Chapitre 40

Je me fige, mes lèvres posées sur celles d'Eros. Je crois que je recule, je ne sais plus très bien mais je sais que ses mains sont toujours posées sur ma taille. Il se fige, tandis que des cris résonnent dans le couloir.

— Mais Mamie, repose ça ! Ça ne faisait pas partie du plan !

Des vombrissements retentissent de l'autre côté, et je me rends compte que j'ai arrêté de respirer.

— Donne-moi l'une de tes barrettes. On va sortir d'ici.

Il n'attend même pas que je la lui donne, puisqu'il la déclipse délicatement de mes cheveux. Alors, il se penche vers la serrure et tente de la crocheter. Quelques dizaines de secondes s'écoulent avant qu'un clic résonne.

Ébahie, je le regarde pousser la porte et la lumière venant du couloir nous aveugle. Il s'est écoulé à peine quinze minutes dans ce placard mais j'ai l'impression de revivre en sortant.

Sauf quand Eros s'amuse à poser sa main sur ma taille, de nouveau. C'est une habitude qui ne semble plus le quitter maintenant.

Je laisse mes yeux se porter sur la situation actuelle. Mamie est en effet en train d'avancer vers nous, une tronçonneuse dans la main. Elle se met même à accourir ! Rewind lui court après, un air paniqué au visage.

Quand il nous voit, il s'étonne et s'arrête à notre hauteur.

— Vous êtes déjà sortis, vous ?

— On t'a entendu crier comme une fillette, souligne Eros, donc oui.

— C'est une fausse tronçonneuse mais Mamie a l'intention de menacer Kereya. Et il faut l'arrêter !

— Où se trouve cette vieille vache ! s'écrie Mamie en tournant sur elle-même.

— Personnellement, je ne l'arrêterais pas, ricane Eros.

Il m'attire à lui. Dieu tout puissant. Il faut qu'il arrête de... me toucher en permanence. Je ne vais pas survivre. Je risque la crise cardiaque en sa présence.

Rewind nous dévisage, un air dégouté au visage.

— J'espère que le placard n'a pas été souillé par votre bestialité, peste-t-il.

— En fait, tu nous as interrompus.

Mes joues chauffent et Rewind ricane.

— Vous pouvez toujours y retourner. Il faut que je ramène Mamie du bon côté de la berge et ensuite on met le plan D.E.S en route.

— Le plan D.E.S ? je l'interroge.

— Le plan destruction. Ne me regardez pas comme ça, c'est Mamie qui a choisi ! Elle dit qu'elle veut tout détruire, la crémière et la crème, le beurre, la ferme... Je n'ai pas tout compris mais bon. Ça concerne Kereya quoi.

Mamie continue de faire vombrir sa tronçonneuse et bientôt, elle disparaît au bout d'un couloir.

Rewind passe une main sur son front puis soupire.

— J'enverrai Julio vous chercher quand le résultat sera prêt. En attendant, vous pouvez... faire vos affaires. Mais vite, par contre !

Eros le fixe avec amusement quand moi, je suis à deux doigts de la combustion interne.

— Pourquoi Julio ?

— Il fait aussi partie du plan.

— Un plan qui consiste à... ? je poursuis, curieuse.

Ce n'est pas Rewind qui répond. C'est Mamie qui revient avec son outil d'attaque et qui s'époumone :

— DESTRUCTION ! Cette Kereya va m'entendre parler ! Brûler mes rideaux, me menacer, tuer mes coquelicots... Forcer ce gringalet à t'épouser est la goutte de trop ! La colère de Mamie sera inarrêtable !

J'éclate de rire. Mamie repart dans la direction dont elle venait et Rewind nous abandonne là, en courant après sa grand-mère. Je l'entends presque chouiner alors qu'il disparaît plus loin.

Eros se tourne vers moi, un sourire aux lèvres.

— J'ai encore un baiser en réserve.

— Non, tu l'as déjà utilisé.

Mais il m'ignore et me prend par la main, pour m'emmener ailleurs. J'ignore où nous allons jusqu'à ce qu'il me pousse dans une pièce. La buanderie. Avec des dizaines de fils où sont étendus les vêtements.

Je pousse un petit soupir en m'adossant contre la porte.

— Un effleurement de lèvres n'est pas ce que j'appelle un baiser, murmure-t-il.

— Un seul alors.

— Ne fais pas comme si mes baisers étaient une torture.

— Une douce torture, ça l'est.

Ses yeux s'accrochent aux miens mais je le sens distrait. Il fixe ma bouche avec appétit, presque avec un désir inassouvi. Ses mains se posent de part et autre de ma tête, et il se penche vers moi.

Avec une douceur inattendue, ses lèvres effleurent les miennes. Quelques secondes s'écoulent, il se décale pour toucher mes joues, puis sa bouche descend dans mon cou et je lâche un petit soupir.

Il m'embrasse là et ce qui n'était qu'un baiser en devient deux, puis quatre, puis... Je ne compte plus. Tous mes sens sont en alerte, j'ai l'impression que mes jambes sont toutes engourdies. Est-ce Eros qui provoque cela en moi ?

Il se détache de ma peau, et remonte vers mon oreille. Je m'entends murmurer d'une voix basse :

— Tu as triché...

Son souffle résonne dans mon oreille et les papillons s'envolent en moi dans un feu d'artifice.

— Encore un. Juste un dernier.

Je suis bien trop faible pour dire non. Et puis quel intérêt ? Quelle utilité de me mentir à moi-même quand j'apprécie chaque contact physique que j'entretiens avec lui ?

Il se penche et sans un bruit, sans une seconde de plus, ses lèvres capturent les miennes. C'est fugace, c'est doux. Et court. Il recule, mais ses mains, elles, ne me libèrent pas.

