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Chapitre 5 : Échos du passé
Les jours s’étaient écoulés comme un flot d’eaux sombres, et l’atmosphère au sein de l’académie était devenue plus tendue. Les rumeurs circulaient, chuchotées dans les couloirs par des élèves intrigués par la présence de Kie. Certains disaient qu’elle était une sorcière, d’autres qu’elle venait d’un clan oublié, tandis que d’autres encore murmuraient qu’elle était simplement une enfant perdue, incapable de trouver sa place. Sasuke, lui, était devenu son observateur silencieux, se demandant si, au fond, il n’était pas le seul à percevoir l’angoisse qui l’entourait.
Ce soir-là, alors que la lune baignait Konoha d'une lumière argentée, Sasuke décida de retourner à la rivière. L’appel de l’obscurité était devenu irrésistible, comme si quelque chose l’y attendait, comme un souvenir enfoui qu’il devait déterrer. Il se glissa hors de sa maison, évitant les chemins trop fréquentés, et se dirigea vers la lisière de la forêt.
En arrivant près de l’eau, il aperçut Kie, accroupie, son carnet ouvert sur ses genoux. Elle semblait perdue dans ses pensées, ses longs cheveux flottant doucement dans le vent nocturne. Sasuke hésita un instant, puis s’avança, décidé à briser ce silence qui l’entourait.
"Encore ici, je vois," commenta-t-il, sa voix tranchant le calme de la nuit.
Kie ne tourna pas la tête. Elle continua d’écrire, son attention absorbée par le carnet. Sasuke se rapprocha davantage, curieux de ce qu’elle pouvait bien noter. L’envie de comprendre, de percer le mystère qui l’entourait, était devenue plus forte que jamais.
"Tu ne sembles jamais fatiguée," observa-t-il avec un brin de sarcasme. "Est-ce que tu écris des contes pour enfants, ou es-tu simplement une ombre qui passe son temps à dessiner des signes incompréhensibles ?"
À ces mots, Kie releva enfin la tête. Son regard, vide d’émotion, se fixa sur lui, mais cette fois, Sasuke ne se laissa pas intimider. Il tenait à comprendre. Il avait besoin de comprendre.
"Ce que je fais ne te regarde pas," répondit-elle calmement, son ton presque indifférent.
"Peut-être," répliqua-t-il, se laissant emporter par une frustration grandissante. "Mais tu sembles fuir quelque chose. Tu es ici tous les soirs, comme si cette rivière te cachait de quelqu’un."
Kie plissa les yeux, comme si elle tentait de lire quelque chose sur son visage. Après un moment de silence, elle ferma son carnet avec un mouvement fluide et lent.
"Je n’ai pas besoin de me cacher. Les ombres n’ont pas de forme, elles ne se cachent pas, elles sont simplement là."
Cette métaphore obscure ne fit qu’aggraver la confusion de Sasuke. Il s’assit au bord de la rivière, essayant d’ignorer le frisson qui parcourait son échine.
"Mais les ombres peuvent être dangereuses," murmura-t-il. "Elles peuvent cacher des choses que l’on préfère oublier."
Kie ne répondit pas immédiatement. Son regard se perdit dans le reflet de la lune sur l’eau, comme si elle voyait quelque chose que Sasuke ne pouvait pas percevoir.
"Oublier... ou se souvenir," dit-elle finalement, sa voix faible. "C'est une danse difficile. Les souvenirs sont parfois plus lourds que la réalité. Ils peuvent nous détruire de l'intérieur."
Sasuke sentit son cœur se serrer. Il avait souvent été hanté par ses propres souvenirs, par les visions de sa famille perdue. Kie était peut-être plus semblable à lui qu’il ne l’aurait imaginé.
"Qu’est-ce que tu veux dire ? Que cherches-tu ici ?" interrogea-t-il, essayant de sonder son esprit.
Kie tourna lentement la tête vers lui, et cette fois, un éclat de quelque chose ressemblant à l’émotion passa dans ses yeux.
"Je cherche des réponses. Des morceaux de moi que j’ai perdus. Mais chaque fois que je pense que je suis proche, ils s’évanouissent, comme de l’eau entre mes doigts."
Sasuke se sentit interpellé par sa confession. Un élan de compréhension l’envahit, mais il n’eut pas le temps d’y réfléchir plus longuement. Les branches derrière eux craquèrent soudainement, et un mouvement furtif attira leur attention.
