𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟕
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C H A P I T R E 1 7
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赤い糸赤い糸
赤い糸
— LIVAI, T'AS UN SACRE CUL dans ce pantalon, putain.
Le concerné leva les yeux au ciel, ignorant la remarque d'Edward. A présent debout devant l'ilot central de la cuisine, ses doigts posés sur le haut de sa tasse, il porta le récipient à ses lèvres avant d'en avaler quelques gouttes.
Face à lui, Farlan, confortablement calé dans le haut tabouret qu'il occupait, esquissa un rictus à l'intention du noiraud. Puis, après avoir ingurgité la bouchée du toast qu'il tenait, ouvrit à nouveau les lèvres :
— Je me demande encore comment deux personnalités contradictoires telles que les vôtres ont bien pu se rencontrer.
— Je l'ai ramassé sur le bord d'une route, il avait été abandonné par sa famille, lâcha Livai en buvant de nouveau une gorgée de son thé.
Aussitôt, juste à gauche du châtain, Edward haussa les sourcils en pointant le noiraud d'un doigt accusateur :
— C'est faux ! Je me suis incroyablement infiltré sur ta banquette arrière pendant que tu t'arrêtais sur une aire d'autoroute ! rugit-il.
— Je t'ai laissé t'infiltrer sur la banquette arrière parce que tu avais froid, le corrigea le noiraud sans laisser voir la moindre émotion. Personne ne laisse ses portières ouvertes en temps normal, tu aurais dû t'en douter.
— Eh ouais ! Parce que je suis un super espion ! lâcha en retour le faux-blond en esquissant des gestes saccadés. Tu as vu mon visage et tu t'es dit : « ce mec a besoin d'aide ! » Je t'ai dupé avec mon air de chien battu et...
— Pour sûr, tu ressemblais à un chien, commenta son chef sans ne rien laisser voir de son amusement.
Jamais il ne l'admettrait, mais il appréciait ce genre de conversations stupides avec Edward.
— Non j'étais un super espion de la mort qui tue, scanda le blond.
— Non.
— Et pourquoi pas ?
— Pas avec un vocabulaire pareil.
En guise de réponse, le faux-blond fit la moue, vexé. Bien sûr que non, il n'était pas un espion. Il n'était, à vrai dire, même pas capable d'en être un. Et ils le savaient tous pertinemment étant donné que, la seule fois où on lui avait confié une mission d'infiltration, il avait oublié de changer son fond d'écran le présentant tout souriant à côté d'un Ackerman tirant une tronche de dix pieds de longs. Il s'était alors grillé, montrant son amitié avec l'ennemi du groupe qu'il tentait d'infiltrer.
Autant dire que la mission de sauvetage après une telle bourde avait été particulièrement...tendue.
— Salut, la compagnie, lança la voix enjouée d'Isabel lorsqu'elle franchit le seuil de la porte.
Tous se tournèrent vers le petit bout de femme flanqué de deux couettes rousses qui venait de faire irruption dans la salle. Derrière elle, la silhouette assez costaude d'un châtain aux cheveux ramenés en arrière, Porco Galliard, le deuxième lieutenant de la Rose Noire, se découpait.
— Salut, Isa, répondit le châtain à droite d'Edward.
La bouche pleine de chocolat, ce dernier se contenta d'un geste de la main énergétique en direction de la femme. Livai, de son côté, hocha simplement la tête.
— Prêts pour l'avant-première de Diamond Star 2 ? demanda-t-elle avec un rictus.
— C'est nul depuis qu'ils ont fait mourir le personnage de (T/P), bouda Edward. Miranda était super utile à l'intrigue, j'ai pas envie de revoir les autres persos sans elle.
— C'est vrai que je ne sais pas trop comment ils vont se démerder pour faire progresser l'histoire, maintenant, expliqua Farlan. Surtout que j'en ai parlé avec elle tout à l'heure, elle n'a pas été appelée pour jouer dans le deuxième opus, ce qui veut dire qu'elle n'apparaitra même pas dans des flashbacks.
Le noiraud, devant eux, leva les yeux au ciel. Il avait oublié que le succès du premier volet de cette saga avait été si large que, même dans ses rangs, des fans du film existaient. Il se réjouissait encore que nul parmi eux n'ait encore demandé à l'actrice une photographie ou un autographe.
