transphobie assumée sous couvert de féminisme avec JK Rowling

//CONTENT WARNING : TRANSPHOBIE//

[avant de commencer, je tiens à préciser que cet article n'est pas un lieu à débat. je parle ici des droits des personnes trans, qui sont les droits humains, et je refuse de les débattre avec quiconque. les personnes trans sont des humain.es, iels ont le droit de transitionner, d'être appelé.es par les pronoms qu'iels préfèrent et si vous n'êtes pas trans, vous n'avez pas votre mot à dire sur leurs revendications - vous ne savez pas ce qu'iels vivent au quotidien. de la même manière, je n'entends pas "contrer" les "arguments" (si tant est qu'on peut les appeler ainsi) transphobes exposés par JK Rowling, car ce qu'elle dit remet en cause l'identité même et les combats de la communauté trans, et lui répondre serait donner de la crédibilité à ce qu'elle dit, et donc à sa transphobie. merci de votre compréhension.]

bonjour à tous, j'espère que vous allez tous bien en ces temps bizarres !

aujourd'hui je viens de vous parler d'un sujet important, qui est la transphobie de la part de certaines militantes féministes (plus communément appelés TERF : trans-exclusionary radical feminist). les TERFs, c'est le nom qui a été donné par des militant.es queer à des militant.es féministes qui estiment que les combats trans invisibilisent les luttes pour les droits des femmes. généralement, ce sont des féministes qui considèrent que les femmes trans ne sont pas des "vraies" femmes, qui les excluent des combats et des revendications féministes et qui considèrent même que les femmes trans représentent un danger pour les droits des femmes.

(rappel : une femme trans est une femme, née dans un corps masculin (son sexe de naissance donc), mais dont l'identité de genre (c'est-à-dire la façon dont elle se perçoit, à quel genre est-ce qu'elle s'identifie) est femme. ce sont des femmes au même titre que les femmes cis, qui sont des femmes nées dans un corps de femmes et s'identifiant femmes.)

aujourd'hui j'ai choisi de vous parler d'une écrivaine et militante très connue dont les propos transphobes et essentialistes ont atteint une haine dont on ne peut plus dire qu'elle tient de l'erreur ou de la maladresse, et qui ne sont pas excusables. je vais essayer du mieux que je peux de vous expliquer en quoi ses propos sont extrêmement problématiques et pourquoi est-ce qu'il est important d'arrêter d'accorder 1) de la crédibilité et de 2) de l'audience à cette personne. il s'agit de l'auteure la plus connue et la plus riche au monde : JK Rowling (14 millions de followers sur Twitter).

cet article sera divisé en quatre parties : la discrimination vécue de manière générale par les personnes trans (pour un peu de contexte), les tweets transphobes de JK Rowling, son essai/son nouveau livre et en dernier, comment réagir par rapport à sa transphobie.

1) LA TRANSPHOBIE

JK Rowling a une communauté énorme et de fait, tout ce qu'elle dit peut avoir un impact conséquent, surtout pour la communauté trans, qui est extrêmement marginalisée et victime de violences en tout genre, notamment des thérapies de conversion, qui sont des tortures légales en France sur les personnes LGBT+ visant à les faire "changer" d'orientation ou à les """guérir""", qui incluent notamment du gavage de porno, des viols, des électrochocs, des fois utilisés à même les organes génitaux, et autres tortures inefficaces.

selon wikipédia, "Il n'existe aucune preuve fiable que l'orientation sexuelle peut être changée, et des études, organisations médicales et organisations internationales signalent que ces thérapies sont potentiellement dangereuses", et "de nombreux travaux de recherches ont classé ces pseudo-thérapies comme relevant des pseudosciences, comme inadéquates aux problèmes vécus par les personnes homosexuelles et transgenres (d'autant que le consensus scientifique est maintenant que l'homosexualité n'est pas une maladie) et comme générant souvent des conséquences négatives et durables sur les personnes homosexuelles (se traduisant notamment par un taux de suicide encore plus élevé) et que ces traitements, outre le fait qu'ils renforcent le sentiment de honte des personnes qui y sont exposées, renforcent aussi les préjugés d'intolérance homophobe prônant l'anormalité de l'homosexualité" - si vous souhaitez plus de détails, je vous invite à aller voir le témoignage "Tu deviendras hétéro, mon fils" sur le site https://www.huffingtonpost.fr.

