𝐓𝐡𝐞 𝐈𝐦𝐦𝐨𝐫𝐭𝐚𝐥𝐢𝐭𝐲 𝐎𝐟 𝐓𝐡𝐞 𝐂𝐫𝐚𝐛 - 𝐶𝑎𝑟𝑙𝑜𝑠 𝑎𝑛𝑑 𝐿𝑎𝑛𝑑𝑜











— 𝐓𝐇𝐄 𝐈𝐌𝐌𝐎𝐑𝐓𝐀𝐋𝐈𝐓𝐘 𝐎𝐅 𝐓𝐇𝐄 𝐂𝐑𝐀𝐁 —

𝐶𝑎𝑟𝑙𝑜𝑠 𝑆𝑎𝑖𝑛𝑧 𝑎𝑛𝑑 𝐿𝑎𝑛𝑑𝑜 𝑁𝑜𝑟𝑟𝑖𝑠





















Chapitre 17 : Bruised Me Heart

- J'ai été sauvé par le bleu de tes yeux, par la douceur de ton sourire, la mélodie de ton rire. J'ai été sauvé comme un naufragé assoiffé de terre, comme une oasis au cœur du désert, comme un prisonnier retrouvant la lumière.

Ce sont ces mots, les maux, qui consument le cœur de Carlos à chaque fois que son regard effleure la silhouette de Lando.

Ces paroles qu'il se meurt de garder contre son cœur et trouve aujourd'hui, enfin, le courage de chuchoter, de ses lèvres tremblantes, à la fois craintives et libérées, à son coéquipier.

- Carlos je..., balbutie son cadet, incapable de trouver ses mots.

Face à lui, le garçon au regard outremer semble totalement déstabilisé, ses joues prennent une délicate teinte rosée qui tire un peu plus vers le rouge à chaque seconde qui s'écoule et ses mains s'agitent, agrippent les bords de son sweat-shirt et tire sur les coutures.

L'Espagnol ne retient pas le sourire attendri qui étire doucement les coins de ses lèvres et secoue la tête doucement, attendri. Il a conscience de le prendre au dépourvu, lui-même ne parvient pas tout à fait à réaliser les mots qui se sont échappés de son cœur à peine quelques secondes plus tôt pour venir s'imprimer dans l'air autour d'eux.

Il ne veut pas le presser, n'attend même pas vraiment de réponse à ses déclarations maladroites, mais au fond de lui, Carlos sait qu'il ne pourra pas garder ce secret plus longtemps. Pas après les derniers événements.

- Tout va bien, Lando, il souffle avec affection. Je ne te demande rien, je ne te demanderais jamais rien, je voulais simplement que tu saches que tout ça, ça compte pour moi. Tu comptes pour moi.

Avec délicatesse, sa main effleure le bras gauche de l'Anglais, la pulpe de ses doigts brossant les contours de l'attelle qui protège son membre douloureusement impacté par le crash.

Inconsciemment, les traits de l'Espagnol se crispent alors que les souvenirs de la journée lui reviennent en mémoire. Devoir se tenir debout au milieu de la zone média et assister au crash sans avoir la moindre information, obligé de maintenir une posture neutre pour les journalistes alors qu'une tempête se déchaîne à son for intérieur et la sensation d'être dévoré par la peur, la terreur qu'il soit arrivé quelque chose à Lando.

L'anxiété menace de reformer une boule étouffante dans le fond de sa gorge quand Carlos passe la langue sur ses lèvres, irritées et rouges d'avoir été trop mordues. Décontenancé par la puissance de ses sentiments, il secoue la tête pour tenter de reprendre le dessus.

- Tout à l'heure, j'ai...j'étais..., il cherche ses mots. L'idée qu'il puisse t'être arrivé quelque chose sans que je n'aie pu te dire, t'avouer ce que je ressens pour toi... j'ai cru que ça allait me rendre fou, il termine avec un pauvre sourire.

Lando continue de le regarder, le souffle coupé, ses prunelles céruléennes bordées de larmes, incapable d'ouvrir la bouche, mais Carlos ne lui en tient pas rigueur. Il ne pourra jamais en vouloir à Lando, c'est comme ça.

Conscient d'être allé plus loin qu'il n'avait jamais osé aller, Carlos esquisse un petit sourire timide, ses doigts pressés contre l'attelle glisse délicatement jusqu'à la main du plus jeune, entrelacent doucement leurs doigts.

- Tu dois être fatigué, il souffle silencieusement. Il faut que tu te reposes, je vais te laisser.

Presque comme il est arrivé, l'Espagnol se retire, extirpant lentement ses doigts de l'emprise de ceux de Lando et se redresse juste assez pour venir poser ses lèvres sur le haut du crâne du garçon, son nez se perdant dans la masse de ses boucles brunes pour lesquelles il a tellement d'adoration.

- Je te vois demain, il sourit une nouvelle fois. Prends soin de toi Lando.

Dans sa voix, résonne l'écho de mots qui ne sont pas encore prêts à être révélés. Sans rien ajouter de plus, Carlos quitte la chambre d'hôtel, laissant derrière lui un Lando bouche bée, visage brûlant et au cœur palpitant.





D'aussi loin qu'il puisse se souvenir, Lando a toujours ressenti de forts sentiments pour son ancien coéquipier, Carlos Sainz.

De la timidité, d'abord, envers cet homme plus âgé, pilote depuis bien plus longtemps que lui et au palmarès impressionnant. L'expression brute du talent d'un homme destiné depuis toujours à gravir sur la plus haute marche du podium et à dominer leur sport de sa virtuosité.

Il se souvient encore, en signant son tout premier contrat chez McLaren, s'être senti intimidé par cet homme qui allait être son coéquipier alors que lui n'était rien d'autre qu'un adolescent à peine sorti de la puberté.

L'admiration ensuite, peut-être teintée d'un peu de jalousie parfois, pour ce coéquipier à qui tout semblait toujours sourire. Lando n'avait pu qu'être admiratif de son talent, de sa capacité à s'adapter et à devenir un membre fédérateur de leur équipe alors que lui peine encore parfois à trouver sa place.

La facilité avec laquelle Carlos l'a laissé s'approcher de lui, l'Espagnol qui n'a jamais tenté de le repousser ou d'élever des barrières entre eux et, au contraire, il lui a ouvert grand les portes de sa vie, de ses amis, de sa famille, permettent à Lando de devenir son ombre, en piste comme dans la vraie vie.

Une amitié forte, dans ce monde rongé par la concurrence et les faux-semblants, l'assurance d'avoir quelqu'un sur qui se reposer, une personne prête à l'écouter sans le juger et avec qui rire de choses que ceux qui ne sont pas pilotes ne peuvent pas comprendre.

Lando a laissé Carlos construire une bulle sécurisante autour d'eux, un cocon loin du carnassier de leur environnement.

L'amour, enfin, de manière incongrue, inattendue, au détour d'une pluie de champagne et rien n'était plus pareil.

Lando a eu beaucoup de mal à accepter ces sentiments, ceux qu'il avait nourris si longtemps, parfaitement inconscient de leur signification, à présent prisonnier d'un amour à sens unique.

Parce que c'est de cela qu'il s'agit, Carlos amoureux d'Isa, en couple avec Rebecca et de Lando et son cœur d'artichaut. Une fable risible dont on devine la fin pathétique dès le premier chapitre.

Alors Lando s'est fait une raison, un amour à sens unique ? Soit. Rien ne l'empêche de le nourrir de son côté sans jamais rien dire, rien tenter, rien espérer et puis peut-être qu'un jour, quelqu'un d'autre viendra ravir son cœur comme l'a fait Carlos, qui sait ?

Et c'est ce qu'il a fait, des semaines, des mois, des années durant, dans le secret de son cœur cadenassé, remplissant ses rêves de « peut-être » et de « si seulement ».

Carlos ne l'aimera jamais ? Lando peut faire avec, après tout, ils sont amis, des amis proches. Si c'est tout ce que Carlos est prêt à lui donner, il s'en contentera. C'est toujours mieux que rien du tout.

Car si la réalité de la vie amoureuse de Lando n'a rien d'un roman à l'eau de rose, heureusement pour lui, la moitié des fans de Formule 1 se plaisent à l'imaginer en couple avec le pilote Espagnol pour qui il se morfond d'amour et à écrire sur le sujet. Des tonnes et des tonnes de fanfictions qui n'attendent que d'être dévorées.

C'est peut-être puéril, étrange ou pathétique, mais c'est ce qui fait du bien à son cœur et puis de toute façon, lire des fanfictions Carlando n'a jamais fait de mal à personne alors pourquoi n'aurait-il pas le droit de les lire lui aussi ?

Tout ira bien, pense Lando quand il ressent le besoin de se rassurer sur sa petite passion coupable. Tout ira bien, ce n'est qu'une fanfiction et puis de toute façon, personne ne le saura jamais.

Parce qu'après tout, qui pourrait imaginer que le plus grand lecteur de fanfiction Carlando de Wattpad n'est autre que Lando Norris lui-même ?





Chapitre 4 : Woking Working

Adossé à la porte de la salle des simulateurs, Carlos à les bras croisés sur le torse et la tête appuyé sur le montant en métal, le regard pensivement fixé sur son jeune coéquipier en pleine session.

Les derniers analystes ont quitté la salle de supervisons au-dessus du simulateur il y a déjà quelques heures, laissant Lando s'exercer seul, collectant autant de données que possible. Distraitement, l'Espagnol observe l'heure sur la montre à son poignet. À cette heure si, il est fort probable qu'ils soient les derniers présents dans cette partie du bâtiment, les horaires de bureau classiques étant passés depuis longtemps.

Pourtant, il semblerait que Lando, lui, ne voit pas le temps passé, concentré au possible sur les courbes et les sections du circuit de Barcelone qui défilent sur l'écran géant fasse à eux.

Le Britannique n'a même pas remarqué la présence silencieuse de son coéquipier pourtant à quelques pas seulement de lui. Carlos secoue doucement la tête devant l'acharnement de son coéquipier, un petit sourire amusé sur les lèvres, avant de tourner les talons et de quitter la pièce.

Vaguement ennuyé de ne pas avoir trouvé de distraction comme il l'espérait avec Lando, il se retrouve tout seul dans le couloir vide et cherche du regard quelque chose pour s'occuper.

Il ne peut pas partir maintenant après tout, pas quand le chouchou de Zak est presque littéralement en train de s'épuiser à la tâche dans le simulateur.

Les mains dans les poches, une expression lasse plaquée sur le visage, il longe le couloir sans réelle destination quand son regard chocolat accroche l'écriteau collé sur la porte de la salle de supervision de la salle de commande du simulateur et un sourire mutin étire ses lèvres.

Sans y réfléchir à deux fois, le brun pousse la porte et monte paresseusement les quelques marches qui le séparent du plateau de commande. Carlos surplombe maintenant Lando et sa session de conduite, sous lui, la tête de son cadet s'agite pour suivre les virages et répondre aux paramètres du simulateur.

L'Espagnol prend le temps d'admirer les performances du plus jeune, avant de presser lentement le bouton de la radio :

- Hey, il souffle de sa voix la plus grave. Tu serais pas un pit stop de Ferrari ? Parce que mon cœur s'arrête à chaque fois que t'approches.

Carlos regarde avec satisfaction la monoplace virtuelle faire une embardée sur le circuit et Lando se contorsionner dans son baquet pour tenter de l'apercevoir sans y parvenir, tirant un petit rire au plus vieux.

- Carlos ? Sa voix grésille dans la radio.

- Touché, il répond dans un Français impeccable.

La monoplace retrouve une trajectoire normale sur la piste, mais bien moins rapide que précédemment, révélateur du manque de concentration du pilote aux commandes.

- Tu m'as fait peur, la voix de Lando sonne faussement agacée. Je croyais que j'étais tout seul.

- Tu n'es pas le seul à faire des heures sup pour impressionner le patron, ricane l'Espagnol.

- Je n'essaie pas d'impressionner Zak, sa voix résonne, boudeuse.

- Bien sûr que non, il lève les yeux au ciel. Tu devrais prendre légèrement à droite du point de corde dans ce virage-là, ça te donnera une meilleure récupération à la sortie pour prendre le prochain.

- Tu essaies de m'envoyer dans le mur ? La voix de Lando retentit dans la salle, pleine de défi.

Le plus âgé laisse échapper un petit rire amusé avant d'appuyer de nouveau sur le bouton de la radio.

- Je te prodigue un conseil, Muppet, tu sais, ce truc que font les coéquipiers ?

Le Britannique ne répond pas immédiatement, mais le rictus vainqueur de Carlos ne fait que s'accentuer en constatant qu'il suit sa recommandation et gagne quelques précieux centièmes sur son chrono.

- Muppet ? La voix de Lando résonne dans la radio.

- C'est ton surnom, il approuve. Basé 50% sur ta taille et 25% sur tes cheveux.

- Je ne suis pas sûr d'aimer, grogne l'autre. À quoi correspondent les derniers pourcents ?

Le sourire de Carlos est à présent immense sur ses lèvres alors qu'il ricane dans le micro :

- Sur le fait que j'espère encore que ta voix mue un jour.

Le brun a tout juste de temps de s'écarter des haut-parleurs avant que les jérémiades du plus jeune ne lui grillent les tympans. Il lui laisse quelques secondes pour se plaindre avant de reprendre la parole.

- Dépêche-toi de me terminer ce tour au lieu de te plaindre, il rit. J'ai faim et il y a un restaurant Italien pas très loin qui vient d'ouvrir.

La réponse met quelques secondes à venir.

- Tu ne veux pas que l'on reste ici ?