Alors, tandis que tous étaient excités à l'idée de se rendre l'avant-première du deuxième film, il commençait à sérieusement se demander s'il parviendrait à garder son calme tout le long de la diffusion.
Mais il se devait de ne jamais oublier une chose : aucun, d'Eren, sa femme ou lui, ne devait faire de vagues.
Discrétion était de mise.
— Ce que je comprends pas, commenta Edward, c'est que Miranda était la sorcière la plus puissante des onze nations et elle s'est fait victimiser comme une merde.
— C'est vrai que c'était ridicule, comme mort, appuya Farlan.
— Vous rigolez !? s'exclama Isabel. Elle s'est sacrifiée pour protéger Hangus ! C'est héroïque.
— Justement, ça correspond pas du tout au personnage, c'est une pétasse de base.
— Ouais, c'est pour ça que j'ai cru qu'elle était pas vraiment morte mais (T/P) m'a dit qu'elle n'apparaissait pas dans le deux.
En retrait, Porco et Livai échangèrent un regard insistant. Qu'il s'agisse du premier qui ne savait absolument pas de quoi ils parlaient ou du deuxième qui s'en fichait — ou plutôt, qui n'admettrait jamais qu'il connaissait déjà la fin car avait lu les livres, des années auparavant — tous deux se sentaient légèrement exclus de cette conversation.
Quand il les entendait parler, le noiraud était parfois pris par l'envie de les faire taire en leur racontant la fin et déclarant que, dans le livre, le personnage de Miranda avait fait semblant de mourir et qu'elle était une traitresse, responsable d'ailleurs du décès des trois soldats qui allaient mourir dans le deuxième volet qu'ils s'apprêtaient à voir, le soir-même. Mais, même si leurs airs outrés le feraient particulièrement rire, il était simplement hors de question que quiconque sache qu'il avait apprécié — ou tout simplement, lu — les livres pour adolescents Diamond Star.
Alors, reculant de quelques pas et ignorant Edward qui était soudain pris d'un accès de vulgarité aigue, insultant la famille de l'intégralité des personnages qu'il n'aimait pas, ils entamèrent, Porco et lui, une conversation d'un tout autre registre.
— Nous quatre, on sera dans la même voiture, expliqua Porco, se penchant vers son interlocuteur. Je serais le chauffeur, (T/P) sera sur le siège passager et vous deux, sur la banquette arrière.
— Je suis obligé de me coltiner l'abruti de service ? demanda-t-il en fronçant les sourcils.
— Tu préfèrerais être à côté de sa femme ? répondit le châtain en haussant les sourcils, légèrement surpris.
— Entre la peste et le choléra..., soupira Livai en pinçant l'arête de son nez. Va pour Eren, au moins il ferme sa gueule, lui.
Un pouffement amusé secoua le torse de Porco. Il appréciait sa collègue mais il était vrai que, lorsqu'elle était lancée sur certains sujets, nul ne pouvait plus l'arrêter.
— Tu es sûr que tu veux conduire ? demanda le noiraud après quelques instants.
— C'était mon job, tu sais, répondit le châtain avec un rictus. Elle était le sniper, j'étais le chauffeur.
— Et quand cette merde d'avant-première sera terminée, on pourra se concentrer sur notre objectif d'aller chercher le septième lieutenant, votre comportementaliste.
— Il est doué dans plein d'autres trucs, souligna Porco.
— Evidemment que le trouves doué, c'est ton frère, lâcha le noiraud.
Comme pour appuyer son intervention, l'héritier Ackerman tira une feuille de l'intérieur de sa veste de smoking et, la dépliant, présenta un tableau à l'homme sous ces yeux.
Celui-ci se découpait en cinq colonnes pour quatre lignes. La première comportait des photographies noir et blanc, la deuxième des légendes pour ces mêmes clichés, la troisième d'autres images et la quatrième, de nouvelles descriptions des portraits.
Sur la première ligne, le visage de Porco était discernable au niveau de la deuxième colonne. Il ne put s'empêcher de parcourir rapidement les quelques mots écrits sous cette image :
« Deuxième lieutenant : Porco Galliard.
