โง
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โง
Lโobscuritรฉ est douce, contre moi. Elle sโallonge et se blottie juste lร , autour de mon corps, prenant place dans un long moment apaisant. Elle me berce dans ses tรฉnรจbres, dรฉlicates et douces.
Soudain, elle remue. Dans lโรฉcran de mes paupiรจres closes, jโen distingue une ardeur rougeรขtre lโilluminant de lโintรฉrieur. Elle sโรฉlรจve, crรฉpitant.
La chaleur se fait plus tendre encore.
Mes yeux sโouvrent, dรฉcouvrant le ballet de flammes grimpant dans les airs. Elles tournoient et ondulent dรฉlicatement. Sโรฉlรจvent sereinement.
โ Tu es rรฉveillรฉeโฆ
Un chuchotement, contre mon oreille. Puis des lรจvres embrassent la peau en-dessous. Tournant la tรชte, je dรฉcouvre deux iris smaragdines qui se plissent en un sourire.
Mirifique est le visage de Toji, ร la lueur des flammes.
โ Tu es lร โฆ, je murmure dans posant une main dรฉlicate sur sa joue. Tu es revenu.
โ Je reviendrais toujours.
Sa paume se pose par-dessus la mienne. Nos fronts se touchent et je ferme les yeux, inspirant son odeur.
Que jโaimerai rester ici ร jamais, lร , au cลur des flammes apaisantes, en sรฉcuritรฉ. Contre lโhomme que jโaime, ma moitiรฉ.
Allongรฉe sur lui, mon torse contre le sien, je me redresse quelque peu. Il me contemple de ses รฉmeraudes, dรฉtaillant chaque trait de mon visage, laissant son doigt caresser les dรฉtails de mon faciรจs en un touchรฉ chaleureux.
โ Je tโaime.
Son murmure coule le long de mon corps et caresse ma peau. Je dรฉpose un baiser sur ses lรจvres. Doux, ร peine marquรฉ.
A la maniรจre dโun songe.
โ Quelles sont belles, chuchote-t-il lorsque je recule.
โ De quoi ? je demande, un sourire curieux aux lรจvres.
โ Les ailes du Phรฉnix.
Mes yeux sโรฉcarquillent et je me contorsionne, mรฉdusรฉe, dรฉcouvrant les sources de ses flammes, autour de nous. Un rire ahuri franchit mes lรจvres quand je prends conscience que la splendeur que je vois est ร moi, reliรฉe ร mon corps.
Immenses, deux ailes blanches sโรฉtendent. Constituรฉes de plumes dโune puretรฉ maculรฉe, elles scintillent presque. Seulement, les bords de ces pรฉtales coruscants sont roussis, comme peints de lueurs รฉcarlates.
Du feu. Mes ailes sont enflammรฉes en un spectacle inรฉgalรฉ.
โ Jeโฆ Elles sont ร moi ? je demande, sentant un capiton dโeuphorie รฉclater dans mon corps.
Me retournant vivement, je croise le regard de Toji qui acquiesce ร toute vitesse, un sourire germant sur ses lรจvres. Je pose mon front contre le sien et รฉclate de rire.
Il mโembrasse doucement. Sa main caresse mon crรขne.
โ Styx ne dรฉsigne pas dโAnges mais de Phรฉnix. Ton pouvoir est similaire au mien mais quelques variations existent. Ceci dit, รฉtant donnรฉ le lien รฉtroit de nos รขmesโฆ
Je ne saisis dโabord pas ce quโil dit. Il se redresse alors et je me recule dans les flammes, le regardant sโassoir. Lร , une ombre grandit dans son dos.
Ses ailes percent sa chair et se dรฉploient, sombres et magnifiques. Quand, soudain, je rรฉalise quโelles ne sont plus les mรชmes quโauparavant, nรฉes des tรฉnรจbres absolues. Noires.
Leur bord a roussi et des flammes y dansent.
โ Nousโฆ Nous avons les mรชmes ailesโฆ Moi, blanches. Toi, noires.
โ Les Phรฉnix ne sont pas des Anges a proprement parlรฉ mais de mauvaises traductions, il y a des siรจcles, leur ont attribuรฉes un surnomโฆ LโAnge de la Vie.
Mes sourcils se haussent. Je connais cette lรฉgende.
โ LโAnge de la Vie et de la Mort nโest pas censรฉ รชtreโฆ
โ LโAnge Eternel.
Jโobserve ma moitiรฉ et mon tout ร la fois, ce regard รฉmeraude qui se plisse en un sourire doux. Et je ne peux mโempรชcher de tendre une main vers ses ailes, recueillant un peu de ses flammes.
