des nouvelles par la suite, et il a appris via son père qu'elle était enfermée entre quatre murs. Apparemment, elle souffrirait de troubles psychologiques. Je préfère ne même pas savoir ce qui ne tournait pas rond chez elle.
Comme Ander vit à Ecclosia, nous sommes restés seuls avec Eros au palais de Lucrenda. Avec ma mère, bien sûr. Elle l'a rencontré et... je crois qu'elle était un peu méfiante au début. Je lui ai raconté l'histoire dans les détails, et elle a fini par l'accepter. Et maintenant, je crois qu'ils s'entendent plus que bien.
Au début, ça a été plutôt difficile. Aussi étrange que cela puisse paraître, la présence des autres me manquait. Même celle de Rewind ! Et Mamie... Mais j'ai fini par m'y faire. Ma vie avec Eros n'a jamais été aussi... parfaite est un grand mot, mais je me sens épanouie et heureuse. Comblée.
Quoiqu'il en soit, si j'ai pu voir Eileen et Ander toutes les deux semaines, c'est la première fois depuis le tournoi que nous sommes tous réunis. Et c'est ce soir que nous célébrons Noël, à Imir qui plus est. Nous avons dû prendre le bateau tôt ce matin pour arriver à temps.
Rewind, Bianca, Morgan, Erkel, Mamie et même Julio sont là ! Bendy et Lolya sont repartis à Calington, je crois qu'Eros s'en est accommodé. Je ne l'ai jamais vu très proche de sa petite sœur.
— C'est quand qu'on ouvre les cadeaux ? s'impatiente Julio en se balançant des jambes.
Il n'a même pas touché à son assiette. Mamie a insisté pour préparer elle-même la dinde et il n'a pas fait l'effort d'y toucher...
— Quand le Père Noël sera passé, réplique Rewind.
— Tu penses que je crois encore au Père Noël ? demande Julio en le dévisageant ouvertement.
Un silence s'écoule et Rewind s'offusque :
— Quel panache ! Ce petit a le même répondant que son frère.
— Petit Papa Noël... quand tu descendras du... chantonne Ander.
— Ah, non ! Chut ! Pas de ces chants de mouette à table.
— C'est osé venant d'une mouette dans ton genre, réplique Eros.
Rewind l'assassine du regard et Morgan s'exclame :
— Quel repas ! Si j'avais su, je serais venue plus tôt.
Rewind se tourne alors vers elle et lui chuchote à voix... haute :
— J'ai un cadeau merveilleux pour toi. Tu seras en extase quand je vais te l'offrir.
— Moi ? En extase ? Je doute fort.
— Elle n'est en extase que devant ma musculature, rajoute Erkel en amenant sa coupe de champagne à ses lèvres.
Morgan lui donne une tape et le menace :
— Tu peux toujours rêver. Quelle musculature déjà ? Je t'ai battu au bras de fer, je te signale.
— Je n'étais pas bien réveillé.
— Tu veux réitérer le coup ?
Erkel se penche et lâche d'une voix rauque :
— Ce soir. Le perdant peut faire tout ce qu'il veut au...
— Chut ! Il y a des enfants autour de cette table.
— Tu veux parler de toi ? ricane Ander.
Rewind lui brandit son majeur et Julio s'exclame à travers le vacarme :
— Je ne suis pas un enfant ! J'ai bientôt quatorze ans.
— D'ailleurs, qu'en est-il de trouver la parfaite physicienne ? s'enquiert Rewind.
La vérité, c'est que Julio passe plus de temps à jouer au violon avec Eros qu'à chercher l'amour.
— Je n'ai pas le temps pour ces choses-là, réplique mon petit frère.
— Et tu as bien raison ! s'exclame Mamie. L'amour, ça pue, comme les pieds de Rewind.
— Coup bas ! C'est un coup bas ! Mes pieds sentent bon.
— Est-ce qu'on peut parler d'autre chose que des pieds à table ? je m'exaspère.
— Tu m'excuseras, Arynn, mais j'ai une réputation à défendre. Mes pieds viennent de la grande lignée rewindesque, ce qui signifie qu'ils descendent de toi, Mamie. Donc toi aussi tu pues des pieds !
— Mais moi je ne le cache pas, ricane-t-elle.
— Quand est-ce qu'on ouvre les cadeaux ? répète Julio.
— Jamais, lâche Erkel. Le Père Noël les a embarqués dans sa hutte.
— Mais arrête, tu vas lui briser le cœur.
