𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟑𝟗

𖤓

ET DANS LES LARMES DE CEUX QUI
VIVENT, JE LAVE LE SANG DES
MARTYRS









Le soleil était haut dans le ciel, projetant ses forts rayons lumineux sur les vastes plaines entourées çà et là d'arbres. Leur chaleur, dense, ne pouvait pourtant pas même rivaliser avec le feu de la guerre en contrebas. On eut dit que les enfers avaient pris le pas sur le monde.

Partout, des monstres s'élevaient, gambadant dans l'herbe. Les larges pieds piétinaient le sol, se faufilant parmi les soldats se resserrant autour d'eux. Certains parmi les titans s'accroupissaient, tendant leurs mains immenses en direction d'humains qu'ils attrapaient afin de les projeter dans leurs gueules béantes aux relents pestilentiels.

La majeure partie des troupes des bataillons était déployée en ce jour important. Mais Emeraude n'avait pris soin de retenir la position que de rares soldats. Ceux membres de l'escouade Levi, qui étaient étendus un maximum pour empêcher ces immondices de rejoindre l'escouade d'Edward située au plus proche de l'action.

Emeraude se trouvait aux côtés de ces derniers.

- Il y a au moins cinquante titans ! résonna la voix paniquée de Marco derrière elle. Même si on sort Ymir de là, comment on va rentrer ?

Lui, Sacha, Jean et Conny se trouvaient sur le sol, debout face au titan cuirassé. Ce dernier, accroupi, semblait peiné à résister aux attaques violentes et répétées de Mikasa, Edward et Christa. De leurs côtés, le regardant faiblir, Emeraude et ses quatre amis tentaient d'évaluer le meilleur moment pour entrer de force dans sa chaire semblable à une armure et tirer Ymir de là.

Un genou à terre, Reiner semblait à bout de force. Mais il continuait d'agiter fébrilement ses bras, tâchant d'éloigner un maximum ses assaillants de lui. Et la soldate appréciait le spectacle qui s'offrait à elle.

Jamais elle ne pardonnerait sa trahison. Tout comme jamais elle n'oublierait la vision du monstre arrachant à main nu les jambes de Mike. Ou encore celle de ce dernier, mourant de sa main dans son lit.

- Erwin, Hanji et l'escouade Levi surveillent nos arrières, nous ne risquons rien, déclara-t-elle simplement.

Elle marqua une brève pause et sentit le regard de Jean se faire insistant sur ses omoplates. Je sais... Je ne suis qu'un monstre d'égoïsme se regardant dans le miroir. Les mots de Levi demeuraient gravés en elle tels une brûlure.

- On peut leur faire confiance, termina-t-elle malgré la douleur.

Et, en effet, tandis que divers titans essayaient de s'approcher d'eux, pas un seul n'était parvenu à les atteindre à moins de cinq mètres. Car, lorsque les très efficaces soldats des bataillons ne parvenaient tout de même pas à en retenir certains d'avancer jusqu'à Reiner, Sacha, Conny, Jean et Emeraude s'en occupaient.

Ainsi, le torse se soulevant avec peine et leurs lames couvertes de sang figées à leurs paumes, ils garantissaient le champ libre pour Edward, Mikasa et Christa.

- Je me sens nul à côté de toi, résonna la voix de Conny, j'ai tué que deux titans depuis qu'on est arrivé et toi t'en as abattu huit...

Emeraude savait qu'il s'adressait à elle mais fit le choix de ne pas répondre. Son regard rivé sur Mikasa qui virevoltait à une vitesse hallucinante autour de Reiner, elle attendait que celle-ci lui parle, le cœur battant. Car, si seulement trois soldats l'attaquaient en ce moment, ce n'était pas pour le tuer ou même l'appréhender mais bien pour l'observer.

Ils voulaient savoir où se trouvait Ymir. Et, lorsqu'Edward, Christa ou l'asiatique le leur dirait, Conny, Jean, Sacha et Emeraude se rueraient en la direction indiquée.

- C'est vrai que tu te débrouilles super bien ! ajouta Sacha. C'est le caporal-chef qui t'a donné des cours particuliers ?

La soldate se raidit à ces mots. Elle connaissait assez son amie pour savoir que sa phrase était dénuée de sous-entendu visant à la blesser. Mais elle s'en sentit quand même touchée.