- Et manger ces horribles sandwichs à l'œuf et au concombre qu'ils servent à la cafétéria ? Il s'offusque. Autant démissionner tout de suite.

Carlos croise les bras sur son torse, physiquement outré par la possibilité d'ingérer l'une de ces abominations que les Anglais appellent repas.

- Plus, il ajoute. Tu as largement dépassé ton temps d'écran pour aujourd'hui Muppet, ta maman serait fâchée si elle savait que je t'ai laissé abîmer tes jolis yeux sur l'écran toute la soirée.

Sans prendre le temps d'attendre une réponse de son coéquipier, Carlos tourne les talons et quitte la salle de contrôle pour retourner dans le couloir. Tranquillement, il trottine jusqu'à la porte du simulateur et s'adosse au mur opposé et sifflote un air de musique à la mode, attendant patiemment.

Quelques minutes plus tard, lui donnant raison, Lando passe la porte, son sac sur le dos. Et si Carlos se retient de faire un commentaire sur les joues rouges du bouclé, il n'est pas aussi doué pour dissimuler le rictus amusé qui étire ses lèvres.





La toute première fois que Lando a posé les yeux sur une fanfiction, il s'agissait d'une blague de son meilleur ami, Max.

Évidemment, Lando sait ce qu'est une fanfiction, c'est un sujet qui revient de temps à autre entre pilotes lorsque l'une d'entre elle fait un carton ou est suffisamment célèbre pour parvenir jusqu'aux oreilles des principaux intéressés via les réseaux sociaux.

Il ne sait jamais vraiment attardé sur la question parce que, eh bien, c'est toujours un peu étrange de savoir que des inconnues écrivent des romans complets autour d'eux, les mettant en scène et en leur écrivant des aventures et des caractères parfois on ne peut plus éloignés de la vérité.

C'est encore plus déconcertant d'imaginer que des adolescentes puissent l'imaginer en train d'avoir des relations sexuelles avec leur personnage ou pire, avec la moitié de la grille de formule 1.

Rien que le fait d'y penser suffit à lui donner des frissons d'horreur.

Donc quand Lando pose pour la première fois les yeux sur une fanfiction ayant pour personnages principaux Carlos et lui-même, sa première réaction est de rougir jusqu'aux oreilles.

Rougir parce qu'évidemment, Max sait pour le monstrueux crush qu'il éprouve pour Carlos. Après tout, il n'existe pas de monde dans lequel Max n'est pas la première personne que Lando appelle en comprenant qu'il y a peut-être plus qu'une simple amitié dans la manière dont il pose les yeux sur son coéquipier.

Et comme Max est un meilleur ami avec un grand A, sa première réaction n'est pas de consoler Lando pour son amour à sens unique voué à l'échec avec son coéquipier plus vieux de cinq, mais plutôt, comme tout meilleur ami qui se respecte, de se foutre copieusement de sa gueule et de trouver la première fanfiction avec un nom étrange pour lui envoyer, associé à un « au moins un Lando qui y arrive » à peine blessant.

Le Britannique, debout dans sa Driver Room, encore trempé de sueur et champagne de son tout premier podium en Formule 1 ne peut que se tenir là, soufflé par l'audace de son prétendu pote, qui ne lui sert à rien d'autre qu'à lui planter des couteaux dans le dos.

Un soupir désabusé s'échappe de son sourire narquois et Lando secoue la tête, propulsant des gouttelettes partout dans la pièce avant de se laisser tomber dans le canapé. Il devrait sans doute se précipiter pour prendre une douche et enfiler une tenue pour aller fêter ce premier pas dans sa carrière de pilote et pourtant, il est rattrapé par une vague de lassitude soudaine qui le cloue sur place.

Les muscles de ses jambes tremblent, ses paupières sont lourdes, mais il est incapable de fermer les yeux. Il ne se rend pas compte de ce qu'il vient d'accomplir, la première course de la saison, son premier podium, c'est un moment important, décisif et pourtant, il ne ressent que l'épuisement d'une course et la pression écrasante qui refuse de quitter ses épaules.

En désespoir de cause, il clique sur le lien de cette chose, cette histoire, fanfiction, que lui a envoyée Max pour se moquer, les sourcils remontés haut sur son front, prêt à fermer le lien au premier signe de fantasme étrange ou à la première scène gênante.

Blasé, il lit en diagonale le résumé de l'histoire et fronce vaguement les sourcils devant le nombre de lectures. Autant de gens suivent les romances imaginaires de deux pilotes de Formule 1 ?

Les premières lignes ont le mérite d'être bien écrites, sans faute d'orthographe et relativement fluide, ce n'est pas aussi écœurant que ce qu'il imaginait. Il faut quelques paragraphes à Lando pour comprendre que l'histoire s'écrit du point de vue de Carlos et l'idée lui fait hausser les sourcils de curiosité. Le Britannique se demande à quel point la version fictive de l'Espagnol se rapproche de la réalité.

Inconsciemment, Lando se laisse glisser un peu plus profondément dans le canapé, adoptant une position plus confortable pour lire. L'histoire commence à leur arrivée à tous les deux au sein de McLaren, l'auteur se perd un peu et la description de Woking n'est pas très fidèle, mais globalement, c'est plutôt bon. Carlos y est décrit comme un charmeur sûr de lui et taquin envers son rookie de coéquipier.

La façon dont il est décrit, en revanche, tire un rire franc au pilote Britannique. Le Lando de l'histoire est décrit timide, presque enfantin, un peu comme un chiot perdu qui ne demande qu'à attendrir son entourage. Un reniflement amusé échappe à Lando tandis que son pouce balais l'écran, l'histoire passant automatiquement du prologue au premier chapitre.

- Muppet ! La porte de sa driver room s'ouvre en grand. T'es pas encore prêt ? Qu'est-ce que tu fais ?

Lando sursaute violemment, prit la main dans le sac et verrouille précipitamment son téléphone, s'attirant un regard inquisiteur qui n'a rien loupé de la scène.

- Carlos ! Il s'exclame, rouge de gêne. On ne t'a jamais appris à toquer aux portes ?

Face à lui, son coéquipier hausse un sourcil, intrigué par la soudaine gêne de Lando qui a définitivement quelque chose à cacher. Curieux, il s'adosse au montant de la porte et croise les bras sur sa poitrine avant d'incliner la tête avec un air intéressé.

- C'est toi qui me reproches de ne pas toquer aux portes, il pointe un doigt en direction du plus jeune. Alors que c'est à cause de toi que l'équipe a été obligée d'installer des verrous partout pour t'empêcher d'entrer ?

Le rouge sur les joues de Lando vire au cramoisi et il se redresse précipitamment, cherchant du regard quelque chose pour s'occuper ou détourner l'attention de son ami.

- Et alors ? Il grimace. J'aurais très bien pu être tout nu.

Nouveau haussement de sourcils blasé de la part de Carlos qui ne se démonte pas et Lando bougonne dans sa barbe.

- Qu'est-ce que tu fais là d'abord ? Je croyais que tu étais déjà parti.

Carlos lui jette un regard intrigué avant de se redresser et de fermer la porte derrière lui, les isolants d'éventuelles oreilles indiscrètes.

- C'est ton premier podium Muppet, il se laisse tomber dans le canapé. Évidemment que je n'allais pas partir sans fêter ça avec toi. Je suis venu te chercher parce que les autres commencent à s'impatienter, Zak a réservé un resto pour toute l'équipe.

- Oh, Lando répond, à court de mots.

Face à lui, l'Espagnol le dévisage des pieds à la tête.

- Tu n'as même pas pris ta douche, il constate. Qu'est-ce que tu fais tout seul ici depuis tout ce temps ?

Les rougeurs qui avaient commencé à disparaître des joues de l'Anglais font leur retour en force alors qu'il fuit les prunelles chocolat de son coéquipier.

Il lui faut une excuse, une bonne excuse et rapidement.

- Lando ? Carlos insiste doucement.

- J'étais en train de lire les commentaires des fans, il prend une grande inspiration. Sur Twitter.

- On en a déjà parlé Lando, la voix de l'Espagnol s'adoucit alors qu'il se relève pour le rejoindre. L'avis des haters ne reflète pas la réalité. Ne leur donne pas le pouvoir de te faire du mal.

Tout en parlant, il pose les mains sur les épaules du brun, l'obligeant à lui faire face et à plonger son regard dans le sien.

- Je suis un grand pilote, il récite de sa voix aux accents chantants que Lando aime tant. Dis-le.

- Je suis un grand pilote, répète le cadet.

- Fuck les jaloux et les haters, Carlos fait danser ses sourcils.

- Fuck les jaloux et les haters, ricane l'Anglais.

- Mon coéquipier est vraiment parfait, je l'adore, c'est le plus bel homme que j'ai jamais rencontré, il est si sex...

- Stop ! Stop, ça suffit ! Lando éclate de rire.

Le plus jeune se défait de l'emprise de Carlos qui le regarde s'éloigner, un petit sourire victorieux plaqué sur ses lèvres avant de lever les yeux au ciel.

- Dépêche-toi d'aller te changer maintenant et par pitié fais quelque chose pour tes cheveux, je ne veux pas être vu quelqu'un d'aussi débrayé, tu ruinerais ma réputation.

Lando hausse les sourcils, une fausse expression d'innocence plaquée sur le visage.

- Mais Carlos, de quelle réputation tu parles ?

Quelques instants plus tard, seuls les rires des deux pilotes résonnent dans l'hospitalité McLaren alors que Carlos cherche tout objet susceptible d'être jeté à la figure de son coéquipier et quand Lando rit à en pleurer.

Sur l'écrans de son téléphone, clignote une notification :

Fanfiction enregistrée !





Chapitre 12 : Vodka Black (out)

L'atmosphère est assourdissante autour de Carlos. L'intensité de la musique menace de lui crever les tympans, la chaleur moite des corps qui se déhanche contre le sien lui fait tourner la tête et l'alcool qui pulse dans ses veines lui fait perdre toute raison.

C'est ce qu'il appelle une bonne soirée.

Autour de lui, des mécaniciens et des ingénieurs, tous plus alcoolisés les uns que les autres tirent le meilleur de ce que la nuit a à leur offrir et il n'est certainement pas celui qui les jugera. Dans le creux de sa main, tourbillonne un cocktail qu'il vient juste de récupérer, peut-être le troisième ou bien le quatrième, il ne tient plus les comptes depuis plusieurs heures déjà.

Il affrontera les foudres de son préparateur physique demain, lorsque la fièvre de son podium sera redescendue et qu'ils auront tous les deux décuvé.

Après tout, deux voitures aussi hautes dans les points, ça n'était pas arrivé depuis bien longtemps pour l'écurie Anglaise, alors autant marquer cette date et la nuit, dans leurs mémoires.

Satisfait de son chemin de pensée, le pilote Espagnol porte le verre à ses lèvres pour une longue gorgée, un bourdonnement de satisfaction venant agiter joyeusement des entrailles à la sensation de l'alcool dans ses veines.

Rassasié pour le moment, ses yeux se mettent en quête d'une figure connue dans la foule pour poursuivre sa soirée. Une jolie brune lui lance bien un regard aguicheur dans le processus, mais Carlos ne prend même pas la peine de lui retourner son sourire, accaparé par sa recherche d'une silhouette qu'il n'a pas vu depuis quelques heures déjà.

Lorsqu'enfin, il la repère dans la foule compacte, un sourire amusé fleurit sur les lèvres du brun qui sirote une nouvelle gorgée de sa boisson avant de se diriger vers la source de son intérêt.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que Lando Norris salement éméché pour ne pas dire totalement saoul, à moitié en train de danser, un bras s'agitant en l'air difficilement en rythme avec la musique et à demi-vautré sur une pauvre demoiselle qui semble peiner à mentir leur équilibre à tous les deux, perchée sur ses talons d'une hauteur indécente.

Une bulle d'amusement explose dans le ventre de Carlos qui entreprend de fendre la foule en direction du duo de danseurs, abandonnant son verre dans les mains d'un serveur.

Il lui faut un peu plus de temps et d'énergie qu'il ne l'aurait imaginé pour y parvenir, mais lorsqu'il les retrouve, la fille est presque parvenue à tirer un Lando titubant dans un coin à l'écart et Carlos n'a pas besoin de réfléchir bien longtemps au pourquoi.

De plus en plus amusé, il clôt les derniers mètres le séparent du couple, attrape au vol une bouteille de champagne sur le plateau d'un serveur qui n'ose pas riposter et enroule un bras autour du ventre d'un Lando qui vacille et oblige la jeune fille agrippée à sa main à s'arrêter elle aussi.

- Bonsoir jeunes gens, il souffle d'une voix rieuse. On fait des bêtises ?

Lando, qui n'avait pas reconnu la présence plaquée contre son dos, tourne la tête pour tomber sur le visage de l'Espagnol, appuyé contre son épaule et esquisse un immense sourire ivre.

- Carlos ! T'étais passé où ? Il s'exclame avant de se tourner vers la fille. C'est le gars dont je te parlais !

Le plus âgé apprécie la manière dont le corps de son coéquipier se détend totalement et repose à présent totalement contre lui, fondu contre la masse de son corps. Il en profite pour enrouler sa deuxième main, celle qui tient la bouteille, autour du plus jeune, les doigts posés bien à plat contre la peau tendre de son ventre.

- Zak me retenait en otage, il souffle dans l'oreille du brun. Mais je vois que tu t'es fait une amie ?

Contre lui, Lando hoche la tête vigoureusement et cherche le regard de la fille qui ne lui a pas lâché la main avant de répondre.

- Ouais ! Elle m'apprenait à danser ! Son visage marque une légère pointe d'hésitation avant qu'il ne se penche vers elle. Comment tu t'appelles déjà ?