Elles se déplacent pour m'agripper par la taille et ma poitrine se retrouve collée contre la sienne. Il fond de nouveau sur ma bouche, et cette fois-ci, ne s'arrête pas.

Chaque respiration est un peu plus dur à prendre. Il ne se contente pas de m'embrasser, il me dévore avec avidité.

Je glisse mes mains dans ses cheveux sans réfléchir et je réalise pleinement que non, je ne réfléchis plus. Pas comme la première fois. Tout est devenu si naturel que... que je commence à m'habituer à cette proximité entre nous.

Mes mains descendent sur ses épaules, l'une glisse sur son torse, puis sur son bras, et je ne sais pas ce que je fais mais je crois que j'aime le toucher. Et je crois qu'il aime aussi.

Mon dos claque contre la porte alors qu'un grognement sourd s'échappe de sa bouche. Il m'irradie. Cet homme me coupe le souffle.

Sa bouche se détache de la mienne et descend sur mon cou, et j'ai du mal à contenir mes soupirs quand l'une de ses mains remontent plus haut, et s'arrête juste au-dessus de mon ventre.

Je me mets à penser qu'il y a trop de tissu entre nos deux corps. Et quand j'ai cette pensée, je réalise que je suis en total laisser-aller. Je m'imagine interrompre ce moment mais... à quoi bon ? La vie n'est-elle pas trop courte pour ne pas en savourer le moindre instant ?

Je le laisse continuer, et ma tête se soulève naturellement. Je rouvre les yeux et le voir me subjugue. Ses cheveux sont si brillants avec la lumière, et quand il s'écarte, ses yeux sont pris d'un éclat que je n'avais jamais vu avant. Ses joues sont rougies, comme ses lèvres et il me contemple comme jamais aucun homme ne l'a fait avant.

— Je pourrais t'embrasser toute la nuit, murmure-t-il.

Je ne demande que ça. Un sourire s'étire sur mes lèvres et d'un air perdu, Eros écarte un de mes mèches de cheveux.

— Ta beauté est impensable, Arynn. Dès que... Dès que tu rentres dans une pièce, c'est comme si... (Il fronce les sourcils, l'air profondément troublé). C'est comme si le reste n'avait plus d'importance.

C'est trop. Je pose mes mains sur ses joues et mes lèvres se scellent délicatement aux siennes. Il pousse un soupir contre ma bouche, ses mains reposant aux creux de mes reins, puis le baiser pourrait s'approfondir mais...

Des coups résonnent à la porte. Et c'est une petite voix masculine qui résonne :

— Euh... Arynn ? Eros ? Je sais que vous êtes là. Rewind m'envoie vous chercher.

Julio. Oh. Bon.

Je m'extirpe des bras d'Eros et ouvre la porte, un immense sourire aux lèvres.

— Julio ! On était justement en train de parler...

— Euh, Arynn ? J'ai treize ans, tu sais. Vos bisous baveux me choquent, c'est vrai, mais je vais survivre. Enfin, je crois.

Ma mâchoire en tombe. Il me sourit d'un air ravi puis recule d'un pas.

— Mais nous n'étions pas en train de faire ça, enfin.

Julio hausse les sourcils, puis grimace. Eros passe à côté de moi et lâche un rire.

— Même moi j'ai du mal à y croire.

— Vous faisiez des bruits bizarres, ajoute Julio.

Oh, Dieu tout puissant. Enterre-moi, sur le champ.

— Tu étais derrière la porte depuis longtemps ?

— Je vous cherchais, je t'ai dit. Et je vous ai trouvés. En train de... Oh, vous avez fait crac-crac ? Dean et Achid ont dit que vous l'aviez déjà fait depuis longtemps.

Si Eros ne me tenait pas par la taille en ce moment même, j'aurais déjà fait un malaise.

— Non, on n'a pas...

— Ils le feront bientôt, pas d'inquiétude !

Rewind s'avance au bout du couloir, un sourire railleur au visage. Puis il fait un signe de tête à Eros.

— Pas vrai, cousin ?

Celui-ci lâche un rire et je me tourne vers lui, faisant mine de m'offusquer. Il me lâche et lève les mains en l'air en signe de drapeau blanc.

— Je n'ai absolument rien dit.

— Ton rire l'a insinué !

— Pas du tout, se défend-il. Je suis un homme respectueux et patient, je t'offrirai des fleurs jusqu'à la fin de ta vie si c'est ce que tu désires.

— Je m'immisce dans votre petite conversation mélodramatique pour souligner qu'Eros a le sang rewindesque dans les veines.

Rewind me fait un grand sourire et je fronce les sourcils.

— Ce qui veut dire ?

— Ce qui veut dire que si cela ne tenait qu'à lui, il t'aurait déjà...

— Chut ! Il y a un enfant parmi nous.

— Julio en a entendu des bien pires, j'en suis sûr.

Rewind se penche, pose sa main sur l'épaule de mon frère et tous deux s'éloignent en parlant de... crac-crac ? J'espère que Rewind n'est pas en train de le pervertiser !

Je me tourne vers Eros qui me sourit d'un air idiot.

— Des fleurs jusqu'à la fin de ma vie, c'est ça ?

— Oui. Je ne suis que l'humble serviteur de ton cœur, ma douce.

Je lève les yeux au ciel en riant. Eros se penche et souffle à mon oreille :

— Mais si tu m'offres plus... Je n'hésiterai pas une seule seconde à me donner à toi.

Mon cœur loupe un battement. Il recule, me fait un clin d'œil avant que sa main n'agrippe de nouveau la mienne.

Pas le temps de s'éterniser sur ces sous-entendus. Il est l'heure d'aller assister au plan destruction de Mamie et Rewind.

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