𝟐𝟐 ¦ 𝐋𝐄𝐒 𝐃𝐄́𝐋𝐈𝐂𝐄𝐒

𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟐 ━ 𝟐,𝟒𝐊 𝐦𝐨𝐭𝐬
Le Jardin des Délices,
Jᴇ́ʀᴏ̂ᴍᴇ Bᴏsᴄʜ (1503)

     Au cours de ses vingt années d'existence, Marco ne s'était que très rarement rendu en discothèque. Ce constat n'avait rien d'étonnant, car ces places tournantes du monde de la nuit rassemblaient à elles seules un tas de choses qu'il n'appréciait pas spécialement : le bruit, les lumière et la foule. Et s'il comprenait la joie que certain·e·s pouvaient ressentir à l'idée de danser au milieu de tout ceci, Marco ne la partageait pas vraiment.

     Plus jeune, il s'était trouvé peiné de ne pas apprécier ces sorties où tou‧te‧s ses ami‧e‧s semblaient pourtant s'amuser. Il avait fini par réaliser que ce genre d'ambiance n'était simplement pas sa tasse de thé. Il en fallait pour tous les goûts, et Marco préférait largement des activités plus tranquilles impliquant un nombre réduit de personnes. Cela ne l'empêchait pas de se rendre quelques fois dans les boites de nuit caennaises, mais toujours avec deux objectifs en tête : profiter de ses ami‧e‧s et s'assurer qu'il ne leur arrive rien de fâcheux.

     Lorsqu'Ymir l'avait invité à les rejoindre ce soir-là, Marco avait pris le temps de réfléchir avant d'accepter sa proposition. Après tout, sa dernière sortie du genre remontait déjà à plusieurs semaines ; il ne risquait pas de faire une overdose. Par ailleurs, il n'avait pas vu son amie depuis plus longtemps encore à cause de leurs horaires terriblement incompatibles. Et puisqu'il se trouvait justement avec Jean à la réception de ce message, ce fut tout naturellement que celui-ci l'accompagna.

     Ymir leur envoya aussitôt l'adresse. Situé en retrait du centre ville, l'établissement en question avait récemment été rénové par son nouveau propriétaire. Plus petite que la plupart de ses concurrentes, la boîte de nuit commençait tout juste à se constituer une clientèle. Mais pour Marco, ce fut presque un soulagement de constater que les lieux n'étaient pas trop bondés. Les deux jeunes hommes payèrent leur entrée avant de retrouver Ymir et son groupe d'ami·e·s qui sirotaient leur verre non loin du bar tout en discutant joyeusement. Marco ne fut pas surpris d'y voir Mikasa, qui était aussi en troisième année de droit. En revanche, il ne s'attendait pas vraiment à ce qu'Eren, son frère adoptif, soit également de la partie.

     — Bordel, grinça Jean dans son dos. Dis-moi que je rêve...

     Néanmoins, celui-ci ne laissa rien paraître de son agacement lorsqu'il s'avança pour saluer Ymir. Il y avait là des têtes que Jean ne connaissait que de loin, ainsi prit-il le temps de se présenter au reste du groupe. Il fit exprès d'ignorer Eren, lequel lui adressa un rictus amusé. Les nouveaux venus s'éclipsèrent ensuite pour aller chercher une boisson au bar. Une fois devant celui-ci, Marco se pencha vers l'oreille de Jean.

     — Je ne savais pas que vous vous entendiez si mal, s'étonna-t-il d'une voix assez forte pour se faire entendre. Il n'est passé quelque chose de particulier entre vous ?
     — Pas vraiment. Eren est juste trop lourd.

     Le barman déposa rapidement leur commande sur le comptoir. Mais au vu de l'air qu'affichait Marco, Jean comprit qu'il aurait aimé en apprendre un peu plus sur Eren.

     — On s'est rencontré l'année dernière, à l'ESAM. Il y a tout de suite eu une espèce de rivalité entre nous. Mais je crois qu'on été presque amis, au début. Jusqu'à ce qu'Eren prenne la compétition trop au sérieux. Tout était devenu une occasion de se prendre la tête pour déterminer qui était le meilleur, expliqua Jean. Et il était souvent question du nombre de filles avec qui on avait couché. Je trouvais que c'était un comportement de gamin à la longue, alors j'ai arrêté de traîner avec lui.