Le regard de la fille, une blonde, fait le voyage entre Lando et Carlos puis Carlos et Lando avec une pointe d'interrogation avant qu'elle ne lui réponde, mais l'Espagnol ne prend même pas la peine de l'écouter parler, elle ne l'intéresse pas.

À la place, il appuie un peu plus fort sur le ventre de Lando, enfonçant la pulpe de ses doigts dans le tissu tendu de sa chemise.

- Tu vas la ramener à l'hôtel ? Il demande sur le ton de l'innocence.

- Quoi ? L'Anglais lui hurle presque dans l'oreille. Non ! Je ne la connais même pas.

Un rictus amusé étire les coins des lèvres du plus âgé qui zieute la main de la fille toujours enroulée autour de celle de Lando.

- Je ne pense pas que ça la dérange, si tu en as envie, il souffle.

Une teinte rougeâtre qui n'est pas dû qu'à l'alcool ravage les joues du Britannique qui pince les lèvres dans une expression concernée avant de secouer la tête.

- Je ne veux pas, il affirme.

En récompense pour son honnêteté, Carlos resserre un peu plus fort son étreinte et laisse échapper un fredonnement appréciateur auquel Lando répond en retirant sa main de celle de la fille et en la laissant reposer sur les siennes.

Face à eux, la blonde qui sent bien que son plan de la soirée est en train de lui filer entre les doigts croise les bras sur sa poitrine à peine couverte par le tissu de sa robe et lance un regard furibond au pilote Espagnol qui n'a même pas daigné lui adresser un regard.

- Hé, elle peste. J'étais là avant !

Cela a au moins le mérite d'attirer l'attention de Carlos dont les prunelles se décrochent de la silhouette brûlante de son coéquipier pour lui lancer un regard dédaigneux dont il a le secret.

- Vraiment ? Il lui adresse un rictus narquois.

L'amusement atteint son paroxysme dans l'esprit enivré de l'Espagnol qui ne recule jamais devant un bon défi.

- Tu entends ça, Muppet ? Il souffle dans le cou frissonnant du brun sans quitter la fille des yeux. Mademoiselle pense qu'elle peut t'avoir à ma place.

Puis, sans laisser le temps ni à Lando, ni à la fille de réagir, sa main libre saisit une poignée de cheveux à l'arrière du crâne de son coéquipier qu'il tire vers l'arrière et il porte le goulot de la bouteille de champagne à ses lèvres.

- Bois, il intime en faisant rouler chaque lettre sur sa langue.

Un fredonnement appréciateur lui échappe lorsque Lando s'exécute sans rechigner, avalant le liquide doré qui déborde sur ses lèvres et coule le long de sa mâchoire et de sa nuque, trempant le col de sa chemise entrouverte.

Dieu sait qu'il pourrait regarder ce spectacle pendant des heures, à côté de ça l'expression de jalousie mordante qui teinte le visage de cette inconnue un peu trop sûre d'elle est à peine satisfaisante et Carlos savoure déjà sa victoire écrasante.

Lentement, il relâche l'emprise de sa main dans les cheveux de Lando et vient doucement l'enrouler autour de sa mâchoire alors qu'il souffle dans son oreille.

- N'avale pas tout.

Il remarque le vague haussement de sourcils de Lando qui s'exécute de nouveau, gonfle les joues comme un ballon et attend les prochaines instructions pendant que Carlos éloigne la bouteille de ses lèvres.

Mais aucune parole ne franchit les lèvres de son aîné qui appuie sa main libre contre la mâchoire de Lando, lui faisant tourner la tête et plonge sa bouche contre la sienne.

Tout ce que Carlos sent, c'est le corps de Lando qui se raidit contre le sien, mais ne le repousse pas, l'exclamation outrée de la blonde face à eux et la façon délicieuse qu'ont les lèvres de Lando d'épouser les siennes à la perfection avant qu'il ne commence à laper le champagne directement contre sa bouche.

La dégustation prend quelques secondes, mais le sourire carnassier qui pare les lèvres de Carlos lorsqu'il s'écarte de son coéquipier, non sans un dernier smack, est absolument outrageux.

Bien trop fier de lui, l'Espagnol quitte son méfait des yeux uniquement pour les planter dans ceux, fâchés de la grande perdante de la soirée.

- Tu vois, chérie, il laisse échapper un ricanement mauvais. J'étais là bien avant toi.

L'instant suivant la fille a disparu dans la foule et Carlos se détache de Lando qui lui fait face, essayent sans succès d'éponger le champagne qui a coulé sur ses vêtements.

- C'était quoi ça ? Questionne l'Anglais pas vraiment traumatisé par le tournant que vient de prendre sa soirée.

Carlos hausse les épaules et plaque son air innocent le plus convaincant.

- Il me fallait un verre et tu étais là.

Les deux coéquipiers se regardent dans les yeux pendant une seconde, bien trop alcoolisés pour réaliser quoi que ce soit et éclate de rire.

L'instant suivant, ils sont bras dessus bras dessous sur la piste de danse comme si rien ne s'était passé, la nuit est encore loin d'être terminée.





Débout, adossé contre le mur du couloir qui mène à la salle de conférence, Lando prend son mal en patience en attendant que le débriefing d'après-course avec les journalistes se termine.

Lui-même n'a pas été convié, il n'a terminé que Grand Prix que sixième, un peu moins de douze secondes derrière le héros du jour, Carlos, qui réalise sa première victoire avec Ferrari.

Si Lando doit être totalement honnête, il avoue avoir ressenti un petit pincement au cœur en voyant son ancien coéquipier réaliser sa première victoire en Formule 1 avec une écurie concurrente de la sienne moins de six mois après avoir troqué l'orange pour le rouge.

Bien sûr, il est heureux pour lui, Lando sera toujours fier de voir Carlos, son meilleur coéquipier, l'homme dont il est secrètement et pathétiquement amoureux depuis des années maintenant accomplir ce rêve qu'ils ont tous. Mais c'est plus fort que lui et l'amertume qui lui a saisi les tripes en le voyant étreindre Charles après la course se mêle à la culpabilité de ne pas être suffisamment mature pour passer au-dessus de son amour à sens unique.

C'est pour cette raison qu'il est ici, devant la salle média, à attendre que la conférence se termine pour pouvoir personnellement féliciter Carlos et peut-être même proposer de lui payer le dîner, si Ferrari n'a pas déjà mis une option sur sa soirée.

Pour tuer le temps en attendant qu'ils terminent, le Britannique s'adonne à son petit plaisir coupable, la lecture de fanfiction.

Lando aimerait dire que Max n'a pas fait mouche avec la première fiction qu'il lui a envoyée, mais cela serait mentir. La vérité, c'est qu'il l'a lu, cette fanfiction, en entier, enfin, disons plutôt jusqu'au dernier chapitre posté par l'auteur avant de disparaître.

Ça vous rappelle quelqu'un ? Parce que moi non.

Tout ça pour dire qu'après avoir expérimenté pour la première fois la sensation abominable de ne pas connaître la fin d'une histoire, Lando a eu envie d'en lire plus, beaucoup plus. Sans le savoir, il avait mis les pieds dans la spirale infernale de la fanfiction.

Jusqu'à ce qu'enfin, il la trouve, sa fanfiction préférée. Celle qui lui fait oublier qu'il lit une histoire sur lui-même et qui le captive pendant des heures juste parce qu'il veut savoir si les deux héros parviendront à s'aimer à la fin et ne lui arrache des gloussements stupides de fangirl.

C'est exactement ce que lui procure The Immortality Of The Crab, une fanfiction au nom improbable qu'il relit déjà pour la deuxième fois, toujours avec la même passion.

Occupé à sourire comme un idiot devant les péripéties d'un Lando et d'un Carlos imaginaire, le Britannique sursaute lorsqu'à la porte de la salle de conférence s'ouvre en grand et qu'une marée de journalistes pressés s'engouffrent dans le couloir.

Le pilote se fait le plus petit possible et se plaque contre le mur pour éviter d'attirer leur attention, mais certains reporters le remarque quand même, mais son expression doit en dire long sur sa volonté de leur parler, parce qu'ils grimacent avant de passer leur chemin.

Lando adresse un bref signe de tête à Checo et Lewis, arrivés deuxième et troisième, lorsqu'ils passent à sa hauteur et ne reste plus que Carlos. L'Espagnol est le dernier à sortir de la salle de conférence, accompagné par sa chargée de communication avec qui il est en grande discussion. Il ne remarque pas tout de suite Lando qui se place sur son chemin.

Il est encore vêtu de sa combinaison de pilote, brillante de transpiration et de champagne, ses cheveux sont plaqués en arrière et ses lèvres enroulées autour de la paille qui sorte de sa gourde tandis qu'il acquiesce studieusement aux paroles de celle qui l'accompagne.

Lando le trouve magnifique.

Comme dans toutes les fictions qu'il a dévorées ces derniers mois, il sent son cœur rater un battement et les papillons prendre leur envol dans ses entrailles. Sa gorge est sèche et ses mains moites alors que Carlos lève les yeux vers lui, la surprise puis la joie venant pétiller dans ses orbes chocolat.

- Muppet ? Il interroge.

- Hey, souffle Lando d'une voix tremblante. Salut champion.

Carlos le regarde encore une seconde avant d'échanger de brèves paroles avec sa chargée de communication qui acquiesce et poursuit son chemin, adressant un joli sourire à Lando en passant et les laissant tous les deux seuls dans le couloir.

- Qu'est-ce que tu fais là ? Questionne le pilote Ferrari.

- Je n'ai pas eu le temps de te féliciter correctement tout à l'heure, il lui adresse un petit sourire. Alors me voilà.

Face à lui, son ancien coéquipier le dévisage une longue seconde et Lando sent ses joues virer au cramoisi qui s'accentue encore lorsque les lèvres de Carlos s'étirent en un sourire amusé.

- C'est que tu peux être mignon quand tu veux, ricane le plus âgé.

Outré, le pilote McLaren ouvre la bouche pour protester, mais il n'en a pas le temps, car l'autre pilote avale la distance qui les sépare à grand pas et l'attire dans une étreinte affectueuse.

- Merci Muppet, il souffle dans ses cheveux. Ça me fait plaisir de te voir.

Contre lui, Lando est tellement rouge que cela en devient médicalement préoccupant.

- Tu pues, il râle pour la forme.

- Je sais, ricane l'Espagnol.

- Lâche-moi ! Lando tente de se défaire des bras puissants qui l'enserrent.

- Encore une minute, il ricane et frotte sa joue dans les cheveux du plus jeune. Juste le temps que tes fringues imprègnent mon odeur de gagnant de Grand Prix.

Lando se débat avec un peu plus de vigueur.

- Ne me dis pas que tu es déjà en train de prendre la grosse tête, il grogne avec dégoût. Tu n'as gagné qu'une course.

- C'est toujours une de plus que toi, rétorque l'autre.

Après un effort surhumain, Lando finit par s'extraire de l'étreinte de son ancien coéquipier qui ne trouve rien de mieux à faire que de rire comme un débile pendant que l'Anglais balaie d'un regard écœuré ses vêtements sales.

- Tu aimes ? Carlos pétille, fier de lui. C'est mon nouveau parfum, Eau de Sainz, tu l'essaies en avant-première petit veinard.

- Tu n'es qu'un porc, ronchonne le plus jeune.

Carlos porte une main à son cœur.

- Mon cœur, tout de suite les grands mots, il gémit misérablement. Toi qui étais venu me féliciter te voilà en train de me poignarder dans le dos.

- Je commence à regretter d'avoir voulu être gentil avec toi, il croise les bras sur son torse.

- Menteur, Carlos lui sourit de toutes ses dents.

C'est vrai, il a menti, mais Lando se garde bien de l'avouer à l'homme qu'il aime désespérément en secret.

- Allez Muppet, il taquine. Ravale-moi cet air grognon et donne-moi ton beau sourire.

Tout en parlant, Carlos saisit les deux joues de Lando à pleine main, étirant la peau à la manière d'une grand-mère gaga avant de le relâcher pour mieux passer un bras autour de ses épaules.

- Ne colle pas tes dessous-de-bras aussi proches de mon visage, râle le plus jeune qui ne se dégage pas pour autant.

- Seulement si tu arrêtes de te plaindre, il propose. La vie est belle, j'ai gagné Silverstone et maintenant, toi et moi, on va aller faire la fête !

Lando hausse un sourcil pour ne pas montrer à quel point l'idée le ravie.

- Ferrari n'a rien prévu pour ta victoire ? Il demande.

- Si, Carlos acquiesce. Mais tu viens avec moi, tu seras mon plus un, tout le monde sera content de te voir.

Avant que Lando n'ait le temps de ne serait-ce que penser à décliner l'invitation, Carlos l'a déjà entraîné à sa suite dans les couloirs en direction de l'hospitalité Ferrari.

La deuxième relecture de sa fanfiction peut bien attendre un peu.





Chapitre 24 : Pensando en la immortalidad del cangrejo

Carlos est particulièrement fier de ses talents de cuisinier. Lui qui n'a jamais réellement eu le loisir de s'exercer, entre un préparateur physique aux petits oignons et une mère surprotectrice, il n'a que rarement eu l'occasion de cuisiner pour lui-même ou pour les autres.

Aussi, il admire avec une pointe de fierté mal placée le résultat de son expérimentation culinaire du jour : pancakes salés aux épinards et à la ricotta. Le plat dégage une délicieuse odeur qui lui met l'eau à la bouche et il n'est pas peu fier d'être parvenu à un résultat aussi prometteur avec le peu d'aliments encore comestibles présent dans le frigo.

