Chapitre 12
Nous allons arriver à la capitale d'Imir –Edros– d'ici quelques minutes et je vais clairement mal. Je ne sais pas si c'est la chaleur étouffante dans la voiture, ou bien cette maudite sensation dans mon estomac mais j'ai un mauvais pressentiment. J'ai peut-être trop de fois exagéré concernant mes suspicions mais c'est la première fois que je voyage depuis longtemps, et surtout pour aller sur une île.
Quand j'étais petite, avec mes parents nous allions souvent dans d'autres pays voisins mais jamais je n'ai eu l'occasion de me rendre à Imir. C'est un pays si isolé que nous aurions dû prendre le bateau. Comme pour Socrenia. Le pays se situe un peu plus au nord-ouest d'Ecclosia, ce qui explique pourquoi William et Therys ont tous deux un teint cadavérique.
J'ai heureusement hérité de la peau de ma mère : légèrement hâlé et prête à bronzer à tout moment de la journée. Eileen est un peu plus pâle que moi, bien qu'elle soit plus resplendissante.
— C'est tellement beau ! s'exclame-t-elle, le nez collé à la vitre.
Je lève les yeux. Il est vrai que le paysage n'est pas mal. Dans mon pays, des dizaines de forêt et d'arbres se dessinent aux côtés des routes or ici, les champs resplendissent de mille feux. Tout est jaune et vert, trop de couleurs vives se confondent dans le tableau, si bien que je plisse les yeux pour voir correctement.
J'ouvre légèrement la bouche quand en regardant devant moi, j'aperçois un palace. Pas un château comme à Lucrenda ou encore une immense demeure moderne pour Ecclosia, j'ai littéralement devant moi un palais oriental aux murs de pierres légèrement dorées et aux tours s'élevant par dizaines.
J'arrive à deviner la mer qui se dessine derrière le palais et je me mets à penser à la nuit d'hôtel le soir où Eileen est venue me chercher. Rewind et moi avions eu une longue discussion, une discussion qui a plutôt clôturé et fermé à jamais notre relation. C'était le genre de sujet dont je n'aurais secrètement pas voulu mentionner. Mais les choses sont ainsi. Rewind fait partie de mon passé.
— Il n'avait pas menti quand il disait qu'Imir était le plus beau pays du monde ! Regarde-moi ce paysage...
— Lucrenda reste tout de même beaucoup plus attirante, réplique Ander farouchement.
— Ça n'a rien à voir, soupire Eileen, en presque extase sur le palais se rapprochant de nous.
Je lève les yeux au ciel et dévisage Ander. Les sourcils fournis, les cheveux bruns un peu décoiffés, je comprends qu'Eileen soit tombée amoureuse de lui. Il ressemble à un dieu vivant.
Mon esprit se met à divaguer. Je me demande comment elle a fait pour se laisser tomber, pour lâcher prise. Pour tout abandonner sans avoir peur de la chute. Je ne pourrais jamais faire ça pour quelqu'un. C'est inimaginable.
— Nous sommes arrivés !
La limousine se gare directement devant le palais, à côté d'une dizaine d'autres voitures, toutes plus luxueuses les unes que les autres.
À peine le chauffeur éteint le moteur qu'Eileen se précipite à l'extérieur. Je suis là dernière à rester dans la voiture et j'ai sincèrement peur. Non, je n'ai pas peur en fait. Je suis terrifiée. Cette boule au ventre ne cesse de grandir alors que je jette un coup d'œil dehors.
Ander a le bras passé autour de la taille d'Eileen et je baisse les yeux sur les graviers. Des dizaines d'arbustes ont été taillés le long du palais et je remarque que leurs fenêtres n'ont rien à voir avec les nôtres. Ici, tout est plus petit, comme une mini ouverture mais je trouve que cela dégage un charme. Cela a l'air plus confort et surtout plus convivial.
Je sursaute lorsque trois coups sont tapés au carreau de la limousine. Le visage de William se dessine alors qu'il me fait un signe de tête comme pour demander ce que je fiche encore ici. Je me retourne une nouvelle fois. Pas de Rewind à l'horizon pour le moment.
Je prends alors mon courage à deux mains et m'extirpe de la voiture. Ce n'est que lorsque j'ai les deux pieds posés au sol que je réalise à quel point William est grand. Ou bien à quel point je suis petite.
— Tu veux l'éviter ce Rewind, n'est-ce pas ?
— Non. Pas du tout.
Mes joues rosissent naturellement comme à chaque fois que je mens et William sourit. Son visage respire la bonne humeur et le charisme. Ses traits sont anguleux, et deux petites fossettes se dessinent de part et d'autres de ses joues.
Pourquoi je ne réalise que maintenant à quel point il est beau ? Et séduisant... Et si... Il faut que j'arrête. Cela ne me ressemble pas de baver ainsi devant un homme.
— J'ai bien vu ta tête au déjeuner d'hier. Et je parle avec Eileen, tu sais.
Il passe une main dans ses cheveux et je l'observe faire, hypnotisée. Ses iris marron m'étudient attentivement, comme à chaque fois qu'il pose les yeux sur moi. J'ai l'impression qu'il prend le temps de tout faire. Le temps de parler, le temps de me regarder, le temps de m'écouter.
— Alors quoi, vous êtes devenus les meilleurs amis du monde maintenant ?
— Affaires politiques seulement. Et puis, Sa Majesté n'aime pas tellement que je traîne autour d'elle. Je le comprends parfaitement, si j'étais avec une aussi jolie femme qu'elle, je ne permettrais pas d'autres hommes de poser le regard sur elle, quoique soient leurs intentions.
Et il plonge ses yeux dans les miens comme pour me faire passer un message. Cela ne fonctionne pas. Enfin, à moitié. J'ai bien quelques secondes d'hésitation mais je finis par répliquer froidement :
— Donc dans vos affaires politiques, vous avez parlé de Rewind ensemble ?
Il hausse les épaules et tend le bras pour s'appuyer sur la voiture. Je me retrouve coincée entre celle-ci et son torse. Génial. Il ne manquait plus que ça.
— En autres. Elle a mentionné à quel point il lui était cher, et aussi à quel point vous étiez tous les deux proches.
— Nous n'étions pas proches, dis-je en grinçant des dents.
— Mais tu veux l'éviter, n'est-ce pas ?
Je hausse les épaules. Il recule alors et me tend sa main. Sa main que je dévisage.
— Viens. Allons autre part ensemble.
— Parce que tu crois que j'ai envie de rester avec toi ?
Il ne retire pas sa main. Tout homme logique l'aurait fait. Tout homme empli de bon sens serait parti, aurait déjà abandonné depuis longtemps.
— Tu es restée trop longtemps seule, Bianca. Laisse-toi aller pour une fois.
Je m'imagine l'envoyer balader et partir retrouver Eileen. Je m'imagine loin d'ici, loin de tout.
Et sans aucune raison valable, je glisse ma main dans la sienne.
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Coucou !
J'ai posté une carte du royaume dans l'avant-propos pour vous situer les principaux pays, n'hésitez pas à aller voir :)
J'espère que le chapitre vous a plu. La suite sortira bientôt normalement.
Bizz bizz
❤️
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