Elles coulent sur mes doigts ร la maniรจre dโun liquide. Assurรฉment, ce feu provient du Styx.
โ Je crois que lโheure est venue que lโAnge Eternel mette fin ร cette merde, je chuchote en me relevant.
Le feu habillant mon corps chute alors, laissant place ร un chiton blanc. Celui de Toji est noir.
Nous nous regardons quelques instants puis acquiesรงons.
Lร , le menton levรฉ, nous posons pied hors des flammes. La salle du trรดne nous apparait alors. Brillante, large, immense.
Vide.
Un hurlement retentit ร cรดtรฉ de nous. Nous marchons jusquโau balcon, protรฉgรฉe dโun rideau opaque. Ce dernier se soulรจve, laissant voir le spectacle quโoffre Elio Evilans.
Debout sous lโarcade de la loggia, les mains posรฉes sur la rampe traversรฉe de lierre, il fait face aux jardins impรฉriaux. Ceux-lร , enflammรฉs, illuminent la nuit noire qui tombe sur la sinistre guerre.
โ NโAYEZ CRAINTE, CHERS VILLAGEOIS, CAR JE VOUS PROTEGERAIS ! NOTRE IMPERATRICE A PEUT-ETRE ETE ASSASSINEE, MAIS PAS NOTRE VOLONTE !
Des applaudissements, sifflets et cris retentissent, en contrebas. Je devine que la population sโest amassรฉe dans le jardin.
Et ce, malgrรฉ le feu.
โ LES DRAGONS QUI NOUS ONT ATTAQUES ONT ETE TUES ! ET LโINSTIGATEUR DE CET ODIEUX COUP DโETAT AINSI QUE SON COMPLICE SONT EN PRISON ! MAIS ILS NโY RESTERONT PASโฆ
Elevant les mains comme pour se nourrir des cris retentissants, il proclame soudain :
โ DEMAIN, NOUS LES EXECUTERONS !
La foule hurle de plus belle, sautant sur place. Jโรฉchange un regard avec Toji, comprenant que notre tรขche sera plus compliquรฉe que ce que nous pouvions bien croire.
Si nous tuons Elio, la foule croira ร un autre Coup dโEtat, et elle ne se laissera pas faire.
โ MAIS A PRESENT, TUONS LE PLUS IMPORTANT DES TRAITRES ! CELUI QUI A TORTURE MA CHERE EGARCA !
Un hurlement retentit. Mon sang se glace. Me dรฉcalant doucement derriรจre les rideaux, jโobserve ce quโil se trame en contrebas. Toji se fige en mโimitant.
Autour dโune estrade, une femme a รฉtรฉ attachรฉe ร un bucher. Les mains dans le dos, sa robe noire volant sous une brise douce, elle pousse un autre hurlement.
โ JE SUIS EGARCA ! REGARDEZ-MOI ! JE SUIS VOTRE IMPERATRICE !
Mais les villageois frappent lโestrade, tentant de la faire tomber. Ils se pressent en une marรฉe humaine autour de la pauvre femme.
โ Elio leur fait subir une illusion, chuchote Toji ร mon oreille. Ils ne remarquent pas Egarca et la confondent avec son tortionnaire.
โ Pourquoi nous ne sommes plus victimes de ces hallucinations ?
โ Disons que devenir ensemble lโAnge Eternel nous a fait gagner quelques galons.
Mon sang se glace. Lโultime bassesse dโElio.
Tuer sa femme en utilisant comme arme la foule qui croit lโaimer.
โ JE VOUS LAISSE CHOISIRโฆ BรCHER OU LYNCHAGE ?
โ Nous devons agir.
โ Mais si la foule rรฉagit au dรฉcรจs dโElio en tuant Egarca ?
โ On volera jusquโร elle.
Jโacquiesce. Toji dit vrai. Il nous faut agir, sauver notre alliรฉe.
Un dernier regard. Nous acquiesรงons.
Avant de pรฉnรฉtrer la loggia.
Cรดte ร cรดte, nous avanรงons. En silence, nous progressons sur la pierre du balcon, nous nourrissant de ce moment si tendu, aux relents de guerre et brise enchantรฉe de victoire pressante.
La distance entre nous et Elio sโamoindrit. Il est si emportรฉ par son dรฉlire, riant en รฉcoutant la foule lui hurler son chรขtiment de prรฉdilection, quโil ne nous voit mรชme pas.
Jusquโร ce que les villageois lui hurlent de faire attention, que des ennemis sont lร , tout prรจs.