toujours d'après wikipédia, les personnes queer (ou LGBTQ+ si vous préférez) ont 4 fois plus de chance en moyenne de se suicider par rapport aux individus hétérosexuels et cisgenres (et les thérapies de conversion/autres violences endurées par cette communauté contribuent largement au taux très important de maladies mentales (la dépression notamment) rencontrées par les personnes LGBTQ+).

et ça, c'est la réalité endurée par les personnes LGBTQ+ dans le monde (ou la peine de mort, pour celles et ceux ayant le malheur de vivre dans l'un des 13 pays où être LGBT est un crime puni de mort, sans compter les 72 pays dans lesquels être LGBT est interdit/un crime), même en France (à noter cependant qu'une députée de LREM, Laurence Vanceunebrock, a déposé en Juin 2020 une proposition de loi pour mettre fin à ces tortures en France, qui n'a pas encore été examinée - source : wikipédia), même aux USA, même en Europe - bref, partout.

avant d'entrer dans le vif du sujet, je tenais juste à dire que je suis féministe, à 100%, et que je soutiens les femmes et leurs combats, parce qu'on en a cruellement besoin encore aujourd'hui en 2021. néanmoins, je suis aussi queer (pas trans, mais pansexuelle) et très proche de personnes trans (ou appartenant au parapluie transgenre, ce qui inclue aussi la non-binarité et les individus genderfluid par exemple) et au quotidien, c'est parfois un enfer (surtout vivant et étudiant dans un environnement relativement peu ouvert d'esprit).
je me permets de m'exprimer sur ce sujet non pas au nom des personnes trans mais en tant que personne LGBTQ+, car d'une part je suis très proche comme je l'ai déjà dit de personnes trans et que d'une autre part, la plupart de mes droits aujourd'hui en tant que personne queer ont été obtenus parce que des personnes trans ont manifesté, parlé, lutté pour que notre communauté et notre génération bénéficient de ces droits et il me semble de fait que c'est normal que je m'exprime à mon tour quand les leurs sont remis en question.

ces deux causes me tiennent énormément à coeur et je ne pense pas qu'elles soient opposées, bien au contraire ! aujourd'hui il existe beaucoup de "féministes queer" qui militent pour les droits des femmes et des LGBTQIA+, et ces deux combats ne se contredisent pas, même si JK Rowling (et autres TERFs) semble être persuadée que l'un nuit à l'autre.

avant d'entrer une bonne fois pour toute dans le vif du sujet, je souhaite être très claire : si vous n'êtes pas directement concerné.e par les propos de JK Rowling, alors vous ne pouvez pas dire si ce qu'elle a dit est transphobe ou non. si vous n'êtes pas une personne trans, dans ce cas vous n'avez jamais vécu de transphobie, vous n'êtes pas passé par les mêmes épreuves que ces individus, et de fait, il ne vous appartient pas de décider si ce qu'elle dit et écrit tient de la transphobie ou non. c'est vraiment très important : par exemple, si vous êtes comme moi une fille cis, vous ne supportez sans doute pas que, quand vous expliquez un comportement sexiste qui vous dérange, un homme vous rétorque "gNgNgNgN c'EsT pAs Du SeXiSmE", alors essayez de ne pas faire la même chose à d'autres communautés discriminées.

