5 - Pluie de vérité

« Lorsque l'amour, entre nos doigts, comme le sable glisse »

2 ans et demi plus tôt ~

Il était tard. Katsuki était bien au courant des potentiels risques de sanctions qu'il encourait à parcourir le stade de l'internat à cette heure-ci. Mais il avait l'irrémédiable besoin de détendre ses nerfs et sa peine. Les larmes qui s'étaient écoulées sur ses joues avaient, pour ce qui allait sans doute s'avérer le restant de la soirée, marqué ses yeux d'un rouge de chagrin, de rage, de peur et d'incompréhension.

La brise d'été caressait ses mèches blondes. Il pensait à tous les événements qui venaient de se dérouler un peu plus tôt, aux côtés d'All Might et d'Izuku. Les cigales faisaient retentir leur chant en harmonie agréable. Le jeune homme se sentait bercé par leur son alors qu'il exécutait sa marche en rythme sur celui-ci.

Son esprit était alarmé par ces révélations qui venaient tout juste de lui apparaître. Lui et ce nerd venaient de subir une terrible réprimande de la part de leur professeur principal, alors qu'ils s'étaient battus l'un contre l'autre.

Il se sentait quelques peu honteux d'avoir entièrement révélé ses peurs à un idiot comme Deku, mais il connaissait ce dernier depuis assez longtemps pour savoir qu'il n'ouvrirait jamais la bouche sur tout ça.
De toute manière, ses maux avaient un besoin vital d'être extériorisés depuis un long moment, et il valait mieux que ce soit devant lui que quelqu'un d'autre.

Mais un autre son parvint à son ouïe à travers celui des cigales.

Une voix féminine chantonnait une mélodie qui lui était familière, un peu plus loin. Il hésita un instant à faire volte face et demi-tour, pas spécialement désireux de croiser une quelconque âme qui vive, mais décida finalement d'acheminer sa route jusqu'au grand stade. Ce n'était pas lui qui allait se priver d'aller quelque part.
L'explosif aperçu alors une silhouette sur le banc en face du terrain de course qu'il ne reconnu pas instinctivement.

La musique séjournait toujours au sein de ses oreilles, et elles constatèrent que des paroles étaient belles et bien prononcées. Sa voix de crécelle prononçait maladroitement le premier couplet d'une chanson que Mitsuki Bakugou avait imposé à son fils avec un film qu'elle visionnait sans cesse. Le grand blond se remémora ses stratagèmes pour stopper la télévision et faire hurler de rage sa mère. Ça l'amusait.

Comme la pluie nous manque parfois

Un orage aurait plus d'allure

Pour se crier ces choses là

Se jeter ces mots à la figure..  

Elle allait poursuivre la mélodie quand elle perçut sa présence dans l'obscurité.

- Q-Qui est là? Et à ces simples mots, le jeune homme distingua l'identité de celle qui les énonça.

La miss gravité. Tête d'œuf. La suiveuse de Deku. Merde, il ne pouvait pas lui foutre la paix juste une petite heure?

- Bakugou? fit-elle avec étonnement lorsque le grand blond pénétra dans un espace un peu plus éclairé par le ciel, à pas lents et les mains fourrées dans ses poches. Qu'est-ce que -

- La ferme, la coupa-t-il nettement, ayant pour but de ne pas être mentalement dérangé.

Ses pupilles s'étant adaptées au noir de la nuit, il constata ses joues rondes qui rougissaient, mais n'y prêta pas attention alors qu'il parvenait au banc où elle était installée. Elle émit un hoquet de surprise lorsqu'il s'y positionna à ses côtés, mais cet étonnement fut bien rapidement éclipsé par l'intrigue à l'égard des divers pansements et le comportement étrange de jeune homme, qui venait de plonger son visage dans ses mains après s'être assit.

Il avait la jambe tremblante, probablement de nerf, comme aux habitudes que tout le monde lui connaissait parfaitement. Et pourtant, c'était légèrement nuancé cette fois-ci, et elle en ignorait la raison.

- Qu'est-ce qui s'est passé? Pourquoi tu es blessé? le questionna-t-elle sans discrétion en observant ses bras sculptés recouverts de bandages.

- Ça te regarde? Marmonna-t-il dans sa barbe.

- Non, elle soupira, mais tes bras.. !

Elle les désigna lorsqu'il lui adressa un regard agacé.

Par chance pour cette emmerdeuse, il n'avait plus la force disponible pour lutter contre beaucoup de choses ce soir.

- Je me suis battu.

- Quoi?!

- Avec Deku.

- HEEE?

La jeune fille était aussi éberluée par ce qu'il venait tranquillement d'annoncer que par la bonté qu'il avait témoigné à lui répondre sans hurler. Ce n'était pas quotidien à cette boule de rage et d'énergie quotidienne qui se brisait les cordes vocales à chaque verbe.

- Pourquoi? Il va bien? s'aventura-t-elle un peu plus.

- Parce que. Je m'en fou. Tu fermes ta gueule, maintenant? répliqua-t-il sèchement.

