ℭ𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟕


















































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             L’AIR EST FRAIS et le ciel, gris. La nuit ne tardera pas à tomber. Perchée sur un vaste carrelage en damier, j’observe les villages s’étendant au loin, ceux que je ne peux pas visiter à cause du sort me retenant ici. Par-delà les remparts, les forêts verdoyantes jouxtent des lacs aux reflets irisés et hameaux de maisons où je devine une vie remplie. Des champs attirent aussi mon regard, parfois.

             Camelot est large. Vaste. Riche. Ou du moins, là, l’illusion persiste.

             Car je ne vois que les récoltes abondantes, les commerces internes fonctionnant, les bois chatoyants qui attirent tant de touristes et une légère poudre irisée dans les airs qui trahit la forte population magique des alentours… Oui, derrière nos remparts, nous nous en tirons bien. Bien qu’il m’insupporte, le roi est même remarquable en sa qualité d’administrateur de royaume.

             Mais nos relations avec les autres nations, elles, sont au point mort. Moorathyl, Arn, Lylian, Gibraska… Les plus puissantes nations autour de nous, celles qui ont les moyens de nous affronter, ont quitté bien des accords commerciaux avec Camelot quand Erwin Ier en a pris la tête.

             Le blond affirme que les femmes de Moorathyl sont oppressées et que notre vieille défaite militaire, il y a de cela plusieurs siècles, n’était lié qu’à la lâcheté des guerriers Moorath. Puis, les valeurs d’Arn reposent principalement sur la justesse et l’honnêteté, faisant des soldats Arnais des « faibles d’esprit ». Par ailleurs, Lylian tient sa fierté de sa culture. Et, étonnamment, Erwin a longtemps su se montrer diplomate avec eux. Jusqu’au jour où, ne cherchant pas à se renseigner sur les coutumes de ce pays, il s’est rendu aux funérailles du dauphin en tenue habituellement portée pour fêter la perte de virginité d’une femme au cours d’une fête où on demande au dieu à ce qu’elle tombe enceinte. Autant dire que cela n’a pas été bien perçu. Finalement, l’impératrice de Gibraska n’a simplement jamais porté Sa Majesté dans son cœur.

             Un soupire me prend tandis que mes yeux se posent sur une longue étendue d’arbres. Brocéliande. Une forêt issue des légendes arthuriennes.

             Un soir, je m’y suis battue. Le lendemain, je me suis réveillée, pieds et poings liés, dans les geôles du château. Mon propre empereur m’avait livrée. Assurant à Camelot que je n’étais nul autre que le démon ayant terrorisé cette région durant la guerre.

— Que voulez-vous ?

             Un sourire étire mes lèvres lorsque la voix de Jäger résonne.

— Monseigneur, je commençais à craindre que vous me laissiez en plan. Cela n’aurait pas été courtois de votre part.

— Je ne suis pas du genre courtois, madame.

             Me détournant enfin de l’horizon, je gratifie Jäger d’un regard amusé. Ses cheveux bruns sont noués en chignon au-dessus de son visage parsemé de trace de doigts boueux. Il a dû passer la journée aux écuries à racler le sol.

             Le regard noir qu’il me réserve en dit long sur les pensées qu’il a ruminé.

— Dites-moi, comment est la vie, en bas de l’échelle sociale ? je lance.

             Contractant la mâchoire, il fixe un point sur le côté pour se contenir. Mais quelques secondes s’écoulent et il reprend son calme.

— Je suis venu car il est hors de question que cette situation dure. Mes amis voulaient simplement m’aider et ils se retrouvent obligés de faire les sales besognes. Mikasa qui a eu du mal à s’imposer en tant que chevalier alors qu’elle est la meilleure de tous, en plus, se fait moquer par nos frères d’armes !

— Comme c’est navrant, je raille. Si vous le voulez bien, avant que votre grande histoire sur votre amante ne me brise le cœur, j’aimerai discuter de sujets plus…sérieux.

             Des rougeurs apparaissent sur les joues du brun qui détourne les yeux. Un faible rire me prend face à son air embarrassé. La vision en est presque attendrissante.

— Elle n’est pas ma… ‘Fin…

— Encore heureux, joli cœur. Car dans la légende, Genièvre se tape Lancelot, je vous signale. Alors à moins d’être prêt à trouver une tête blonde entre les seins de votre grand amour, je vous conseille de vous focaliser sur le pouvoir.

             Aussitôt, son regard s’assombrit. Il n’y a aucun doute, il a un faible pour la noiraude. Tant mieux, je pourrais l’exploiter facilement.