(je ne vise personne en particulier, je tenais juste à le dire)

mais bref, cette énorme parenthèse sur les violences LGBTphobes mises à part, voici comment tout a commencé :

2) LES TWEETS TRANSPHOBES DE JK ROWLING

l'année dernière, un grand scandale a éclaté sur JK Rowling, l'accusant de transphobie à cause de certains tweets à caractère transphobe qu'elle avait likés/dont elle est l'auteure (rappel : elle est suivie par 14 millions de personnes sur Twitter). depuis 2018, elle avait liké plusieurs tweets transphobes (et était aussi accusée de suivre une youtubeuse elle-même de nombreuses fois accusée de transphobie) et en 2019/2020, elle a écrit plusieurs tweets transphobes.

voici les screens des tweets traduits qu'elle a écrits/likés (source : madmoizelle.com et @lecoindeslgbt sur instagram) :

(fun fact Joanne : oui, les personnes trans sont discriminées, et pourtant vous ne marchez pas avec iels. si vous avez besoin de plus d'exemples, Donald Trump a interdit en 2020 aux personnes trans de servir dans l'armée et a autorisé les discriminations envers les personnes trans à l'hôpital, entre autres joyeusetés.)

si vous ne vous débrouillez pas trop mal en anglais, je vous conseille de regarder la vidéo suivante (de matt bernstein, un militant queer aka @mattxiv sur instagram). il explique très clairement en quoi le comportement de l'auteure est transphobe (d'abord à travers ses tweets) et parle notamment de l'essai transphobe rédigé par JK Rowling (qui a d'ailleurs remporté le prix Rutzell décerné par la BBC fin 2020) et également de son nouveau livre (aussi problématique, vous allez voir pourquoi).

la 1ère partie de la vidéo présente les tweets transphobes de JK Rowling (du moins la plupart, il ne présente que les "principaux") et la seconde partie (à partir de 11 minutes et quelques) parle de l'essai transphobe qu'elle a écrit et de son nouveau livre.

https://youtu.be/0jZJ0vttMpw

cette vidéo est hyper complète (la plus complète et nuancée que j'ai pu trouver sur le sujet), il s'exprime très clairement et calmement, mais si vous ne parlez pas très bien anglais, je vous ai fait un résumé (mais je vous conseille vraiment de regarder la vidéo pour des explications plus complètes et nuancées, je passe seulement sur les points les plus importants) :

- par rapport au tweet qu'elle a publié (celui où l'article dit "les personnes qui menstruent"), il est transphobe car elle rétorque en écrivant : "n'y avait-il pas un mot pour ça avant ? fimmes ? fommes ? fammes ?".

cela sous-entend donc que seules les femmes ont leurs règles, ce qui n'est pas vrai. en effet, les femmes trans n'ont pas leur règles et les hommes trans/les personnes non-binaires ayant un vagin peuvent avoir leurs règles. de la même manière, certaines femmes cisgenres n'ont pas leurs règles (les femmes ménopausées, les femmes cis qui n'ont pas d'utérus, etc). c'est dans le but d'être plus inclusif  à la fois de la communauté trans mais aussi de certaines femmes cisgenres que l'auteur de ce post a écrit "les personnes menstruées", et non pas les femmes.

- ce tweet en lui-même n'est pas une raison de cancel l'auteure, car effectivement, cela pourrait être une maladresse, ou une erreur de sa part. mais le fait est qu'elle en a écrit (ou liké) plusieurs du même acabit (dont vous avez les screens plus haut), en refusant d'écouter les personnes qui ont tenté de lui expliquer pédagogiquement en quoi ses propos sont problématiques. il semble qu'il y ait un véritable refus de sa part de s'informer et de se remettre en question de l'auteure vis à vis de la communauté trans (rappel : une communauté très marginalisée et victime de discriminations allant jusqu'à la torture) et quand on connait l'impact qu'elle a, son comportement est inacceptable et dangereux (il participe et encoutage à la discrimination envers les personnes trans).