Elle gonfla ses joues rosées.

- Je savais que je n'aurai pas droit à plus d'informations, elle fit la moue.

- Tu veux que je te frappe ou tu la fermes? la menaça-t-il de sa voix caverneuse.

Pour toute réponse, elle lui offrit un nouveau soupir, et le silence de la nuit bercé par le chant des cigales reprit à nouveau son cours tranquillisant.

Mais il ne dura guère, entaché dans une nouvelle reprise de cette chanson déprimante qu'elle fredonnait.

Comme la pluie nous manque parfois..

- Tu te fous de ma gueule?! aboya-t-il avec puissance.

- Chhhhhut ! lui indiqua-t-elle. Les robots peuvent venir nous débusquer, je te rappelle.

- Je m'en branle ! Arrête de chanter !

- Mais c'est toi qui est venu t'incruster alors que j'étais là innocemment et seule. Tu assumes, affirma-t-elle sans une once d'hésitation, mais avec un brun de malice au creux de ses lèvres. Ces dernières esquissaient le début d'un sourire à demi éclairé par la lumière lunaire.

- Tch, jasèrent celles de Katsuki.

La jeune fille n'avait pas tort, il aurait pu se recueillir ailleurs, mais c'était en ces lieux qu'il avait prit ses marques pour exécuter toute sorte de réflexion. Que ce soit pour travailler ses exercices physiques, préparer de nouvelles attaques grâce à son Alter, réviser ses leçons quand il n'avait pas entièrement tout retenu en classe - ce qui s'avérait rare  - ou tout simplement pour ce genre de moments. Ces moments où les questions et tracas jaillissaient de tout part et qu'il avait l'urgence de les laisser reposer et flotter dans l'horizon quelconque de ce stade hideux.

- Si au moins tu chantais pas de la merde.

- Tu ne connais même pas, elle roula ses pupilles noisettes jusqu'au ciel. Le vent valsait avec ses mèches volumineuses aux ombres brunes.

- ..Comme le soleil nous tue. C'est le vers d'après, non? Alors me traite pas d'ignare, sale gamine aux goûts merdiques, l'injuria-t-il.

Elle l'étudia avec stupéfaction.

- Tu.. connais? elle était incapable de se représenter un Katsuki qui aurait connaissance d'une variété de chanson aussi peu populaire et très mélo-dramatique.

- Ma mère regardait tout le temps ce film, et elle me cassait les pieds avec cette chanson. Pas compliqué de la retenir, lui offrit-il en gage d'explications.

Pour toute réponse, elle le gratifia d'un sourire aux allures timides mais agréablement étonnées.

- Deku doit être le genre de femmelette qui mate ce genre de truc, poursuivit-il dans un rictus moqueur. Cela lui était apparu dans un aspect amusant alors même qu'il n'avait pas le moindre souhait de penser à ce nom, ni à celui d'All Might pour le restant de la soirée.

- Non, il ne connaît que les films de super-héros, et arrête d'être aussi méchant, le défendit-elle.

- Raté, mais ça aurait pu, continua-t-il sans plaisanterie.

À sa confusion, elle émit un petit rire discret.

- Quoi? cracha-t-il.

- Rien, lui fit-elle alors qu'elle apaisait son léger esclaffement.

Elle qui n'était guère accoutumée à la présence du jeune homme, ce moment lui apparaissait distrayant et plutôt plaisant, même si elle avait cerné les différents degrés du caractère de celui-ci.

- Tu ne vas pas me dire pourquoi vous vous êtes battus? tenta-t-elle tout de même, incapable de dissimuler sa curiosité.

- Bordel. Il m'insupporte, tête d'oeuf, voilà pourquoi.

Evidemment, il n'allait pas lui évoquer le One For All et la transmission du pouvoir de son idole à ce nerd de merde qui avait décidé d'en faire son ultime successeur.

- Menteur, bouda-t-elle en gonflant à nouveau ses joues. Et arrête, j'ai un prénom.

Un problème se présenta à lui.

- C'est quoi déjà? la questionna-t-il sans aucune once d'ironie.

- Sérieux ! geint-elle un peu trop bruyamment.

- La ferme !

Elle lâcha un dernier soupir entremêlé à un rire coupable, et encra ses yeux noisettes parsemés d'or dans les siens, un fond d'amusement dans les traits de son visage rond.

- Ochako Uraraka, prononça-t-elle doucement de sa voix suave. Je te le redis une dernière fois, tâche au moins de t'en souvenir, cette fois-ci.


Aujourd'hui ~


- Tu es bien amoché.

Le timbre de sa voix n'avait pas déraillé d'un seul octave depuis le nombre de jours qui s'étaient lentement écoulés depuis ce temps-là. Ce temps où lui, et la totalité de ses camarades de la classe A, étaient persuadés de la saisir parfaitement, tant elle apparaissait avec une transparence morale et enfantine aux yeux de tous. Juste une gamine, elle était juste une gamine, avec des rêves, des ambitions, qui souhaitait se procurer une place parmi les plus prestigieux des héros. Le cœur de Katsuki, qui s'était brusquement précipité dans une course folle, lui pesait, et sa vision déjà floue semblait se troubler davantage devant ces iris noisettes si familiers. Ce yeux qu'il avait aperçu autrefois de si près.

