ℭ𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟒





















































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             LES MAGES DISENT toujours vrai. Ils ne mentent pas. Cela ne leur vient pas à l’esprit de le faire, à moins qu’ils aient grandis aux côtés d’êtres humains. Mais ceux désignés par les dieux pour accomplir les tâches les plus nobles ne mentent pas. Non.

             Historia ne ment pas. La dame du Lac ne ment pas.

— Je me demande quelles pensées tournent dans cette tête songeuse, déclare une voix, dans mon dos. Je crois que je donnerais cher pour le savoir.

             Mes yeux se détournent du paysage des jardins du palais quand je me retourne pour observer Eren. Debout dans l’encadrement de la porte de cette vaste salle, il me sourit tendrement. Mon cœur a pour réflexe de battre plus intensément quand je vois cela mais les paroles de la blonde restent gravées dans mon esprit.

             Elle a affirmé qu’il trahirait sa promesse. Qu’il ne me rendrait pas ma liberté. Qu’il me mettrait en cage.

— Tout va bien ? insiste-t-il en voyant mon air songeur.

             Il franchit les mètres nous séparant et prend mon visage en coupe, me forçant à le regarder. Mes yeux plongent dans l’océan émeraude des siens tandis qu’il m’observe. Ses sourcils se froncent, il détaille chaque partie de mon visage, quêtant sans doute le mal me rongeant et tentant de l’annihiler.

             Je pose une main par-dessus l’une des siennes. Son toucher est tendre et chaud. Je ne me suis jamais sentie aussi légère qu’à ses côtés. Cependant la prophétie d’Historia, elle, pèse lourd.

— J’aimerais figer le temps, je chuchote. Je ne veux pas affronter l’avenir.

             Là, son visage s’adoucit en un sourire plus doux. Je me dis qu’il est splendide, sous cet angle. Que la sincérité fait étinceler son regard et qu’il est stupide de douter de cet homme. Seulement je n’avais pas de raison de douter d’Han et j’en ai de douter d’Eren. Il serait complètement idiot de ne pas prendre certaines mesures.

             Les prophéties se réalisent toutes. Toujours. Encore plus celles confirmées par Olympe.

— C’est normal d’être nerveux. Je le suis aussi. Si tu savais comment je suis nerveux… Surtout quand des nobles m’accostent et que tu n’es pas dans les parages. Il y a encore dix mille choses à régler avant le couronnement officiel et je comprends que tu sois dépassée mais ça va aller…

             Ses joues caressent mes pommettes et son sourire s’élargit davantage. Je peine à croire qu’il compte me trahir, quand il me regarde ainsi. Il faut croire qu’il est un excellent menteur.

— Mais on va convaincre Livai de laisser les chevaliers de la Table Ronde se ranger de notre côté puis on va organiser une cérémonie où différents mages attesteront de l’origine divine d’Excalibur et cela achèvera de convaincre la plupart des gens. Les réfractaires ne seront plus qu’une minorité. Mon règne commencera enfin.

             Posant son front sur le mien, il prend une profonde inspiration. Je sens l’espoir qu’il fonde en moi et la délivrance qu’il ressent à l’idée que son plan se déroule sans accroc. Il a hâte de prendre officiellement place sur le trône.

             Et je crois que j’aurais hâte aussi si je n’étais pas terrorisée.

— Eren… Tu as promis, tu te rappelles ? je demande d’une voix légèrement étranglée.

             Ses sourcils se froncent et il se détache légèrement de moi. J’inspire une bouffée d’air, tentant d’apaiser les furieux battements de mon cœur.

— Ma liberté. Tu as promis que je récupèrerais ma liberté et pourrais quitter le château.

— Tu ne veux plus devenir mon bras droit ? demande-t-il en haussant les sourcils.

             Mes traits retombent brutalement et mon cœur se fige. L’impression qu’il remonte ensuite jusqu’à ma gorge me prend, comme si je faisais une chute vertigineuse. Mes yeux s’imbibent de larmes quand je le fixe, atterrée par ce que je viens d’entendre.

             Alors Historia disait vrai ? Il ne compte pas me rendre ma liberté ? Le fait que je sois devenue son bras droit est pour lui une raison suffisante de me garder sous cloche ?

             Je recule d’un pas, écœurée. Voyant mon geste, il s’alarme soudain. Ses sourcils se haussent et il attrape mes mains entre les siennes avant de les porter à sa bouche. Les baisers qu’il y dépose pourraient m’apaiser, me faire gémir de contentement ou même d’autre cause.