- par exemple, dans son thread de trois tweets sur le fait que "si le sexe n'est pas réel...", elle confond la notion de sexe (donc nos organes biologiques, c'est à dire mâles ou femelles) avec celle du genre (qui est une construction sociale : c'est comment on s'identifie - par exemple, je suis de sexe féminin car je suis née avec des organes sexuels féminins et mon genre est "femme" également car c'est ainsi que je m'identifie).
oui, le sexe est réel : personne n'a jamais dit le contraire (à part peut-être des mouvements extrémistes dont je n'aurai pas entendu parler mais soit). en revanche, le sexe ne dicte pas le genre. dans la majorité des cas, les deux correspondent (dans le mien par exemple : ça s'appelle être cis ou cisgenre). mais pour une minorité de personnes, leur sexe de naissance diffère de leur genre : c'est la transidentité. donc oui, Joanne, le sexe est réel. mais le genre est un spectre. les deux ne correspondent pas toujours, et c'est un fait qui a été prouvé scientifiquement. les personnes trans existent et jusque là, il ne me semble pas qu'elles aient fait de mal à qui que ce soit (contrairement aux transphobes).

- ce qu'il faut comprendre, c'est que parmi les femmes, il y a des tas de minorités qui souffrent d'oppressions sexistes différentes - les femmes noires, handicapées ou par exemple, transgenres. on fait toutes face à des discriminations sexistes différentes selon ces facteurs, mais cela ne veut pas dire que nos luttes sont opposées ou incompatibles, au contraire ! ce n'est pas parce que les femmes trans ne souffrent pas, par exemple, de discrimination liée à l'avortement ou aux règles qu'elles ne sont pas des vraies femmes ou qu'elles ne souffrent pas de sexisme, elle aussi. elles l'expériencent juste d'une manière différente, tout comme c'est le cas pour les femmes racisées, de classes sociales plus pauvres ou handicapées.
JK Rowling a probablement vécu beaucoup de sexisme dans sa vie, mais à la mesure d'une femme blanche, hétéro et cisgenre. cela diffère certainement de l'expérience d'une femme trans et noire ou handicapée, et pourtant elles sont toutes victimes de sexisme, et elles sont toutes des femmes. en outre, l'expérience de l'une n'invalide pas celle de l'autre.

- JK Rowling semble définir les femmes par leur corps (notamment par leurs règles). mais dans ce cas, cela exclut beaucoup de femmes (déjà les femmes trans mais pas que), même des femmes cis : que faire des femmes cis qui n'ont pas d'utérus, ou qui sont juste ménopausées ? c'est très réducteur de définir les femmes par leurs organes génitaux, au delà de la transphobie, c'est juste du sexisme. ironique, n'est-ce pas ?

- en outre, Joanne Rowling parle beaucoup dans ses tweets et dans son essai des lesbiennes (en disant qu'elle les soutient et qu'elle connait beaucoup de lesbiennes dont elle est proche) et l'utilise comme un argument (en gros pour dire "je ne suis pas transphobe, j'ai des amies lesbiennes"). déjà, ce sont des choses complètement différentes : on peut soutenir les lesbiennes ou toute orientation sexuelle, mais être transphobe. le premier implique une orientation sexuelle, tandis que le deuxième implique une identité de genre : ce sont deux choses différentes, même si les lesbiennes et les personnes trans font partie de la communauté LGBTQ+.
en plus de ça, c'est joli de le dire sur internet, mais elle n'a jamais inclus un personnage gay ou une romance homosexuelle dans les sept tomes d'Harry Potter (et oui, elle a dit une fois que Dumbledore était gay, mais il y a une différence entre le dire une fois dans une interview après la parution du livre et le représenter explicitement dans la saga comme un personnage gay), ni vraiment manifesté son soutien aux personnes homosexuelles en dehors de cette polémique (elle n'a pas relayé des pétitions, utilisé sa plateforme pour éduquer et soutenir les personnes LGBTQ+, n'est jamais allée dans une manifestation, etc), ce qui m'amène à douter sérieusement de son engagement pour les lesbiennes.