Il ne devrait pas être étonné, Lando n'est pas la définition d'un grand cuisinier lui-même et il aurait été plus qu'inattendu de trouver de quoi faire un repas équilibré dans son réfrigérateur. Carlos est donc satisfait de sa performance en dépit des moyens à sa portée.

Les deux hommes ne sont de retour dans la principauté Monégasque que depuis quelques heures et l'appartement du plus jeune s'est présenté comme la meilleure option, le temps que l'Espagnol fasse lui-même l'acquisition d'un bien dans les environs.

Pensivement, le pilote Ferrari dresse deux assiettes qu'il dispose dans un plateau avec une carafe de thé glacé sans sucre dont il a trouvé des sachets déshydratés dans un tiroir.

La pause estivale ne fait que commencer et pourtant, il sait que Lando et lui seront séparés bien plus rapidement qu'il ne l'aurait voulu, l'inconvénient de vouloir garder leur relation secrète. Lando doit prendre un avion pour l'Asie où l'attendent Max Fewtrell et Martin Garrix dans deux jours et Carlos doit retrouver sa famille dans leur villa au sud de l'Espagne à la fin de la semaine.

Il ne sait pas s'ils auront le temps de se retrouver tous les deux avant que McLaren et Ferrari ne les rappellent l'un et l'autre au simulateur pour préparer la fin de la saison. La situation était bien plus simple lorsqu'ils étaient tous les deux pilotes de l'écurie Anglaise, mais Carlos n'échangerait pour rien au monde leur relation actuelle.

Le plus naturellement du monde, il se déplace dans la cuisine de son compagnon et traverse l'appartement jusqu'au salon où il sait qu'il trouvera Lando en train de jouer en ligne.

Discrètement, il vérifie que l'autre pilote n'est pas en plein live avant d'entrer dans la pièce. Étonnement, Lando n'est pas concentré sur l'écran comme il l'imaginait, mais avachi dans le canapé, tête penchée en arrière et le regard fixé sur le plafond, totalement plongé dans ses pensées.

Un petit sourire amusé fleurit sur les lèvres de l'Espagnol qui se déplace lentement dans la pièce jusqu'à atteindre le dossier du canapé par-dessus lequel il se penche et enlace l'autre homme, venant poser un baiser à la base de son cou.

Lando bronche à peine, mais Carlos ne se vexe pas, il a l'habitude de le voir se perdre dans les méandres de son esprit et bien qu'il serait prêt à payer cher pour en connaître la portée, il ne le pousse jamais à les verbaliser.

- J'ai fait à manger, il souffle doucement, sa bouche suivant le tracé d'une veine.

Il faut quelques instants à Lando pour reprendre pied dans la réalité, Carlos le sent à la manière dont son corps se détend dans le canapé et contre lui et à la main qui vient lentement se perde dans ses cheveux, le gardant proche de la peau du plus jeune.

- Hm ? Marmonne le garçon aux prunelles couleur azur.

- Pensando en la inmortalidad del cangrejo ? Fredonne l'Espagnol dans sa langue natale.

Un rire remonte dans la poitrine du plus jeune qui se redresse dans le canapé et Carlos relâche doucement son emprise afin de le laisser s'éloigner.

- Qu'est-ce que tu me chantes ? Sourit le plus jeune.

L'hispanique laisse échapper un gloussement conspirateur avant de le relâcher complètement pour faire le tour du canapé et y prendre place à son tour, laissant à Lando tout le plaisir de se lover contre lui.

- Pensando en la inmortalidad del cangrejo, il répète. C'est une expression Espagnole que ma mère utilisait beaucoup quand j'étais enfant et que je ne l'écoutais pas. On peut traduire ça par penser à l'immortalité du crabe, on l'utilise pour parler de quelqu'un qui rêve éveillé.

C'est au tour de Carlos d'être avachi dans le canapé, Lando à moitié allongé sur lui, le menton posé sur le haut de son torse et leurs jambes entremêlées, il passe une main dans le bas du dos de son amant.

- Les crabes sont immortels ? Lando hausse les sourcils.

- Je ne crois pas, Carlos glousse en réponse.

- C'est stupide, atteste l'autre. En plus de mettre beaucoup de pression sur les épaules de ces pauvres crabes.

- Je n'ai jamais dit que c'était du génie.

Lando le regarde un instant avant d'étendre les bras et de poser les mains sur les joues de Carlos qui le laisse faire et appuie son visage contre le toucher.

- Redis-le, souffle l'Anglais.

- Pensando en la inmortalidad del cangrejo, il obéit docilement.

Les lèvres de son amant qui se posent sur les siennes sont une récompense dont il ne se lassera jamais.

- J'adore quand tu parles Espagnol, murmure Lando contre ses lèvres.

- Je sais.

Carlos n'a pas le temps de sourire, la bouche de l'autre homme est de nouveau sur la sienne, avide et quémandeuse et qui est-il pour lui refuser quoi que ce soit ?

La réponse de Lando est de se pencher vers lui, inclinant la tête lorsque leurs nez se heurtent. L'une de ses mains est posée sur le cou de Carlos, glissant dans ses cheveux et la main de Carlos s'enroule autour de son cou, serrant doucement. Lando ne retient pas un gémissement et le plus âgé en tire avantage, sa langue glissant pour se heurter à la sienne, léchant ses dents comme s'il était impatient de le goûter.

Lando se recule pour respirer, haletant et Carlos fixe ses yeux dans de jolies prunelles bleu-vert.

- C'est à toi que je pensais, il dit au plus grand, sa lèvre inférieure humide.

- Hm ? Carlos le regarde avec des yeux affamés.

- Tout à l'heure, il précise. C'est à toi que je pensais.

Carlos l'embrasse à nouveau, chastement.

- J'étais juste à côté, tu aurais dû m'appeler, il lui lance un regard suggestif.

Lando éclate de rire, ses mains traçant distraitement le contour des pectoraux de l'homme sous lui.

- Tu étais tellement canon avec ton tablier, ça aurait été un crime de te distraire, il rougit en admettant sa petite obsession.

- Oh, Muppet, ne rougit pas comme ça, taquine Carlos en approchant leur front pour pouvoir le regarder dans les yeux. Je peux remettre ce tablier quand tu veux.

Carlos lui adresse un sourire tout à fait charmant pour compléter sa tirade et il observe avec délice les joues de son cadet s'empourprer.

Les pupilles de Lando se dilatent, il a envie de goûter à ce sourire alors il se penche pour un autre baiser, souriant quand Carlos rit contre ses lèvres et fait claquer leurs dents l'une contre l'autre.

- Putain Lan, j'ai tellement envie de toi, dit-il contre les lèvres de l'Anglais.

- Moi et les crabes, on ne rêve que de ça, souffle l'autre en déposant un autre baiser sur la bouche de Carlos, gémissant lorsque les dents de Carlos tirent sur sa lèvre inférieure.

Lando se redresse et bouge contre lui, passant sa jambe par-dessus celles de Carlos et s'installant sur ses genoux. Carlos inspire une grande bouffée d'air et lève les yeux vers son cadet avant de l'entraîner vers le bas d'une pression de la main sur sa nuque.

Le bouclé le rejoint avec avidité, léchant sa bouche et faisant s'entrechoquer leurs langues. Carlos le laisse faire, heureux de laisser Lando le dévorer. L'une de ses mains vient saisir une poignée de cheveux bouclés, tirant assez fort pour que Lando soit obligé de rompre le baiser et de pencher la tête en arrière. Les lèvres de Carlos tracent un chemin avide le long de sa mâchoire jusqu'à son cou, mordant et suçant jusqu'au col du sweat-shirt de l'Anglais.

Lando s'agrippe au dos de son amant, laissant des marques et roule des hanches contre le bassin de Carlos. Il gémi en sentant le renflement immanquable du sexe de Carlos à travers son pantalon. Carlos fredonne de contentement et plante ses dents dans le cou de Lando, tirant la main sur sa nuque vers le bas pour le presser contre lui. Lando laisse échapper une respiration hachée et fixe son regard sur le mur derrière eux pour tenter de reprendre contenance.

Il ne s'est jamais senti aussi désiré de sa vie que lorsque Carlos l'attrape par l'arrière de son sweat-shirt pour imbriquer leurs bassins et l'embrasser désespérément. Lando lui rend son baiser avec avidité, se dressant plus haut sur ses genoux pour jeter ses bras autour du cou de Carlos pour les attirer l'un vers l'autre.

Lando s'agrippe avec insistance aux épaules de l'Espagnol et gémit lorsque la main de Carlos glisse sur l'élastique de son jogging. Hors d'haleine, il se recroqueville dans le cou de Carlos, enfouissant son visage et gémissant.

- Ton repas va refroidir, il murmure à bout de souffle, résistant à peine au besoin de se frotter contre l'autre homme.

- Je ferais réchauffer, il passe une main dans ses cheveux courts.

Carlos reprend son souffle, il embrasse le cou et la mâchoire de Lando, se frayant un chemin jusqu'à ses lèvres pour l'embrasser tendrement et s'éloigner en souriant.

- Ne me fais pas croire que tu te soucis de mes pancakes maintenant, il esquisse un rictus et soulève ses hanches à la rencontre de celles de Lando, lui arrachant un nouveau gémissement.

Le plus jeune ricane devant le ridicule de la situation et hausse les épaules.

- Je ne voudrais pas que l'on me reproche de trop penser aux crabes et pas à toi, il répond au mouvement de son bassin en orientant le sien pour créer un nouvel angle.

Carlos l'embrasse à nouveau et se recule à peine pour murmurer contre ses lèvres :

- Je commence à regretter de t'avoir parlé de cette expression, amor mỉo.

Lando sent les papillons dans son estomac se mettre à danser, Carlos sait l'effet qu'il lui fait alors il heurte de nouveau leurs fronts, fixant les deux orbes aigue-marine avec tendresse et il clôt de nouveau la frontière entre leurs lèvres.





- Monsieur, désirez-vous que je vous apporte la carte, ou attendez-vous quelqu'un ?

Sa meilleure poker face plaquée sur le visage, Lando verrouille l'écran de son téléphone portable et lève les yeux vers le serveur qui vient juste de lui poser une question et forme un joli sourire poli du bout des lèvres.

- J'attends quelqu'un, il explique. Il ne devrait pas tarder à arriver.

Comme pour lui donner raison, la silhouette trottinante de son ancien coéquipier passe devant les grandes baies vitrées du restaurant où ils se sont donné rendez-vous pour ce brunch pré Grand Prix.

Le chapitre que Lando vient de lire lui revient en mémoire et il rougit comme une collégienne alors qu'un Carlos Sainz transpirant de sa course matinale et affreusement sexy est dirigé vers leur table par une serveuse absolument sous le charme du pilote Espagnol.

Lando ne peut pas en vouloir à la jeune fille qui bégaie qu'elle va leur chercher les menus avant de disparaître en cuisine, rouge comme une tomate. S'il ne l'avait pas côtoyé pendant les cinq dernières années, il aurait probablement eu la même réaction.

Impassible, il regarde Carlos accepter la serviette qu'on lui tend pour éponger la transpiration sur son visage avant de relever les yeux et d'enfin croiser ceux de son ancien coéquipier et ami.

- Muppet ! Il lui adresse un sourire heureux. Désolé du retard, tu ne m'as pas attendu trop longtemps ?

- Je viens juste d'arriver, il lui sourit en retour.

Mensonge, l'Anglais a eu le temps de lire quatre chapitres depuis qu'il est assis à table, mais il se retient bien de lui donner cette information.

- Franchement, qu'est-ce qui te plaît autant dans la course ? Il pose un coude sur la table et son menton dedans. Rien que te regarder me fatigue.

Amusé, Carlos secoue la tête et s'étire la nuque. Ils ont déjà eu cette discussion un nombre incalculable de fois et il s'est fait une raison, ils ne tomberont jamais d'accord sur la question.

- Tu devrais venir courir avec moi de temps en temps, tu verrais que ce n'est pas si mal.

Le visage de Lando prend une expression dégoûtée et il ouvre son menu d'un mouvement magistral et dramatique, signifiant son refus de ne serait-ce que penser à l'idée.

- Alors, il change de sujet. Quoi de neuf ?

Face à lui, Carlos hausse un sourcil interrogatif.

- Lando, on s'est vu au golf la semaine dernière, il rappelle. Que veux-tu qu'il soit arrivé en une semaine ?

Le plus jeune lui lance un regard blasé.

- Oh, mais excuse-moi de demander des nouvelles, il lève les yeux au ciel. Fais-moi penser à appeler ton père la prochaine fois que j'ai envie de discuter avec un Sainz qui a envie de me voir.

Carlos laisse échapper un gloussement amusé.

- Diva, il se moque.

- Ami en carton, rétorque l'autre.

Les deux se font face pendant une seconde et Lando tente tant bien que mal de le fusiller du regard, mais l'expression charmeuse mêlée d'amusement l'oblige à détourner le regard et à ériger son menu devant son visage en protection contre le charme de son crush.

Intérieurement, Lando pique un fard, il n'y a pas plus de quelques minutes, il s'apprêtait à lire un smut particulièrement prometteur entre lui et l'homme qui lui fait face, le tout en maintenant une expression de neutralité absolue et voilà qu'un tout petit regard de rien du tout l'oblige à reprendre son souffle ?

Il va falloir qu'il ait une sérieuse discussion avec son cœur concernant la gestion des priorités.

- Je me suis disputé avec Becca.

Sorti de ses pensées par cette annonce imprévue, Lando baisse de nouveau son menu sur la table pour lancer un regard plein d'incompréhension à son vis-à-vis.