Expert : mécanicien, chauffeur, exerce aussi en tant que démineur.
Mandats d'arrêt : 3.
Prix sur le marché noir : 5 500 000 $. »
Ses yeux glissèrent sur la troisième ligne, comportant les portraits de son frère ainsi que des membres décédés de la Rose Noire.
Sur la deuxième colonne, des cheveux foncés ramenés en arrière surplombait une mâchoire aussi carrée que celle de Porco. Mais quelque chose dans les yeux de cet autre homme, dans leur forme arrondie, lui conférait un air bien plus doux et avenant.
« Septième lieutenant : Marcel Gailliard.
Expert : comportementaliste, expert en manipulation.
Mandats d'arrêt : 3.
Prix sur le marché noir : 5 500 000 $. »
Porco fronça légèrement les sourcils.
— Nos primes sont similaires, commenta-t-il.
Puis, ses yeux glissèrent sur la colonne à droite de son frère et sur les longs cheveux blancs encadrant un visage plutôt marqué. Sur la photographie, elle portait une capuche.
Son cœur se serra dans sa poitrine. Cette fille-là et les deux à côté, ce trio avec qui il avait partagé tant de rires et de cuites, elles étaient décédées, aujourd'hui. Et le tampon rouge barrant leurs photographies insistait bien sur cette idée.
« Huitième lieutenant : Olivia Starkohei.
Expert : sabreuse, escrimeuse.
Mandats d'arrêts : 4.
Prix sur le marché noir : 6 000 000 $. »
Le visage à sa droite.
« Neuvième lieutenant : Elisa Manhard.
Expert : acrobatie, infiltration.
Mandats d'arrêts : 2.
Prix sur le marché noir : 5 000 000 $. »
Il sentit sa poitrine le cuir. Il avait mal. Inej Ghafa, voilà comment ils avaient eu l'habitude de surnommer cette femme capable de tant de prouesse avec son corps, de gravir des façades lisses, de s'infiltrer dans les forteresses les plus forgées.
Elle lui manquerait.
Une autre photographie. La dernière de la ligne. La plus douloureuse pour lui. Celle dont s'était épris son frère, Marcel.
« Dixième lieutenant : Lara Smith.
Expert : chimiste.
Mandats d'arrêts : 4.
Prix sur le marché noir : 6 000 000 $. »
Il poussa un faible soupir. Il sentait le regard du noiraud, insistant, sur lui. Mais, ses yeux toujours rivés sur le tableau, il s'efforça d'ignorer l'homme en face de lui. Car il savait à quoi il pensait. Mais il se trompait.
Il connaissait la femme qui était censée les avoir trahis et, même si elle était amnésique, qu'elle ne se souvenait pas bien d'eux, jamais il ne douterait d'elle.
Personne ne pouvait comprendre. Personne, à part les membres de la Rose Noire.
En mission, alors qu'ils courraient au milieu d'ennemis, l'arme à la main et l'objectif en tête, elle avait été leur bouclier, celle qui protégeait leurs arrières. Combien de fois s'était-il retrouvé, les mains en l'air face au canon d'une arme à feu rivé sur son front, et pourtant sûr qu'il n'allait pas mourir ?
Car combien de fois, alors que son assaillant s'apprêtait à appuyer sur la détente, une balle avait traversé son corps de part en part, l'immobilisant ?
Alors, oui, nul ne pourrait jamais comprendre. Mais il savait que tous au sein de la Rose Noire avait confiance en elle.
Elle avait été piégée. Aucun doute n'était possible.
— Même si son nom n'est pas sur le tableau, je sais qu'elle n'a pas fait ça, elle ne nous a pas balan..., commença Porco, tentant de la défendre.
— Lis la deuxième ligne, dernière colonne, le coupa Livai.
Un peu surpris, le châtain s'exécuta. Et, baissant les yeux vers l'extrémité droite du tableau, là où une case noire barrée d'un point d'interrogation trônait à la place d'une photographie, il entreprit de lire la description.
« Cinquième lieutenant : ?.
Expert : tireur d'élite.
Mandats d'arrêt : 15.
