L E J E U D E
— C A R T E S —
Eren pousse un énième râle avant de laisser sa tête choir sur l’oreiller. Une plainte franchit ses lèvres et je souris en le voyant pousser son ordinateur.
— Pourquoi on s’y est pas pris plus tôt !?
— Parce que je te haïssais et qu’il était hors de question que tu m’approches, je souris.
Affalé à moitié sur l’un des lits, Eren grogne. Quant à moi, je tape à toute vitesse, me disant que je corrigerais cela plus tard.
— Un dossier de cent pages en une semaine… En période d’examens, en plus… Je vais me tirer une balle.
— Eren, c’est le mi-semestre, tu n’as pas d’examens dans toutes les matières, je le rassure. Et j’ai déjà avancé de mon côté.
— Moi aussi, lâche-t-il, les yeux clos, laissant son ordinateur de côté. J’ai écrit vingt pages. Mais c’est pas le genre de choses qui suffit à Hafeez et tu le sais.
— J’en ai écrit cinquante.
Aussitôt, il se redresse brutalement. Ses sourcils se haussent tandis qu’il m’observe, abasourdis. J’éclate de rire en voyant cet air constipé.
— Mais on a commencé il y a deux heures ? s’exclame-t-il.
— J’ai fait les recherches cette nuit, je n’ai eu qu’a rédigé et j’ai écrit un peu toute la journée.
Eren fronce les sourcils, atterré.
— Mais ça représente au moins dix heures de…
— J’ai pas réussi à dormir, je lâche.
Aussitôt, ses traits retombent et il comprend. Noor. Notre amitié était morte depuis longtemps mais le lui dire m’a quand même fichu un sacré coup.
J’ai l’impression que le son de ses pleurs, étouffées par la porte, résonne encore dans ma tête.
Le regard d’Eren commence à me brûler. Embarrassée, je recommence à taper. Furieusement, les mots défilent. Je ne peux pas m’arrêter, troublée par la façon qu’ont ses yeux d’insister sur moi.
— (T/P), arrêtes.
Aussitôt, mes doigts se figent.
— Mais on doit finir le…
— Te prends pas la tête avec cette merde. T’as fait ta moitié, je ferais la mienne et je te jure que ce sera très bien fait.
— Toujours aussi modeste, je commente.
— Pourquoi être modeste quand on est le meilleur ?
Malgré moi, je souris en regardant cette curieuse énergumène qu’est mon copain. Il m’observe avec douceur avant de se lever. Je ne comprends pas tout de suite ce qu’il fait.
M’approchant, il se penche dans ma direction. Puis, saisissant mon ordinateur, il le jette sur le côté avant de grimper à quatre pattes au-dessus de moi.
— Mais qu’est-ce que tu fais ? je lâche dans un rire, basculant en arrière.
Mon dos touche le matelas et j’observe ses yeux verts, juste au-dessus de moi. Ses mains, plantées de chaque côté de ma tête, le soutiennent tandis qu’il me regarde délicatement.
Le dos de ses doigts caresse une partie de mon visage.
— Tu es si belle, si douce…, chuchote-t-il. Je ne t’ai jamais mérité.
— Eren…
— Je déteste te voir comme ça. Tu m’as rendu heureux alors pourquoi je n’arrive pas à te réconforter quand tu ne l’es pas ? Je me sens si impuissant.
Ma main saisit la sienne et nos doigts s’entrelacent.
— Je t’assure que tu fais bien plus pour moi que ce que tu crois.
— Mais pas assez…
De la peine traverse son regard et mon cœur se fige. Je me sens mal de le voir ainsi, si souffrant de la situation.
— Ecoute, j’ai perdu une amie et il me faut faire le deuil de cette relation, c’est tout.
Il ne répond pas tout de suite, continuant de me regarder. Je me sens bien, dans l’ombre de son corps.
— Bon… D’accord. Mais je dois quand même essayer de te remonter le moral.
Je souris, touchée par sa mignonnerie.
— Et comment comptes-tu t’y prendre ? je demande dans un sourire malicieux.
— De façon très simple…
Mes sourcils se froncent lorsque sa voix traine un peu. Puis, brutalement, il écarte les bras, laissant son torse tomber contre le mien. Je hurle, surprise.
Ses bras glissent sous mon dos et il me soulève de terre dans un rire bruyant. Mes jambes s’enroulent aussitôt autour de sa taille et je glousse, paniquée.
— Repose-moi ! Repose-moi !
— Hors de question.
Sa tête enfouie dans le creux de ma nuque, je ne suis pas sûre qu’il voit quoi que ce soit. Je ne parviens pas à m’arrêter de rire, grisée.
— Eren, on va se faire mal ! je lance dans un cri de panique.
— T’inquiètes, je g…
Brutalement, je bascule en arrière. Un hurlement franchit mes lèvres et je m’accroche de toutes mes forces à Eren. Sa main se glisse sous mon crâne, le protégeant.
Mes fesses tapent le sol. Le choc me tend.