     Marco siffla tout en jetant un œil discret en direction d'Eren.

     — Il m'avait semblé du genre forceur, commenta-t-il, mais c'est encore pire que ce que je pensais.
     — C'est clair. Au fait, tu sais qu'il m'a déjà proposé de coucher avec lui ? lâcha calmement Jean, l'air de rien.

     Marco se retourna vivement vers lui, les sourcils haussés par l'étonnement. Il n'avait jamais entendu une histoire pareille.

     — La première fois, c'était après que Mikasa m'ait mis un râteau. Il m'avait dit qu'à défaut d'avoir la sœur, je pourrais tenter avec le frère, cita Jean. Et il y a fait allusion plusieurs fois depuis. Je te jure, ce type fait une fixette sur moi, ricana-t-il. Quelle que soit la compétition qu'il pense mener, on dirait que j'ai gagné depuis longtemps !

     Marco fut tenté de rétorquer que c'était lui, le gagnant qui avait finalement réussi à séduire Jean, mais il n'osa pas le faire. Leur consommation en main, les deux jeunes hommes rejoignirent le reste du groupe. À leur retour, Ymir ne fut pas avare de questions pour Jean qui tendait l'oreille pour entendre quelque chose à travers le bruit ambiant de la boite de nuit. On aurait pu penser que la jeune femme cherchait simplement à connaître un peu mieux le nouveau venu, mais Marco ne demanda si Ymir n'en profitait pas pour l'évaluer. S'il avait compris la manœuvre, Jean n'en laissa rien paraître et s'efforça de répondre du mieux possible. Bien que la conversation se rapprochait d'un interrogatoire de police, Marco fut heureux de voir discuter ensemble deux des personnes qu'il aimait le plus.

     Ce petit manège ne dura pas, car Historia déclara soudain qu'elle avait drôlement envie d'aller danser. Ce faisant, elle glissa un clin d'œil discret à Jean, qui comprit qu'elle avait attendu le bon moment pour mettre fin à son calvaire. La plupart des membres du groupe suivirent la jeune femme blonde qui s'éloignait déjà en direction de la piste. En temps normal, Jean les aurait imité‧e‧s sans hésitation. Mais ce soir, il se tourna vers Marco pour l'interroger du regard.

     — J'aime autant rester ici, déclina-t-il. Mais vas-y, toi.

     Il savait que Jean appréciait beaucoup plus ce genre de distraction que lui, et sa présence ne devait pas l'empêcher d'en profiter. Avant de partir, le jeune homme déposa un rapide baiser sur ses lèvres avec un naturel qui laissa Marco pantois.

     — Je ne pensais pas vivre assez longtemps pour voir Jean faire un truc aussi mignon, commenta une voix dans son dos.

     Marco sentit ses joues rougir sous le poids du regard que lui adressa Mikasa. Il y devina une loueur amusée, mais la jeune asiatique semblait sincèrement heureuse pour eux. Marco tourna la tête en direction de la piste de danse, où il peina à repérer Jean au milieu de tous ces corps inconnus qui bougeaient selon un rythme plus ou moins décousu. Le jeune homme s'était placé à côté d'Historia pour chanter à plein poumon les paroles de la musique que crachaient les enceintes.

     Marco aimait observer Jean de loin tout en sachant que, parmi cette foule d'anonymes, il était celui qui le connaissait le mieux. Seulement, il eut le loisir de constater que le beau châtain attirait bien d'autres yeux que le sien. Sur la piste de danse, deux jeunes femmes s'étaient frayées un chemin pour arriver à sa hauteur. En voyant Jean se pencher vers elles pour entendre ce qu'elles essayaient de lui dire, Marco sentit un nœud désagréable lui tordre la poitrine. Lorsqu'il se redressa, son ami se contenta de secouer la tête en signe de négation. Quoi que ces inconnues aient tenté de lui proposer, Jean avait visiblement refusé. Marco s'en trouva soulagé.