- Bordel, Sacha, la ferme, rétorqua immédiatement Jean qui avait remarqué l'éclair de honte ayant traversé les yeux de son amie.

- Cessez de bavarder, on a mieux à faire, coupa la concernée en essayant de ne rien montrer de son embarras.

Du coin de l'œil, elle vit Sacha ouvrir la bouche d'une mine navrée et devina qu'elle s'apprêtait à s'excuser. Mais la voix de Mikasa l'interrompit dans son geste.

- DANS L'ÉPAULE ! YMIR EST DANS SON ÉPAULE !

Là, les quatre soldats eurent un sursaut. Leur amie était là, tout proche. Et ils comptaient bien la libérer. L'heure n'était pas aux commérages.

Sans perdre un instant de plus, ils propulsèrent leur grappin en direction du titan cuirassé. Celui-ci balaya l'air au même moment pour chasser Edward qui tentait d'entailler son torse. Dans son geste, Reiner empêcha les grappins de Conny et Jean de se planter sur lui mais ceux de Sacha et Emeraude pénétrèrent ses clavicules.

D'un geste synchronisé, elles dévissèrent les bouteilles de gaz accrochées à leurs jambes et sentirent alors une forte impulsion les soulever de terre. Aussitôt, leurs corps fut propulsé en direction du titan, fendant l'air et dépassant Christa et Edward qui s'éloignaient pour leur laisser le champ libre.

Les deux nouvelles venues, avec Mikasa, étaient les plus rapides de l'escouade d'Edward. Ainsi, face aux réflexes du titan cuirassé, elles étaient les plus à même de parvenir à tirer Ymir de là.

Sacha fondit avec force sur le pectoral gauche du titan, découpant au passage son index et son pouce qui tentaient de l'attraper. Ceux-là allèrent s'écraser au sol tandis que la jeune femme se tournait vers l'autre bras de Reiner pour le blesser davantage.

Mikasa, quant à elle, avait une cible bien précise. Malgré ses accès d'individualisme lorsqu'elle se battait, elle n'était pas sans savoir qu'elle pouvait faire confiance aux deux autres femmes pour tirer Ymir de là. Alors, oubliant le titan colossal quelques instants, elle se concentrait sur la nuque du cuirassé qu'elle voulait déchiqueter.

Elle non plus, n'avait pas digéré la trahison de Reiner et Marcel.

Emeraude, de son côté, s'en tint au plan que tous s'étaient fixés. Tandis que ceux parvenus à atteindre le blond s'acharneraient sur divers endroits de son corps, elle s'aventurerait là où se trouvait Ymir et Marcel. Car elle allait devoir maitriser le jeune homme à main nue pour libérer la brune et elle était la plus douée en combat au corps à corps au sein de l'escouade d'Edward.

Le grappin planté dans la clavicule droite du traitre, elle observa son épaule tout en s'approchant de son corps, esquivant aisément son bras qu'il tentait d'utiliser pour lui faire barrage. Il fallait qu'elle comprenne comment accéder à son membre. Même si elle ne voyait pas Ymir, elle savait qu'elle se trouvait derrière une plaque faisant office d'épaule au titan, comme le lui avait montré Mikasa. Et Emeraude se demandait comment la rejoindre.

Tandis que le pouce de Reiner manquait de la percuter et que Sacha le coupait pour lui éviter un coup fatal, la jeune femme réalisa qu'elle n'allait pas pouvoir entrer dans cette partie de son corps. Tout simplement car Marcel et sa prisonnière avaient pénétrés cet endroit grâce à une fente pratiquée dans la peau du cuirassé, fente qui ne s'élargissait que s'il se mettait dans une certaine position, les bras le long du corps. Or, en se battant, le blond levait ses membres supérieurs et empêchait donc l'accès à sa cachette.

Mais Emeraude n'avait pas dit son dernier mot.

Dégainant ses boomerangs, elle projeta avec une vitesse digne de Levi Ackerman ses armes en direction du titan. Celui-ci ne put faire quoi que ce soit pour se protéger, les projectiles allaient à une vitesse trop soutenue. Et, concentré sur Mikasa qui venait de frôler sa nuque avec ses lames et Sacha qui zébrait de ses sabres l'intérieur de sa cuisse, il ne réalisa l'action de la troisième femme que lorsqu'il sentit une vivre douleur au niveau de son épaule.