             Mais cela est sans compter sur la terreur qui m’anime.

— Tu seras libre, d’accord ? Tu seras libre de faire ce que tu veux, partir ou rester. Libre.

             Sa large main caresse doucement le sommet de mon crâne puis il saisit mon visage en coupe. Ses pouces frictionnent mes pommettes et il louche sur mes lèvres avant de les embrasser. Un contact doux, bref et chaste. Délicat, comme s’il craignait de me briser.

— Ai confiance en moi, ma belle. Tu es libre. Libre d’être la femme la plus extraordinaire de ce royaume qui s’est enfui. Libre de devenir mon bras droit. Fais-moi confiance, je ne t’enfermerais pas.

             Les visages d’Han et Erwin m’apparaissent. Leurs caresses. Leurs baisers. Leur façon de me parler avec une gentillesse profonde qu’ils ne réservaient qu’à moi. Leur apparent respect qu’ils n’acceptaient de montrer qu’à mon unique personne.

             Tout cela n’était que comédie, une façon de m’attirer dans leurs filets. Comme je savais comment manipuler les hommes, j’en ai trop souvent oublié qu’eux savent comment manipuler une femme. Ils avaient conscience du fait qu’il leur fallait courber l’échine et murmurer à quel point cela leur coûtait de l’admettre mais qu’ils me trouvaient impressionnante.

             La seule chose qui les distingue d’Eren est que lui, j’ai encore plus envie d’y croire. Mais je ne peux pas m’offrir ce luxe.

— Je te fais confiance, je mens dans un murmure en souriant, les larmes aux yeux.

— Oh, Forgeron, tu signeras ma perte, chuchote-t-il dans un rire niais.

             Ses lèvres fondent sur les miennes. Sa langue s’enroule autour de sa jumelle en écartant les croissants de ma bouche et je ne peux m’empêcher de me laisser aller à ce baiser. Sa bouche est trop douce pour qu’on ne s’y laisser pas sombrer. Il pourrait faire de moi ce qu’il souhaite. Je crois qu’il est sur le point de le faire.






















             Je suis amoureuse de lui.


























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             La mine confuse et ébranlée du Forgeron me travaille. Je ne sais pas ce qu’il se passe dans son esprit. J’aimerais le savoir car le meilleur moyen de l’aider est encore de cerner et d’annihiler son trouble cependant il me semble évident qu’elle préfère ne pas en parler.

             Notre baiser s’amenuise lentement et je finis par m’écarter d’elle. Elle respire difficilement et ses lèvres sont gonflées. Je suppose que tout cela était trop intense pour elle. Je souris doucement en la voyant gonfler sa poitrine.

— Le corset t’empêche de respirer, tu devrais peut-être le troquer contre autre chose, je fais remarquer.

— Les dames de la cour portent toutes des toilettes sophistiquées. Comment je pourrais prétendre être dans le même cercle que le roi si je portais des haillons ?

             Je souris. Elle n’a pas l’air de comprendre que même dans des haillons, elle rayonnera toujours davantage que n’importe quel noble paré de vêtements onéreux. Elle est le soleil. Un soleil qui se croit lune. Un soleil pluvieux. Un soleil n’ayant pas conscience de la puissance de sa lumière.

             Mais un soleil quand même.

             Mon monde se réveille avec elle et se couche à ses côtés. Il est compliqué d’avancer quand elle n’est plus là. Je ne vois honnêtement pas ma vie sans sa personne. J’aurais froid. Trop froid. Et ce, qu’importe ce que je choisirais de porter.

             Et elle pourrait me brûler autant de fois qu’elle le voudrait, je reviendrais toujours vers elle. Car je ne trouve pas mon chemin sans sa lumière.

— Qu’importe ce qu’il se passe, tu peux m’en parler si tu le souhaites. Je tiens à ce que tu le saches. Je serais toujours là pour te soutenir, qu’importe ce qu’il se passe.

             Elle acquiesce. Mais je vois bien que je ne l’ai pas convaincue. Son regard est triste et fuyant. Elle fixe le sol d’un air absent. Je pousse un soupir et finis par enfouir sa tête dans mon torse. J’embrasse le sommet de son crâne et le caresse, elle se laisse aller dans mon étreinte.

             J’enroule un bras autour de son corps. J’aimerai que nous restions ainsi à jamais.