Prix sur le marché noir... »
Lisant les chiffres de la dernière ligne, ses yeux s'écarquillèrent et ses sourcils se haussèrent. Bien sûr, il n'était pas sans savoir que la mieux implantée dans le milieu du crime au sein de la Rose Noire était elle, il n'y avait qu'à s'en référer au nombre de mandats d'arrêts émis à son encontre et dont il connaissait d'ailleurs le détail — trois internationaux, six français, deux suisses, un états-unien et trois algériens.
Mais, tout de même, après avoir vu une prime de six millions pour Olivia Starkohei et Lara Smith, jamais il ne se serait attendu à une telle somme.
Abasourdi, ce fut d'une voix légèrement enrouée qu'il articula à voix haute :
— Sept milliards quatre-vingt millions cinq-cents milles dollars.
Pantois, il mit quelques instants avant de relever la tête vers Livai. Ce dernier, les bras croisés sur sa poitrine et appuyé sur le plan de travail, le fixait d'un air impassible.
Pourtant, dire qu'il n'avait pas eu de réaction similaire en voyant pour la première fois une somme aussi haute sous la seule photographie manquante aurait été mentir.
— La Rose Noire s'en est souvent prise à des hommes politiques influents et, le dénominateur commun à toutes ses actions était la présence d'un sniper. Alors son implication dans ces attentats est la seule que les enquêtes ont pu prouver, les vôtres n'ont jamais été démontrées, expliqua-t-il.
Porco acquiesça. Bien sûr, il le savait. Si la police était à la ramasse en ce qui concernait la Rose Noire, le milieu du crime organisé était plutôt bien au courant.
Cependant, ils demeuraient ignorants quant à la plupart de leur mission.
— L'assassinat d'un premier ministre, l'attentat ayant pris la vie à la femme et l'enfant d'un président, l'accident suspicieux d'un député au moment où sa voie aurait pu être décisive pour faire valider une loi... Plein de vos actions ont poussé les parrains du crime organisé à s'intéresser à vous.
— Ce premier ministre menaçait de publier l'identité d'Olivia, à l'époque, donc (T/P) s'en est occupée. Nous n'avons pas été payé pour tuer cette mère et sa fille mais pour les aider à disparaitre alors que la guerre civile les menaçait sérieusement, leur fils et frère avait d'ailleurs été tué lorsqu'on nous a appelé, se justifia-t-il. On est des tueurs à gages mais pas des monstres, on n'aurait pas accepté un contrat pareil, sinon.
Un rictus étira ses lèvres tandis qu'il balayait le tableau du regard, légèrement fier.
— Et je te signale que c'est ta mère qui nous a payé pour assassiner ce député, affirma-t-il. Il voulait valider le port des armes à feu et, même si Kuchel nous a vanté le fait qu'elle était une femme engagée qui s'inquiétait de la sécurité de tous, nous savons tous les deux que c'est parce qu'elle aurait perdu beaucoup d'argent si la vente d'armes était devenue légale en France.
— Effectivement, si elles sont légalisées, le trafic d'armes en prendra un sacré coup, souligna le noiraud. Mais elle n'a pas tort sur le fait que les victimes d'armes à feu doubleront, il n'y a qu'à voir ce qu'il se passe ici, aux Etats-Unis.
Porco acquiesça lentement. Puis, avec un léger sourire, replia la feuille qu'il tendit à Livai. Celui-ci la rangea dans la poche intérieure de sa veste.
— Quoi qu'il en soit, reprit le châtain, je sais que (T/P) n'a rien à voir avec la publication de nos noms sur le dark web. Et puis elle est intelligente, elle n'aurait jamais mis en ligne nos identités sans mettre la sienne avec, ça la désigne trop comme coupable. C'est clairement un coup monté.
— Je suis d'accord avec toi, acquiesça l'autre. Enfin, bien sûr, sauf sur la partie concernant son intelligence.
— Je t'emmerde, rétorqua alors une voix dans son dos.
Livai se tourna vers celle qu'il avait reconnue. Porco fit de même, gratifiant d'un clin d'œil son amie qui, ayant pris la place de Farlan, buvait présentement une mixture chaude dans une tasse.
Si elle ignora le geste amical du châtain, ce ne fut que pour fusiller du regard le noiraud. Car en réalité, malgré son amnésie, elle ressentait une certaine connexion avec Porco duquel elle se sentait proche.