SECONDE PARTIE : SON ESSAI

ensuite, matt bernstein parle beaucoup de l'essai de 3 000 mots de JK Rowling (je l'ai lu en entier aussi) dont voilà le lien : https://www.jkrowling.com/opinions/j-k-rowling-writes-about-her-reasons-for-speaking-out-on-sex-and-gender-issues/. c'est une lettre qu'elle a publié sur son site pour s'exprimer sur la polémique (et qui n'a fait que renforcer la polémique, vous allez voir pourquoi).

je voulais de base vous mettre certains extraits qui m'avait les plus choqués dans cet article et les expliquer, mais ce serait vraiment extrêmement long donc je vous laisse à la vidéo de matt bernstein, qui l'a très bien fait. néanmoins, voici quelques points que l'on retrouve souvent dans son essai :

↠ elle associe sa propre expérience de femme cis à celle des hommes trans, en expliquant donc (tous les extraits sont dans la vidéo de matt bernstein) que si elle en avait eu la possibilité, elle aurait elle aussi transitionné pour "devenir un homme". elle dit donc que les hommes trans sont des femmes qui ont choisi la "facilité" car ils ne voulaient pas affronter le sexisme mais qu'au fond, ils sont encore des femmes, juste incertain.es de qui iels sont (je la cite presque mot pour mot). cela invalide complètement l'expérience et le vécu des hommes trans, comme s'ils étaient juste incapable de penser par eux-mêmes ou de déconstruire les stéréotypes inculqués par le patriarcat. cela voudrait aussi dire que la transidentité n'existe pas et n'est qu'un "échappatoire" au sexisme pour les hommes trans, ce qui est aussi complètement faux. elle se permet ainsi d'invalider, elle, en tant que femme cis, le vécu de milliers de personnes à travers le monde, sans chercher à se remettre en question ni à demander leur avis aux personnes concernées.

↠ et c'est vraiment problématique, parce qu'elle ne fait pas la différence, comme beaucoup de gens, entre ne pas aimer les stéréotypes et les oppressions qui vont avec son genre (par exemple : je suis née fille et je m'identifie en tant que fille mais le patriarcat, le sexisme que j'ai pu subir ou encore les normes sociales ont parfois rendu être une fille difficile pour moi, ce qui ne me donne pas envie de "devenir" un homme trans pour autant) et être transgenre, qui est vraiment s'identifier à un genre qui n'est pas celui assigné à la naissance.
c'est bien plus complexe et profond, et c'est très hypocrite de la part de JK Rowling de ne pas le reconnaitre. cela invalide encore une fois complètement l'expérience et le vécu des personnes trans.

↠ c'est la même chose quand elle dit qu'elle aurait bien transitionné, elle aussi. déjà, beaucoup de personnes trans, même dans des pays où c'est autorisé (ne parlons même pas du cas où c'est interdit), ont du mal à transitionner : d'abord à cause du courage que ça demande de s'affirmer en tant qu'individu trans dans une société qui les discrimine, et ensuite, pour des raisons financières/administratives. ensuite, encore une fois, elle mélange le sexisme qu'elle a vécu avec l'expérience complètement différente de la transidentité - qu'elle n'a jamais vécue et qu'elle ne connait donc pas personnellement. elle se permet donc de s'exprimer sur une discrimination dont elle n'est pas victime pour la minimiser.

↠ elle sous-entend également beaucoup que faire son coming out en tant que personne trans est une tendance, ce qui encore une fois, invalide le vécu et l'expérience des personnes trans. si plus en plus de personnes trans font leur coming out, ce n'est pas parce que c'est une trend, c'est juste parce que la société accepte de plus les personnes transgenres.

↠ en dehors de ça, je trouve très dérangeant le fait qu'elle ramène tout aux femmes cisgenres. il existe d'autres formes d'oppression que le sexisme adressé aux femmes cis, et il faut l'accepter - cela ne veut pas dire que son vécu à elle était "facile" ou qu'elle n'a pas vraiment fait l'expérience du sexisme. les activistes trans n'ont pas pour but de décrédibiliser/d'invalider ce qu'ont vécu les femmes cisgenres ou de s'approprier des luttes qui ne sont pas les leurs, contrairement à ce que JK Rowling prétend à certains passages de son essai. au contraire, leur but est de lutter ensemble. leur existence, leur combat, n'efface pas celui des femmes cisgenres.

