𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟑𝟏
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𝐂 𝐇 𝐀 𝐏 𝐈 𝐓 𝐑 𝐄 3 1
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MA TETE.
Le poids de mon crâne semble trop lourd lorsque je le bouge. Ecrasant une douce matière moelleuse, il roule tandis que j’ouvre péniblement les yeux. Aussitôt, ceux-là se referment, aveuglés par une trop forte luminosité.
— Madame la duchesse ? Calmez-vous, vous êtes en sécurité.
Une voix douce et particulièrement aigue retentit à mon oreille. Un froissement répétitif me laisse comprendre que la femme qui vient de parler est une minuscule fée dont les ailes battent l’air sans discontinuer.
A nouveau, j’ouvre les paupières. Cette fois-ci, je distingue plus facilement le plafond gravé d’ornements somptueux, juste devant moi. Autour de celui-ci, le sommet du lit à baldaquin sur lequel je suis étendue m’apparait. Ses tringles sont constituées de bois torsadé parsemé de feuilles descendant des rideaux finement drapés.
Semblables à une ondée, ils coulent délicatement autour des draps brodés de fleurs dans lesquels je suis installée. Tournant difficilement la tête, je ne vois que peu de chose du restant de la chambre.
Seule une lumière blafarde semblant venir de fenêtres, plus loin, me parvient.
— Monsieur le duc. Votre femme est réveillée. Nous allons vous laisser seuls un moment, retentit à nouveau la voix.
Une femme à peine plus grande que ma main quitte mon épaule droite dans un tintement léger. Une poudre irisée chute de ses ailes battant tandis qu’elle s’éloigne.
La suivant doucement du regard, j’aperçois bientôt la silhouette du duc.
Il a ôté son long manteau, permettant de voir la naissance de son torse à travers sa chemise légèrement déboutonnée et même celle de ses bras puisqu’il en a retroussé les manches. Il soupire, se laissant choir sur une chaise ouvragée, aux pieds de mon lit.
Je le regarde passer une main dans ses cheveux noirs, me sentant particulièrement vulnérable, allongée dans ce lit.
— J’ai dormi combien de temps ? je demande.
— Une nuit et une journée. Nous sommes au début de la soirée.
J’acquiesce, remuant. Aussitôt, mes traits se contractent et je retiens un juron, sentant mon ventre me tirailler atrocement.
Soulevant les couvertures habillant mon torse, je regarde mes bandages. Ils semblent avoir été fait proprement.
— Sa Majesté a attrapé les personnes qui vous ont fait ça. Ils ont été exécutés.
Je me fige, la main tenant toujours les draps. Mes yeux s’écarquillent tandis que mon cœur semble se bloquer dans ma poitrine. Un instant, je ne peux plus bouger.
— Quoi ? je lâche finalement, sentant mes mains trembler.
— Il s’agissait de domestiques infiltrés au palais. C’est de cette façon qu’ils sont parvenus à entrer malgré la présence des gardes poissons qui inspectaient les volontés de chacun des participants.
Les inspecter ? Alors les hommes plantés aux portes du palais pouvaient lire mon envie de piéger Lycus ?
Pourquoi ne sont-t-ils pas intervenus ?
— Non, vous devez vous tromper, vous…
— Pourquoi ?
Posant l’index devant ses lèvres, son pouce soutenant son menton et son coude étant planté dans l’accoudoir, le duc m’observe longuement. Je ne réponds pas, la gorge nouée. Il insiste donc.
— Pourquoi je me trompe ? Je vous en prie, répondez-moi.
Ses yeux smaragdins me fixent avec amertume. Quelque chose ne va pas.
Je demeure silencieuse, n’osant ajouter quoi que ce soit. Il me lorgne longuement, ne désirant visiblement pas couper ce silence.
Mais il finit par le faire.
— Est-ce parce qu’il n’y avait aucun envahisseur et que c’est vous qui avez fait cela ?
Mon cœur bat la chamade.
— Si cela peut vous rassurer, j’ai menti en disant que nous avions trouvé les responsables, lâche-t-il d’un air mauvais. Je me doutais que cela vous pousserait à admettre, même silencieusement, que vous avez effectivement agis en parfaite abrutie !
Je gonfle mes poumons d’air, fixant les feuilles du lit à baldaquin.
— Ecoutez, je sais que je vous ai mis en position délicate… Lycus a été tuée alors que j’étais là et que nous venions de nous disp…
— BORDEL MAIS JE ME FICHE DE MA POSITION ET DE LYCUS ! EST-CE QUE VOUS VOUS RENDEZ COMPTE QUE J’AI CRU QUE VOUS ALLIEZ MOURIR ?
Son cri m’arrache un sursaut. Brutalement, il s’est levé, me foudroyant du regard. Sa peau a viré au cramoisie tandis qu’une veine palpite sur sa tempe.