Les mains de Reiner continuant d'essayer de chasser Mikasa et Sacha, il se tourna vers l'endroit de son corps qui venait de le transpercer de douleur. Et ses yeux tombèrent alors sur l'impensable.

A quelques mètres seulement de son épaule où étaient cachés Marcel et Ymir, Emeraude se tenait. Ses sabres fermement tenus par ses mains habillées de gants en cuir, ses jambes propulsées vers l'avant, elle approchait à grand pas de la naissance de son bras. La plaque qui couvrait celle-ci, pour sa part, était en train de tomber pathétiquement au sol, séparée de son corps. Et, voyant deux reflets argentés briller dans le ciel juste à côté de la jeune femme, il comprit soudain.

Elle avait réussi à percuter les points précis où la plaque de son armure s'attachait à ses épaules avec ses boomerangs. Celle-ci s'était alors décrochée, dévoilant la cachette de Marcel et Ymir. Décidément, cette jeune femme à la langue bien pendue ne cessait de le sidérer de jour en jour.

Comment avait-elle fait pour deviner les endroits exacts où reposait l'équilibre de cette protection ?

Mais il n'eut le temps d'y penser plus longuement. Emeraude approchait Marcel et Ymir. Il fallait qu'il l'arrête. Continuant de fixer ses yeux sur la jeune femme et le simple mètre qui ne cessait de s'amenuiser entre elle et ses deux cibles, il projeta son bras droit en direction de la soldate, prêt à la percuter d'un coup fatal.

Mais, aussitôt, une vive douleur le transperça à cet exact membre. Et, se tournant vers sa main qui se séparait du reste de son corps pour tomber au sol, il eut tout juste le temps de voir Sacha, tenant la lame qui venait de l'amputer. Son regard s'attarda sur sa queue de cheval brune s'élevant en un halo de colère autour de sa tête. Elle le punissait de l'avoir trahie.

Et elle surveillait les arrières d'Emeraude.

Avant qu'il n'ait le temps de réagir, l'ombre anormalement rapide et presque inhumaine de Mikasa traversa son champ de vision telle une tâche noire. Il ne sut qui elle était que parce que seule elle et l'homme portant le même nom de famille qu'elle pouvait faire preuve d'une si grande vitesse. Et, lorsqu'il remarqua qu'elle avait abandonné son poste à hauteur de sa nuque, il comprit qu'il était trop tard.

Seulement il n'eut le temps de réaliser ce qui était sur le point de se passer qu'une vive douleur le transperça au niveau de ses globes oculaires et sa vision de Mikasa se mouvant tel un éclair d'ombre autour de lui se vit engloutie par les ténèbres.

Elle venait de lui crever les yeux.

En contrebas, profitant de la distraction que lui offrait ses deux collègues, Emeraude franchit les derniers mètres la séparant de l'épaule de Reiner, les pieds en avant. Et, avec un sourire carnassier, elle remarqua les yeux marrons de Marcel qui s'écarquillèrent lorsqu'il comprit que les bottes de la jeune femme allaient le percuter.

Mais il n'eut le temps de reculer. Elle bougeait trop vite. A peine eut-il cligner des yeux que les semelles de ses chaussures percutaient de plein fouet son visage, le projetant plus profondément dans l'épaule de Reiner. Et le coup fut tellement violent qu'il s'effondra sur lui-même.

A sa droite, Ymir regarda la scène, ses taches de rousseur se réhaussant quelque peu sur sa peau lorsqu'elle haussa les sourcils. Mais Emeraude n'y fit pas attention. Son amie était en danger, elle devait la sortir de là au plus vite.

A vrai dire, elle était tellement pressée d'attirer la brune loin de ses ravisseurs qu'elle ne s'attarda pas une seconde pour achever Marcel qui ne se relevait pas, assommé, ni même pour se rendre compte que son amie - pourtant prétendument kidnappée - n'était nullement attachée.

D'un geste aisé et habitué, elle enserra la taille d'Ymir de son bras droit et arracha le grappin qu'elle avait planté dans la clavicule de Reiner du gauche. Là, ignorant la brune qui semblait se débattre contre son torse, elle appuya généreusement sur la pédale de sa bouteille de gaz et se délecta de la sensation de liberté qui souleva sa cape verte lorsqu'elle quitta la cavité sombre et visqueuse dans laquelle ils se trouvaient.