Aucun doute n'était possible, ils avaient été de grands amis, par le passé.
— Porco va nous conduire jusqu'au lieu de l'avant-première. On part dans dix minutes donc j'espère que tu es...
La voix de Livai mourut dans sa gorge. Se redressant pour placer son mug vide dans l'évier, la femme venait de se lever, contournant l'ilot central et laissant voir ce qui n'était autre que sa tenue pour l'évènement.
Une robe sirène habillait son corps. Un décolleté en « v » plongeant, formé par deux tissus s'entrecroisant, soulignait sa gorge réhaussée de traits d'highlighter précisément tracés. Puis, de celui-là, des manches en dentelles s'étendaient jusqu'à ses poignets sur un tissu transparent, laissant croire qu'il s'agissait de tatouages délicats. Demeurant près de sa poitrine jusqu'à ses genoux, le tissu s'élargissait ensuite très légèrement, sublimant sa silhouette et lui donnant une allure gracieuse.
Elle était radieuse. Elle et son maquillage finement élaboré.
— ...prête, termina Livai, son regard allant s'éterniser sur les courbures du corps de la femme.
— Je le suis, répondit simplement la femme. Et Eren nous attend déjà dans la voiture.
Le dépassant sans un regard, elle franchit le seuil de la cuisine en faisant résonner ses talons. L'avant-première commencerait à dix-neuf heures et il n'était que huit heures du matin mais, entre les conférences de presse, les photographies, les rencontres artificielles pour la presse et les interactions avec les fans, mieux valait qu'ils se présentent très en avance — surtout que le producteur lui avait demandé de venir durant la matinée pour rejouer certaines scènes du premier opus.
Histoire de rappeler aux fans combien ils l'avaient aimé et, surtout, faire savoir qu'elle n'oubliait rien du personnage de Miranda. D'autant plus que celui-ci réapparaitrait dans les films à venir.
Livai, quant à lui, se contenta de la regarder sans pudeur, déglutissant péniblement. Depuis leur séance plutôt...rythmée, il n'avait eu l'occasion de lui adresser la parole. Le matin suivant cela, ils s'étaient même retrouvés une demi-heure dans la même pièce, seuls, mais n'avaient prononcé le moindre mot, faisant semblant d'être obnubilés par leur téléphone portable.
Avant qu'Edward, débarquant en hurlant que la tension sexuelle était trop forte dans ces lieux, n'achèvent de les faire fuir tous les deux vers leurs chambres respectives.
A ses côtés, Porco le tira bien vite de ses pensées :
— Fais gaffe à ne pas baver, tu vas tâcher ton beau smoking.
ꕥ
Dans la voiture, le silence était tendu. Assise à droite de Porco, l'épouse d'Eren faisait de son mieux pour éviter le regard de celui-ci ainsi que celui de son amant dans le rétroviseur. Et le chauffeur, à sa gauche, laissait voir un léger rictus face à ce spectacle.
Pour sûr, elle s'était fourrée dans un sacré pétrin.
Coucher avec un homme qu'elle ne supportait pas, qui ne s'intéressait à elle que pour l'argent qu'elle allait lui apporter, le tout sous prétexte d'une détresse sexuelle et alors qu'elle tentait d'arranger les choses avec son époux... Si certains pensaient avec leur bite, elle avait fait l'exacte même erreur avec son clitoris.
Un raclement de gorge retentit dans son dos.
— En résumé, Porco sort, ouvre la portière d'Eren qui fait ensuite le tour pour ouvrir celle de (T/P), reprit Livai. Puis, Porco ouvre la mienne et, tandis qu'il retourne dans la voiture pour la garer, on fait semblant de rire entre nous pour les paparazzis planqués aux alentours.
— Il est trop tôt donc le tapis rouge ne sera pas déplié mais des fans seront là. Il faut donc faire bonne impression même si on n'arrive pas en limousine, approuva Eren.
— Des caméras seront déjà à l'intérieur, sans doute aussi le trou du cul qui tue les membres de la Rose Noire donc on ne fait aucune gaffe, on ne se fait pas remarquer.
La voiture ralentit avant de s'arrêter. Au travers des vitres teintés, tous percevaient d'ores et déjà les flashs des caméras et téléphones portables.