— Ça tombe bien, je n'aime pas les enfants.
— Je ne suis pas un enfant ! beugle Julio.
— Tu es tout petit, rétorque Erkel.
— Et toi t'es tout gros.
Morgan hurle de rire alors que Rewind retient son souffle. Moi, je m'esclaffe au même titre que le reste de la tablée.
— Je l'aime ce petit ! rit Morgan. Même moi je n'aurais pas osé.
— Tu n'oserais pas parce que ça se terminerait mal pour tes jolies petites f...
— Alerte rouge ! Enfant à la table, je répète, enfant à la table ! s'écrie Rewind. On ne parle pas de postérieur ici.
— Même pas du tien ? lance Ander.
— Le mien est rocambolesque, j'avoue, mais non, pas maintenant.
— Rocambolesque, j'en doute fort, réplique Mamie. Le mien, en revanche, est bien...
— Bon, chut chut ! On ne veut pas savoir.
— Les cadeaux, on peut les ouvrir maintenant ? soupire Julio. Ça vous évitera de parler de fesses au moins.
Eileen retient un rire et Rewind se lève.
— Allez, les cadeaux. Les miens sont les meilleurs, je vous préviens d'avance.
Il appelle les domestiques pour ramener les cadeaux et Eros se penche vers moi.
— J'en ai un pour toi, je te le donnerai à la fin, d'accord ?
Je hoche la tête. Des dizaines de cadeaux sont alors posés sous le sapin et Rewind ne perd pas une minute. Il s'en va chercher un petit paquet, qu'il tend directement à Bianca.
— Honneur à la plus belle petite abeille.
Elle roule des yeux et s'occupe de défaire le paquet. Elle découvre alors un masque de nuit à l'effigie d'une abeille.
— Tu n'es pas croyable, soupire-t-elle.
S'ensuit alors la distribution des cadeaux. Mamie me tend une boîte et j'y découvre une robe rose splendide.
— J'adorais la porter quand j'étais plus jeune mais je ne rentre plus dedans, maintenant.
Elle me fait un clin d'œil. Rewind me lance un autre paquet dans les mains de la part de Morgan et Erkel, et j'y trouve un coffret de livres d'une collection rare. Bianca m'offre un marque-page en céramique et donne un complémentaire à Eros. Celui-ci reçoit de la part d'Eileen et d'Ander un livre de cuisine, et Rewind, lui, lui offre un guide de voyage.
Puis c'est à Ander d'ouvrir ses cadeaux. Tout le monde s'arrête dans ses activités quand il ouvre celui de Rewind. C'est une boîte en verre vide, avec un peu de terre au fond.
— Qu'est-ce que tu veux que je fasse de ça ?
Rewind débarque derrière lui, les mains closes et s'approche avant de placer un petit animal dans la boîte. Un lézard !
Ander lève les yeux vers Rewind qui sourit de toutes ses dents.
— Je me suis dit que ça te ferait plaisir. Je sais combien Patrick te manque et...
Il ne le laisse pas terminer sa phrase et le prend dans ses bras, un sourire rayonnant au visage. Je vais pleurer si je ne regarde pas ailleurs.
— Tu sais comment tu vas l'appeler ?
— Rewindo, en ton honneur.
Rewind ricane et se tourne vers Morgan.
— De la part de tout le monde. On sait que ça te sera forcément utile à un moment.
Morgan ouvre alors un grand paquet et découvre un énorme coffret en bois. Elle l'ouvre et tombe sur... des flacons de poisons, du fil étrangleur, des fins poignards.
Son visage s'illumine alors qu'elle nous remercie.
— Je vais enfin pouvoir tuer Erkel proprement.
— Pour en venir à Erkel, tiens mon vieux.
Ander lui tend un autre énorme coffret. Celui-ci est composé de la même manière que pour Morgan sauf qu'il y a des clous, des lames tranchantes et une immense épée scintillante.
— Elle est rare alors prends-en soin.
Pour la première fois depuis que je le connais, Erkel sourit franchement. Il s'en va faire une accolade à mon frère et Rewind.
La suite de l'ouverture des cadeaux continue. Eileen gagne une marmite offerte par Rewind, et une robe venant de Morgan.
Puis Rewind ouvre celui d'Ander. Il arrache l'emballage et ouvre la boîte. Une petite box se trouve dedans et alors qu'il s'amuse à déplier le couvercle, un jet d'eau lui éclabousse le visage.
Ce n'était pas un cadeau, c'était une blague d'Ander. Rewind ouvre la bouche, et relève la tête.