Je frissonne. Le silence se fait, pesant, sur les lieux.
— Vous n’avez pas le droit de vous faire du mal…
— Je suppose que cela vous est réservé, je le coupe sèchement.
Il se fige. Moi aussi.
Ma réponse était déplacée, surtout que je sais à présent pourquoi il a agi de cette façon envers mon peuple. Seulement ce n’est pas parce qu’il se sent coupable de cela, qu’il veut absolument protéger les sephtis maintenant que cela lui donne le droit de me hurler dessus.
Je pousse un soupir. Il tourne la tête et je ne peux ignorer l’expression blessée qu’il arbore.
— Navrée, ma remarque était vraiment déplacée.
Il ne répond pas, se refusant à me regarder.
— Je comprends votre besoin de protéger les sephtis car j’éprouve le même. Rares sont ceux s’en étant sortis, comme moi, et ayant pu recommencer une nouvelle vie ailleurs. La plupart sont encore parqués à Pagsy.
Il fixe le vide, silencieux.
— Alors il m’incombe d’utiliser mes rares chances de côtoyer les plus puissants de ce monde dans le but de les protéger. Vous souhaitez protéger les sephtis ? Moi aussi.
Bien qu’il ne me regarde pas, je me penche en avant, fixant ses yeux posés ailleurs.
— Je pense donc que vous pouvez me comprendre lorsque je vous dis que je mettrais ma vie en danger pour parvenir à mes fins.
Sa mâchoire se contracte.
— Non, je ne comprends pas.
Mes sourcils se haussent.
— Enfin si, je comprends. Je comprends même entièrement mais…
Là, il pose ses yeux smaragdins sur moi. Une expression que je ne sais déchiffrer les allume, brillante.
— C’est vous qui ne comprenez pas.
Sans me laisser le temps de répondre, il tourne les talons. Je le regarde fendre cette salle faite de bois et verdure avant de disparaitre derrière une porte qu’il claque.
Mes sourcils se froncent.
— Effectivement, je ne comprends pas, je répète toute seule.
Je réalise bien qu’il se fait une mission de protéger les sephtis depuis ce qu’il s’est passé. Mais il doit comprendre qu’il ne peut empêcher la mort de chacun d’entre nous. Et si, en me mettant en danger, j’aide le plus grand nombre, il devrait applaudir cela.
Poussant un grognement, je remue dans mon lit, tentant d’en sortir.
— Je ne ferais pas cela, si j’étais vous.
Je sursaute, me retournant et découvrant un homme, debout à côté de la fenêtre.
— MAIS C’EST QUOI VOTRE PUTAIN DE PROBLEME ? CASSEZ-VOUS DE MA CHAMBRE !
Etrangement, il m’est familier. Mais je n’ai pas le temps de réfléchir à l’endroit où j’ai déjà vu ce regard marqué d’un pli épicanthique, planté au milieu d’un visage aux traits doux et délicats.
Reculant dans mon lit, je regarde autour de moi, tentant de trouver n’importe quoi qui pourrait faire office d’armes.
— Calmez-vous, bon sang, vous allez rouvrir vos points de suture.
— Mais qui êtes-vous ? je crache. Et comment êtes-vous entrés ?
Ses sourcils se froncent, comme si ma question était des plus stupides.
— Et bien… Par la porte.
Est-ce que cet abruti se fiche de moi ? Il me faut absolument savoir s’il m’a entendu converser avec le duc et sait ce que j’ai fait.
— Mon nom est Ylus, prêtre Vierge. Je suis entré sous la forme d’une mouche quand votre mari a ouvert la porte pour sortir.
Aussitôt, mes épaules s’affaissent. Je n’arrive même pas à paniquer en réalisant que je viens d’hurler sur une telle personnalité spirituelle.
Il n’a rien entendu de notre discussion et s’est contenté d’utiliser le pouvoir des vierges — la métamorphose — pour entrer ici.
— Bien, je lance en replaçant la couverture pour me cacher. Je peux savoir ce qui vous amène ici ? Et déguisé en insecte, qui plus est ?
Il sourit doucement. Un rictus doux et empreint de sagesse, cachant ses mains dans les larges manches de son kimono couleur ambre.
— Votre mari a formellement interdit à quiconque exclu du personnel soignant d’entrer dans votre chambre. Mais notre ami commun Hector voulait absolument que vous sachiez quelque chose.
— Ah oui ?
Il acquiesce.
— Lycus a survécu et officiellement déposé une requête auprès de l’impératrice ainsi que du conseils des douze prêtres et prêtresses, demandant votre exécution.
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voici le trente-et-unième
chapitre de cette fanfiction !
merci énormément de lire
encore cette fiction !
j'espère que ça vous aura
plu !
surtout le passage où toji
admet qu'il a eu peur pour
elle >>>>>
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