𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟖𝟏











𝐂 𝐇 𝐀 𝐏 𝐈 𝐓 𝐑 𝐄  𝟖 𝟏





















           On eut dit qu’un coup de hache divine avait été porté au Tartare lui-même. Le sol tremble sous nos pieds, nous secouant. Les ongles posés sur ma peau n’ont de cesse de griffer mon cou.

           Du sang coule sur ma poitrine tremblante et je vois le regard de Toji se poser sur cet endroit précis. Mon cœur tambourine quand sa mâchoire se contracte.

           Un hurlement. Meeva vient de tomber.

           Elle glisse le long du sol. Son corps percute la rampe et elle menace de basculer par-dessus. Je lâche la torche qui tombe sur le pied de mon assaillant.

           Il sursaute dans un hurlement et je me défais de sa prise. M’élançant en direction de Meeva, je tente de la rattraper.

           Trop tard. Elle tombe par-dessus la rampe.

           Je cesse de courir. Mes yeux s’écarquillent. Il me semble que le monde cesse de tourner lorsque je vois son corps chuter dans un cri long à faire froid dans le dos. Je tremblote, hébétée.

— M… Meeva…

           Soudain, un bras fort entoure ma taille. On me tire sur le côté. J’ai à peine le temps de réaliser que Toji vient de m’emmener que la main aux longs doigts crochus frappe l’endroit où j’étais, quelques seconds avants.

           Je peux enfin voir mon assaillant, sa peau hâlée entourant des yeux marqués par un pli épicanthique. Mon estomac se noue tandis que je le regarde subrepticement.

           Son teint semble indiqué une provenance des régions nordiques du Désert Evilans tandis que la forme de ses yeux est plutôt une caractéristique des Terres Ancestrales.

           Je n’ai le temps de détailler plus longuement ses longs cheveux noués qu’il me faut reculer.

— Un membre de la rébellion ? je demande. Au service de Megumi ?

           L’homme éclate de rire, passant une main dans sa chevelure frisée. Lorsqu’il en ressort la main, celle-ci n’est plus crochue mais a retrouvé forme normale.

           Cela ne m’étonne guère. Il est un métamorphe.

— Ces bracelets peuvent t’indiquer que je n’obéis qu’à moi-même.

           Il fait tressauter les cercles d’or indiquant son statut d’esclave. Je suppose qu’il n’en est plus un et les porte afin de narguer l’empire qui a laissé ceci se faire.

— Un mercenaire, réalise Toji.

           Je prends soudain pleine conscience de notre position. Mon dos est plaqué contre son torse et son cœur bat avec force près de l’arrière de mon crâne. Sa chaleur m’embaume.

           Je frissonne contre lui et recule d’un pas, me défaisant de son étreinte. Là, le sol tremble de plus belle. Je me rattrape tout juste à la rampe de l’escalier tandis que Toji déploie ses ailes, flottant au-dessus du sol.

— Pourquoi le sol tremble-t-il de cette manière ? je demande, alarmée, tentant d’oublier le souvenir du corps de Meeva chutant par-dessus la rampe.

— Je pense que c’est le char en général qui tremble.

           Toji semble ennuyé lorsqu’il prononce ces mots.

— Tu veux dire que les dragons éveillés s’en prendraient aux chevaux nous conduisant ?

— Je veux dire que les dragons éveillés essayent sans doute de grignoter ce qui rattache le char aux chevaux et qu’une fois ceci fait, nous chuterons dans les airs, attendant l’atterrissage pour qu’ils nous crament.

           Le mercenaire lâche un soupir, sans doute fatigué de nous entendre parler.

— Bon, je ne me fais pas payer pour discuter. Alors vous allez me faire le plaisir de…

           Ses yeux s’écarquillent quand sa voix meurt dans sa gorge. Une épée vient de se loger dans son cou, traversant celui-ci en un bruit de succion.

           Un spasme le prend et il s’écroule sur les genoux. Puis, de tout son long.

           Mort.

— Voilà ce qu’il fallait faire. Pas besoin de discutailler des plombes.

— Azenoraiflikh, je chuchote en découvrant la femme à la splendide tignasse frisée.

           Marchant jusqu’à l’homme, elle fait preuve d’un équilibre remarquable en évitant de tomber. Puis, elle saisit l’épée qu’elle défait de la gorge du malheureux avant de la ranger dans son fourreau, à sa taille.

