──── 𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑𝟔












L  E    J  E  U    D  E
—     C    A    R    T    E    S     —

































           MES MAINS sont moites quand je les essuie sur mes cuisses. Nerveuse, je déglutis péniblement tandis que Noor, tout en souriant, verse du café dans une tasse. Elle me sourit avant de la déposer sur la table basse devant moi.

           Ma gorge se serre quand je vois son visage illuminé.

— Je suis contente que tu viennes me voir ! J’étais tellement occupée, étant donné que c’est la dernière semaine avant le rendu du devoir…

           En effet…

           Je dois d’ailleurs aussi m’occuper de cela, avec Eren. Nous n’avons toujours pas commencé le devoir que nous devions faire en deux mois de temps alors que Karim Hafeez a déjà pris la décision de nous récompenser avec un voyage.

— D’ailleurs, j’ai un peu discuté avec Karim qui m’a dit qu’il allait profiter du rendu pour vérifier l’état de vos cartes, lance-t-elle avant de me sourire d’un air malicieux. Ne lui dis pas que je suis ta source et faites le tri dans vos cartes.

           Elle rit doucement, complice.

           J’avais entièrement oublié cette histoire de cartes. Surtout parce que, durant un mois, Eren a disparu de la circulation et le professeur a donc arrêté de passer nous voir chaque lundi pour vérifier l’état de nos jeux. Puis, je suppose qu’il a oublié de reprendre cette activité plutôt étrange.

           Mon estomac se noue tandis que j’observe le sourire de mon amie. Il est toujours brillant lorsqu’elle évoque son crush.

— D’ailleurs, à propos de lui, ma mère a dû deviner que j’étais plutôt attirée par lui.

           Je ne veux pas lui faire de peine. Mais je ne peux demeurer hypocrite plus longtemps.

— Je crois qu’elle va tenter d’amener mon père avec elle la p…

— J’ai replongé.

           Mes lèvres se pincent.

           Me voilà, à nouveau, lui coupant la parole pour lui parler de moi. M’imposant dans la conversation. Cela me ramène aussitôt à quelques mois auparavant, lorsqu’elle m’a dit que l’unique raison pour laquelle elle ne se confiait pas à moi était que je refusais de l’écouter, trop concentrée sur ma personne.

           Mon ventre se noue pourtant lorsque je vois la sincère inquiétude envahissant ses yeux écarquillés.

— Qu… Quoi ?

— C’était il y a plus d’un mois, maintenant. Je suis allée à une soirée et j’avais vraiment besoin de me vider l’esprit. J’étais désespérée, j’ai choisi l’option de facilité.

           Mon cœur se serre. Soudain, ses yeux s’imbibent de larmes et je vois à quel point cela la touche.

— Mais… Je…, commence-t-elle, la voix tremblante.

           Une larme coule sur sa joue. Un étau enserre ma gorge.

— Tu… Tu pouvais venir me voir, (T/P). Je t’assure que je ne t’aurais pas fermé ma porte, je… J’aurais jamais dû… Si j’avais su…

           Ma poitrine est lourde et mon cœur bat fort.

— Ce n’est pas de ta faute. Vraiment.

           Elle secoue la tête et je frissonne en voyant une larme couler sur sa joue. Un soupir me prend et j’ignore la tasse de café qu’elle m’a apportée.

— Ecoute, j’ai eu du mal, ces derniers temps. Toi aussi. Je ne te dis pas ça pour te blâmer Noor. Tu as toujours été là pour moi, y compris à des moments où je ne le méritais pas.

           En un mot, l’alcool m’a rendue misérable.

           Parfois, quelques bribes de mon passé, quand j’étais constamment ivre, me reviennent. Mon corps sursaute de honte et je me crispe lors, pleurant presque d’embarras.

           Noor était là, à ce moment. Elle m’a aidée. Tout le temps.

— (T/P), je… Non, c’est impardonnable… J’aurais jamais dû… Je savais que tu étais fragile…

           Ma poitrine se fait lourde.

           Noor ne s’est jamais confiée à moi car elle savait que je ne pourrais peut-être pas le supporter. Ma façon de gérer mon stress a longuement été l’éthanol et elle ne pouvait donc pas s’appuyer sur moi pour gérer ses tracas.

