Chapitre 37

— Ce soir, on met le plan en action.

Rewind chantonne tout en accrochant des banderoles dans le salon. Des banderoles en l'honneur d'Eros, avec des sortes de graffitis. Je fronce les sourcils, tout en déplaçant mon pion. Je suis en pleine partie d'échecs avec Bianca et je suis aussi en train de perdre piteusement.

Enfin, tout le monde sait que Bianca est une professionnelle aux échecs mais je pensais avoir une chance de la battre. Il faut croire que je me suis mis le doigt dans l'œil.

— Pourquoi tu accroches la décoration ? Ce n'est pas aujourd'hui l'anniversaire d'Eros.

Hier soir, je suis restée jusqu'à une heure du matin avec lui. Nous avons parlé de tout et de rien, allant de nos plats préférés jusqu'à se demander pourquoi l'univers existe. Ce que j'adore avec Eros, c'est qu'il rentre dans mes questions farfelues jusqu'au bout.

À aucun moment donné, je n'ai eu l'impression de le gêner, bien au contraire. Ses yeux brillaient si forte quand il me regardait que j'ai, à plusieurs reprises, détourné le regard.

Il n'y a pas eu de réel rapprochement, même si j'en brûlais d'envie. Au moins, nous avons pu parler. Et nous sommes sur la même longueur d'ondes. Que cela soit quant à comment nous visualisons chacun notre futur, jusqu'à son humour. J'ai tellement ri avec lui que j'en avais mal aux joues.

Et j'ai donc pu apprendre que son anniversaire tombe la veille de la date de son mariage. La poisse, quoi.

— Ce n'est pas pour Eros, réplique Rewind en déroulant la banderole.

Je manque d'éclater de rire en voyant des minis nous dessinés dessus en train de former une chaîne. Je tiens la main d'Eros, qui lui, donne un coup de pied à Ander, qui embrasse Eileen sur la joue, pendant que Rewind et Bianca se font un câlin. Et une abeille est posée sur son épaule.

— Rewind, tu as cinq ans d'âge mental ? s'étonne Bianca.

Il ouvre la bouche, scandalisé, avant de rétorquer d'un ton froid :

— Je te signale que j'ai passé du temps à tous vous confectionner. Tu pourrais au moins respecter mon travail. Regarde, il y a même Mamie au bout !

En effet, Mamie se tient à la fin de la banderole avec Tic et Tac. Elle lève sa canne en l'air comme pour prononcer un sort, et je lâche un éclat de rire.

— Oh, Marie Jésus ! Qu'est-ce que c'est que cette horreur !

Mamie fait irruption dans le salon, et c'est trop pour moi, j'éclate de rire. Elle a retiré les deux rondelles de concombres qui ornaient ses yeux et les ouvre grand en voyant son mini elle sur la banderole.

Sa peau est recouverte d'un masque à l'argile, si bien qu'on dirait un monstre tout droit sorti des enfers.

— Ce n'est pas moi, j'espère.

— Si, c'est toi, réplique Rewind. J'ai passé le plus de temps sur toi, alors sois au moins contente !

— Contente de... ça ? Je ressemble à un lapin effaré. Et mon teint, Rewind ! J'ai pris le soleil depuis, mon bronzage devrait être au moins visible. Tu as de la chance que je n'ai pas pris ma canne !

Elle fait mine de le fusiller du regard mais je vois bien l'éclat de malice dans son regard.

— Votre canne ne vous aide pas à marcher ? je m'étonne soudain.

— Je peux marcher sans canne, rétorque Mamie. C'est juste un accessoire pour frapper mes ennemis.

Rewind en fait tomber sa mâchoire au sol.

— Alors toute ma vie n'aura été qu'un mensonge ! Je croyais que tu avais du mal à avancer, moi !

Elle lâche un ricanement de sorcière.

— Bien sûr que non, fils. Je ne suis pas aussi vieille que tu le penses. Soixante-quatorze ans et pas toutes mes dents ! J'ai encore quelques siècles devant moi pour te cannader avec toujours autant de plaisir !

Rewind imite une grimace et Bianca éclate de rire.

— Quoiqu'il en soit, je ne ressemble pas à cette... chose dessinée sur ta banderole. Tu me prends pour un gobelin, fils ? Il ne manquerait plus que le chapeau et je suis prête pour le casting !

Elle s'approche de la banderole et inspecte de plus près, mais son portrait cette fois-ci. Rewind lui tourne dos et pivote vers nous en imitant sa grand-mère.

— Ah, par contre, pour te représenter, tu ne t'es pas loupé !

— Tu as vu, aussi beau en vrai que sur papier.

— Mauvais comparatif. Tu es plus beau sur le papier qu'en vrai.

Elle ricane toute seule, de nouveau. Je ne peux m'empêcher de sourire devant leur scène. J'aurais aimé avoir cette complicité avec mes grands-mères avant que toutes deux ne périssent.

— Tu es aveuglée par les rayons Rewind pour ne pas voir mon charme naturel ? Tu veux mes lunettes de soleil ?

Et il lui tend ses lunettes. Mamie les met. Ce qui me fait rire, c'est la différence de taille entre les deux. Mamie doit être un petit bout d'à peine un mètre soixante quand Rewind fait presque deux fois sa taille. Bon, j'exagère. Il doit être aux alentours du mètre quatre-vingt mais tout de même.

Mamie attend quelques secondes. Elle regarde à droite. Puis à gauche. Puis éclate d'un rire machiavélique.

— Non, tu es toujours aussi laid qu'au premier jour, mon chéri.

— Mais Mamie ! C'est méchant ça.

— Ce n'est pas toi qui disais que la vérité sortait de la bouche des plus beaux ? Regarde ma beauté, fils. Je suis incapable de te raconter de bobards !

Elle lui tourne les dos et garde les lunettes de soleil sur son nez. Puis elle se dirige d'un pas tranquille vers la porte, en marchant comme une reine.

— Mamie, mes lunettes !

Elle fait volte-face et lui mime un baiser.

— Elles font partie de ma tenue de ce soir, fils. Je te les rendrai demain. N'oubliez pas, les enfants, bal déguisé ce soir ! Le premier qui arrive en crasseux aura affaire à Mamie.

Et elle quitte la pièce d'un air solennel. Bianca vient de bloquer mon roi de sa tour. Bon.

— Échec et mat.

— Un bal déguisé ? je me tourne vers elle.

— C'est en l'honneur du tournoi. Eileen a eu l'idée avant-hier et bien sûr, Rewind s'est porté volontaire pour les costumes.

— Ce qui signifie... ?

— Que tu n'as pas à réfléchir au tien. Il s'occupe de tout le monde. N'est-ce pas, mon amour ?

Rewind sort de sa transe, visiblement encore sous le choc de l'enlèvement de ses lunettes et avance vers nous.

— Oui, mon abeille fleurie ?

— Tu passeras donner sa tenue à Arynn ?

— Oui oui. J'ai pensé aux meilleures costumes pour nos tourtereaux !

Il fait mine de se frotter les mains comme s'il avait hâte.

— Plus que quelques heures avant l'ouverture du bal et quelque chose me dit qu'il fera des étincelles !

Il offre un clin d'œil à Bianca qui sourit, satisfaite. Je n'oublie pas qu'il doit mettre en action son plan avec Mamie ce soir.

Pas de doute sur ce qu'il affirme.





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je posterai le chap 38 ce soir :)

bizz bizz

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