— Je m’en voudrais d’interrompre ce si charmant couple, cingle une voix d’un air sarcastique que je ne lui connais que trop bien. Ceci dit, j’aime à penser que le… roi a d’autres chats à fouetter. Il serait dommage d’oublier l’état instable de notre royaume pour quelques timides baisers maladroits d’adolescents boutonneux.

             Je regarde le seigneur Livai Ackerman. Ses mains sont jointes dans son dos et son regard de glace est posé sur nos corps entremêlés. Je sais exactement à quoi il pense. Il croit qu’elle me manipule. Que ce Coup d’Etat a été orchestré par elle et elle seule.

             Aussi, pour le convaincre de m’épauler, je vais devoir discuter avec lui. Seul à seul. Sans le Forgeron. Quand bien même cela me coûte de m’amputer de mon meilleur élément pour une discussion si importante.

             Cette dernière se redresse pourtant, s’écartant de mes bras. Elle est intelligente. Très intelligente. Je ne suis donc pas vraiment surpris de la voir marcher jusqu’à la porte, dépassant le noiraud sans un regard pour lui, le menton levé.

             Tout comme moi, elle sait que je dois avoir cette discussion en tête-à-tête avec Livai.

— Vous partez en tournant le dos à votre roi ? s’enquit ce dernier en lui jetant un regard médisant. Vous ferez une bien piètre noble, à cette cours.

— A quoi bon suivre l’étiquette ? Celle-ci est faite pour régir les palais où l’on sait se tenir. Savez-vous seulement vous tenir, Ackerman ?

             Elle ne le regarde même pas quand elle lâche ces mots, ouvrant la porte et s’en allant. Celle-ci se referme dans son dos et nous nous retrouvons seuls. Le noiraud esquisse un rictus amusé. Je sais que, même si cela lui coûterait de l’admettre, il apprécie le Forgeron.

             Du moins, il appréciait son caractère jusqu’à ce qu’elle fomente un Coup d’Etat.

— Touché, fait-il remarquer.

— Le gouvernement de Camelot n’existe pas sans l’appui de sa légendaire table ronde. L’inverse aussi. Je suis le nouveau gouvernement. Vous êtes le seigneur le plus influent de la table. Nous avons un intérêt commun.

             Ackerman acquiesce. Il aime quand les gens vont droit au but. Je l’ai appris après des années à servir sous ses ordres. Mais il ne répond pas tout de suite, lançant un regard à travers les vastes fenêtres pour observer les jardins royaux.

             Je n’aime pas ces derniers. Surtout car les voir rappelle à (T/P) qu’elle n’est pas libre.

— Je savais qu’Erwin était un enfoiré. Je l’ai toujours su et comme votre ami et particulièrement vulgaire, Jean, l’a si bien fait remarquer lorsqu’il croyait que je ne l’entendais pas « ce Coup d’Etat m’en a touché une sans faire bouger l’autre ».

             Je regarde Ackerman, attendant le « mais ». Je sais qu’il y a un « mais ». Il y a toujours un « mais ».

— Mais mon problème n’est pas qu’Erwin quitte le trône et que vous le remplaciez. Non. Vous feriez un excellent souverain. Pas seulement parce que je le dis. Mais parce que les dieux le disent, lance-t-il en désignant l’arme à ma ceinture. Seulement elle ne s’appelle pas le Forgeron pour rien et je ne peux m’empêcher de me dire que c’est étrange qu’une femme capable de forger des épées vous épaule quand vous proclamer avoir dégainé Excalibur.

— Il s’agit réellement d’Excalibur. 

— Oh, mais je le sais. Mais cela ne m’empêche pas de me dire que vous êtes en train de vous faire manipuler comme le garçon amoureux que vous êtes, le gars rendu con par la vision d’une femme puissante sûre d’elle.

             Ses yeux gris se plongent dans les miens avec brutalité.

— Je ne vous laisserai pas foutre en l’air ce royaume pour un béguin.

— Elle ne me manipule pas, je grogne.

— Je n’en sais rien.

             Il tire un rouleau de parchemin de sa poche et me le lance. Je le rattrape au vol et déglutis en le déroulant. Il s’agit d’un contrat magique. Que nul ne peut rompre. Je lis celui-ci rapidement et mon cœur se fige dans ma poitrine.

— Votre contrat stipule si elle tente quoi que ce soit pour s’emparer du pouvoir, je la mettrais en prison ou elle mourra ?

             Je regarde Livai qui acquiesce.






















— Signez-le et vous obtiendrez la loyauté de la Table Ronde.












































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vous sentez
le truc
arriver ?
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