Chapitre 10

— Comment ça, Eros est la récompense ? s'exclame Bianca.

Rewind lui, éclate de rire.

— Plus de soixante ans de tournoi et tu crois pouvoir changer les règles ?

— C'est déjà prévu, rétorque Bendy. Je suis même sûr et certain que tes petits amis à Ecclosia ont enfin pris connaissance des nouvelles règles. D'ailleurs, le tournoi ne sera pas ouvert qu'aux membres royaux. Il le sera aussi pour toutes les jeunes roturières qui désireraient épouser un prince. Bien sûr, il y aura une sélection faite au préalable. Ma mère choisit les profils.

— Et ta mère est d'accord pour qu'Eros épouse une roturière ? s'offusque Rewind.

Il hausse les épaules d'un air nonchalant.

— Elle s'en fiche. Elle veut se débarrasser d'Eros.

— Il est d'accord avec ça ?

Je les surprends tous à prendre la parole. Bendy se tourne vers moi, un sourire charmeur aux lèvres.

— Tu veux rire ? Il fait la tête depuis des mois et il refuse de parler à notre mère jusqu'à ce qu'elle décide d'annuler cette compétition. Elle ne le fera jamais, son orgueil est bien au-dessus du prétendu amour qu'elle aurait pour son fils.

— C'est totalement injuste pour lui, souffle Bianca. On doit faire quelque chose.

— Tu ne peux rien faire, réplique Bendy. Ma mère est une divinité des enfers, elle t'égorgerait en pleine nuit si tu t'opposais à elle.

— Et si Eros trouve quelqu'un d'autre ? interviens-je. Et s'il tombait amoureux d'une fille mais qu'elle ne gagnait pas la compétition ?

Bendy me dévisage avec curiosité et répond d'une voix traînante :

— Ma mère s'y opposerait, je suppose. Je ne sais pas jusqu'où elle compte aller mais je soutiens mon frère sur ce point-là.

Bon. Au moins, Bendy n'est pas un monstre. Lui et Eros sont-ils proches ? Il pourrait peut-être l'aider... J'ignore si Eros a l'âme d'un rebelle en lui. Je me connais suffisamment pour savoir qu'à sa place, je serais déjà en train de pleurer dans mon coin à l'idée de me marier avec un inconnu. Je n'aurais jamais pu faire ce qu'a fait Eileen.

— Bon, tu n'as pas dix tours de plage à faire ? me rappelle Rewind avec un immense sourire narquois. Je me suis levé pour ça, je te signale !

Je grommelle en quittant mon siège. Dix tours de plage... Le cauchemar.

• • •

— Encore huit tours ! ricane Mamie au loin en utilisant son sifflet.

Elle porte un chapeau et nous siffle toutes les cinq minutes. Rewind et Bendy, eux, gesticulent comme des enfants. Ils nous hurlent dessus, à croire que ce sont des encouragements. La blague. Bianca, elle, passe son temps à les réprimander. Un moment, Rewind la soulève de terre et je l'entends pousser un cri de surprise.

Eros ne desserre pas les mâchoires. Il court à son rythme, plus pressé qu'autre chose et moi, je le suis tant bien que mal. Plutôt mal, d'ailleurs. Mes poumons se compriment à chaque pas que je fais, et mes jambes me semblent de plus en plus lourdes. Et ça ne fait que seulement deux tours ! J'ai l'impression qu'Eros a fait ça toute sa vie quand moi, j'aurais bien besoin de me remettre au sport.

— Pourquoi tu es parti comme ça tout à l'heure ? je demande à un moment, le souffle court.

Eros ralentit pour courir à ma hauteur. Ses joues ont rosi avec l'air frais du matin et Dieu seul sait à quel point il est beau en ce moment même. Il hausse les épaules d'un air désinvolte.

— On devait juste y aller. Ce n'était pas contre toi.

— C'est par rapport au tournoi ?