- Quoi ? Il demande.

- Tu voulais savoir ce qu'il s'est passé depuis la semaine dernière, Carlos hausse les épaules. Eh bien, je me suis disputé avec Rebecca, elle ne sera pas là ce week-end.

- Oh, le plus jeune ne trouve rien de mieux à dire.

Il est vrai qu'une petite partie de lui aimerait se réjouir du fait que Carlos et sa copine soient en froids, mais le faux air intouchable que l'Espagnol se donne actuellement alors qu'il regard partout sauf dans les yeux de Lando éteint net cette étincelle dans le cœur du plus jeune.

Quoi que puisse être le sujet de la dispute, il est clair que cela impact Carlos plus qu'il ne souhaite l'admettre.

- Rien de dramatique, il tente de dédramatiser. Juste un truc con, je suis certain que d'ici quelques jours ça sera passé. Qu'est-ce que tu penses de la terrine de pommes de terre au comté ? J'aurais bien pris des huîtres, elles me font envie, mais c'est un peu risqué, non ?

- À quel sujet ? Lando refuse de changer de sujet.

Face à lui, Carlos laisse échapper un bref soupir avant de lui adresser un petit sourire qui n'arriverait même pas à la cheville de ceux qu'il lui donne habituellement.

- Lando, tu n'es pas obligé de...

- Si, insiste l'Anglais. Si c'est quelque chose d'important pour toi, alors j'ai envie de l'entendre.

Joignant le geste à la parole, il se penche par-dessus la table et saisit doucement la main de l'Espagnol, à plat sur la table avant d'y apposer une petite pression qu'il espère encourageante et rassurante.

Le regard chocolat de son ancien coéquipier voyage furtivement de son visage à leurs mains toujours entrelacées et alors que Lando pense qu'il va retirer la sienne, il la retourne pour que leurs paumes entrent en contact et saisit sa main en retour avant de lui adresser un vrai sourire.

- Je t'assure que ce n'est vraiment pas grand-chose, il commence avant de se rendre compte qu'il ne dupe personne. C'est juste que tout était parfait quand on essayait de rester discret et que rien n'était officiel, tu comprends ?

Lando hausse un sourcil et Carlos se mord la lèvre pour retenir un rire. Inutile de préciser que la dernière relation sérieuse de l'Anglais remonte à plus d'un an et demi.

- L'année dernière, personne ne savait, on avait tous les deux notre propre vie et on se retrouvait quand on avait envie de se voir et après Isa, je pensais que c'était ce dont j'avais besoin, Carlos continu, ses yeux plantés sur leurs deux mains alors qu'il semble perdu dans ses pensées.

- Mais ? Questionne Lando.

- Mais finalement, la pression extérieure est devenue trop forte et ne va pas croire que je ne suis pas heureux d'être avec elle surtout, Becca me rend très heureux.

- Mais ? Lando sent qu'ils touchent au but.

- Mais plus on passe de temps ensemble et plus je me rends compte que l'on n'a absolument rien en commun, il finit par avouer.

Les deux hommes tombent dans un silence contemplatif, uniquement interrompu par le retour de la serveuse rouge écrevisse qui lance une oreillarde peu discrète à leurs mains jointes avant que Lando ne retire la sienne.

Il lui demande poliment une carafe d'eau et quelques minutes de plus pour faire leur choix avant de la regarder partir pensivement, il ne manquerait plus qu'elle parle de ce qu'elle vient de voir, et reporte son attention à son ami.

- C'est à cause de ça que vous vous êtes disputés ? Il demande doucement.

- Non, Carlos secoue la tête. On était chez moi et elle commençait à arranger tout son planning en fonction des Grand Prix et je ne sais pas, je crois que j'ai paniqué, elle l'a sentie et je pense que tu devines la suite.

Le plus jeune pince les lèvres, oui, il n'a pas besoin d'être devin pour comprendre ce qu'il s'est passé.

Carlos le regarde à présent avec ses grands yeux bruns plein d'espoir de chiot abandonné et il ne peut que lutter pour retenir la grimace amère qui menace de déformer ses traits.

- Si c'est d'espace dont tu as besoin, tu devrais lui dire, il propose calmement. Rebecca est une fille intelligente, elle devrait comprendre.

Le brun le dévisage un instant et Lando à presque l'impression qu'il cherche quelque chose dans ses yeux, mais il garde un visage neutre doublé d'un petit sourire encourageant.

- Merci Muppet, il lui sourit. Je devrais peut-être te demander des conseils plus souvent.

- Surtout pas, il grince des dents. Et interdiction de dire à ta copine que j'ai joué un rôle là-dedans, je ne veux pas qu'elle se venge sur moi si tu finis par la larguer.

Carlos le regarde une seconde, incrédule, avant d'éclater d'un grand rire communicatif.

- Tu sais, le meilleur parti pour moi selon les fans, c'est toi, il ponctue sa phrase d'un clin d'œil charmeur. Je devrais peut-être y réfléchir sérieusement. Tu en penses quoi ?

Lando s'étouffe avec son eau sans aucune discrétion, attirant sur eux les regards curieux des autres clients avant de battre en retraite derrière le mur protecteur de son menu, non sans avoir fusillé du regard la source de tous ses problèmes au passage.

- Si tu prends les huîtres, je te tue.





Chapitre 45 : Little Miss Jealous

Allongé de tout son long en travers du lit king size de la suite d'hôtel que McLaren a attribué à Lando, Carlos patiente en scrollant sur Instagram le retour de son petit ami.

Ils se sont mis d'accord au début du week-end pour partager la chambre de l'Anglais, ils dormaient dans celle de Carlos lors du dernier Grand Prix et le plus jeune des deux pilotes trouve amusant d'alterner d'un week-end à l'autre.

Cette méthode les rend également plus difficiles à suivre pour les journalistes et les fans un peu trop curieux qui seraient tentés de s'intéresser d'un peu trop près à l'incroyable « amitié » qui lie les deux anciens coéquipiers.

C'est donc tout naturellement que Lando lui a donné un double des clés de sa suite ce matin à l'occasion d'une rencontre fortuite entre conférences de presse et interviews avant qu'ils ne se séparent, suivant chacun le planning chargé de leur journée média.

Le dos de l'Espagnol le fait souffrir aussi, il roule sur le ventre, continuant de faire défiler les Tik Tok tous plus amusants ou intrigants les uns que les autres. Lando ne devrait pas tarder à revenir, les réunions stratégiques McLaren s'étirent toujours tard dans la soirée, mais il a dit à Carlos qu'il rentrerait pour qu'ils partagent un repas livré par le room service.

À cette pensée, le ventre de Carlos gargouille et il pousse un soupir d'ennui en passant une main dans ses cheveux encore humide de la douche qu'il vient de prendre. Un bref regard à sa montre et il décroche le téléphone de la suite pour passer commande, Lando ne devrait plus tarder, autant que le repas soit déjà prêt à son arrivé.

Une fois fait, il reprend sa passionnante activité précédente : vider son esprit sur les réseaux sociaux. Une nouvelle publication de McLaren attire vaguement son regard et il clique sur la vidéo, impatient de voir quel genre de bêtises, ils peuvent encore avoir fait faire à leurs pilotes.

Cependant, il fronce vite les sourcils en constatant que la direction prise par la vidéo est à peine dissimulée. C'est à peine si elle ne crie pas sur les toits : Landoscar.

Carlos connaît les ships entre pilotes, il est même très au fait du Carlando puisqu'il en est l'un des principaux concernés et qu'il trouve amusant de voir les fans de ce ship chercher des liens et des indices pour attester de leurs théories alors que Carlos et Lando sont, eh bien, déjà en couple depuis un moment maintenant.

Il connaît aussi le Charlos qu'il est censé incarner avec Charles, mais personnellement, il est plutôt fan du Lestappen. Carlos n'est qu'un homme, comme tout le monde, il a un point faible pour les ennemis to lovers.

Il y a tellement de ship, des célèbres comme Brocedes, Carlando, Charlos, Landoscar, Lestappen, Maxiel, Piarles, Loscar, Sewis et puis aussi des plus étranges Britcedes, Carloscar, Chestappen, Dando, Lancierre, Norstappen, Rubon, Sebchal, Strollonso et d'autres pour lesquels Carlos à plus de mal à déterminer le point de départ.

Toujours est-il que lui et tous les pilotes de Formule 1 connaissent les ship, mais il y a une nuance entre les connaître et en faire carrément la promotion via le compte publique d'une écurie. L'idée lui fait doucement grincer des dents.

Heureusement pour sa mâchoire, le plateau-repas qu'il a commandé ne tarde pas à arriver et détourne provisoirement son attention.

Cependant, presque deux heures plus tard, toujours aucune trace de Lando, le plateau-repas n'est plus qu'un souvenir tout comme la bonne humeur de Carlos.

Allongé de son côté du lit, dos à la porte, le pilote Ferrari prend son mal en patience, impatient d'entendre les explications de son petit ami et foncièrement incapable de s'endormir sans s'est assuré que rien de grave n'est arrivé, surtout quand Lando ne répond pas à ses messages.

L'Espagnol ronge son frein jusqu'à ce qu'une bonne heure plus tard, le déclic de la porte de la suite qui se déverrouille ne résonne dans la chambre.

Monté sur ressort, Carlos est aussitôt assis dans le lit, le bras tendu, prêt à allumer la lampe de chevet pour confronter son petit ami quand le rire caractéristique de Lando résonne dans l'entrée, suivie par un concert de chuchotement et d'autres gloussements étouffés.

Hésitant, la main de Carlos reste en suspens quand il comprend que Lando n'est pas seul, une peur sourde lui saisissant les tripes quand il s'aperçoit que la deuxième voix appartient à Oscar Piastri.

Un bref soupir de soulagement lui échappe cependant quand les murmures s'éloignent et que la porte de la chambre se referme, ne laissant que le bruit feutré des pas de Lando dans le couloir.

Les sourcils froncés, Carlos se réinstalle dans le lit, visage tourné face au bord du lit pour que l'autre homme ne puisse pas le voir, il ramène la couverture jusque sous son nez.

À peine quelques minutes plus tard, un poids se fait sentir sur le matelas et le corps de Lando vient se plaquer contre son dos. Un bras de l'Anglais s'enroule autour de lui, une main glisse sous son t-shirt pour venir caresser son ventre et une paire de lèvres vient embrasser la peau de sa nuque, juste à la frontière du tissu.

- Tu dors ? Souffle Lando avec douceur.

Mauvais, Carlos garde le regard fixé sur l'obscurité face à lui.

- Carlos ?

Le plus jeune sent assurément la tension dans le corps de son compagnon.

- Content de voir que tu te rappelles que j'existe.

La remarque est sortie beaucoup plus acerbe qu'il ne l'aurait souhaité et Carlos pince les lèvres avec regret.

- Attends, quoi ? Le corps de Lando bouge dans le lit et la lampe de chevet s'allume. De quoi est-ce que tu parles ?

Agacé, Carlos se redresse et plonge son regard dans les yeux lapis-lazuli de l'autre garçon.

- Je disais, il mâche ses mots. Que tu aurais au moins pu m'envoyer un pauvre message, histoire que je ne passe pas la soirée à poireauté ici comme un idiot.

Les prunelles de Lando s'écarquillent d'horreur et Carlos roule des yeux.

- Pardon, excuse-moi, j'ai complètement oublié notre soirée je...

L'Espagnol le coupe d'un geste de la main.

- Ce n'est pas grave, vraiment, je n'ai pas besoin d'excuses Lando. Tu fais ce que tu veux de ta vie, avec qui tu veux.

- Non ! Le bouclé saisit sa main, un air de panique dans le regard. Non, ce n'est pas ce que je veux, je voulais être avec toi. J'avais prêté mon téléphone à Oscar, il a dû oublier de me dire...

- Pourquoi Oscar avait ton téléphone ? Carlos fronce les sourcils.

Dans un coin de son esprit, la vidéo Landoscar tourne en boucle et il se déteste pour ça.

- Il attendait un appel important et son téléphone avait plus de batterie, je lui ai...

- Parce qu'Oscar reçoit les appels importants sur ton téléphone ? Est-ce qu'il te raccompagne à ta chambre à chaque fois aussi ?

- Mais de quoi est-ce que tu parles ?! Sa chambre est de l'autre côté du couloir !

Les deux hommes se font face en silence, chacun est conscient que les prochaines paroles pourraient très bien dramatiquement aggraver les choses.

Mais alors que Carlos s'apprête à ouvrir la bouche, quelque chose change dans le regard de Lando, une petite lueur d'incrédulité qui se transforme secondes après secondes en compréhension.

- Carlos, il avale sa salive, conscient de marcher sur des œufs. Est-ce que tu es jaloux ?

Immédiatement et avec une effrayante rapidité, le visage du plus âgé s'empourpre et il détourne le regard pour tenter de sauver l'honneur.

- Non ! Il bafouille maladroitement. Pas du tout.

Sa fierté l'empêche de croiser le regard de Lando alors il fixe ses yeux sur la couverture qui les séparent.

- Mais si, il y a un sourire dans la voix du plus jeune. Tu es jaloux parce que j'ai passé la soirée avec Oscar.

- Absolument pas, Carlos bredouille. Je suis en colère parce que mon copain m'a oublié alors que l'on devait passer la soirée ensemble et qu'à la place j'ai mangé tout seul un plateau-repas pour deux personnes.

Il y a un peu trop de mots dans la phrase qui quitte ses lèvres, mais l'idée est là et Carlos espère qu'elle fera l'affaire.

