𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟗
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𝐂 𝐇 𝐀 𝐏 𝐈 𝐓 𝐑 𝐄 9
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LA BRISE SOUFFLEE par Eole touche délicatement ma peau, y déposant un parfum des plus doux. J’inspire doucement, un sourire étirant mes lèvres, tandis que je remercie silencieusement le dieu du vent.
Ouvrant les paupières, je découvre un paysage qui m’est bien familier. Régulièrement, lorsque je m’endors, le dieu Morphée m’amène en ce lieu. Mes rêves y sont toujours des plus agréables.
— Merci, je chuchote. Je dois avouer que la cellule dans laquelle le duc Fushiguro m’a enfermée est si peu confortable que cet endroit me semble encore plus agréable qu’à l’ordinaire.
Dans mon dos grimpe un arbre. Son tronc majestueux ne griffe pas mes omoplates. Ceux-là ne sont d’ailleurs plus vêtus de ma cape de druide mais d’un chiton bleu pâle cintré d’un fil d’or. La matière est douce sur ma chair. Je la caresse délicatement.
— Tu aimes ? résonne une voix dans mon dos. Je pourrais t’en apporter une véritable, si tu veux. J’entends par là… Te rencontrer pour de vrai et non dans tes rêves.
Aussitôt, je me lève, me plaçant face à l’arbre. Puis, m’agenouillant au sol, je ferme les yeux par respect pour la nouvelle venue.
— Allons, rit-t-elle en me voyant faire. Ce n’est pas la première fois que je t’enlève en rêve. Tu n’es pas obligé de me vénérer de la sorte à chaque fois.
— Vous êtes une déesse et vous me faites l’honneur de discuter avec moi pendant que je rêve, je vous adorerais toujours.
Un rire me répond. Je la sens marcher à côté de moi. L’un de ses doigts frôle mon dos et je frissonne. Comme lors de nos précédentes rencontres, je me redresse alors.
Jamais elle ne me dit de me relever. Mais elle caresse toujours mon bras, ma tête ou mon dos lorsqu’elle souhaite que je le fasse. Et j’obtempère systématiquement.
Debout, je me retourne. Elle me montre le dos, vêtue d’une tenue similaire à la mienne mais blanche. La teinte complimente les ténèbres de ses longs cheveux tombant en boucles entre ses omoplates. Mon souffle se coupe brièvement dans ma poitrine.
Sans même la voir de face, elle dégage une telle prestance et aura que l’on sait qu’elle est une déesse.
— J’aime cet endroit. Rares sont les druides à qui je parle mais je les amène toujours ici, déclare-t-elle.
Levant la tête, j’observe le paysage par-dessus son épaule. Il est vrai qu’il est époustouflant de beauté.
L’arbre auquel j’étais adossée marque le sommet d’une colline verdoyante. Quelques fleurs et plantes en tout genre l’anime jusqu’à sa chute, bordée d’une dense forêt se poursuivant sur quelques kilomètres, jusqu’à un océan d’un bleu étincelant.
— Il est vrai qu’il est des plus beaux, je soupire en me plaçant à sa droite.
Me tournant vers elle, je regarde son profil. Les rayons du soleil complimentent sa peau éclatante. Semblable à de la porcelaine, elle s’articule avec élégance sur ses traits fins, autour de ses yeux marqués par un pli épicanthique. Ceux-là, solennels, observent la nature l’entourant.
La déesse de la colère divine est définitivement une sublime créature.
— Vouliez-vous m’entretenir de quelque chose ? je demande. Est-ce la raison pour laquelle vous m’avez convoquée ici ?
— Au contraire, je ne veux pas alourdir tes pensées. Je sentais simplement que tu avais besoin d’un moment de répit, après ta rencontre avec ce rustre, déclare-t-elle.
Je sais exactement de qui elle parle.
— Je suis consciente du fait que je n’aurais pas dû le gifler mais… Il m’a fait perdre patience.
— Je ne t’en blâme pas.
Après l’avoir giflée, je me suis vue conduite avec peu de délicatesse dans le sous-sol du manoir. Sans un mot, il a ouvert les grilles d’une cellule avant de me jeter sur son sol couvert d’un mélange de paille et de crasse.
Les heures se sont écoulées et je me suis endormie, épuisée. En ouvrant les yeux, je me suis trouvée ici et ai réalisé que je dormais encore. La déesse a simplement profité de mon sommeil pour m’emmener dans ce lieu si agréable.
— Puis-je vous demander quelque chose ? je susurre en me tournant vers elle.
— Fais donc.
Quelques instants, j’hésite. Mais lorsque les yeux noirs de la déesse se posent sur moi, je comprends que je ferais mieux d’éviter de lui faire perdre patience. Après tout, elle est une déesse. Elle n’a pas le temps de m’attendre.
