Chapitre 57
Ces derniers jours ont été un vrai ascenseur émotionnel. Quitter Kelinthos et le Jeu des Roses pour s'engager dans une guerre dont nous n'étions même pas sûrs de ressortir vainqueurs a été une situation plus que délicate. Puis Erkel est mort, et il est revenu à la vie. Nous avons combattu un tas de soldats, sans compter les quatre qui nous ont bien amochés. Nous avons remporté la guerre en nous affirmant pleinement.
Et maintenant, la vie reprend son cours. Je passe les portes du palais, un brin nostalgique de ma première fois ici. J'étais déterminée à le tuer. Je n'ai jamais réussi, je n'ai même jamais tenté quoique ce soit. Et heureusement. Je ne m'imagine pas vivre sans lui aujourd'hui. L'amour est imprévisible.
— Bon. Nous devrons parler de pas mal de choses.
Sa voix est éraillée. Sûrement à force de crier mon nom quand il me pensait morte. Je le vois défaire son veston puis jeter son gilet anti-balles par terre. Horrifiée, je vois trois énormes bleus lui barrer la peau, à l'endroit où il aurait dû été touché.
— Je suis d'accord, premièrement, pourquoi as-tu fait le mort ? Tu as arrêté de respirer !
Mon ton est accusateur. Erkel se tourne vers moi, hausse un sourcil puis répond d'un air désinvolte :
— Je n'allais pas faire mine que tout allait bien pour que cet idiot me tire une balle en pleine tête.
— Tu m'as fait croire que tu étais mort, grogné-je.
— Et alors ? Tu étais triste ?
Il sourit comme un imbécile. D'un air rageur, je lui cracherai presque au visage toute la haine qu'il m'inspire en ce moment même :
— Bah non, bien sûr ! J'étais aux anges, au Pa-ra-dis. La vie est tellement plus agréable sans toi.
— Enfin, j'ai quand même dû essuyer tes larmes sur mes joues après coup.
Je le fusille du regard alors qu'il éclate de rire. La situation n'est pas drôle. Alors pour le détester jusqu'au bout, je me rue vers l'escalier pour monter à l'étage. Mais ses bras m'emprisonnent et sa tête se pose sur la mienne. D'une voix douce, il me confie :
— Je suis désolé, Morgan. J'aurais aimé que les choses soient différentes, mais j'avais prévu mon coup. Je savais que Roy finirait par me tirer dessus à un moment où à un autre. Maintenant, cela n'a plus d'importance. Ils sont tous morts et nous sommes en sécurité.
Je me laisse aller contre lui. Il dépose un baiser sur ma joue avant de me relâcher.
— Je vais aller soigner ces... trucs. Tu devrais venir avec moi, ton bras est ensanglanté.
Et il a raison, ma blessure s'est rouverte. Alors je le suis sans protester. Ensemble, nous enjoignons sa chambre puis filons vers la salle de bains. Il ouvre les placards, sort des bandages et d'autres trucs utiles et au moment où il referme les portes, mes doigts effleurent son visage. Il est tellement... unique.
Nos regards se croisent. L'alchimie n'a pas disparu, il y a toujours cette fichue tension entre nos deux corps. Sans me demander quoique ce soit, il saisit doucement mon visage pour déposer un baiser sur mes lèvres. C'est délicat, c'est doux, et plaisant. Je caresse sa peau et mes mains descendent sur ses épaules, son torse nu. Je ne me lasserais jamais de lui, c'est incroyable.
Il finit par reculer et saisit les bandages. Alors qu'il s'occupe de ma blessure, je l'interroge :
— De quoi devons-nous parler ?
— D'un tas de trucs. De nous, de tes activités de meurtrière qui doivent cesser au plus vite, de...
— Mes activités de meurtrière ?
— Où veux-tu vivre, ma fleur ?
Ses surnoms ne m'avaient pas manqué.
Menteuse.
Je hausse les épaules.
— La forêt me paraît être une bonne option.
— Alors je te suis.
J'éclate de rire et ses yeux se mettent à briller comme si je devenais un cookie dès que je riais. Il me dévisage avec curiosité... ou amour. Je ne sais pas trop.
— Tu irais dormir dans les bois avec moi ?
— Bien sûr que oui. Je mettrais le monde à feu et à sang pour toi. Vivre en forêt ne devrait pas être si compliqué que ça. J'ai fait du camping, tu sais et...
Je le fais taire en capturant ses lèvres. Il grogne congre ma bouche en reculant.
— Où veux-tu que j'aille vivre ?
— Reste ici, avec moi. De toute manière, ce palais est triste sans toi. Et maintenant que Torin n'est plus là...
Il s'interrompt. Je prends son visage dans mes mains avec toute la douceur que je possède.
— Je suis désolée. J'aurais aimé pouvoir faire quelque chose pour lui.
— Vous vous appréciiez à peine.
— Mais il était ton ami. Te voir ainsi me fait de la peine.
Il hausse les épaules et décide de clore le sujet. Même s'il veut faire croire qu'il va bien, je sais qu'il en souffre. Je préfère rester silencieuse pour l'instant, et lui laisser le temps de faire son deuil. Perdre un être cher fait toujours mal.
— Maintenant que le souci maison est réglé... Où voudrais-tu aller ?
Je plisse les yeux alors qu'il termine de bander mon bras.
— Je veux dire, on n'est pas obligés de rester ici. Bon, j'ai tous mes conseillers et domestiques mais on pourrait changer d'endroit, même voyager si tu veux.
— Pourquoi pas voyager à Imir ? Et rendre une petite visite à ta nouvelle famille.