Son expression se rembrunit et il réplique :

— Si tu connais la réponse à ta question, pourquoi tu me la poses quand même ?

Je me mords les joues. J'ai gaffé. Eros ne prononce plus un seul mot. Moi, je dis les premiers trucs qui me passent par la tête.

— Tu sais, tu peux m'en parler si tu veux. Enfin, je ne suis pas très douée pour donner des conseils mais je suis une oreille attentive. Et je parle trop, parfois, même un peu trop souvent, alors si tu t'exprimais, ça me permettrait de... Tu vois là, je parle trop. Et je ne fais pas exprès !

Il tourne la tête vers moi et je crois que mon cœur a cessé de battre quand je le vois esquisser un sourire en coin.

— Effectivement, j'ai une pipelette à côté de moi.

Mes joues chauffent et je me devine déjà rouge comme les défunts coquelicots du jardin de Mamie.

— Je te taquine, Arynn. Tu peux parler, ça ne me gêne pas.

— Le problème, c'est que si je continue de parler... Je vais faire un malaise...

Et c'est vrai. J'ai un point de côté.

— Encore quatre tours, lance-t-il.

— OK, je fais un malaise.

Il lâche un rire tout en ralentissant pour me suivre. Sauf que je suis à deux doigts de recracher mes poumons en pleine course. Je ne sens plus mes jambes, ni mes pieds, ni même un seul muscle de mon corps. Je sens mon cœur tambouriner dans ma poitrine et avoir Eros à côté de moi n'arrange pas la situation.

Lorsque je pose mes yeux sur lui, j'en perds mon souffle. Son t-shirt se soulève à chacun de ses pas qui semblent si légers comparés aux miens, et les muscles de son dos...

Je fais un pas de travers et m'étale de tout mon long au sol. Eros s'arrête en pleine course et se précipite vers moi, alerté.

— Arynn ? Tu ne fais pas vraiment un malaise ?

Je cache mon visage de mes mains pour masquer mes joues rouges de honte et souffle d'une voix éteinte :

— J'ai trébuché.

— Sur une étendue de sable plat ?

Et il éclate de rire. Il saisit doucement mes mains et je crois voir la Faucheuse m'achever, je prie pour que cette journée ne soit qu'un rêve mais non. Eros me sourit de toutes ses dents, son visage à l'envers.

Aussi idiote que perdue dans mes pensées, je pense encore à voix haute.

— Tu es aussi beau à l'envers qu'à l'endroit, c'est troubl...

Je plaque ma main sur ma bouche, mortifiée. Eros arrête de rire et me dévisage avec curiosité, presque amusement.

Moi, je me relève illico et pique un sprint pour m'échapper de cette honte monumentale.

Arynn, tais-toi la prochaine fois, par pitié.

J'ai envie de m'arracher les cheveux. En passant devant le groupe des quatre commères, Mamie s'exclame :

— Un tour supplémentaire pour vous être arrêté !

— Elle est tombée sous son charme, ricane Rewind.

Bianca lui donne un coup de coude et il réplique en levant sa pancarte, hurlant à pleins poumons :

— ALLEZ EROS ET ARYNN !

Je manque de m'étouffer avec ma salive en reprenant ma course. Eros ne tarde pas à me rejoindre et au bout de quelques secondes, il lance :

— Merci pour le compliment.

Je le fusille du regard, et j'ai enfin le courage de répliquer :

— C'est sorti tout seul, ce n'était pas intentionnel.

— À la couleur de tes joues, je m'en doute.

J'ai une soudaine envie de l'étriper. Je me retiens. Je suis une princesse civilisée, pleine de bon sens et de sagesse.

Quand je le regarde, j'ai envie de me donner des tartes pour être aussi impotente.

À peine un jour que je le connais, et je fais déjà des gaffes phénoménales. Ce séjour à Imir promet...







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bon j'étais pas censée poster, mais j'ai bien avancé cette nuit donc jme suis dit gogogo

bizz bizz

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