🌻 Chapitre 22- Le mur des légendes

Ça fait plusieurs jours que la scène du dîner de Thanksgiving se joue en boucle dans ma tête.

Je revoie encore le regard affligé de Taylor et de ma tante, alors que l'ambiance venait tout juste de se détendre entre nous trois, suite à la dégustation de Rosa de nos frites de patates douces. Après la dernière remarque de ma tante, le silence s'est fait jusqu'à la fin du repas. Je commençais tout juste à apprécier le fait de passer du temps avec elle sans que nous nous prenions la tête, et voilà qu'un autre mystère refait surface.

Alors que je suis allongée sur mon matelas avec mon livre La Double identité d'Adèle posé sur mon ventre, je ne cesse de me demander qui est cette fameuse Letitia évoquée pendant la soirée de Thanksgiving.

-Faudrait peut-être que je leur demande, je murmure toute seule. Sauf que vu la tête qu'elles tiraient toutes les deux, je pense pas que ça leur évoquerait de bons souvenirs. Alors peut-être que si j'en parle à Joseph... ouais, peut-être qu'il pourrait m'éclairer. Mais avant ça, je termine ma lecture d'Adèle.

Sitôt dit, sitôt fait. Je me replonge dans une énième lecture pour terminer cette histoire plus que prenante. Il n'empêche que ça fait vachement de bien de retrouver l'univers d'un auteur, surtout quand ce dernier vous fait voyager à travers ses mots. Et comme à chaque lecture, je ne vois absolument pas le temps passer, si bien que je suis presque déçue lorsque je vois la dernière page arriver à grands pas.

-Purée non... non..., je répète tandis que j'hésite à tourner la page me séparant de la fin de l'histoire. Non, non, non, non, non... faut pas que ça finisse.

Est-ce c'est comme ça que les fans de saga réagissent lorsque leur lecture touche à sa fin? Si c'est ça, qu'est-ce que je les comprends...

Finalement, c'est ma curiosité naturelle qui finit par prendre le dessus, et c'est presque la mort dans l'âme que je termine les aventures d'Adèle Ribaucourt, alias l'héroïne qui ignorait ses véritables origines.

-Pourquoi toutes les bonnes choses ont une fin?, je demande sans attendre de réponse particulière.

Une chose est sûre, c'est que je vais avoir du mal à trouver un livre aussi emballant que celui-là. Je pense alors faire un tour parmi les autres œuvres littéraires de l'auteur de cette histoire, à savoir Justin Davidson. Ce mec doit avoir une carrière de fou malade, c'est certain.

Alors que je tourne la dernière page du livre, je tombe sur un message écrit au stylo bille, où il est marqué ceci:

𝐵𝑜𝓃 𝒶𝓃𝓃𝒾𝓋𝑒𝓇𝓈𝒶𝒾𝓇𝑒 𝒶̀ 𝓉𝑜𝒾, 𝐿𝑒𝓉𝒾𝓉𝒾𝒶 𝒥𝑜𝓃𝑒𝓈! 𝐵𝑜𝓃𝓃𝑒 𝓁𝑒𝒸𝓉𝓊𝓇𝑒 ☆

𝒥𝓊𝓈𝓉𝒾𝓃 𝒟𝒶𝓋𝒾𝒹𝓈𝑜𝓃

Cette découverte me met dans un état à mi-chemin entre la surprise et l'incrédulité, tandis que je ferme la quatrième de couverture en m'asseyant précipitamment.

Letitia Jones.

A nouveaux, des milliers de questions se fraient un chemin jusqu'à mon cerveau à une telle vitesse que je me sens obligée de placer une main sur mon front, comme si ma tête allait exploser. Cette Letitia Jones a forcément un lien avec ma tante et ma cousine, puisqu'elles ont le même nom de famille, et que ce livre, qui lui est dédicacé, se trouve dans cette maison. Je sais que tante Rosa a divorcé, il y a quelques années. Mais sur sa page Wikipédia, il n'a pas été fait mention des enfants qu'elle a pu avoir avant son divorce. Est-ce qu'elle a eu un autre enfant après cela? Est-ce que Taylor et cette enfant, Letitia, seraient alors demies-sœurs? Ou est-ce qu'il s'agit d'une parente? Et pourquoi je n'ai jamais entendu parler d'elle jusqu'au repas de Thanksgiving?

Je secoue ensuite la tête face à toutes les théories que je commence à élaborer.

-Ça fait trop d'infos, là, bon sang...

Je repense alors au visage affligé de ma tante et de ma cousine, et cette phrase: Letitia aurait sûrement aimé, elle aussi.

-Elle aurait sûrement aimé..., je répète en murmurant.

Soudain, une autre théorie me fait l'effet d'une gifle. Si l'évocation du souvenir de cette Letitia fait à ce point mal à ma tante Rosa et à Taylor, c'est qu'il a dû lui arriver quelque chose. Quelque chose de grave.

Oh bon sang... est-ce qu'il se pourrait qu'elle soit...?

Je secoue une nouvelle fois la tête. Il se pourrait que je sois liée à cette fille d'une façon ou d'une autre. Nous pourrions très bien être cousines, elle et moi. Et si tel était le cas, il faut que j'aie plus d'informations à son sujet, car il semble bien que nous ayons les mêmes goûts littéraires.