โ Qโฆ
Elio se retourne vivement et รฉcarquille les yeux en me dรฉcouvrant. Figรฉ, elle balbutie :
โ Tโฆ Toi ? Non. Cโฆ Cโest impossibleโฆ Tu es censรฉe รชtre morte !
Je lis la frayeur dans ses prunelles tandis quโil recule, sโรฉloignant de moi. Cependant son dos percute le torse de Toji et il hurle en le voyant.
Ses yeux glissent sur nos ailes et il tombe ร genoux, joignant les mains en priรจre.
โ Nโฆ Non ! Je ne savais pas qui vous รฉtiez ! Jeโฆ Je suis dรฉsolรฉโฆ Sโil-vous-plaรฎt, รฉpargnez-moi ! Je ferais tout ce que vous voudrez !
Un rire franchit mes lรจvres.
โ Sullyvan.
โ Qโฆ quoi ? demande-t-il, surpris.
Toji rรฉpond ร ma place.
โ Je nโai jamais compris pourquoi Lycus lโavait attaquรฉ. Je veux dire, il nโy avait pas de sephtis, dans ses villageois. Seulement, peut-รชtre quโelle a cru quโil y en avait car un certain Ange lui en avait donnรฉ lโimpression.
Il secoue la tรชte ร toute vitesse.
โ Nโฆ Non ! Cette femme รฉtait folle ! Cโรฉtait une vraie folle ! Elle aimait juste tuer ! Je vous jure !
โ Ah oui ? Ce nโรฉtait pas liรฉ au fait que tu ne supportais pas quโun Ange soit plus puissant que toi ? Que Sullyvan ait ร son cรดtรฉ une titane qui le rendait, la nuit, invincible ?
Il cesse de trembler, nous regardant quelques instants. Tour ร tour, il nous observe.
Soudain, il disparait.
En une fraction de secondes, il dรฉploie ses ailes et file dans le ciel.
Nous nous retournons, le dรฉcouvrant en train de flotter au-dessus des villageois. Ses larges ailes dรฉployรฉes, attirant des cris de son peuple qui dรฉcouvre quโil est un Ange, lui qui lโavait si bien cachรฉ.
Mais il nโen a que faire, รฉclatant de rire.
โ Jamais vous ne pourrez prouver quoi que ce soit face aux Dieux ! Et ils ne me jugeront pas sans preuve ! Alors si vous croyez queโฆ
โ Tu oublies une chose, Elio, je dรฉclare dans un sourire.
Ses sourcils se froncent.
โ Sullyvanโฆ Tu lโavais attaquรฉ de jour. Mais il fait nuit, maintenant.
Elio nโa que le temps dโafficher un air intriguรฉ.
Ses yeux sโรฉcarquillent soudain quand une lance jaillit de son torse. La pointe maculรฉe de sang nous apparait tandis que la tige sโรฉtend, dans son dos. Ses lรจvres se dรฉcollent et du sang en coule.
Les villageois hurlent de terreur.
โ Pour mon peuple, rรฉsonne soudain une voix.
Pรฉniblement et oscillant, Elio se retourne, dรฉcouvrant Sullyvan, flottant dans les airs. Ce dernier lโobserve sombrement aprรจs lโavoir transpercรฉ. Je reconnais la lance qui a failli le tuer, quand il est allรฉ chercher Hector et Egarca.
LโAnge de la Lumiรจre fixe celui de la Nuit quelques instants avant de sโeffondrer au sol.
Son corps claque le jardin, soulevant un nuage de cendres. Sullyvan le rejoint, sโaccroupissant ร cรดtรฉ de lui. Il pose la main sur la tige de la lance.
โ Et รงaโฆ Cโest pour ma fille.
Brutalement, il remonte lโarme, dรฉchirant le corps dโElio en deux. Annihilant chaque vie, chaque pouvoir en lui.
Lร -dessus, il se lรจve et acquiesce en notre direction. Nous lโimitons.
โ Madame Egarca ?
โ Votre Majestรฉ ?
Les villageois, dรฉfaits de lโillusion dโElio, rรฉalisent peu ร peu qui se trouve en face dโeux. Aussitรดt, une femme gravit la scรจne et tranche les liens de la femme.
Celle-ci la remercie dโune caresse sur la joue avant de se tourner vers son peuple.
Il y a quelques choses de solennel dans la faรงon quโont ses liens de tomber au sol. Son torse se bombe avec รฉlรฉgance.
Le menton droit, fier, elle dรฉclare :
โ Peuple de lโEmpire, jโai entendu votre appel.
Toji et moi รฉchangeons un regard. Nos doigts sโentremรชlent.
La guerre est finie.
โง
enfin, il est moooort
j'espรจre que ce chapitre
vous aura plu !
โง
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