— Cours, Ander. Et cours vite, parce que je vais t'étriper.
Les deux s'amusent à se poursuivre dans la salle sous l'hilarité générale.
Eros me prend alors par la main et sort une petite boîte de sa poche.
— Tu es prête pour recevoir ton cadeau ?
Ses yeux se mettent à briller et mon cœur bat follement dans ma poitrine. Je me perds dans son regard et le monde autour de moi ne semble plus qu'être un lointain souvenir.
L'émotion me saisit à la gorge alors que je le vois se mettre à genoux devant moi, et ouvrir la petite boîte. Comme je l'ai toujours imaginé, une bague aussi simple que jolie brille dans la mousse. Eros fait dans la simplicité. Et c'est sûrement pour ça que je l'aime.
— Je ne te l'ai jamais demandé proprement et notre union du Jeu des Roses n'a pas été officielle, alors je te le demande aujourd'hui.
Il prend une inspiration et lie ses yeux aux miens.
— Tu es tout ce dont j'ai toujours rêvé, Arynn, depuis notre première rencontre je n'ai jamais été aussi heureux qu'avec toi. Tu es... drôle, et incroyablement belle, et tellement douce, que ce soit dans ta façon d'être avec moi ou bien avec les autres. Peu importe le futur, le passé reste derrière nous, et comme Mamie le dirait, c'est l'instant présent qui compte. Alors je te le demande aujourd'hui, me feras-tu l'honneur d'être ma femme ?
Rewind et Ander ont arrêté de se courir après. Mon frère s'arrête et me dévisage, les yeux brillants d'émotion. Même Morgan a un sourire aux lèvres.
Je suis en train de fondre en larmes de bonheur. Sans le faire attendre plus d'une seconde, je m'agenouille pour le prendre dans mes bras.
— Oui, oui, oui ! Mille fois oui !
Il me serre contre lui alors que les autres nous applaudissent derrière nous. Je sens son cœur battre contre le mien. Je n'ai jamais été aussi heureuse. C'était le plus beau cadeau qu'il puisse me faire.
— Euh, je dis ça je dis rien, mais vous êtes déjà mariés. Cupidon en personne a célébré votre union.
Je vois les yeux de ma mère s'embuer de larmes dans mon dos et cela m'emplit d'un bonheur sans nom.
Eros et moi nous relevons tandis que ma mère vient me féliciter.
— Je veux être le parrain des futurs enfants. D'ailleurs, je préviens tout le monde ici, si je ne suis pas parrain de vos futurs progénitures, le sang va couler.
Rewind époussette sa veste et je roule des yeux.
— Qui voudrait d'un parrain comme toi ? ricane Ander.
— Pour mon humour peut-être ? Je ferais rire le bébé avant qu'il ne soit déjà né.
— Quelle modestie ! s'exclame Morgan.
Il lui tire la langue, tel l'enfant qu'il a toujours été. Moi, je serre Eros si fort dans mes bras que j'en aurais presque mal.
Les autres continuent de se disputer, quand Mamie s'exclame à travers le boucan :
— Les cadeaux ont peut-être été tous distribués, mais il y en a un que vous avez oublié. Le câlin de Mamie !
Elle tend les bras et Rewind fonce dans ses bras.
— Premier ! Le dernier est une poule mouillée !
Et le dernier, c'est Erkel. Il est tiré par Morgan alors que nous nous faisons tous un câlin collectif.
Les larmes me montent aux yeux. Eros me serre contre lui, et Rewind referme ses bras autour de nous. Julio se faufile une place entre les jambes d'Eros, et même ma mère nous rejoint.
— N'oubliez jamais, mes enfants, l'amour triomphera toujours !
— C'est étrange, mais vous allez me manquez après cette semaine, avoue Rewind.
— On se reverra, sourit Morgan. On se reverra toujours.
— C'est vrai, avoue Eileen. On ne sera jamais bien loin.
Ce câlin est symbole de beaucoup de choses. De l'amour entre chaque couple, mais aussi de l'amour de cette famille. Nous nous sommes serrés les coudes jusqu'au bout. Nous nous sommes épaulés, aidés, et protégés.
Aujourd'hui, j'ai l'amour d'Eros, et j'ai aussi celui de ma famille, le plus important d'entre tous à mes yeux.
— L'histoire n'est pas finie, sourit Mamie. Elle ne fait que commencer.
FIN
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est-ce que j'ai pleuré en écrivant ce chapitre ? totalement.
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