Cependant, ses yeux s'ouvrent contre sa volonté lorsque les mains de Lando encadrent son visage, l'obligeant à relever la tête et qu'il plaque leurs fronts ensembles, faisant s'entrechoquer leurs nez doucement.

- Je suis désolé, il souffle doucement et Carlos sent son souffle contre son visage. Il y a eu un changement de planning, mais ce n'est pas une excuse, je n'aurais jamais dû t'oublier.

- C'est bon, répond lentement l'Espagnol qui tente de s'éloigner sans y parvenir.

- Non, ce n'est pas bon, contredit Lando. Je t'assure qu'il n'y a pas un endroit au monde où j'aurais préféré me trouver ce soir qu'ici, avec toi.

- Charmeur, Carlos ricane faiblement.

- C'est la vérité, les lèvres de Lando effleurent les siennes. Je t'assure que je n'ai pensé qu'à toi pendant toute la soirée, à mon envie d'être avec toi, contre toi...

Il ne laisse pas à Carlos le temps de répliquer, Lando se penche simplement en avant, inclinant sa tête jusqu'à ce que sa bouche rencontre celle de l'Espagnol.

Pour Lando, c'est toujours une sensation incroyable d'embrasser Carlos, ses yeux se ferment tandis que les sentiments surgissent comme des feux d'artifice et des arcs-en-ciel qui explosent en lui. Le plus jeune recule après quelques instants, se léchant les lèvres, prêt pour le rejet qu'il espère vraiment ne pas voir arriver.

Au lieu de cela, il sent l'une des mains de Carlos saisir les cheveux à l'arrière de son crâne et le ramener vers lui pour un autre baiser. Et si Lando pense qu'embrasser Carlos est extraordinaire, alors être embrassé par Carlos est tout simplement époustouflant. L'autre main de l'Espagnol se pose sur le bas de son dos, l'attirant plus près de lui jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'espace entre eux.

Lorsqu'ils se séparent, à bout de souffle, Lando esquisse un petit sourire plein d'espoir.

- Est-ce que je suis pardonné ? Il souffle.

Amusé, Carlos secoue la tête.

- J'attends de voir comment tu comptes te rattraper, l'ébauche d'un sourire éclairant son visage.

Lentement, il se laisse entraîner contre le corps de Lando qui éteint la lumière, jusqu'à ce qu'ils ne retrouvent leur position d'origine, Carlos allongé sur le flanc et Lando, lové contre son dos, une main possessivement ancrée sur son ventre, sous son t-shirt et l'autre, plongée dans ses cheveux sombres, leurs jambes entremêlées.

Le silence revient entre les deux hommes et Carlos ferme les yeux, profitant des massages que la main de Lando prodigue à son cuir chevelu, il sent le sommeil l'entourer de son cocon protecteur.

- Si tu crois que je vais oublier cette histoire de jalousie avec Oscar, promet silencieusement l'Anglais dans ses cheveux.

- Ferme-la, grogne l'Espagnol dont le corps vibre sous le rire de Lando.

- Tu sais que tu es le seul à mes yeux ? Hm ?

Désireux de pouvoir dormir en paix, Carlos laisse échapper un lourd soupir à moitié endormi.

- Dis à McLaren de se calmer avec le Landoscar et je voudrais bien te croire, il baille.

Nouveau rire de la part du plus jeune qui se redresse juste assez pour venir embrasser sa joue.

- Promis, il murmure dans un sourire.

Mais seule lui répond la respiration lente et apaisée de son amant.





Un sourire attendri étire les lèvres du pilote McLaren alors que ses yeux glissent sur les dialogues du chapitre. Ce n'est pas l'un de ces préférés, mais il aime toujours les conversations à cœur ouvert qu'ont les Carlos et Lando de cette histoire. La façon qu'ils ont de s'aimer simplement en dépit des obstacles et de leurs propres doutes.

The Immortality Of The Crab, son histoire préférée, retrace particulièrement bien ces petits moments de vie sans verser dans le drame et le manque de communication dont peuvent pâtir les intrigues des fanfictions classiques. C'est pour ça qu'il ne se lasse jamais de la lire et de la relire encore et encore.

Si une seule de ces histoires pouvait un jour devenir la réalité, alors il aimerait que ça soit The Immortality Of The Crab, sans la moindre hésitation. Et s'il ne craignait pas de passer pour un dingue auprès du public en plus de se faire méchamment taper sur les doigts par son écurie, il serait tenté de retrouver l'auteur de la fanfiction pour la remercier et accessoirement demander si une nouvelle histoire Carlando ne serait pas en cours de création.

Heureusement pour lui et pour une pauvre autrice quelque part dans le monde, Lando n'est pas encore prêt à passer le cap de révéler son secret à un autre être humain. Cela a beau faire plusieurs années maintenant qu'il dévore tout ce qui se rapproche de près ou de loin au Carlando, il préfère tout autant que cela reste une passion secrète encore quelque temps.

Pour toujours à vrai dire.

C'est pourquoi il ne prend aucun risque et range son téléphone dans sa poche en voyant Carlos revenir de la réception du golf où ils se sont retrouvés pour l'après-midi, deux chariots de golf sur l'épaule, les clés de leur voiturette et un air absolument fier de lui plaquer sur les lèvres.

Lando l'admire quelques secondes avant de détourner le regard, même après toutes ces années, il doit encore lutter contre le rouge qui lui monte aux joues.

Il finira bien par se faire une raison, c'est une cause perdue.

La fin de la saison approche à grands pas, encore quelques semaines, une poignée de Grand Prix avant de devoir repartir de zéro, et même si beaucoup de choses ont changé avec les années, certaines s'accrochent au passage du temps.

C'est le cas de leur tournoi de golf annuel.

Chaque année, après avoir laissé derrière eux les pays et les courses au climat capricieux pour revenir au Moyen-Orient, Carlos et Lando planifient une journée golf entre le Qatar et Abou Dhabi, c'est la tradition.

L'une de celles que Lando chérira jusqu'à la fin de sa carrière en Formule 1.

- J'ai tout récupéré ! S'exclame Carlos en arrivant à sa hauteur.

- C'est pas trop tôt, l'Anglais lève les yeux au ciel. J'ai bien cru que j'allais prendre racine.

Le plus âgé lui tire la langue comme un gamin.

- Si tu n'es pas content tu n'as qu'à y aller toi-même, il rétorque.

- Certainement pas, déclare Lando en saisissant son chariot. C'est le travail du perdant ça et moi, j'ai gagné l'année dernière.

C'est la vérité, après des années à se faire lamentablement laminer par son ancien coéquipier, Lando a pour la première fois l'année dernière, remporté leur concours. Ce qu'il ne dit pas, c'est qu'il a passé des mois à prendre des cours en secret avec un professionnel et qu'il s'est tellement donné pour l'emporter qu'il a souffert d'un mal d'un insupportable mal de dos les jours suivants.

Mais bon, rien que pour voir l'ébahissement sur le visage de Carlos après qu'il l'a atomisé, cela vaut bien quelques sacrifices.

- Comme si tu n'avais pas passé l'année à me le rappeler, bougonne l'Espagnol. N'y compte pas trop cette année, tu n'auras pas de la chance deux fois.

- Appelle ça de la chance si tu veux, il ricane. Moi, je pense que tes vieilles articulations sont en train de te lâcher grand père.

Le regard furibond que lui lance le brun suffit à déclencher le rire de Lando qui se traîne du côté passager de la voiturette, laissant à Carlos la conduite de l'engin. Privilège du gagnant.

Sur le chemin jusqu'au premier trou, les deux amis parlent surtout de travail, de la fin de la saison qui approche à grands pas, des banalités entre deux personnes qui se connaissent depuis près de six ans et qui font partie des seuls au monde à pouvoir vraiment comprendre la vie de l'autre.

- D'ailleurs, j'ai fait ce que tu m'as conseillé la dernière fois, déclare Carlos de but en blanc quelque part entre le cinquième et le sixième trou.

Sans se laisser déconcentrer, Lando frappe la balle et évite de peu un bunker à droite du green qu'il visait à l'origine. Il esquisse une grimace avant de se tourner vers son ami et la stupide moue victorieuse.

- De quel conseil tu parles au juste ? Il passe une main dans ses cheveux. Je passe ma vie à essayer de t'éviter de faire des choix minables.

Face à lui, Carlos esquisse une grimace comique avant de commencer à ranger ses clubs dans le caddie.

- J'ai parlé avec Rebecca, il précise. Tu sais à propos de la façon dont je me sens dans notre couple.

Incrédule, Lando manque de faire tomber son caddie. Interdit, il dévisage le pilote Ferrari du regard.

- Bordel Carlos, je t'ai donné ce conseil il y a plus de dix mois ! Tu as attendu tout ce temps pour lui en parler ?

- Quoi ? Non ! C'est au tour de Carlos de sembler déstabilisé. Je lui en ai parlé il y a longtemps, genre trois mois, mais comme c'est à toi que j'avais demandé des conseils, je me suis dit que je devais te tenir au courant.

Lando laisse échapper un soupir vaguement rassuré avant de piquer un fard.

- La prochaine fois que tu me sors un truc pareil sans contexte, il prévient. Je te jure que je te pète les dents à coup de club de golf.

Carlos roule lourdement des yeux.

- Tu n'as qu'à le dire si tu ne veux pas savoir, il marmonne dans sa barbe.

L'Anglaise ferme les yeux et se pince l'arête du nez.

- Bien sûr que si je veux savoir Carlos, il râle. Je ne vis que pour t'écouter me parler de ta vie amoureuse.

Le plus âgé pouffe de rire tandis qu'ils se dirigent vers le prochain trou.

- J'ai décidé de rompre avec elle, il lance de nouveau sans préparation. On ne se voit plus depuis quelques semaines déjà.

Lando trébuche sur ses pieds et lève un regard écarquillé vers son ami qui ne semble pas particulièrement triste outre mesure.

- Ah oui ? Il questionne d'une voix étranglée.

- J'ai réfléchi à ce que tu m'as dit, il hausse les épaules. Je pense que tu avais raison.

Lando pince les lèvres, il ne se rappelle pas ce qu'il a bien pu dire.

- Et c'est ça qui t'a amené à rompre avec ta copine ? Il demande.

Carlos secoue la tête.

- Ce n'est pas ta faute si c'est ça qui t'inquiète, il pose une main sur l'épaule de son cadet. Mais c'est à partir de notre conversation que j'ai vraiment commencé à réfléchir à ce que j'attendais vraiment d'une relation de couple.

Le plus jeune avale sa salive et détourne le regard, faisant semblant d'admirer le parcours face à eux.

- Ça va ? Il demande sans le regarder. Je veux dire, je sais que les ruptures ne sont jamais faciles et depuis que je te connais, tu as toujours été en couple alors j'espère que tu sais que je suis là pour toi si tu as besoin.

Lando n'ose toujours pas lever les yeux vers son ami donc il ne peut pas voir l'expression de profonde douceur qui teinte les traits de Carlos avant qu'il ne les recouvre par un masque d'amusement.

- Ce que tu peux être mignon quand tu veux, il enroule un bras autour de ses épaules. Tu le sais ça Muppet ?

Agacé, les joues rouges, Lando se dégage d'un coup d'épaule et lui tire la langue.

- J'essaie juste d'être sympa avec toi grand-père, il grimace. Maintenant que tu as trente ans, personne ne voudra plus de toi.

Face à lui, Carlos lève les yeux au ciel. Il est habitué à ce que Lando se moque de son âge.

- Ne t'en fais pas pour moi, il lui flashe un sourire charmeur. Je n'aurais aucun mal à trouver quelqu'un si j'en ai envie.

Lando roule des yeux. Comme s'il n'était pas déjà au courant de ce détail.

- Vantard, il souffle.

- Mais tu n'as pas tort, l'Espagnol l'ignore. Je ne me rappelle même pas la dernière fois où j'ai été célibataire. Je crois que ça va me faire du bien d'être seul pendant quelque temps, faire le point sur ce dont j'ai vraiment envie. Et puis comme ça, on pourra se faire des virées entre célibataires !

- Oh joie, ricane le plus jeune.

Sortir avec Carlos uniquement pour le voir s'amuser avec toutes les jolies femmes possibles et imaginables ? Lando préférerait encore que le pilote Ferrari se remette en couple sur le champ que de devoir assister à ce carnage.

Il ne compte peut-être pas tenter quoi que ce soit avec Carlos, il n'a pas envie de ramasser les morceaux de son pauvre cœur pour autant.

- Quel engouement, ricane le brun en passant de nouveau une main autour de ses épaules. Un peu plus et on pourrait croire que c'est toi qui t'es fait larguer et moi qui tente de te consoler.

Cette fois-ci Lando ne fait rien pour s'extraire de l'étreinte de son ami, au contraire, il enroule un bras autour de sa taille, le rapprochant de lui.

- Non, c'est juste, il cherche ses mots. Tu es sûr que ça va ? Je ne t'en voudrai pas si tu as besoin d'un câlin ou je ne sais pas, de pleurer un coup ?

Le sourire que Carlos lui adresse, pour ce sourire-là, Lando tomberait de nouveau amoureux sur le champ s'il ne l'était pas déjà. Tendresse, affection et aussi de l'amour, même s'il ne s'agit pas du même type d'amour que celui qui serre le cœur de Lando à chaque fois qu'il le regarde.

- Je t'assure que tout va bien, Carlos parle doucement. À vrai dire, je crois qu'une partie de moi savait que ça ne fonctionnerait pas avec Rebecca dès le départ. Ma rupture avec Isa était encore trop récente, et même si on ne s'aimait plus depuis longtemps, j'aurais dû attendre avant de commencer une nouvelle relation. Pour tout te dire, il y a longtemps que je ne m'étais pas senti aussi bien, je vais bien, c'est promis.