Un groupe d'élèves, des camarades de l’académie, s’approchait, riant et plaisantant, sans se soucier de la présence de Kie. Ils s’arrêtèrent en la voyant, leurs rires se transformant en murmures inquiets. L’un d’eux, un garçon à la chevelure blonde, se moqua ouvertement.
"Regardez, c’est la fille qui parle aux fantômes. Qu’est-ce que tu fais ici, Kie ? Écrire des lettres à l’au-delà ?"
Les autres éclatèrent de rire, mais Sasuke sentit une vague de colère monter en lui. C’était ce qu’il redoutait : que les autres élèves n’aient aucune idée de la douleur que Kie pouvait ressentir. Il se leva, se plaçant devant Kie comme un bouclier.
"Laissez-la tranquille," ordonna-t-il, sa voix teintée d’une colère froide. "Vous ne savez rien d’elle."
Le groupe de camarades hésita, surpris par sa réaction. Le blond haussait les sourcils, confus face à l’improviste défense de Sasuke.
"Et toi, qu’est-ce que tu en sais, Uchiha ? Tu penses vraiment qu’elle mérite ta protection ?"
Sasuke ne répliqua pas. Il ne savait pas vraiment pourquoi il agissait ainsi, pourquoi il se battait pour Kie, mais quelque chose en lui s’éveillait. Peut-être était-ce la résonance de leurs blessures respectives, l’appel d’une âme troublée qu’il ne pouvait ignorer.
"Elle ne vous a rien fait," murmura Kie, brisant le silence qui s’était installé. "Ne perdez pas votre temps avec moi."
Ses mots étaient empreints d’une tristesse que Sasuke n’avait jamais entendue. Les autres élèves, un peu désarçonnés par la situation, échangèrent des regards incertains. L’un d’eux, une fille aux cheveux bruns, s’avança timidement.
"Pourquoi restes-tu toujours seule, Kie ? Tu pourrais te faire des amis. On pourrait... on pourrait t’inclure."
Kie les observa avec un mélange de surprise et de méfiance.
"Je ne cherche pas d’amis," dit-elle enfin, sa voix aussi tranchante qu’une lame. "Et je n’ai pas besoin de votre pitié."
À ces mots, les élèves reculèrent, leur air désinvolte s’évaporant peu à peu. Ils échangèrent des regards, réalisant qu’ils étaient face à quelque chose qu’ils ne comprenaient pas. Finalement, ils décidèrent de s’en aller, laissant derrière eux une atmosphère lourde de tension.
Sasuke se tourna vers Kie, surpris par la force de sa voix, mais aussi par la fragilité qui se cachait derrière.
"Tu sais, ils ne valent pas mieux que ça," murmura-t-il, essayant de la réconforter. "Ils n’ont aucune idée de ce que tu traverses."
Kie baissa les yeux, puis, lentement, elle relâcha un soupir.
"Peut-être. Mais cela ne change rien. Ils ne peuvent pas voir ce que je porte. Personne ne le peut."
Sasuke se sentit démuni face à sa résignation. Il aurait voulu lui offrir des mots réconfortants, des promesses de solidarité, mais il savait que rien de ce qu’il dirait ne pourrait vraiment apaiser son âme tourmentée.
"Peu importe ce que tu ressens, tu n’as pas à le porter seule," finit-il par dire. "Tu peux... compter sur moi."
Un silence s’installa entre eux. Kie leva les yeux vers lui, une lueur de surprise traversant son visage.
"Compter sur toi...?" répéta-t-elle, comme si les mots lui étaient étrangers.
Sasuke acquiesça, un peu mal à l’aise. Il n’avait pas l’habitude de se montrer vulnérable, mais il savait qu’il devait faire quelque chose, pour elle, pour lui.
"Je sais ce que c’est d’être seul. Et je ne veux pas que tu le sois. Je ne veux pas que tu... que tu te caches. Parle-moi, même si ce n’est pas facile. Je t’écouterai."
Les yeux de Kie s’adoucirent, mais elle restait immobile, comme si elle pesait chaque mot qu’il venait de prononcer. Puis, finalement, elle soupira de nouveau, et dans un geste délicat, elle lui tendit son carnet.
"C’est là que tout commence."
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