     Cependant, l'incident lui donna aussitôt matière à réfléchir. Jean était un jeune homme désirable ; c'était un fait qu'il n'avait jamais cherché à nier, même au tout début de leur relation. Et Marco n'était assurément pas le seul à partager cet avis. Il suffisait pour cela de jeter un coup œil à Eren qui, bien que situé de l'autre côté de la piste, semblait toujours vouloir garder le beau châtain dans son champ de vision. Marco secoua la tête. C'était ridicule ; lui et Jean n'étaient même pas vraiment ensemble à proprement parler. Avait-il seulement le droit d'être jaloux à la moindre interaction de ce genre ? À ses côtés, Mikasa sembla s'amuser du tourment qu'elle voyait s'agiter silencieusement en lui.

     — Tu es sûr que tu ne veux pas le rejoindre ?

     Marco se mordit nerveusement la lèvre inférieure. Ces derniers temps, il n'était plus sûr de grand-chose. Ses yeux ne quittaient pas la silhouette de Jean, qui se trémoussait au milieu d'autres corps que le sien. Et Dieu savait qu'il aurait aimé avoir l'audace de le rejoindre pour l'embrasser devant tou‧te‧s celleux qui ne pourraient jamais espérer le déshabiller que du regard ; Eren le premier. Oui, si seulement il osait...

     Le jeune homme se balança d'un pied sur l'autre, les sourcils à demi-froncés. Il hésita pendant de longues minutes, lesquelles lui permirent finalement de rassembler le courage nécessaire. Une fois décidé, Marco siffla le reste de son verre avant de le tendre à Mikasa, qui l'attrapa avec un sourire en coin. Elle le regarda s'éloigner vers la piste de danse d'une démarche (certes) moyennement assurée pour y retrouver celui qui lui faisait tant tourner la tête.

     Le sourire de Jean fit remonter ses pommettes lorsqu'il vit son beau brun s'avancer. Maintenant qu'il se tenait au milieu de tout ce monde, Marco ne savait pas vraiment ce qu'il convenait de faire. Sans doute devrait-il essayer d'imiter les mouvements des autres fétard‧e‧s, qui semblaient se dandiner naturellement au rythme de la musique. Seulement, Marco était assez peu confiant quant à ses qualités innées de danseur. À vrai dire, il avait l'impression d'être un bébé pingouin qui réalisait que la banquise était drôlement glissante.

     Jean dut s'en douter, car il attrapa aussitôt sa main pour le guider. De son côté, Marco s'efforça d'oublier leurs trop nombreux‧ses voisin‧e‧s afin de se concentrer sur ses gestes. Au bout d'une ou deux chansons, il était déjà un peu moins crispé et fredonnait même quelques refrains. Heureux de constater qu'il semblait s'amusait, Jean redoubla d'efforts dans l'espoir d'agrandir son sourire. Il y parvint sans difficulté après l'avoir fait tourner plusieurs fois, le ramenant toujours un peu plus proche de lui. Entre la musique et les lumières, Marco commençait à se sentir un peu étourdi. Ou peut-être était-ce la façon dont Jean le regarda juste avant de l'embrasser.

     Ce baiser ensorcela tellement Marco qu'il ne réalisa pas tout de suite où Jean l'entraînait avec tant d'empressement. Il laissa échapper un hoquet de surprise lorsque son dos heurta la porte close d'une cabine flambeau neuve. Des lèvres s'écrasèrent de plus belle contre les siennes avec une telle ardeur que Marco chercha à leur échapper afin de pouvoir respirer. S'il appréciait beaucoup cet élan de passion, il avait légèrement peur que ses conséquences ne soient pas adaptées au lieu dans lequel ils se trouvaient. Cependant, Jean paraissait bien loin de ce genre de préoccupations. Sa bouche se perdit dans le cou du brun tandis que ses mains s'affairaient en-dessous de sa ceinture. Prisonnier de ses attentions, Marco s'entendit gémir.

     — Putain, Jean. T'es sûr de vouloir faire ça ici ?