— Qu’est-ce que je dois faire ?

— Dans la légende, la première épée du rocher n’est pas Excalibur. La première arme se brise et Merlin mène Arthur à un lac où la dame du Lac lui tend une nouvelle épée, la célèbre Excalibur. Ceci dit, il était déjà roi depuis un moment puisqu’il avait décroché l’épée légendaire…

             Les sourcils du brun se froncent.

— Et les gens l’ont accepté comme ça ? Je veux dire, dans les contes qu’on me racontait petit, il était juste question d’un petit gars ayant décroché une épée d’un rocher et étant devenu roi, c’est tout. Jamais je me suis demandé si les nobles avaient accepté ça sans broncher, souligne-t-il.

— Ils ne l’ont pas accepté. Merlin avait enlevé Arthur quand il était enfant et menti sur ses véritables origines, à savoir qu’il était le fils de la reine de Tintagel. Quand il a dévoilé la vérité sur le fait qu’Arthur était, en réalité, un prince, les choses se sont mieux passées pour lui. Mais il a quand même eu pas mal de réfractaires…

— Mais moi, je n’ai pas d’origine particulière ! Soit, j’ai aussi eu un mage qui m’a élevée mais elle m’a jamais caché l’identité de mes parents !

— Merlin n’a pas élevé Arthur, je le contredis. Il l’a confié à un couple de vassaux.

— Ça n’a pas été mon cas. Ymir m’a élevé. Avec un coup dans le nez et en faisant pas mal de bourdes, mais elle m’a élevé.

             J’acquiesce. Le nom Jäger ne m’est pas inconnu. Il s’agit d’un couple de nobles encore vivants et dont les noms résonnent régulièrement, dans les geôles du château. Je n’ai aucune idée de la raison pour laquelle ils n’ont pas accepté d’élever leur enfant mais lui ont tout de même laissé leur nom.

             Ils ne l’ont pas renié. Tous savent qu’Eren est le fils de Grisha et Carla. Mais ils ne se sont simplement pas vus depuis des années.

— Alors reprenons ce que je disais sur la véritable Excalibur. Parce que l’air de rien, cette épée est le symbole du pouvoir d’Arthur. On sait déjà qu’Armin est Lancelot, Mikasa est Guenièvre et Ymir, Merlin. Alors tâchons de trouver la Dame du Lac. Elle aura sans doute des explications à nous fournir.

             Le brun se contente d’un hochement de tête.

— Je peux vous poser une question ?

             J’acquiesce.

— Vous, dans ce joyeux conte de fée, vous êtes qui ? Parce que je me souviens d’aucun personnage qui aide Arthur à monter sur le trône de force tout en trainant dans ses jambes.

— Sans doute Mordret.

             Un rire le prend. Sincèrement amusé et je me surprends à apprécier la vision de ses yeux se plissant. Bien moins inquiétante que les regards noirs qu’il me gratifie à longueur de journée.

— Mon fils incestueux ? Rien que ça ?

— Le fils à qui vous devez votre mort, je souligne.

             Il secoue la tête, visiblement très amusé par mon trait d’humour déplacé. Mais, bientôt, il reprend contenance. L’air frais fouette ses joues rougies qui font ressortir le vert de ses yeux. Ces derniers se posent sur le paysage s’étendant au-dessus des remparts.

             Je suis son regard.

— Si elle existe, je suppose que c’est là-bas que je la trouverais, lance-t-il.

— Brocéliande, demeure de la Dame du Lac, j’affirme. Je ne pourrais pas vous y accompagner, sire.

— Tant mieux. Je crains de ne pas trouver de plaisir dans la tache de surveiller une enfant perturbée et perturbante, cingle-t-il.

             Mes yeux roulent dans leurs orbites quand il tourne les talons. Me retournant, je l’observe franchir le vaste sol en damier pour rejoindre l’arcade donnant sur l’intérieure du château. L’épée à sa taille, qui n’est pas celle que j’ai façonnée, remue à ses pas.

             Soudain, il s’immobilise.

— Oh et, Ak Ram Ka’han…

             Mes muscles se raidissent. Il ne m’appelle pas par mon prénom, celui gravé sur cette épée, mais par mon triste surnom hérité des combats. Je suppose que je ne suis plus que cela, à présent. J’ai choisi d’être franche avec lui. Alors sa haine à mon égard est logique.

             Par-dessus son épaule, il me lance un bref regard avant de reprendre son chemin :





— Ne m’appelez pas sire.



