Il se crispe et me foudroie du regard.
— Hors de question que j'aille les voir !
— Erkel ! Rewind a raison, tu es un taureau enragé. Ils t'apprécient et toi, tu préfères rester reclus. Tu as vécu trop longtemps dans la solitude, bouge-toi un peu les fesses, non ?
Il marmonne dans sa barbe.
— Me bouger les fesses ? C'est toi qui va te...
Sauf qu'il ne finit pas sa phrase parce qu'à toute vitesse, j'ouvre le robinet du lavabo et l'éclabousse. Il se tourne vers moi alors que je ricane comme un démon tout droit sorti des Enfers. Et il me court après. Mais je l'évite comme la peste, me rue dans la chambre.
Sauf qu'Erkel est plus fort, plus rapide. Et que je n'ai pas vraiment envie de me débattre. Alors il me rattrape, ses bras encerclent ma taille et il me ramène dans la salle de bains. Je gigote comme un ver de terre, battant des jambes et bientôt, il me pousse sous la douche. Ah, ça, non !
Je tente de m'enfuir mais il me bloque de ses bras, un sourire aux lèvres.
— Tu n'iras nulle part, petit cœur.
— Le petit cœur va appuyer là où ça fait mal si tu...
Il s'avance et rentre à son tour dans la douche. Je le regarde faire, éberluée. Il lève le bras, saisit le pommeau avant de le placer devant mon visage et d'allumer l'eau. Je pousse un petit cri tandis que l'eau glacée dégouline le long de mon corps. Je tente de le repousser mais Erkel raccroche le pommeau puis me ramène à lui.
— Alors, elle est bonne ?
— Tu sais, je peux toujours te tuer.
— Ose, ma fleur.
Il m'accule contre le mur et ses yeux balaient mon corps d'une telle intensité que je suis incapable d'effectuer le moindre mouvement. L'eau continue de dégouliner, mouillant mes vêtements et il sourit d'un air victorieux.
— Tu es encore mieux comme ça.
Je baisse les yeux. Évidemment, mon haut est tellement moulant que toutes les formes possibles sont visibles.
— Juste parce que maintenant, tu as une vue complète sur ça ?
Et je désigne ma poitrine, ce qui le fait rire. Mais bientôt, son rire se tait, et sa bouche vient rejoindre la mienne. Bon sang. Cet homme me rend dingue. Ses mains se posent sur ma taille alors qu'il me ramène contre lui. Sa langue se mélange à la mienne, ses lèvres remuent contre les miennes et je ne proteste pas quand il enlève mon haut.
Après tout, j'ai un putain de dieu grec devant moi à moitié nu, alors je ne vais pas me plaindre. Nos poitrines nues l'une contre l'autre, ses mains dévient dans mon dos, descendent un peu plus bas alors que ses lèvres continuent leur voyage dans mon cou, puis plus bas, puis plus... C'est une déferlante d'émotions qui agit en moi. Je gémis contre sa bouche, glissant mes mains dans ses cheveux, l'attirant encore plus contre moi.
Bientôt, nos vêtements disparaissent. C'est urgent, c'est pressant. J'ai besoin de le sentir contre moi, j'ai l'impression que si je ne le sens pas maintenant, tout de suite, je vais imploser. Mon cœur bat encore plus vite que d'habitude et j'ignorais que c'était possible. Ses soupirs se transforment en grognements, ses mains sont partout à la fois, ses doigts me font revivre des plaisirs coupables.
Lorsque nos deux corps sont au bord de la jouissance, au bord de la falaise vers une chute infinie de plaisir, je lui murmure les trois petits mots que je retenais jusque-là. Ça le fait venir immédiatement et sa bouche continue de déposer des baisers sur ma peau. Ce n'est qu'après quelques minutes qu'il recule. Je prends pleinement le temps de le dévisager. Bon Dieu, je l'aime.
— Redis-les-moi.
Je fais mine de ne pas comprendre. Erkel se tient là, devant moi. Sa main effleure mes seins, descend le long de mon ventre puis encore plus bas. Je serre les cuisses, le souffle court.
— J'ai déjà...
— Chut.
Il dépose un baiser sur mes lèvres. Je le dévisage. Et les minutes durent des heures, il a coupé l'eau mais mes gémissements résonnent contre les parois de la douche. Il s'abaisse, se met à genoux. Et mon plaisir décuple. Je m'agrippe à ses épaules pour ne pas chavirer, pour ne pas sombrer. Mes jambes se mettent à trembler après plusieurs minutes et il finit par se remettre debout.
Il saisit mon visage dans ses mains.
— Redis-les-moi.
Sa voix est douce, suave. Alors je ne tiens pas.
— Je t'aime. Je t'ai toujours aimé, je crois.
Ma voix n'est qu'un murmure. Il se délecte des moindres de mes mots puis m'agrippe par les hanches pour m'embrasser une dernière fois.
— Tu disais dans ta lettre que j'étais ta lumière. Alors laisse-moi te dire ce que tu représentes à mes yeux. More, tu es une bénédiction pour moi. Tu es un coucher de soleil dont on ne se lasse jamais, tu es la douceur d'un matin, la promesse d'un lendemain. Après tout ce que j'ai vécu, après tout ce que nous avons vécu, je n'imagine plus un seul jour sans te savoir à mes côtés.
Je fonds sous ses mots. Alors je ne fais rien d'autre que de le serrer dans mes bras. Les larmes pointent aux coins de mes yeux mais je les ignore. Cet homme me rend pleinement heureuse.
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