Porco prit une profonde inspiration. Lui, membre connu et fiché de la Rose Noire, s'apprêtait à sortir aux yeux de tous. Car, s'ils se présentaient aussi aujourd'hui à la postérité, c'était aussi pour envoyer un message au tueur.
Le Cinquième Lieutenant de la Rose Noire avait beau être amnésique, les autres ne l'étaient pas. Et ils veillaient sur elle.
Ils ne voulaient pas pousser le tueur à s'en prendre aux autres membres mais ils ne voulaient pas non plus qu'il s'imagine qu'elle était une cible facile car amochée.
— On règle cette merde et on va chercher Marcel, chuchota le frère de ce dernier.
Il essuya ses paumes sur son pantalon onéreux qui lui changeait de ses habituels joggings et jeans tâchés de cambouis. A contre-cœur, la femme à sa droite acquiesça.
Même si elle n'était pas enchantée à l'idée de réunir les anciens lieutenants de la Rose Noire, ceux-là même qui étaient pris pour cible et avaient une cible dans le dos, elle se devait d'admettre que là était leur seul moyen de parvenir à venger la mort d'Olivia Starkohei, Elisa Manhard et Lara Smith.
— Le mot d'ordre est discrétion.
Là-dessus, Porco se leva, quittant le siège conducteur. L'évènement n'ayant pas encore commencé, aucun portier n'était actuellement désigné pour ouvrir aux célébrités arrivant. Le chauffeur était donc le plus désigné pour une telle tâche.
Lorsqu'il fit sortir Eren, sa femme le sut au grand concert de cris qui l'accueillit. Quelques secondes s'écoulèrent et la fraicheur du dehors frappa son flanc en même temps qu'une vive luminosité envahissait la voiture.
Se tournant, elle vit la main d'Eren tendue à hauteur de son visage. Avec un sourire, elle regarda le visage de son époux.
Celui-ci était fermé mais ses yeux brillaient. La coupe de la robe, dite « sirène », était l'exacte réplique de celle qu'elle avait porté lors de leur mariage. Et il était ému par les souvenirs lui revenant en tête lorsqu'il songea de nouveau à cet évènement.
Elle saisit la paume de son époux, chaude et douce autour de la sienne. Puis, posant son escarpin sur le bitume, laissa le brun l'attirer vers lui avant de la presser contre son torse, sa main glissée la chute de ses reins et ses lèvres se posant sur son front.
Elle sourit contre le torse de l'homme, appréciant sa chaleur qui l'apaisait. Il n'était pas friand des démonstrations publiques, elle le savait. Mais, malgré les flashs et cris hystériques qui résonnaient présentement autour d'eux, il la conserva au creux de son corps quelques secondes encore avant de relever son visage en agrippant son menton.
Là, blottie contre lui, la tête basculée en arrière, elle sentie son cœur rater un battement en croisant ses iris vert émeraude. Si belles. Profondes. Douces.
Elle se souvint de leur premier baiser, des larmes d'Eren sur ses mains tandis qu'elle lui affirmait que Grisha avait tort de le traiter si mal, de la pierre figée dans sa bague de fiançailles, de la chaleur de leurs étreintes, de leur nuit de noces rythmée, de leur lune de miel où seul leur amour occupait une place.
— Je t'aime, murmura-t-elle, sa main allant se glisser sur sa joue.
Mais, avant qu'Eren n'ait le temps de rétorquer quoi que ce soit ou que sa femme n'aille au bout de son geste et presse enfin ses lèvres aux siennes après tant de temps sans le faire, une voix résonna derrière eux, les interrompant :
— Vous vous aimez, on est content. On y va ou vous comptez aussi refaire votre nuit de noce sur place ?
Aussitôt, les deux se tournèrent vers Livai qui, de l'autre côté de la voiture, les fixait, son habituel air impassible plaqué sur les traits. Et, agacée d'avoir été interrompue à un moment crucial, la femme lâcha simplement :
— Tiens, t'es assez grand pour dépasser du toit de la voiture ?
Livai se contenta d'un haussement de sourcils suivit d'un roulement de yeux. Eren, lâchant un pouffement en glissant sa main dans le dos de sa compagne, conduisit celle-ci autour de la voiture.