— Je vais tuer ces abrutis, grommelle-t-elle.

           Un à-coup. Elle bascule sur les fesses et manque de chuter dans les escaliers. Sa main s’attrape tant bien que mal à la rampe.

— On ne peut pas se battre dans ces conditions ! Les dragons nous empêchent de nous déplacer !

— Vous avez une solution ? cingle Toji.

           Mes épaules se haussent. Celles d’Azenor font de même. L’ancien Joyau de la Liberté semble peiner.

— Déjà, on devrait sortir du manoir. Une fois dans le jardin, on verra beaucoup mieux ce que font les dragons.

— Eux aussi, nous verrons mieux. Ils pourront nous carboniser en toute tranquillité, crache Toji. Dites, vous en avez combien, des idées de génie, comme ça ?

— Je sais que ce n’est pas le plan le plus brillant mais c’est tout ce qu’on a !

           Une autre secousse. Le coup est trop violent. Je ne réalise que j’ai lâché la rampe que lorsque mon corps glisse sur les marches.

           Un hurlement me prend lorsque leurs silhouettes se rapetissent à mesure que je tombe. Mes bras couvrent ma tête, la protégeant et je n’arrive à m’accrocher à rien.

           Soudain, on me soulève du sol. Je vois ce dernier s’éloigner tandis que je monte dans les airs. Deux bras se sont enroulés autour de mon corps et je suis pressée contre celui d’un autre.

           Toji.

— Comment je peux me concentrer si je dois te sauver le cul toutes les deux secondes ? murmure une voix, dans le creux de mon épaule.

           Son souffle électrifie ma peau tandis qu’il me garde contre lui. Les jambes et bras pendant dans le vide, je ne peux même pas me tourner pour le regarder.

           Tant mieux. Je ne suis pas sûre d’avoir envie qu’il voie mon expression.

           Alors, j’observe les objets rouler jusqu’au bas des escaliers. Amphores, livres, sphères, pierres… Tous dégringolent les marches tandis que nous vacillons.

           Soudain, mes yeux s’écarquillent. De la bile remonte ma gorge en une griffure et je me retiens de vomir, fixant le corps qui vient de glisser sur dans les escaliers, parmi les autres objets.

           Ses yeux froids et sans vie ne sont pas de la même couleur. Ses cheveux roux prennent la poussière, glissant le long des marches. Son pendentif tressaute quand elle tape le sol avec vigueur.

           L’imposture s’étant faite passée sur moi.

           Ou plutôt, son cadavre.

— Putain…

           La voix de Toji trahit sa stupeur. La femme que l’on soupçonnait le plus d’être derrière tout cela nous fixe, morte.

           Soudain, le manoir cesse de trembler. Flottant dans les airs, le noiraud me garde contre lui, n’osant pas bouger immédiatement. Puis, doucement, il se pose sur le sol.

           Celui-ci ne tremble plus.

           A nos pieds, nous observons le corps sans vie de l’imposture. Le mien tremble tandis que je regarde ses jambes tuméfiées, les marques de griffures sur son coup.

— Elle a été battue à mort, je réalise.

— Sans doute prise dans les débris tombants.

           La voix d’Azenor nous parvient tandis qu’elle se redresse durement. Nous l’observons tous deux.

— Elle vient du sommet des escaliers. Pour elle, là-bas, il y avait ses appartements.

           Soudain, le ventre de l’imposture s’affaisse. Ses yeux se ferment. Elle pousse un long râle et ses yeux se ferment. Ma gorge se noue en voyant cela.

— Elle n’était pas tout à fait morte, réalise Azenor. La malheureuse n’a poussé son dernier soupir qu’après cette longue chute.

           Je ne réponds pas. Mes lèvres se pincent tandis que je regarde la femme étendue. Mon esprit vogue à la manière qu’a eu l’écroulement du manoir de s’arrêter lorsqu’elle est descendue sous nos yeux.

           Mais, surtout, je songe au dernier soupir qu’elle vient tout juste de pousser alors qu’elle semblait décédée.

— Bon, allons dans le jardin. Je suis sûre que les autres nous attendent et nous devons soigner nos blessures.

           La mage nous dépasse d’un pas léger. Je la suis du regard, mon estomac se nouant.

           Au moment où je marche à sa suite, une main s’enroule autour de mon poignet. Toji me retient. Il attend qu’elle soit assez éloignée pour me retourner.