Dès que je m’étale sur le parquet, Eren se redresse brutalement. Je vois ses yeux s’écarquiller tandis que sa main caresse mon visage, le touchant doucement :
— Tout va bien ? Tu n’as pas mal ? Ma belle ? Tu n’as pas mal ? S’il-te-plaît, réponds-moi !
— Je vais bien, Eren. Cesse de paniquer, je chuchote dans un sourire.
— Putain, le con ! Mais je suis vraiment trop con, put…
Saisissant son visage entre mes mains, je le tais de ce simple geste. Puis, l’attirant vers moi, je pose un baiser sur ses lèvres. Timide. Délicat.
Mes sourcils se froncent :
— C’est de mon petit-ami que tu parles, je te signales.
— Toutes mes excuses, milady. Que puis-je faire pour être pardonné ?
Je hausse les épaules, regardant au loin d’un air candide. Malgré cela, son regard sur moi se fait persistant et je finis par éclater de rire.
— Arrêtes de me fixer, tout le temps. Tu me stresses.
— Oui, mais tu es si belle…
Je lève les yeux au ciel, feignant d’être agacée.
— Il en faudra bien plus pour te racheter, mon beau.
— Ah oui ? Pauvre de moi, je n’ai pas beaucoup d’idées…
Je souris face à sa bêtise.
— Quoi que…
Sa voix s’est soudain faite plus grave tandis que ses yeux louchent sur mes lèvres. Je frissonne en sentant son torse se presser au mien lorsqu’il expire. Son souffle charrie d’ailleurs doucement mes lèvres, enivrant.
— Je… Eren…
Penchant la tête sur le côté, il continue d’observer ma bouche. Frissonnante, je ne remue pas, comme hypnotisée par ce regard insistant.
— Oui, continue de dire mon nom… Juste comme ça…
— Eren…
Ses yeux descendent, fixant ma gorge lorsque je déglutis péniblement. Celle-ci disparait sous le col de mon tee-shirt, engloutie.
Mais il poursuit sa route, semblant deviner ce que dissimule le tissu. Ma gorge se serre tandis que mes entrailles cuisent.
— Eren…, je chuchote, sentant son poids m’écraser.
Ses yeux se posent enfin sur les miens. Aussitôt, un sourire étire ses lèvres. Doux. Attendrissant.
— Je vais me faire pardonner autrement, ma belle.
— Quoi ? je m’exclame lorsqu’il se redresse soudain sur ses genoux. Mais non ! Je t’assure que je suis prête à…
Sa main touche ma joue qu’il caresse. Secouant doucement la tête de droite à gauche, il me sourit :
— Tu veux te changer les idées et je vais te changer les idées, mais pas comme ça. Le jour où tu le feras avec moi, ce sera parce que tu en auras réellement envie.
Un instant, j’ouvre la bouche pour protester. Mais aussitôt, je réalise qu’il dit vrai. Bien sûr, j’ai envie de lui, de découvrir son corps, de m’enfoncer dans son étreinte.
Mais pas comme cela. Pas simplement pour cesser de penser à Noor.
Souriant doucement, il me tend la main. Je la saisis et il m’aide à me redresser. Nous nous levons d’un même geste et je me tourne vers le coin cuisine, réalisant que nous n’avons toujours pas mangé.
Aussitôt, ses mains saisissent mes hanches et son torse se colle à mon dos. Je frissonne. Il glisse son visage dans le creux de mon épaule, embrassant la peau sous mon oreille.
Je frissonne immédiatement, la gorge sèche.
— Ne t’en occupes pas, repose-toi, souffle-t-il contre ma peau.
Un frisson me parcourt lorsque sa voix éclot sur ma chair en capitons de chaleur.
De ses dents, il attrape le cartilage de mon oreille qu’il mordille à peine. Un faible gémissement franchit mes lèvres et mes yeux roulent dans mes orbites.
— Eren, je croyais que…
— Oh mais on ne va rien faire ce soir, chuchote-t-il. Je veux juste te donner un avant-goût.
Entre mes dents serrées, je l’insulte. Il éclate de rire en me dépassant. Aussitôt, sa chaleur me quitte et je frissonne.
— Petit con.
— J’aime quand tu me dis des mots sales.
J’éclate de rire malgré moi et le regarde se diriger vers la cuisine. Croisant les bras, je l’observe en haussant un sourcil.
— Tu vas cuisiner ? Toi ?
— Bien sûr que non, le menu du restau à emporter est sur ton frigo.
Là-dessus, il saisit le papier et je lève les yeux au ciel. Je le reconnais bien là.
— J’ai compris. Je l’appelle.
Me tournant, je saisis mon téléphone portable abandonné sur mon lit. Le déverrouillant, je m’apprête à ouvrir le journal d’appel quand une notification attire mon attention.
Un message d’un numéro inconnu.
Curieuse, je l’ouvre.
« Bonjour.
J’aimerais discuter avec vous de votre relation avec mon fils. RDV demain, 17h00, café Ricoeur. Soyez à l’heure.
Grisha Jäger.
PS : Inutile d’en parler à Eren. »
le chapitre 38 s'annonce
chaotique
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