Lando prend encore une brève seconde pour l'observer, cherchant la moindre trace de mensonge ou de mal-être sur les traits de son ami, mais il finit par se rendre à l'évidence, Carlos dit la vérité.

Le pilote McLaren esquisse un doux sourire avant de hocher la tête et l'Espagnol le libère de son étreinte, clôturant implicitement cette conversation.

Le reste de l'après-midi se déroule tranquillement, comme il s'y attendait, Lando se fait détruire par Carlos qui n'a visiblement pas digéré de s'être fait battre au golf et s'est entraîné comme un forcené pour que cela n'arrive plus jamais.

Vers la fin du parcours, alors que le soleil a déjà commencé à décliner à l'horizon, l'Espagnol mène largement leur partie et Lando ne peut que grimacer en imaginant l'année de vantardise et de fanfaronnade qui l'attend.

- Merde ! Merde ! Merde ! Marmonne Carlos depuis l'autre côté du green.

Lando hausse un sourcil, l'autre homme vient pourtant de rentrer la balle dans le trou sans difficulté.

- Quoi ? Il lève les yeux au ciel. Ne me dis pas que tu trouves ça trop facile quand même ? Je risque de me vexer.

Carlos pose les yeux sur lui, surpris.

- Non pas du tout, il secoue la tête. Je devais retrouver Teto et Luigi pour aller au restaurant, mais je n'ai pas vu passer l'heure et j'ai laissé mon téléphone à l'hôtel.

Lando laisse échapper un petit rire, amusé de voir que même après tout ce temps, Carlos n'a pas changé d'un pouce, tête en l'air jusqu'au bout des ongles.

- Prends le mien, il propose en tendant son téléphone à son ami. Le numéro de Roberto dans mes contacts. On ne devrait pas en avoir pour longtemps à terminer, dis leurs que tu les retrouves là-bas directement.

Carlos lui adresse un petit sourire reconnaissant en saisissant l'appareil du bout des doigts.

- Merci Muppet, il sourit.

Lando répond à son sourire par un petit signe de la main et se détourne pour travailler son alignement et son swing. Il esquisse une moue satisfaite quand la balle rentre parfaitement dans le trou et se retourne pour se vanter auprès de son adversaire.

- Tu n'as pas encore gagné papy, je peux encore te...

- C'est une blague ?

La totalité du corps de Lando se fige comme s'il avait été plongé dans un bain d'eau glacée alors qu'à quelques mètres de lui, les yeux de Carlos quittent l'écran du téléphone pour les poser sur Lando, un sourire plein d'incompréhension peint sur les lèvres.

Sur l'écran du téléphone, la dernière chose qu'ait regardée Lando.

La fanfiction Carlando.

The Immortality Of The Crab.

Le sourire retombe lentement sur les lèvres de Carlos lorsqu'il perçoit la peur panique sur le visage de Lando. Il fronce les sourcils.

- Lando ?

L'Anglais à la sensation d'avoir été touché par la foudre, chaque articulation de son corps semble peser une tonne si ce n'est son cœur qui bat si vite dans sa poitrine qu'il menace d'exploser d'une seconde à l'autre.

Toute trace d'amusement a désormais quitté le visage de Carlos qui pâlit à vue d'œil, ses doigts agrippés au téléphone comme si sa vie en dépendait.

- Ce n'est pas une blague, c'est ça ? Il chuchote.

Ses paroles font l'effet d'un uppercut au plus jeune qui sort de son état de choc pour immédiatement céder à la panique qui lui broie l'estomac.

Inconsciemment, il lâche le club de golf qui tenait et fait quelques pas, la main tendue en avant pour récupérer son téléphone.

- Rends-moi ça ! Il couine d'une voix aiguë.

Pour ne rien arranger, Carlos fait un pas en arrière, ramenant le cellulaire contre sa poitrine.

- Lando...

- Rends-le-moi, je te dis !

Les deux hommes s'affrontent du regard, la froide incompréhension de Carlos contre la terreur vibrante de Lando qui clôt l'espace entre eux.

- Mais...

- Je ne veux pas en parler, le plus jeune bégaie. Rends-moi mon téléphone.

Les oreilles du pilote McLaren bourdonnent, il n'entend plus que les battements frénétiques de son cœur et sa tête tourne.

C'est impossible, ça ne peut pas arriver, pas après tous les efforts qu'il a fait pour garder son amour secret tout ce temps. Carlos ne peut pas savoir pour les fanfictions, il ne peut pas savoir pour Lando.

C'est impossible, ce n'est pas en train d'arriver.

Il ferme les yeux pour retenir les larmes qui s'y forment.

C'est impossible.

- Muppet, il faut qu'on....

- S'il te plaît, la voix du bouclé tremble, comme une supplique. Fais comme si tu n'avais rien vu, d'accord ? S'il te plaît Carlos.

Le silence entre eux est si lourd, Lando a l'impression que la terre s'est arrêtée de tourner. Il a du mal à respirer, ses pensées sont un tel désordre et pourtant, il garde les yeux fermement fixés sur le téléphone plaqué contre le torse face à lui. Il ne lève jamais les yeux, pas une seconde, pour rencontrer ceux de Carlos qui ne demande que ça.

Il ne peut pas le regarder.

- D'accord, finis par souffler le plus âgé.

Lentement, il lui tend l'appareil que Lando s'empresse de ranger dans sa poche, un soupir de soulagement sur le coin des lèvres.

- Merci, il murmure.

Lando s'écarte, ne lève toujours pas les yeux, le silence est lourd, gênant, ils ne seront plus jamais les mêmes.

- Je rentre à l'hôtel, il balbutie au bout d'un moment.

Aucune réponse ne vient et il n'en attend pas. Les muscles engourdis et les mains tremblantes, il se détourne.

Lando quitte le parcours à pied, sans jamais se retourner, laissant derrière lui un Carlos muet et les morceaux de son cœur brisé.





Epilogue : Two bros, kissin' on the podium but five feet apart cuz they're not gay

Dans le couloir qui mène au podium, Carlos laisse échapper une respiration nerveuse.

Sa combinaison lui colle à la peau à cause de la course qui vient d'avoir lieu, il meurt de chaud et son cœur refuse de retrouver un rythme régulier, mais ce dernier point n'a pas de lien particulier avec l'effort physique qu'il vient de fournir.

Le dernier Grand Prix d'une saison, c'est toujours un moment particulier, une sensation à part, mais aujourd'hui, tout au long de la journée, il n'a pensé qu'à une seule chose et ça n'est pas la Formule 1.

À côté de lui, Charles lui adresse un petit sourire. Ce n'est pas le résultat qu'ils avaient espéré pour leur dernière course ensemble, mais ce qui est fait est fait et ils ne peuvent plus changer le passé.

- C'est le grand moment ? Demande doucement le Monégasque.

Carlos hoche simplement la tête, ne faisant pas confiance à sa bouche pour formuler des mots et à sa voix pour ne pas dérailler.

Gentiment, Charles lui tapote l'épaule en signe d'encouragement.

- Je suis sûr que tout va bien se passer, il déclare avec certitude en voyant le stress de son coéquipier.

- On va rapidement le savoir de toute manière, il finit par lâcher dans une expiration.

Charles lui lance un nouveau sourire et presse doucement son épaule avant de le relâcher au moment où Lando les rejoint dans le couloir.

L'Anglais est le dernier arrivé, c'est aussi l'homme du jour, le dernier gagnant de la saison, retenu un peu plus longtemps par l'interview de fin de course, ils ne se sont même pas croisés dans la cooldown room.

- Ça va ? Demande l'Espagnol à demi-mot.

- Je meurs de chaud ! S'exclame le pilote McLaren.

Le sourire immense de Lando est communicatif et Carlos ne retient pas un petit rire stupide qui remonte dans sa gorge. À côté d'eux, Charles roule des yeux devant leur mine gaga et s'écarte de quelques pas pour leur laisser un peu d'intimité.

Doucement, ses doigts viennent effleurer ceux de son amant qui entremêlent leurs doigts.

Carlos a envie de l'embrasser, il a envie de goûter la victoire sur ses lèvres, mais ce n'est pas encore le bon moment.

- Bravo, pour ta course, il souffle doucement. Tu as été magistrale.

- Bravo, pour la tienne, complimente Lando. J'ai bien cru que le premier virage allait avoir raison de nous tous, mais tu t'en es très bien sorti.

- Pas assez pour te rattraper, il grimace et Lando rigole.

- Tu as vu la fusée que j'avais aujourd'hui ? Même dans tes rêves, tu n'aurais pas pu me rattraper.

De sa main libre, Carlos passe une main joueuse dans les cheveux bouclés de son ancien coéquipier.

- Ne prends pas la grosse tête, il met en garde avec humour. Ou tu dors sur le canapé.

Le visage du plus jeune prend une expression outrée.

- Tu n'oserais pas, il contredit.

- Envie de me voir essayer ? Il ricane, charmeur.

Ils pouffent de rire comme les deux idiots amoureux qu'ils sont et Carlos respire un peu mieux.

Il sait que Lando a compris l'origine de son stress et qu'il s'agit là de sa manière de l'aider à se sentir mieux. Ils ont beau avoir pris la décision à deux après y avoir réfléchi pendant des mois à faire des plans A, B et C, il n'empêche que maintenant qu'ils y sont vraiment, Carlos est stressé.

Un pli soucieux se forme sur le front du pilote McLaren qui étreint un peu plus fort ses doigts.

- Tu sais que l'on n'est pas obligé de le faire, pas vrai ? Il demande doucement, comme s'il avait peur de le brusquer. On n'a pas à faire ça comme ça, ni même maintenant si tu n'en as pas envie.

- Je sais, il lui sourit avec tout l'amour dont il est capable. Je sais Muppet, mais j'ai envie de le faire maintenant, j'en ai vraiment envie.

- OK, Lando semble rassuré. Mais jusqu'au dernier moment si tu ne veux plus tu dois me le dire, je ne t'en voudrais pas, jamais.

Délicatement, Carlos lève la main qui n'est pas entremêlée à celle de Lando pour venir délicatement caresser sa joue. Au moment où il se penche pour pouvoir ravir ses lèvres, ils sont interrompus par un Charles vaguement gêné.

- Roméo et Juliette ! Il les interpelle. Il faut qu'on y aille, c'est l'heure.

Comme pour lui donner raison, le speaker hurle le nom du Monégasque et un tonnerre de hurlement résonne dans le couloir.

- Merci Charles, il lui sourit. On arrive.

Son coéquipier leur adresse un dernier signe de tête et un sourire d'encouragement avant de disparaître par la porte, acclamé par des milliers de spectateurs.

Carlos avale difficilement sa salive.

- Je te retrouve dans deux minutes, il souffle à l'Anglais avant de lâcher sa main.

L'espagnol se redresse, s'écarte de Lando et entreprend de traverser le couloir lorsque son nom est annoncé à son tour.

Au moment de passer la porte, il est arrêté par Lando qui l'appelle.

- Hé, Carlos !

Il se retourne à demi, le pas sur le seuil de la porte.

- Hm ?

- Je t'aime.

Le sourire qui étire les traits de son visage est si immense qu'il lui fait mal. Carlos n'a pas le temps de répondre qu'on le tire dehors en lui indiquant de se dépêcher d'aller jusqu'au podium. En traversant la plateforme, il reconnaît quelques figures connues en contrebas qu'il salue en plus de faire coucou à la foule.

Charles le regarde arriver, un fin sourire amusé accroché aux lèvres et Carlos lève les yeux au ciel.

L'Espagnol monte fièrement sur la deuxième marche du podium, saluant la foule qui l'ovationne en contrebas. La liesse atteint son summum lorsque Lando monte à son tour sur l'estrade, saluant le monde qui explose pour lui.

La cérémonie de remise des trophées et les hymnes passent comme dans un rêve pour lui, sourire, soulever le trophée, prendre quelques photos et enfin, enfin, le moment qu'il a l'impression d'avoir attendu toute sa vie.

Les confettis et les feux d'artifices explosent autour d'eux et à l'instant où ils devraient saisir leurs bouteilles de champagne, Lando se tourne vers lui, une toute dernière interrogation dans le regard doublé d'un :

- Toujours partant ? Soufflé dans un sourire.

Lando ne fera rien sans son accord.

Le sourire sincère qui illumine son visage doit être une réponse suffisante parce que Lando se penche pour saisir le col sa combinaison et l'attirer à lui dans un baiser d'anthologie.

Au moment de joindre leurs lèvres, Carlos n'a pas la moindre hésitation.

Il n'hésite pas parce qu'il est certain de son amour, sur de Lando et sûr de lui.

Aussi parce qu'il sait que quelque part dans la foule qui les regarde, muette de choc devant ce moment qui va marquer l'histoire, Max a répété et aiguisé ses meilleures punchlines à jeter à la figure de journalistes un peu trop médisants.

Parce que quelque part dans le paddock, Lewis agite fièrement un drapeau LGBTQ+.

Et parce que sur les réseaux sociaux, le monde s'enflamme après que George ait appuyé sur le bouton de publication du communiqué de soutien officiel de l'association des pilotes.

Carlos embrasse Lando, il l'embrasse comme si sa vie en dépendait, parce qu'elle en dépend. Après toutes ces années, toutes ces épreuves et le temps qu'il leur aura fallu pour se retrouver et apprendre à s'aimer, le jeu en valait la chandelle.

Alors le monde autour d'eux peut bien exploser, pour ce qu'il a à en faire, temps que les lèvres de Lando sont pressées contre les siennes, demain sera une belle journée.