           Je frissonne à son contact brûlant. Seulement je tremble carrément en voyant son regard. Pour la première fois depuis longtemps, il me semble qu’une sorte de trève y brille.

           Aucune animosité. Simplement de la curiosité.

— Dis-moi.

           Mes sourcils se froncent.

— Inutile de jouer l’innocente. Je te connais comme si nos âmes étaient jumelles, lâche-t-il avec sarcasme, sachant que nous sommes effectivement des âmes sœurs. Tu n’as pas l’air d’être soulagée que la femme nous ayant attaqués soit décédée.

           J’hésite un instant avant de lâcher un soupir.

— Tu te souviens des sisnasas que ta créature attaquait ? C’est en les soignant que, dans cette vie, je t’ai connu, je chuchote.

           Il acquiesce sombrement.

— Lorsqu’elles mourraient, leurs yeux s’écarquillaient et elles se figeaient, puis elles laissaient échapper leur dernier soupir avant de rendre l’âme, les yeux clos.

— Alors ? Cela voulait dire que c’est la peur qui a tué l’imposture ? Comme les autres ? demande-t-il en désignant la concernée du menton.

           Je secoue la tête.

— Ce qui a tué ces femmes est le fait que, sans des pierres rares et cataplasmes chers, je ne peux pas soigner convenablement des blessures infligées par une créature qui provenait du Tartare. L’énergie y est si négative qu’une simple druide comme moi ne peut pas y faire grand-chose.

           Les seuls que j’ai pu sauver ont été la femme que j’ai emmenée dans le manoir du duc — et qui a péri, quelques mois plus tard, malgré le fait que j’ai replanté un sélénite dans sa poitrine — et l’empereur Elio Evilans qui disposaient des cataplasmes les plus élaborés.

           Et qui, surtout, est un Ange protégé par Apollon.

           L’énergie du Tartare est trop violente pour qu’un simple mortel y survivre pour de bon. Il lui faut des remèdes savamment pensés et encore, il ne tiendra que quelques mois.

— Tu es en train de me dire que cette femme a été tuée par une créature du Tartare ? demande-t-il. Mais comment cela serait pos…

— Toji. Nous sommes morts. Tous.

           Mes yeux se plantent dans les siens.

— Nous ne savons pas où étaient les différents membres de ce cortège, aux Enfers. Nous partons du principe qu’ils étaient des héros dans les Champs-Elysées mais rien n’exclue que certains soient venus du Tartare.

           L’homme jauge le cadavre de la femme.

— Je doute qu’Hadès et Apollon laissent des gens provenant du Tartare monter à bord.

— Cela dépend. Si on les motivait assez ?

— Tu penses à quoi ?

— « Aide sur cette mission et si tu réussis, tu n’iras plus au Tartare mais dans un coin plus tranquille des Enfers. Tu ne seras plus jamais torturé. »

           Il acquiesce mollement. La proposition semble effectivement alléchante. Moi-même, je suis d’une certaine façon ici pour cela — ne pas finir au Tartare et plutôt devenir un Ange. Par le passé, Toji a pris la même décision.

— Donc, selon toi, elle a été tuée par un membre de l’équipage qui vient du Tartare ? Il aurait découvert qu’elle était celle derrière ces illusions ?

           Je secoue la tête.

— Je crois plutôt qu’ils n’étaient pas deux agresseurs mais trois. Et qu’elle a été doublé par sa complice.

           Au même moment, je réalise brutalement. Mes yeux s’écarquillent et je monte les escaliers. Toji me suit aussitôt et nous nous arrêtons à hauteur du métamorphe qu’a occis Azenor.

           Sans surprise, je réalise que le visage que j’ai vu tantôt n’est pas le sien. Il l’avait changé en usant de ses pouvoirs. Maintenant, son teint est plus clair et ses cheveux sont devenus roux.

           Je reconnais l’un des chevaliers.

— Donc nos agresseurs étaient à bord du char depuis le début, chuchote Toji.

— Et l’un d’entre eux se balade librement parmi nous.
























j'espère que ce chapitre
vous aura plu !

alors ? des théories ?

je vous cache pas que
j'ai été frustrée d'apprendre
que wattpad n'envoie plus
de notifications de
mes chapitres pour
plusieurs parmi vous

je ne sais pas comment
régler le problème






































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