↠ ensuite elle dit notamment plus loin que le langage médical inclusif est oppressant et remet en cause son identité de femme (oui, elle le dit dans ces termes là) et que les femmes trans seraient un danger pour les femmes cisgenres (je cite : "si vous ouvrez les portes des vestiaires et des toilettes à tout homme prétendant qu'il se sent femme, alors vous ouvrez les portes à tous les hommes qui veulent venir à l'intérieur").
elle insinue donc qu'en autorisant aux personnes trans l'accès aux toilettes qui correspondent au genre auquel iels s'identifient, alors ce serait un danger pour les femmes cis (je pense qu'elle sous-entend qu'il y aurait une augmentation des violences).
tout d'abord, je tiens à noter qu'elle dit bien "tout homme prétendant qu'il se sent femme", et pas femme trans : cette tournure décrédibilise les femmes trans et refuse de reconnaitre leur identité de genre - cela invisibilise et invalide donc leurs combats.

en outre, si sa grande crainte est une augmentation des violences envers les femmes cis, et bien il n'a jamais été prouvé que les personnes trans représentaient un risque pour les femmes cis/les avaient violées ou battues. en outre, si des hommes cisgenres prétendaient effectivement être trans pour accéder aux toilettes afin de commettre de telles violences, je ne pense pas qu'ils attendraient sagement qu'on autorise les personnes trans à utiliser les toilettes qui correspondent à leur genre pour commettre ces atrocités.

en toute honnêteté, vous pensez sincèrement que des violeurs/meurtriers/auteurs de violences envers les femmes soient prêts à commettre tous ces crimes, mais tiens si la loi leur interdit d'utiliser les toilettes féminins, alors ils vont obéir ? honnêtement, je pense que JK Rowling non plus ne pense pas ça mais qu'elle fait délibérément la confusion pour faire peur aux gens et les ranger de son point de vue.

en plus, matt bernstein explique dans sa vidéo que dans son université ou à New York, il y a de plus en plus de toilettes avec une mention "libre d'accès pour toute personne s'identifiant en tant que femme/homme" et qu'aucune infraction de ce genre n'a été remarquée jusque là.

Paris Lees, une femme trans, explique très bien la chose selon moi :

"Il n'y a pas de preuve que moi étant moi ait causé des problèmes pour les femmes cis que je rencontre. Si jamais il devait y avoir des problèmes entre les femmes trans et les femmes cis, ils devraient être traités avec respect et au cas par cas. Pour l'amour de dieu, laissez-nous tranquille."

bref, je vous laisse lire son essai en entier, je n'en ai présenté que les points qui revenaient le plus. honnêtement, si je devais déconstruire et expliquer chacun des "arguments" qu'elle donne dans cette lettre (elle mélange beaucoup le concept de genre et de sexe, encore une fois), ça me prendrait des heures et cet article ferait 10 000 mots (no joke).

TROISIEME PARTIE : LE LIVRE

maintenant, le livre. la polémique continue en juillet, puisque le nouveau livre que sort JK Rowling est à propos d'un homme s'habillant en femme pour capturer et tuer des femmes cisgenres.

vous êtes peut-être en train de penser : en quoi est-ce transphobe ? en soit, si l'auteure avait été quelqu'un d'autre, ça ne le serait pas. mais on sait que JK Rowling considère que les femmes trans (ou du moins la plupart) ne serait que des hommes qui s'habillent en robe. dans son essai, elle disait aussi qu'autoriser les "hommes prétendant se sentir femmes" à accéder aux toilettes correspondant à leurs genres représenterait un danger pour les femmes cisgenres. donc, on sait qu'elle considère que les "hommes s'habillant en femmes" (= les femmes trans) sont un danger pour les femmes cis.

et c'est exactement la storyline de ce livre. coïncidence ? ça fait un peu beaucoup quand même pour quelqu'un qui "soutient et aime les personnes trans" (oui elle a eu le culot de dire ça dans sa lettre), non ?

si au départ les tweets de JK Rowling pouvaient être discutables, il n'y a désormais plus aucun doute quant à ses intentions transphobes.