           Cependant, elle a cruellement eu besoin d’aide. Et je n’ai pas pu être là.

— Rien n’excuse la façon dont je t’ai traitée. Me confier à toi et être un poids aurait été plus approprié que de… je suis tellement désolée, (T/P).

           Mon cœur se serre en voyant les larmes rouler sur ses joues.

— C’est entièrement ma faute, si…

— Non, Noor. J’ai pris cette décision toute seule.

— Oui, mais à cause de mes paroles, tu as cru que ma porte ne t’était plus ouverte. Mais elle a toujours été ouverte, même pas quand j’étais en colère ! Et je te promets qu’elle le sera toujours.

           Je secoue la tête de droite à gauche. Mon cœur s’alourdit en voyant ses yeux mouillés de larmes s’écarquiller.

— Je… Quoi ?

— Ta porte a toujours été ouverte, Noor. Je le sais. Je ne suis juste plus capable d’en franchir le seuil.

           Une larme coule sur ma joue et ma gorge se serre tant que ma voix sonne terriblement aigue lorsque je lâche :

— Je ne te fais pas confiance, Noor. J’ai beau essayé. Je n’y arrive pas.

           L’intérieur de ses sourcils pointe le ciel et elle frissonne. Son menton tremble lorsqu’elle couine, désemparée :

— Mais je t’assure que je t’ai simplement dit ça sur le coup de la colère. Tes problèmes m’importent réellement, (T/P). Je tiens à toi et j’ai toujours voulu… Enfin…

           Elle doit lire sur mon visage qu’il n’est pas utile de finir sa phrase car ses épaules s’affaissent soudain et elle se tait, résignée. Une larme coule sur sa joue quand ses bras se referment autour d’elle pour lui apporter un peu de confort.

— Je m’en voudrais toute ma vie d’avoir causé ça, (T/P). Je suis enti

— Arrêtes. Je suis une alcoolique. Ma rechute ne dépend, in fine, que de moi et tu le sais.

           Elle sursaute presque en entendant la fermeté de ma voix.

— Je refuse que tu te flagelles, Noor. Pas quand tu as été d’un si grand soutien pour moi au cours des dernières années. Je n’oublie pas tu as été la raison pour laquelle j’ai décidé de devenir sobre et je ne te vois pas comme la raison pour laquelle j’ai rechuté après un an et demie. Mais plutôt celle pour laquelle j’ai tenu durant tout ce temps, avant.

           Elle frissonne et je saisis ses mains, me penchant par-dessus la table.

— Noor. Je voulais simplement être tout à fait honnête avec toi et là est la raison pour laquelle je t’en ai parlé. Ce ne sont pas des reproches.

           Ses grands yeux bruns sont plongés dans les miens.

— Noor, je te remercierais jamais assez de m’avoir fait l’honneur d’être mon amie au cours des dernières années.

           Ses yeux s’écarquillent soudain et elle sursaute presque.

— Attends… Pourquoi ça sonne comme… Est-ce que tu…

           Dans son regard, je vois nettement le moment où elle réalise la vérité. De la douleur traverse ses pupilles et elle expire brutalement, une larme roulant sur sa joue.

— Quoi ? lâche-t-elle dans un sanglot brillant.

           Ma gorge se serre et elle lâche mes mains comme si celles-ci la brûlaient.

— Noor… Jamais je n’oublierai tout ce que tu as fait pour moi. Je n’ai pu rester sobre que grâce à toi et…

— Je t’en supplie, ne fais pas ça, murmure-t-elle en secouant la tête, des larmes roulant sur mes joues.

— Saches que tu as été une amie absolument formidable. Tu as été là pour moi, a su me soutenir et je serais toujours présente à tes côtés d’une façon. Tu peux littéralement me demander n’importe quoi, je t’aiderai.

— S’il-te-plaît…

           Son couinement est doublé d’autres larmes. Elle secoue la tête.

— Je le pensais pas, j’avais juste mal. Je t’en supplie.

— Le problème ne vient pas de nous. Je suppose que la vie est parfois trop dure pour que certaines relations y surv

— Je veux pas te perdre, s’il-te-plaît.