. . . ♕ . . .




















 


             Les journées se succèdent, ennuyeuses. Les matins sont bercés par les visites d’Erwin dans la chambre qu’il m’a attitrée. Il se contente de s’assoir sur mon canapé et manger des gâteaux en complimentant mes traits et ma docilité.

« Les femmes comme vous, sur le plan de l’obéissance, font les soldats idéals. A quoi bon posséder dans ses rangs des personnes telles que Mikasa, Armin, Eren ou même Livai s’ils attendent la première babiole venue pour me tourner le dos ? »

             Jusqu’à ce qu’il quitte la chambre car ses responsabilités l’incombent, je le console. Puis, marchant dans les jardins d’un air las, je croise régulièrement des connaissances avec qui je discute. Mais tout cela ne dure jamais bien longtemps.

             Plusieurs jours se sont écoulés depuis que j’ai confié à Eren la tâche de cueillir la Dame du Lac. Et je ne l’ai pas revue depuis. Pourtant, l’aller-retour jusqu’à Brocéliande à pied peut se faire en une journée. Alors, lui qui a accès à des chevaux, je doute que ce soit la longueur du voyage qui explique le temps qu’il met à se présenter à moi.

             Il doit monter sur le trône. Il s’agit d’une question de vie ou de mort.

             Autour de moi, les fleurs s’étendent et leurs parfums embaument l’air. Je longe les allées symétriques, contournent les fontaines élaborées et soupire au rythme des oiseaux voletant au-dessus du gazon.

             Soudain, une main agrippe mon épaule, me tirant en arrière. Avant même que je ne cris de surprise, une autre se pose sur ma bouche, étouffant les sons. Reculant, emportée par cette force inconnue, je traverse des rubans de feuilles se referment soudain sur moi, me privant de la forte luminosité ambiante. Je reconnais les branches du sol pleureur.

             Je suis dissimulée à la vue de tous, sous l’arbre. Mon dos se retrouve plaqué contre des écorces tandis qu’une peur me prend. Mais à l’instant où je réalise qu’il ne s’agit pas d’un criminel m’attirant dans un coin sombre pour m’agresser mais simplement d’Eren — qui a visiblement un goût prononcé pour ce genre d’approche — je me détends.

             Il se place devant moi et à peine vois-je ses yeux émeraudes que je le pousse violemment loin de moi. Il se laisse faire.

— Mais vous êtes complètement malade !? Est-ce que c’est une façon d’approcher une dame ?

             Un rictus moqueur le prend et il hausse un sourcil.

— Me dites pas que vous avez eu peur ?

— Q… Quoi ? Moi ? Bien sûr que non ! J’aurais juste pu vous tuer sur le coup de la surprise ! Et à ce moment-là, on aurait eu du mal à vous faire grimper sur le trône, croyez-moi !

             Il ne semble pas me croire.

— Vous êtes une piètre menteuse.

             Levant les yeux au ciel, je balaye l’air d’un geste de la main.

— Qu’est-ce que vous voulez !? A part vous rapprochez d’une femme parce que l’amour de votre vie va sûrement aller quérir de meilleurs orgasmes sur la queue de votre meilleur ami ?

             Aussitôt, son sourire retombe et son regard se fait plus noir. De toute évidence, j’ai atteint un point sensible. Sa mâchoire se contracte.

Mikasa est une amie dévouée. Nous avons été élevés ensemble et elle m’aime profondément.

— Lui aussi, il va l’aimer profondément. Si vous voyez ce que je veux dire, je lâche en insistant sur l’adverbe dans un sourire venimeux.

             Aussitôt, il pose son avant-bras sur ma gorge, me plaquant plus fermement au tronc d’arbre. Ses yeux semblent s’assombrir tandis que son nez frôle le mien. Je sens son souffle brûlant sur mes lèvres :

— Vous parlez d’une personne que vous ne connaissez pas. Et je risque bien de me fâcher sérieusement si vous recommencez à être grossière.

             Un rire me prend.

— Vous n’êtes pas en position de me menacer, mon joli. Car je suppose que si vous êtes là, c’est parce que vous avez trouvé la Dame du Lac mais que vous avez besoin de moi pour une raison quelconque.

             Aussitôt, la colère se dissipe dans son regard. Il semble réaliser que je dis vrai car il recule soudain, mal à l’aise.














— Elle veut un entretien avec vous. Ce soir. Aux écuries.
































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désolée pour la
semaine de pause
mais je reprends
:)

j'espère que la
nouvelle cover et
ce chapitre vous
aurons plu
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