En s'éloignant du corps de Reiner, elle aperçut Mikasa tournoyer autour de sa nuque, tentant de la trancher malgré la main ferme que le cuirassé avait posée dessus ainsi que Sacha, debout sur sa joue, observant avec précision ses yeux, prête à les crever s'ils se régénéraient. Connaissant assez ses collègues pour savoir qu'elles avaient remarqué son départ même si elles ne la regardaient pas, Emeraude ne jugea pas utile de les prévenir qu'elle tenait Ymir avec elle et que la mission était un succès.

Mais elle sentit tout de même une bouffée de fierté en voyant ces deux femmes se déplacer avec tant de rapidité et de rage autour du titan. Elles étaient de véritables guerrières, digne des contes qu'Edward lui racontait lorsqu'ils étaient plus jeunes. Et elles étaient ses amies.

Continuant sa course, elle dépassa bientôt Jean et Conny qui s'attaquaient à un titan essayant d'approcher Reiner puis Edward qui en abattait un autre et lui adressa un clin d'œil en la voyant filer. Mais elle ne voyait Christa nul part.

Ignorant ce détail - sa priorité était de mettre Ymir en lieu sûr - elle s'éloigna bientôt tellement de Reiner qu'elle ne parvint plus à distinguer Mikasa et Sacha sur lui et décida alors de s'enfoncer parmi les arbres. Contre son torse, Ymir continuait de se débattre tandis que leur vision s'assombrissait, les arbres obstruant la traversée du soleil.

Durant quelques instants, elle parvint à garder une distance assez convenable avec le sol. Mais, bientôt, Ymir se débattit à un point tel qu'elle comprit qu'elle n'allait pas tarder à chuter parmi les hauts pins aux feuillages vert foncé. Alors, réalisant que la brune ne comptait pas se laisser emmener la sorte et qu'elle allait devoir la maitriser, elle fit le choix de la prendre par surprise.

Son bras droit toujours enserré autour de la taille d'Ymir de sorte à ce que le dos de celle-ci lui colle au torse, elle ferma brusquement ses bouteilles de gaz de la main gauche alors qu'un peu moins d'une dizaine de mètres les séparaient encore du sol.

- Qu'est-ce que... commença Ymir en se sentant basculer vers l'avant.

Mais Emeraude ne lui laissa pas le temps de finir sa phrase. Profitant de leur chute, elle enroula sa jambe droite autour de celles de la brune et glissa son bras gauche derrière les siens de sorte à les bloquer dans son dos. Ymir poussa un juron en constatant qu'elle ne pouvait plus bouger.

- Lâche-moi, grommela-t-elle dans un souffle court tandis que le sol se rapprochait dangereusement d'elles.

- Je viens de te sauver les miches alors tu vas m'obéir, grogna Emeraude en retour, raffermissant sa prise, les cheveux d'Ymir fouettant son visage dans leur chute.

Elle sentit Ymir se tendre contre son torse et constata que deux mètres tout au plus les séparaient d'un impact particulièrement douloureux.

- J'ai dit..., commença la brune en s'étirant contre elle pour se dégager quelque peu.

L'autre raffermit davantage sa prise.

- ...LÂCHES-MOI !

Avant que son adversaire ne puisse anticiper son geste, le titan abattit son crâne en arrière, percutant de plein fouet le nez d'Emeraude. Celle-ci, dans un réflexe qu'elle jugera plus tard stupide, lâcha la brune pour venir poser ses mains habillées de gants sur son visage ensanglanté.

Profitant de sa soudaine liberté, la brune saisit avec violence les épaules de son assaillante en se retournant vers elle et la projeta au sol, précipitant sa chute. Emeraude eut, quant à elle, tout juste le temps d'écarquiller les yeux avant de voir l'herbe mouillée juste devant son nez couvert de sang.

L'impact fut douloureux. Autant pour elle qu'Ymir. Son esprit sembla se décrocher de sa tête durant un bref instant tandis qu'une vive brûlure s'abattait sur son flanc droit. Mais, contrairement à elle, le titan colossal n'était pas habitué à de tels coups.