Aussitôt furent-ils arrivés à hauteur du noiraud que celui-ci, ne se laissant pas démonter, posa aussi ses cinq doigts entre les omoplates de la jeune femme. Cette dernière, retenant une insulte à l'égard de l'homme, se contenta d'un sourire crispé.
Il le faisait exprès. Il voulait la mettre mal à l'aise.
Et, les paumes des deux hommes qui l'attiraient posées contre son dos, irradiant leur chaleur euphorisante, elle devait à présent faire face à un public dense et des flashs violents sans ne rien laisser paraitre de son estomac se tordant ou ses cuisses se serrant.
Devant eux, des barrières de métal contenait une foule déjà hurlante. A sa droite et sa gauche, des cris retentissaient mais, les flashs étant trop vifs, ils ne pouvaient voir leurs propriétaires. Alors, faisant face à la bâtisse ancienne s'étendant devant eux, les portes aux reliures dorées ouvertes et prêtes à les accueillir, ils marchèrent en leur direction.
— Je sens venir les titres les plus fous les uns que les autres, commenta Eren.
— Si notre position te gêne, tu peux me laisser être le seul à toucher ta femme, rétorqua Livai entre ses dents, un sourire sur les lèvres.
— Va crever, Rumpletitskin, répondit le brun avec le même rictus crispé.
— Parlant de crever, elle crevait d'envie que je la prenne. Une idée sur la cause de son désarrois sexuel ?
— C'est clair que je devais vraiment lui manquer pour qu'elle se rabatte sur Grincheux, surtout quand Blanche-Neige est tellement mieux.
Du mieux qu'elle le pouvait, la concernée continua d'avancer vers les portes, silencieusement. Car elle savait que si elle ouvrait la bouche, ce serait pour hurler et ce ne serait sûrement pas du plus bel effet.
— Tu sais ce que je crois ? T'as pas sorti ton flingue parce que tu craignais qu'elle n'ait pas été consentante, t'as sorti ton flingue parce que t'as entendu qu'elle criait plus avec moi qu'avec toi.
— Si tu as l'impression que ses cris étaient forts, alors t'es décidément pas habitué à faire jouir les autres, souligna le brun.
Ils pénétrèrent le hall. Les portes se refermèrent derrière eux et les cris s'évanouirent tandis que le froid de l'extérieur laissait place à une température plus douce. Quelques personnes traversaient la salle garnie de sculptures jusqu'à une vingtaine de mètres plus loin où se trouvait l'objet de leur intérêt. Un escalier couvert d'un tapis rouge menant aux étages supérieurs.
— Bien sûr, et c'est pour ça qu'elle fuyait autant ton regard, railla le noiraud. Sûrement pas parce qu'il était compliqué pour elle de constater qu'un Ackerman la faisait plus jouir en trente minutes que son mari en deux ans.
— Je te...
Mais la voix d'Eren fut interrompue par celle de sa fiancée.
— Excusez-moi, interpella-t-elle l'un des portiers. Les journalistes et fans peuvent nous voir ?
— Non, madame, répondit l'homme avec un sourire poli. Les portes sont fermées.
— Parfait.
Gardant la tête haute et les yeux rivés vers l'escalier, elle prit une simple inspiration. Puis, dans un geste aussi brutal que rapide, elle déploya ses bras qu'elle avait jusque-là gardés à hauteur de sa poitrine. Ses poings atterrirent dans l'entrejambe des deux hommes dans un geste synchrone et ils se plièrent en deux à l'exact même seconde.
Ignorant les regards de ses anciens collègues attirés par le bruit, elle lâcha simplement :
— Parlez encore une fois de moi comme d'un objet sexuel et je les coupe en plus de les frapper.
Puis elle s'en alla, les laissant sur le sol, blessés autant dans leur corps que dans leur égo.
ꕥ
La journée avait beaucoup progressé et touchait maintenant à sa fin. Au milieu du lieu à présent ouvert aux journalistes et fans, elle n'avait de cesse de tournoyer, étreindre ses admirateurs et prendre des photos à leur côté.
Le brouhaha des conversations envahissait les lieux parsemés de flashs de lumière. Les caméras suivaient ses moindres mouvements tandis que, se penchant vers les fans amassés derrière des barrières, elle étreignait des jeunes filles munies de leur téléphone avant de se reculer légèrement pour prendre un selfie avec elles.