— Auriez-vous eu vent de créatures échappées du Tartare ? je finis par demander.
Si ma question lui fait l’effet d’une gifle, elle n’en laisse rien paraitre. Son visage demeure froid, glacé. Mais elle finit par murmurer :
— Si Hadès échouait à ce point, je doute qu’il viendrait en discuter avec une déesse telle que moi. N’oublie pas que je châtie les humains mais aussi les divins.
J’acquiesce, déglutissant péniblement. J’espère que notre conversation ne créera pas de bouleversements au sein de l’Olympe. Cependant, je suis parfaitement consciente du fait que cette déesse ne s’empêchera pas de poser des questions pour mes beaux yeux.
La première fois que ma route a croisé celle de Némésis, je me trouvais au sommet d’une colline, le corps harassé par une longue course. Chutant dans ses bras, je n’ai vu que ses ailes entre mes paupières mi-closes.
Mais sa fine main délicate a caressé ma tête et elle m’a chuchotée, dans un murmure des plus doux, qu’elle veillerait à ce que les responsables du massacre que je venais de vivre payent pour leurs actes.
Une décennie s’est écoulée depuis. Nul n’a encore payé. Mais je sais que ma déesse ne trahirait ses promesses pour rien au monde.
Sa vengeance est simplement longue, douloureuse et vile.
— Ton esprit est tracassé, dernièrement. Je le sens partout où je vais.
— Quelqu’un s’amuse à assassiner des femmes. Et je suis incapable de dire comment il s’y prend, je soupire. J’aimerais le trouver.
— As-tu des indices ? Hormis… Cette théorie à propos du Tartare.
Mes lèvres se pincent. Je finis par secouer la tête. Cependant Némésis a déjà remarqué mon hésitation. Ses sourcils se froncent.
Elle n’a pas besoin de parler. Je sais qu’elle m’ordonne silencieusement de dire ce que je lui cache. Alors je finis par m’y résigner :
— Certains accusent l’Ange de la Mort.
— L’Ange de la Mort n’existe pas. Qu’importe ce que tous disent, les dieux veillent sur les sephtis et il n’y a pas de diable qui les protège. Vous êtes sous notre protection, au même titre que tous.
Un sourire étire mes lèvres. Ce n’est pas la première fois qu’elle tient ce genre de propos. Mais ils m’apaisent toujours. Je me sens mieux, lorsque je l’entends parler de la sorte.
Une déesse elle-même me promet que les dieux nous protègent. Les dires des Hommes n’ont plus aucune valeur.
— Je suis bien d’accord. Je cherche donc qui peut être responsable d’une telle tuerie. Je veux dire, cela n’a aucun sens. Aucun homme n’est capable de fomenter des meurtres si inc…
— Je t’ai dit qu’aucune créature du Tartare ne s’était échappée et que l’Ange de la Mort n’existait pas. Mais cela ne signifie pas que ce qu’il se passe n’a pas d’origine divine, me coupe Némésis.
Je me fige. Mon sang fait de même.
— Si tu ne trouves aucune explication au décès d’une personne, cela signifie que sa source ne voulait pas que tu comprennes ce qu’il se passait.
J’inspire difficilement, mes poumons se bloquant soudain. Elle ne me regarde pas, continuant de détailler l’horizon lorsqu’elle déclare :
— Tu es douée. Je le sais car je te connais depuis dix ans à présent et je veille sur toi. Alors si toi, tu n’as pas pu comprendre la mort d’une femme, nul ne le pourra.
— Cela signifie donc qu’un dieu est derrière ces décès ? je demande.
— Cela signifie surtout que tu devrais restée éloignée de tout cela.
Je n’ai pas le temps de répondre. Ses yeux semblables à des obsidiennes se posent sur moi. Ses doigts claquent dans l’air printanier. Mes paupières se ferment.
Je les ouvre à nouveau. La vallée a laissé place à un plafond sombre et poisseux, illuminé de la lueur vacillante de torches. Le parfum fleuri est maintenant empli d’une forte odeur d’urine.
Je suis de retour dans ma cellule.
Me redressant dans une grimace, un bruit attire mon attention. Tournant la tête, je découvre la silhouette d’une femme forte habillée d’une longue robe ivoire. Celle-ci ravi sa peau foncée.
— Qui êtes-vous ? je demande.
— Je suis le lieutenant du duc Fushiguro. Et il exige votre présence à sa table.
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voici le neuvième chapitre
de cette nouvelle fanfiction !
ne vous inquiétez pas,
toji revient bientôt !
j'espère que ça vous aura
plu !
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