Alors, lorsqu'Emeraude se remit sur pieds, une fraction de secondes plus tard, et se retrouva face à une Ymir gisante à quelques mètres, celle-ci était tout juste en train de se redresser. Les poings serrés et ses vêtements couverts de tâches verdâtres, elle avança d'un pas lourd en direction de la brune.

- Je peux savoir ce qu'il te prend ? rugit-elle tandis que sa jambe la lançait douloureusement suite à l'atterrissage.

- Je ne comptais pas rester avec vous, je serais mieux là-bas, rétorqua la brune en se redressant péniblement sur ses pieds.

- Qu'est-ce qu'il t'arrive, bordel !? De quoi tu parles ? répondit Emeraude en voyant son amie se mettre en position d'attaque, les poings levés devant son visage.

- Reiner et Marcel vont m'emmener dans un endroit avec d'autres personnes comme moi, ils m'ont promis qu'aucun mal ne me sera fait.

Emeraude s'arrêta de marcher en arrivant devant Ymir. Et, comprenant qu'elle allait devoir faire usage de la force, elle leva à son tour ses poings à hauteur de son visage.

- Ils mentent ! répondit-elle.

- Qu'est-ce que tu en sais !?

- Je le sais, c'est tout.

Et elle disait vrai. Jamais elle n'aurait participé à la mission visant à aider Ymir si elle n'était pas convaincue qu'elle encourait un danger auprès de Reiner et Marcel. Armin ne lui avait peut-être rien confié là-dessus, mais elle était certaine qu'elle devait empêcher la brune de les suivre.

Quoi qu'il n'en coûte.

- Parce que tu crois qu'ici, on va bien me traiter !? Il a fallu un procès pour décider si Eren n'avait ne serait-ce que le droit de vivre ! rétorqua Ymir avec une expression faciale qui ne lui ressemblait pas, celle de la peur. Tu crois qu'ils vont me faire quoi, à moi !?

A ces mots, elle se jeta sur Emeraude, le poing brandit. La jeune femme l'esquiva d'un pas de côté et tenta d'abattre son coude sur la nuque de la brune mais celle-ci lui fit un croche-patte. En s'effondrant au sol, elle agrippa les épaules de la brune dans sa chute, la forçant à l'accompagner. Elles roulèrent ensemble sur quelques mètres jusqu'à ce qu'Emeraude ne plante son genou dans le creux de ses reins, la forçant à s'immobiliser face contre terre et ne se place à genoux sur elle, bloquant les bras d'Ymir dans son dos.

Celle-ci, à plat ventre, grogna de frustration en tirant sur ses bras mais il était trop tard. Emeraude ne la laisserait plus s'en tirer.

- Oui, on va bien te traiter ! Regarde comment Erwin se décarcasse pour empêcher les Brigades Spéciales de coincer Eren ! On trouvera un moyen, Ymir, crois-moi !

- Non ! Arrête de mentir ! Je n'ai pas de maison à Shiganshina renfermant une foutue clé, moi ! répondit Ymir d'une voix où transparaissait une peur sincère. Je n'ai rien qui mérite qu'on me protège !

Emeraude ne répondit pas. Ymir avait raison. Même si cela lui fendait le cœur, elle comprenait l'appréhension de son amie. Parce qu'elle ne se fourvoyait pas. Elle n'avait rien qui pourrait justifier que le major décide de la protéger.

Seulement elle était prête à se battre pour l'aider et elle savait pertinemment que chaque membre de son escouade, l'ancienne 104ème brigade d'entrainement, l'étaient aussi. Elle était leur amie.

Soudain, sous son genou, elle sentit le corps de la brune se raidir. Et, remarquant du coin de l'œil qu'elle s'était tendue, elle suivit son regard. Et elle réalisa pourquoi elle n'avait pas vu Christa, plus tôt.

Suspendue aux doigts d'un odieux titan bedonnant la soulevant par sa cape, la blonde poussait des cris de terreur, à une trentaine de mètres de leur position. Et, même si elles ne pouvaient pas l'entendre, elles comprenaient sa peur. Car aucun sabre ne se faisait voir à sa taille.

Christa était désarmée et sur le point de se faire engloutir.

- Historia... murmura Ymir en tremblant. NON !