Souriant, elle sentit son cœur s'échauffer en voyant les larmes d'émotion barrant le visage d'une jeune à la peau matte d'où s'échappait de splendides cheveux frisés. Elle semblait si heureuse de la voir.
Alors, s'approchant de l'intéressée, elle ignora les cris et les mains tentant de l'attraper par-dessus la barrière, laissant aux vigiles le soin de les contenir comme il le fallait. Les yeux de la fan s'écarquillèrent en réalisant que son idole l'approchait bel et bien, laissant mieux voir ses iris chocolat.
— Je vous adore ! J'étais tellement triste quand Miranda est morte dans le premier volet ! J'ai même pas fini le film tout de suite ! J'ai cru que vous alliez pas venir j'ai eu un peu peur je voulais vous rencontrer ! Vous savez je suis la première shippeuse du Galaeren !
Elle parlait à toute vitesse, tant et si bien que la jeune femme devant elle eut du mal à suivre. Mais, acquiesçant à toute vitesse pour lui montrer qu'elle comprenait, elle la laissa finir avant de répondre :
— En tout cas je suis ravie d'être venue, rencontrer des personnes comme toi ça fait vraiment chaud au cœur, merci beaucoup !
Son interlocutrice plaqua une main sur sa bouche, visiblement sous le choc que son idole se soit adressée à elle. Puis, brandissant son téléphone, elle lâcha simplement :
— On peut prendre un selfie !?
— Bien sûr ! répondit la femme avec un sourire, se penchant au-dessus des barrières.
Les cris augmentèrent quand elle se rapprocha des fans. Quelques-uns se poussèrent, tentant d'être dans le cadre de la photo. Elle regarda son reflet, remonta les yeux vers la caméra avant de sourire.
La fan appuya sur l'icône ronde en bas de l'écran. L'image se figea un instant avant de laisser de nouveau place au reflet des têtes amassées autour de la célébrité. Quelques compliments fusèrent quand elle ouvrit la bouche pour répondre, ravie.
Mais son geste fut brutalement interrompu par des cris fusant à quelques mètres d'eux. Intriguée, elle se tourna vers la source de ces exclamations outrées. Les personnes derrière la barrière firent de même.
Et, lorsqu'elle réalisa l'objet de ce soudain revirement d'humeur, elle sentit ses muscles se raidirent et ses yeux, s'écarquiller.
— Bordel..., murmura-t-elle.
Là, juste devant une affiche promotionnelle du deuxième violet de Diamond Star, tandis que les flashs s'intensifiaient, que le brouhaha brièvement interrompu reprenait et que les têtes se tournaient de plus en plus vers la scène, elle n'arrivait à décrocher son regard de cette dernière.
Au sol, habillé de son smoking noir hors-de prix et reconnaissable par ses longs cheveux bruns, Grisha Jager gisait, sa main refermée sur son nez qu'il tenait. Devant lui, à hauteur de son visage, deux chaussures richelieu noires étaient plantées dans le sol.
De celles-ci jaillissaient des jambes drapées dans un pantalon au tissu lisse et soyeux au-delà duquel une chemise de soie évoluait jusqu'à un cou de marbre. Celui-ci donnait sur une mâchoire finement travaillée qui marquait la fin d'un visage harmonieux où de fines lèvres pulpeuses rougeâtres, un nez droit et deux yeux glacés étaient soigneusement dispersés.
Le noiraud, au-dessus de l'homme, massait présentement son poignet, son éternel air impassible gravé sur ses traits.
Le cœur de la jeune femme rata plusieurs battements dans sa poitrine, son souffle se coupa tandis que, son estomac se soulevant, elle vit les iris glacées de celui qui se tenait debout glisser de la personne étendue à ses pieds jusqu'à elle. Et, déglutissant péniblement tandis qu'il la fixait intensément, elle sentit ses pensées la quitter durant quelques secondes.
Mais, lorsqu'elles revinrent, ce fut sous la forme d'une phrase. Une seule. Et pas n'importe laquelle.
Est-ce que Livai Ackerman vient de coller une droite à Grisha Jäger ?
赤い糸
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