           Ma poitrine se gonfle de sanglots tandis qu’elle éclate bruyamment, cachant sa bouche de sa main.

— Noor, je t’assure que je ne t’en veux pas.

— Mais moi, je m’en veux ! Même si j’avais mal, jamais cela ne me donnait le droit de…

— Noor. Tu es humaine. Les humains font des erreurs. Et tu sais que j’en ai fait un paquet.

           Elle secoue la tête, ses épaules tremblant.

— S’il-te-plaît…

           Sa peine rend tout cela tellement plus compliqué. Cependant je dois aller au bout.

— Je ne veux pas te punir, Noor. Tu as fait du mieux que tu pouvais jusqu’à un point de rupture. Seulement, il se trouve que ce point de rupture… A causé trop de dégâts. Et je n’arrive pas à prétendre que rien ne s’est produit.

           Mes mains sont prises de spasmes.

— Tu es très importante pour moi, Noor. Car je t’aime. Je t’aime énormément et je ferais tout pour toi.

           Ma gorge se serre.

— Quoi qu’il se soit passé. Ma porte te sera toujours ouverte et j’insiste vraiment pour que tu l’ouvres dès que tu as besoin d’aide. Ne te tais plus comme avant.

           Elle secoue la tête.

— C’est juste que…, je lâche avant que ma voix meure dans un sanglot. Moi, je n’ouvrirais plus la tienne.

           Elle ne bouge pas, ne réagit pas. Ses yeux écarquillés fixent ses mains quand une larme en coule sur ses joues.

— Je suis désolée que ça se finisse comme ça, Noor.

           Elle tremble. Je sens que je ne dois pas rester.

           Le cœur gros, je me lève. Elle ne réagit pas, sous le choc. Elle sait qu’il est inutile de me dire que nous allons arranger la situation, faire en sorte de repartir de zéro.

           Cette amitié est finie. Rien ne la réparera.

           Je me lève, les épaules voutées. En quelques pas, je sors de la chambre et ferme la porte derrière moi. A peine ai-je relâché la poignée qu’elle éclate en sanglots. Le bruit de ses pleurs me parvient, étouffé. Je frissonne en l’écoutant, sentant ma gorge se serrer.

           Il me faut quelques secondes avant de trouver la force de m’arracher à cette porte. Je me tourne.

           Eren se tient debout dans le couloir.

           Les mains enfoncées dans les poches de son sweatshirt, la tête penchée sur le côté, il m’observe. Sa lèvre inférieure pointe vers le haut en une moue compatissante et il me regarde avec peine.

— Je… Je…

           Mais je n’arrive pas à parler.

— Je sais, chuchote-t-il en s’approchant. Je sais mon cœur. Je suis venu pour ça.

           Ses bras se referment autour de moi, m’enfouissant contre lui. Ma tête se loge dans le creux de son cou et j’inspire une bouffée de sa chaleur réconfortante.

           Là, enfin, à l’abris contre lui, j’éclate en sanglots.

           Fermement, il me serre dans ses bras. Prise de violents hoquets, je ne parviens pas à parler et ne fais que lâcher des murmures incohérents.

— Ca va aller, mon cœur, ça va aller, chuchote-t-il.

           Mais je secoue la tête de droite à gauche. Jamais une séparation n’a m’a faite mal à ce point.

           Soudain, il s’écarte de moi afin de prendre mon visage en coupe. Là, ses yeux se plantent dans les miens et il caresse mes pommettes de ses pouces.

— Ecoute, ma belle. On va aller se regarder un film pour se changer les idées et ensuite, je t’invite au restaurant. D’accord ? Et si tu te sens pas de sortir, on prend à emporter.

           J’acquiesce à toute vitesse, des larmes continuant de rouler sur mes joues.

           Ses yeux se ferment et il m’embrasse. Je fonds dans ses lèvres, y trouvant une chaleur réconfortante. Enfin… Il est exactement ce qu’il me faut, ce dont j’ai besoin.

           Nous séparant, il pose ma tête contre son torse et me serre avec fermeté contre lui. Et il chuchote :

— Tu vas voir, on va dépasser ça ensemble, mon cœur.

 











































le cœur est brisééé

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