Emeraude vit la douleur qui déforma les traits de la brune. Et elle n'était pas sans savoir l'amour que celle-ci lui portait. De toute façon, même sans sentiment passionné, elle comprenait la peine qu'elle pouvait ressentir. Car son estomac venait aussi de se soulever en voyant la blonde dans une telle position, à deux doigts de la mort.

Un frisson la prit. Elle savait comment forcer son amie à rester. Mais elle se dégoûtait pour ce qu'elle s'apprêtait à faire.

- Emeraude ! appela-t-elle en se tordant sous ses genoux. Va l'aider ! Je t'en supplie !

- Seulement si tu restes avec nous.

Elle sentit la brune se raidir sous elle et vit ses yeux s'écarquiller tandis qu'une larme roulait sur ses joues. Jamais elle n'avait vu Ymir pleurer auparavant. Et elle réalisa que cette vision lui faisait mal.

- Est-ce que tu es en train de me faire chanter en utilisant la vie d'une tes amies ? demanda le titan colossal en se tordant le cou pour lui lancer son regard le plus noir.

Il y eut un bref silence.

- Oui, répondit simplement Emeraude, tentant d'ignorer le titan qui basculait sa tête en derrière en approchant Christa de ses lèvres charnues.

Et, en voyant l'éclair de rage qui traversa le regard d'Ymir, son cœur se fendit dans sa poitrine. Après Levi, l'heure était venue pour elle de perdre une autre de ses amies. Un étau se serra autour de sa gorge mais elle l'ignora.

Elle tenait entre ses mains sa seule chance de forcer Ymir à rester. De la sauver.

- Est-ce que tu te rends compte de ce que tu me dis ? lui cracha la brune au visage.

Emeraude ne répondit pas. Mais le titan dut réaliser combien elle était sérieuse en la regardant car ses yeux s'écarquillèrent soudain et elle poussa un soupir, visiblement résignée. Une autre larme coula sur sa joue.

Elle se tourna vers la blonde. Sa silhouette se rapprochait furieusement de la bouche du monstre. Ses sourcils se haussèrent face à ce triste spectacle.

- Tout ce que tu veux, soupira-t-elle, résignée. Mais sauve-la.

Emeraude ignora le pincement dans sa poitrine. Mais elle le savait : elle avait perdu Ymir. Quelque chose d'irréversible venait de se briser entre elles et rien ne pourrait jamais réparer ça.

Alors, d'un geste vif et habitué, la jeune femme dégaina ses boomerangs qu'elle projeta loin devant elle. La brune sous elle retint son souffle en entendant les projectiles s'éloigner dans des sifflements. Un reflet argenté brilla sous le soleil le temps d'un instant puis, un battement de cil plus tard, le titan s'effondra, relâchant Christa par la même occasion.

Un soupir de soulagement traversa les lèvres de la brune tandis que le boomerang revenait dans la main d'Emeraude.

- Tu n'es qu'un monstre, résonna soudain la voix tremblotante d'Ymir, signe qu'elle avait cédé et pleurait, encore sous le choc.

Les yeux de la jeune femme s'embuèrent à leur tour mais elle ne répondit pas.

Elle se souvenait de la main du titan bestial arrachant les membres de Mike pour la punir de s'être moquée de lui, elle revoyait la peine dans le regard de celui-ci lorsqu'elle avait tranché la gorge de son cheval, elle ressentait son corps se tendre sous sa main tandis qu'elle le tuait, elle ne pouvait oublier le regard empli de dégoût qu'avait posé Levi sur elle ni même la nuit passée ensuite à essayer de nettoyer ses mains d'un sang qui ne partait pas.

La sensation de l'hémoglobine sur ses paumes la poursuivait. C'était d'ailleurs pour cette raison qu'elle portait aujourd'hui des gants de cuir. Pour masquer ce qu'elle était. Une créature infâme, un être vile et malin.

Quelqu'un qu'Ymir et Levi avaient cerné.

« Je sais, je ne suis qu'un monstre d'égoïsme se regardant dans le miroir. »

Levi avait raison. Ymir aussi. Alors elle répondit d'une voix éteinte :









- Oui.














n'hésitez pas à commenter! je suis toujours curieuse de vos avis !

et merci à ceux et celles le faisant déjà <3

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