- Encore une fois, murmura-t-elle avec la même lueur taquine qu'auparavant.

Elle s'était penchée vers lui, lui qui semblait aujourd'hui si faible, attaché sur cette chaise, sans défense, à l'agonie.

Et pourtant, il la fixait de ses yeux de frénésie, devant ces mots qu'elle osait prononcer si normalement.

Et la haine surpassa la mélancolie. Il sentait les flux de toute sa rage, de tout le désordre, de tous les hurlements, de tous les pleurs, de toutes les morts, de tout ce qu'elle avait gâché, remonter vivement et violemment en lui à la surface en un mélange disgracieux. Ce dernier ne demandait qu'à exploser à la figure de cette traîtresse.

Katsuki lui témoigna l'unique geste qu'il était apte à exécuter dans son ultime faiblesse, et lui cracha à la figure avec tout le mépris qu'il avait emmagasiné pour elle depuis tout ce temps.

Son unique réaction fut de s'éloigner en essuyant sa salive avec une mine compréhensive.

Non. Non.

Elle n'avait pas le droit.

Bordel de merde.

Qu'elle n'ose même pas témoigner une once de tristesse.

Elle n'en avait aucunement la possibilité.

- J'imagine que je l'ai mérité, convint-elle sans une trace d'animosité.

Pas après tout ce qu'elle avait commit.

Pas après tous les pleurs qu'elle avait provoqué.

Elle l'étudiait avec une certaine précision et une satisfaction qui n'était guère la bienvenue.

Putain, qu'elle ôte ce visage qu'il avait chérit si fort de sa peau, qu'elle se l'arrache, il ne voulait pas le voir. Pas le voir sur elle, pas sur cette putain de meuf, cette putain de vilaine, pas sur cette putain de meurtrière.

- Tu ne savais même pas comment elle s'appelait, Katchan, ne fais pas l'hypocrite, lui lança-t-elle comme s'il était en faute.

Il revit l'imbécile électrique sous la pluie. Il revit l'émission qui interrogeait les sentiments de la famille de la déchue. Il revit la maussade humeur de ses camarades à chaque saison des neiges. Il revit la culpabilité de Deku, qui s'en était toujours éperdument voulu d'avoir été si aveugle. Il revit l'enterrement, sous les flocons fondants qui s'imprégnaient sous les peaux. Il revit encore l'imbécile électrique, qui avait, durant une bien trop longue période, refusé de s'éloigner de la tombe de celle que cette traîtresse leur avait enlevé, alors même qu'elle était la prétendue amie de sa victime. Il revit Denki noyé dans l'accablement, larmoyant chaque seconde passée là, nommant son prénom maintes et maintes fois, en quête d'une réponse qu'il n'obtiendrait plus jamais, de la part de cette fille aimée qu'il ne reverrait plus.

Ses mains tremblantes.

- Tu es la pire des garces, parvint-il à articuler. La pire..

Elle esquissa un mince sourire sur ses joues. Voilà pourquoi Ochako ne voulait plus le recroiser.

La jeune femme avait assassiné l'une de ses camarades. Une amie, qui plus est.

Comment aurait-il pu en être autrement, de toute façon?

Et ce qui était accomplit était impossible à réparer.

Kyouka Jirou ne reviendrait pas.


Comme la pluie nous manque parfois

Un orage aurait plus d'allure

Pour se crier ces choses là

Se jeter ces mots à la figure

Comme la pluie nous manque parfois

Comme le soleil nous tue

Comme ses rayons nous semblent froids

Quand on ne s'aime plus  



~~


Helloooo !

Je me rend compte que je n'écris presque que du tragique en ce moment, les petits flashbacks vont me faire du bien parce que je veux un peu de mignonnerie dans ce monde noir 😭

Surpris par la vérité, hein?

Evidemment, elle n'a pas fait ça sans raisons, vous vous en doutez bien.

A vous de poursuivre pour savoir pourquoi, à moi d'écrire pour vous éclairer sur ça..

J'ai écris ce chapitre très rapidement, il est peut-être un peu nul et le vocabulaire est sûrement moins soutenu que d'habitude, mais j'ai pris plaisir à l'écrire ^^

J'espère qu'il vous aura plu, je pense qu'il y a aura des flashbacks presque dans tous les chapitres pour que vous puissiez reliez le passé au présent.

J'avoue que la chanson qui traîne tout au long de ce chapitre m'a pas mal aidé pour l'écriture, j'écoute cette musique en boucle depuis que j'ai vu La belle personne, du coup je voulais l'inclure :)

N'hésitez pas à me donner vos avis, ça me fait toujours extrêmement plaisir de les lires !

Je vous embrasse ❤

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