     L'intéressé rabattit la cuvette des toilettes pour s'y installer. Quand il sortit de sa poche un préservatif pour le lui enfiler, Marco comprit que Jean n'avait probablement jamais prévu de s'arrêter à un simple baiser. Ou même à sa bouche. Car celle du jeune homme se trouvait justement beaucoup trop prêt du sexe de son partenaire pour que ce soit une simple coïncidence.

     — Je n'ai jamais fait ça avant, le prévient-il.
     — Moi non plus, avoua Marco.

     Cette réponse sembla plaire à Jean. Après quelques secondes de contemplation, il posa d'abord ses lèvres sur le gland qui se dressait devant lui. Jean s'appliqua à essayer différentes choses : tout en caressant tour à tour sa verge et ses testicules à l'aide de ses mains, il fit courir sa langue sur la longueur du membre et se risqua enfin à le prendre en bouche. À force de redécouvrir ainsi l'organe sexuel masculin, Jean gagna progressivement en confiance. Dès les premiers mouvements de va-et-vient qu'il effectua, Marco sut qu'il ne tiendrait pas beaucoup plus longtemps. Ses doigts se perdirent dans les cheveux châtains de son partenaire alors qu'il laissa la jouissance le traverser dans un ultime gémissement. Pas peu fier de lui, Jean se redressa avec un sourire en coin.

     — Il faudrait vraiment qu'on aille se faire dépister, lâcha-t-il tranquillement. La prochaine fois, j'aimerais essayer d'avaler.

     Marco en fut si abasourdi qu'il resta d'abord sans voix.

     — T'es vraiment un grand malade, finit-il par pouffer.
     — Et tu n'as encore rien vu...

     Le sourire malicieux qu'affichait Jean ne rassura pas du tout Marco, qui se demandait ce que l'autre pouvait bien sous-entendre par cette phrase sibylline. Jean le laissa cogiter quelques secondes de plus, puis il attrapa son poignet afin de guider sa main le long de son dos. Sous les yeux perplexes de Marco, il l'encouragea silencieusement à faufiler ses doigts sous la barrière de son pantalon. Ceux-ci s'y aventurèrent prudemment, jusqu'à ce que leur propriétaire comprenne ce que Jean voulait lui faire sentir. Car sous son caleçon, coincé entre ses fessiers, il y avait là un objet très étonnant.

     — Bordel, jura Marco. Est-ce que c'est ce que je pense ?

     Et Jean continua simplement de lui sourire, visiblement ravi de sa petite surprise. De son côté, Marco n'avait jamais été aussi troublé. Il n'eut pas besoin de réfléchir longtemps pour supposer que le jouet sexuel avait été acheté en ligne, tout comme la fameuse poire de lavement avant lui. Quand à savoir pourquoi Jean était si content d'acquérir de nouveaux bibelots destinés à s'introduire dans ses fesses...

     — Il est hors de question que je te fasse l'amour dans les toilettes à la propreté douteuse d'une boite de nuit, trancha immédiatement Marco. Et de toute façon, tu es beaucoup trop bruyant pour qu'on puisse se le permettre.

     Jean s'apprêtait à plaider sa cause, mais cette remarque eut le mérite de lui faire entendre raison. S'il fit d'abord la moue, il trouva rapidement une solution à ce léger contre-temps.

     — On va chez moi ?
     — On va chez toi.

     Ils sortirent des toilettes avec un certain empressement. En se frayant un chemin jusqu'à la sortie, l'épaule de Marco percuta assez brusquement celle d'un autre jeune homme qui se retourna sur leur passage. Jean crut voir le visage de son compagnon pâlir. Lorsqu'il s'en inquiéta, ce dernier lui assura pourtant que tout allait bien. L'artiste lui sourit en retour. Sans doute était-ce la lumière qui lui jouait des tours.

Nᴏᴛᴇ ᴅᴇ Lʏᴀ
Me voilà de retour après cinq mois de pause qui m'ont semblée bien longs !

Comme je l'ai expliqué à quelques reprises sur Instagram, j'ai eu un deuxième semestre universitaire un peu compliqué où j'ai malheureusement délaissé l'écriture (bien malgré moi). Mais je me relève tranquillement et j'espère maintenant retrouver un rythme régulier pour terminer LMBYFL d'ici la fin de l'été. On croise les doigts !

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top