Seulement, bien que je ne me l'avoue pas encore, ça m'effraie un peu de devoir chercher à en savoir plus sur elle, et sur ce qu'il en est advenu. Oui, moi, Joyce Martinez, je flippe un peu à l'idée de découvrir quelque chose qui pourrait potentiellement me déplaire. Car visiblement, l'absence de cette Letitia a l'air de peser sur le moral de Rosa et de Taylor, et il y a forcément une raison à cela. Et, honnêtement, je ne vois pas pourquoi cela ne vaudrait pas non plus pour moi qui vis à présent chez elles. D'autant plus que, maintenant que j'ai appris son existence, je ne peux pas faire semblant de n'avoir rien vu. Je ne peux pas faire comme si je n'avais rien découvert.

Un autre flashback me vient alors. Il s'agit de la première fois que Taylor et moi avons pris le petit-déjeuner ensemble. Lorsque je lui ai montré quel livre j'étais en train de lire, à savoir La Double identité d'Adèle, son visage est devenu de plus en plus triste. Cette fois, je suis convaincue que cela avait un rapport avec ce bouquin.

Je pousse un gros soupir. Non, je ne peux plus faire semblant de n'avoir rien vu. Il faut impérativement que je sache ce qui se cache derrière tout ça. Même si je sens, au fond de moi, que ça ne me plaira pas du tout.

Je descends de mon lit à étage, avec ma décision fermement prise, même si ça me file carrément la pétoche. Une chose est sûre, c'est que j'en parlerai à Joseph. Avec lui, je me sentirai plus sereine.

Alors que je m'apprête à quitter ma chambre, je tourne mon regard vers le mur en face de mon bureau, sur lequel sont posés quatre posters. Un avec Martin Luther King, un avec Lady Diana, un avec Nelson Mandela et un autre avec... Jeanne d'Arc. Original comme choix, mais on ne choisit pas les personnes qu'on admire naturellement.

Il s'agit là de mes héros de la vie réelle, qui constituent une vraie source d'inspiration pour moi. Pourquoi? Parce qu'un jour, un moment donné, ils se sont levés pour défendre des valeurs qui leur étaient chères et qu'ils ont voulu faire entendre au monde entier. Tous venaient de milieu différent, ils venaient d'époque et de pays différents, ils ont parfois fait face à différente réalité, et c'est pourtant la chose qu'ils avaient en commun. Ils voulaient contribuer à rendre leur monde meilleur. Et si ce sont ces quatre personnalités que j'ai choisi de mettre sur mon mur, c'est pour des raisons bien particulières.

Pour Martin Luther King, c'est parce que c'est tout simplement le boss de l'ultime. C'est un argument suffisamment convaincant, je pense. Mais je me souviens surtout de cette citation tirée de son célèbre discours intitulé I Have A Dream. Je rêve que mes quatre enfants vivront un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la valeur de leur caractère. Pour moi qui ai souvent été sujette à certaines remarques désobligeantes à cause de mes origines mixtes, autant dire que ça me booste mon moral.

Pour Lady Diana, c'est tout simplement parce qu'elle a eu le courage de faire ce qu'aucun membre de la famille royal n'a fait avant elle, à savoir tendre la main aux personnes atteintes du sida, ou qui viennent de milieux différents. Elle n'a pas hésité à briser les barrières ni à casser les codes, quitte à se brouiller avec la monarchie. Ils voulaient qu'elle rentre dans le moule et qu'elle se fonde dans la masse, mais elle, elle a bien compris qu'on ne peut pas se fondre dans la masse quand on est fait pour briller.

Pour Nelson Mandela, c'est parce qu'il est pour moi un modèle de persévérance. Parce que, mince, il a passé presque trente ans en taule sans avoir jamais renoncé à ses idéaux. Il aurait eu toutes raisons d'en vouloir à ceux qui l'ont accusé de simplement vouloir l'égalité pour tous, mais au lieu de cela, ses trente années de captivité l'ont préparé à être le dirigeant que l'on connaît tous aujourd'hui. Il est également à l'origine de nombreuses citations désormais connues, mais ma préférée reste celle-ci: Cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse.

Et enfin Jeanne d'Arc! Celle qui m'a appris que l'on était jamais trop jeune pour changer le cours des choses, ni même pour entrer dans l'Histoire. Et ce même en venant d'un milieu particulièrement humble. On aura beau vous dire que vous êtes trop jeune, que vous n'êtes pas assez qualifié pour faire telle ou telle chose, que de toute façon ça ne marchera jamais, quand vous êtes convaincu d'une chose, vous faîtes tout pour parvenir à votre but. Et ça, c'est une chose dont les gens se souviennent même après leur mort.

Le fait de me rappeler des exploits de ces personnes me donne, étrangement, une bouffée d'audace, et c'est en étant sûre de moi que je quitte ma chambre, tout en étant persuadée que je survivrai aux explications que j'attends de la part de Joseph.



Hey, j'espère que ce chapitre vous a plu ^^

Comme vous le voyez, on n'est pas encore dans la partie hyper dure à digérer mais ne vous en faîtes pas, ça ne va plus tarder...


Concernant la réflexion de Joyce sur les fans qui terminent une saga, est-ce que vous vous y reconnaissez ? (o‿∩)

Pour ce qui est de l'auteur du livre qu'a lu Joyce, Justin Davidson... eh bien, il apparaît dans une autre de mes histoires. Eh oui, j'ai fait un petit crossover , c'était tentant.

Sur ce, je vous dis à la prochaine !

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