il ne faut pas oublier que JK Rowling est une femme cisgenre et blanche qui a une certaine position sociale depuis la parution de Harry Potter. elle ne sait pas ce que c'est qu'être trans (sachant que les femmes trans et noires représentent le plus grand pourcentage de personnes sdf aux USA), elle n'a jamais vécu de transphobie, et pourtant elle utilise sa plateforme de 14 millions de personne pour répandre de la haine et des fausses informations sur les personnes trans, alors qu'elle pourrait apporter tellement d'aide au combat !

ce n'est plus qu'une histoire d'erreurs ou de maladresse : elle a écrit un essai transphobe de 3k mots et plusieurs tweets où elle décrédibilise et minimise le vécu des personnes trans, et invalide leur combat. JK Rowling est problématique et transphobe, et il faut arrêter de la soutenir.

bref, pour plus de détails je vous redirige soit vers la vidéo de matt bernstein, soit sur le compte instagram @lecoindeslgbt (avec le hashtag #JKRowlingtransphobe) qui en parle très bien aussi (en français cette fois haha).

voici le thread twitter posté par une personne trans (traduction en coms) :

(saluez les quelques cellules restantes de mon cerveau qui se sont attelées à la traduction de ce thread. comme mon cerveau pense toujours dans un mix entre le français et l'anglais et que je suis *tousse* relativement fatiguée ce soir, je n'exclus pas de potentielles erreurs.)

4) ON FAIT QUOI DU COUP

ce qui m'amène à mon dernier point : l'importance d'arrêter de la soutenir, et comment.

⇨ tout d'abord, il faut arrêter de lui accorder de l'audience et de la crédibilité. donc, arrêter de la suivre et d'accorder du crédit à ce qu'elle dit.

⇨ ensuite, arrêtez de la soutenir financièrement : si vous voulez acheter ses livres, achetez les en seconde main. achetez de la merch non officielle ou de la merch de seconde main au lieu de la merch officielle. allez sur des fandoms non-officiels plutôt que sur le site officiel de Harry Potter.

parlez moins d'Harry Potter. certes, je sais c'est peut-être votre saga préférée, "toute votre enfance", "votre vie", etc. je comprends, c'est le cas pour moi aussi : je suis et je resterai inconditionnellement amoureuse de cet univers. mais c'est une fiction, on peut vivre sans. les personnes trans, elles, vivent dans une réalité transphobe que cette auteure accentue par la polémique qu'elle a créée.
elle contribue à la marginalisation et à l'augmentation des discriminations envers cette communauté, et ça c'est inacceptable - et ça ne vaut clairement pas une saga. ne me sortez pas que c'est impossible pour vous de vivre sans en parler partout sur Internet : on parle d'une fiction par rapport à une discrimination (je le rappelle : allant jusqu'à de la torture légale en France et dans beaucoup de pays au monde), que cette auteure encourage par ses propos.
ça ne vous empêche pas de lire cette saga, seulement arrêtez d'en parler vingt fois par jour sur votre rantbook/profil.
continuez d'en discuter avec vos amis si ça vous tient tant à coeur, je ne pourrai pas vous en empêcher, mais s'il vous plaît, arrêtez d'en parler partout sur internet, par respect envers la communauté trans.

et si vous pensez que c'est trop difficile pour vous, alors imaginez ce que ça doit être pour les personnes trans qui étaient fan d'Harry Potter et qui admiraient JK Rowling. c'est votre responsabilité en tant qu'allié.e de ne pas continuer de parler de sa saga à tout bout de champ.

s'accrocher à un univers fictif quand les propos de l'auteure blessent et remettent en question l'identité même de milliers d'êtres humains et incitent à la haine (elle ne le fait pas explicitement mais à travers tous ses tweets, sa lettre et son livre, elle incite à "renier" l'identité des personnes trans et encourage donc les discriminations dont cette communauté souffre), c'est égoïste.

merci d'avoir lu jusqu'ici. je suis désolée si c'est très long mais je voulais vraiment faire l'article le plus complet possible. j'y ai passé énormément de temps (plus de six heures lol, mes yeux souffrent), donc merci de votre soutien !

passez une très bonne soirée, bon courage à tous pour la fin de cette semaine confinée,

niamh

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