Adossé à la vitre de l'abribus sous lequel il s'est abrité, Lando laisse échapper un souffle glacial. L'air qui quitte ses poumons se répand autour de lui en un nuage de condensation blanchâtre.

Les mains dans les poches et le nez enfoncé dans le col de son manteau, il attend depuis de longues minutes que Max, son meilleur ami, daigne pointer le bout de son nez.

La saison de Formule 1 est terminée depuis plusieurs semaines et on ne peut pas dire que Lando est au meilleur de sa forme. La F1 n'a pas grand-chose à voir avec son état même si cela fait indéniablement partie de l'équation.

L'Anglais est épuisé par cette longue saison de courses, la plus longue de sa carrière, mais il est avant tout fatigué de fuir. Fuir Carlos comme la peste partout où il va, éviter de s'attarder dans les salles de conférences, s'installer le plus loin possible de lui lorsqu'il ne peut pas s'éclipser, maintenir le sourire pour que personne ne soupçonne la nouvelle distance créée entre les deux pilotes. Passer la fin de la saison enfermée dans son motor home et surtout, surtout ne jamais croiser le regard de Carlos, baisser les yeux, se lancer dans des conversations effrénées avec un Oscar passablement surtout, tout faire pour ne pas aborder le tabou qui a créé un froid entre eux deux.

Parce que Lando ne peut tout simplement pas se résoudre à l'affronter, à répondre aux questions que l'Espagnol aura forcément, à avouer des sentiments qu'il s'est efforcé de garder enfoui au plus profond de son cœur sans oser ne serait-ce que les formuler à voix haute.

C'est peut-être lâche, mais c'est la seule solution qu'il a trouvée pour maintenir la tête hors de l'eau et ne pas simplement s'effondrer.

La fin de la saison s'est donc déroulée dans un brouillard flou et stressant pour le pilote McLaren qui s'est empressé de prendre la fuite une fois la ligne d'arrivée passée à Abou Dhabi.

Pas de fête, pas de célébrations pour lui, mais un nécessaire retour à la maison.

Le voilà quelques semaines plus tard, subissant de plein fouet le glacial et humide hiver Anglais en pleine déprime et le cœur notablement brisé. Pas sa période la plus glorieuse.

À vrai dire, si sa mère ne l'obligeait pas à l'accompagner dans toutes ses sorties, il passerait la majorité de son temps enfermé dans sa chambre à dormir ou à regarder des édits et lire des fanfictions.

Aussi, en désespoir de cause, madame Norris s'est résolue à appeler à l'aide et à rameuter la cavalerie en la personne de Max, récemment revenu d'un tournage Quadrant sur une île paradisiaque spécialement pour sortir son meilleur ami de son hibernation forcée.

Lando est d'ailleurs en train de l'attendre. Son ami lui a promis un restaurant et une soirée entre potes pour lui vider l'esprit et réfléchir à un plan d'attaque pour la saison prochaine.

Fraîchement lavé, à la demande de sa mère, et habillé d'un jean classique et d'un gros pull en mailles douces et réconfortantes, Lando a pris le bus pour rejoindre le point de rendez-vous où Max est censé passer le chercher.

Sa montre affiche dix-neuf heures quinze, Lando laisse échapper un soupir avant de remettre sa main au chaud dans la poche de son manteau. Ses écouteurs n'ont plus de batterie depuis presque vingt minutes, son nez coule, il a oublié de prendre des mouchoirs et il ne sent plus ses doigts de pieds.

Agacé, il laisse échapper une nouvelle brume de concentration avant de commencer à se balancer d'un pied à l'autre, essayant de faire revenir un peu de sang dans ses membres frigorifiés.

Le ronronnement d'un moteur qui vrombit attire brièvement son attention et du coin de l'œil, il perçoit l'éclat reconnaissable d'une Ferrari 275 GTB.

Pensivement, il regarde le bolide passer de l'autre côté de la route, un petit sourire nostalgique plaqué sur ses lèvres. La Ferrari 275 GTB, un modèle vintage de la deuxième moitié des année soixante aux courbes d'une rare élégance et au moteur V12 rugissant produite à moins de mille exemplaires dans le monde n'est autre que la voiture conduite par le Carlos Sainz de sa fanfiction préférée : The Immortality Of The Crab.

En voir une aujourd'hui, c'est une piqûre douce-amère dans le cœur de l'Anglais qui continue malgré tout de la regarder lorsque la voiture s'engage dans le rond-point au bout de la rue. Il hausse les sourcils en la voyant faire le tour et prendre la dernière sortie, revenant sur ses pas.

Les mains dans les poches, il regarde l'auto ralentir à son niveau et s'arrêter à l'arrêt de bus, déclenchant ses warnings.

Incrédule, il regarde le conducteur dont il ne parvient pas à discerner les traits, cachés derrière une casquette, retirer sa ceinture et ouvrir la portière.

Comme dans une mauvaise blague ou le début de sa version personnelle de « Destination Finale », Lando regarde l'inconnu retirer sa casquette et révéler le visage hésitant et le petit sourire stressé de Carlos Sainz.

- Salut Muppet, il souffle au bout de quelques secondes d'un silence pesant.

Bouche bée, il faut un long moment pour comprendre ce qui se déroule sous ses yeux.

Carlos est là, juste devant lui, un samedi soir en plein milieu de la campagne anglaise.

C'est parfaitement inconcevable.

Et pourtant, il y a tellement longtemps qu'il n'a pas entendu sa voix, il ne peut empêcher son pauvre cœur de s'emballer.

Carlos semble remarquer son choc, puisqu'il pince les lèvres, le regard légèrement hésitant et les mains ballantes le long de son corps.

- Tu montes ? Il indique la voiture du regard. Je t'emmène.

- J'attends Max, Lando annonce de but en blanc.

C'est la seule idée pertinente que son cerveau est parvenu à formuler.

- Je sais, il y a un doux sourire sur les lèvres de l'Espagnol. Mais il ne viendra pas, c'est moi que tu attends. Allez, ne reste pas là dans le froid, grimpe.

Lando fronce les sourcils, les pièces du puzzle s'imbriquent lentement dans son esprit.

Max espèce de sale traître, il va lui faire la peau la prochaine fois qu'il lui mettra la main dessus.

- Merci, il détourne le regard. Mais je préfère rentrer en bus.

Il glisse malgré tout une œillade rapide en direction de l'autre homme, juste à temps pour le voir passer une main dans ses cheveux et lever les yeux au ciel.

Lando pince les lèvres, même son côté agacé lui a manqué.

- Lando, sa voix sonne exaspérée. Je ne veux t'obliger à rien, mais monte dans cette voiture.

- Je préfère le bus, il répond du tac au tac avant d'enfoncer son visage dans le col de son manteau pour en faire un rempart.

L'Espagnol lui lance un regard incrédule avant de soupirer de nouveau.

- Arrête de faire ta tête de mule.

Le plus jeune fronce les sourcils, mauvaise réponse.

- Je ne fais pas ma tête de mule, je n'ai pas vraiment envie de te voir au cas où tu n'aurais pas remarqué.

Il peut voir l'impact de ses mots toucher l'autre homme de plein fouet et Lando s'en veut immédiatement. Il pince les lèvres et baisse les yeux, mais ne s'excuse pas pour autant.

- Ah, il y a un rire sans joie dans la voix de l'autre. Tu veux dire quand tu m'évitais comme la peste ou quand tu as bloqué mon numéro ? Oui, je crois que j'avais compris le message.

Une boule de culpabilité menace d'étouffer Lando sur place, mais il ne desserre pas les dents.

Les deux hommes tombent dans un silence gêné, uniquement interrompus par le bruit des quelques voitures qui passent à leur niveau et Lando ne peut s'empêcher de remarquer qu'ils attirent l'attention.

Distrait, il sursaute quand Carlos reprend la parole.

- Écoute, il passe une main sur son visage. Je ne veux pas te forcer à quoi que ce soit, c'est juste que je me suis donné beaucoup de mal pour tout ça, la voiture, le restau... Mais si tu ne veux pas, je comprends. Est-ce que je peux juste te ramener chez toi ?

Une lueur d'incompréhension brille dans le regard du plus jeune lorsqu'il relève la tête.

La voiture ? Le restaurant ?

De quoi est-ce qu'il parle ?

Encore une fois, il lui faut quelques secondes de trop pour mettre les informations bout à bout. The Immortality Of The Crab, chapitre 19, lorsque Carlos emmène Lando à un rendez-vous pour la première fois, il vient le chercher dans une Ferrari 275 GTB avant d'aller au restaurant, est-ce que c'est de ça qu'il parle.

L'incompréhension doit se lire clairement sur son visage, car les joues de l'Espagnol prennent une teinte rose immanquable qui ne fait qu'accentuer ses interrogations.

Est-ce que Carlos aurait lu sa fanfiction préférée ? Mais pourquoi ? Et surtout, comment ? Quand ?

- Oh, s'échappe simplement de ses lèvres.

Face à lui, c'est au tour de Carlos de détourner le regard et de passer une main dans ses cheveux à l'arrière de sa nuque.

- Je peux tout t'expliquer, il parle rapidement. Si tu acceptes de venir avec moi.

Lando n'a pas vraiment envie de faire face à son amour de toujours, mais quelque part au fond de lui, la corde de la curiosité a été tirée et il est incapable de résister. Surtout pas quand toute cette histoire fait naître en lui une bonne dose d'espoir un peu fou.

- OK, il souffle, se surprenant lui-même au passage.

De l'autre côté, Carlos relève vers lui de grands yeux, comme s'il n'en croyait pas ses oreilles.

- OK ? Il demande une confirmation.

- Oui, allons-y.

La voix de Lando n'a rien d'assurée, ses joues sont rouges, son regard fuyant, mais il prend son courage à deux mains et marche jusqu'à la portière passagère. D'une démarche décidée, il s'installe côté passager et croise les bras sur son torse, cachant son visage encore une fois dans le col du manteau.

Carlos, toujours debout à côté de la Ferrari, le regarde faire, incrédule, avant d'esquisser un grand sourire et de se glisser derrière le volant.

De peur de faire un faux pas, l'Espagnol n'ose pas ouvrir la conversation et ils sont tous les deux silencieux pendant quelques minutes.

- Où est-ce que tu l'as trouvé ? Lando finit par demander sans le regarder.

- Trouver quoi ?

- La voiture, il précise. Tu n'en avais pas de comme ça.

C'est vrai, Carlos n'a jamais été du genre à collectionner les voitures contrairement à lui. Aux dernières nouvelles, il n'avait que celle offerte par Ferrari l'année passée.

- Ah, elle n'est pas à moi, l'Espagnol caresse le volant d'un air admiratif. J'ai demandé à Ferrari de m'en prêter une, ça n'a pas été facile. Finalement, je suis passé chez un collectionneur, je dois la rendre demain matin.

Lando hoche la tête, il ne pensait pas que Carlos pourrait se donner autant de mal pour une voiture, ou plutôt pour coller aux détails de ce fameux chapitre, si sa théorie se confirme.

Les deux hommes roulent en silence durant un moment, Lando n'ose pas regarder Carlos alors il se contente d'observer l'extérieur à travers la fenêtre, profitant occasionnellement du reflet de la vitre pour apercevoir la silhouette détendue de son ancien coéquipier.

La route est plutôt rapide et ils ne tardent pas à se retrouver dans la banlieue de Londres sans que l'Anglais ne puisse dire où exactement.

Il leur faut encore quelques minutes de route silencieuse avant que Carlos ne s'engage dans une allée relativement peu éclairée. Au bout, le pilote Ferrari gare la voiture devant l'entrée un restaurant tellement discret que Lando ne l'aurait même pas remarqué au premier regard.

L'Espagnol quitte le siège conducteur pour laisser les clés à un voiturier et Lando s'empresse de le suivre.

- Où est-ce que l'on est ? Il demande précipitamment. Je ne suis pas habillée pour aller dans un truc chic.

Carlos se retourne à demi, juste assez pour que Lando puisse apercevoir le doux sourire qui habille ses lèvres, le faisant rougir comme une tomate, et pose une main sur le bas de son dos, le guidant à l'intérieur.

- C'est bon, il parle d'une voix mélodieuse. Je me suis occupé de tout.

Immédiatement après avoir passé le seuil, Lando s'arrête, le souffle coupé, incapable de formuler une pensée cohérente et Carlos le laisse faire, une mine amusée et un peu fier de lui peinte sur le visage.

Lando connaît cet endroit, il en est certain et pourtant, il n'est jamais venu ici en personne. Il a lu ces lignes tellement de fois qu'il pourrait le citer de tête, comme un poème que l'on apprend à l'école.

Autour d'eux, une salle de taille moyenne, pas trop petite pour que l'on ne s'y sente pas oppressé et pas trop grande, de façon à ce que l'atmosphère reste intime, romantique. Chacun des murs est orné de dizaines d'étagères, remplies de milliers, de dizaines de milliers de bouteilles de tous les alcools du monde si joliment présentées et éclairées que l'on pourrait se tromper et penser que le soleil les illumine de l'intérieur.

De grands arcs en terre blanche donnent l'impression d'une architecture des îles grecques comme Santorin ou la Crête qui baignent les lieux d'une atmosphère douce et estivale malgré l'hiver qui règne à l'extérieur.

Au plafond, des glycines et d'autres arbres fleuris forment un toit végétal à couper le souffle et diffuse une douce odeur de fleurs dans tout le restaurant.

L'ensemble est à couper le souffle, tiré d'une scène du film Mamma Mia ou d'une carte postale d'été.

Mais si Lando connaît aussi bien ce restaurant, c'est parce que c'est l'exacte description de l'endroit dans lequel le Carlos de The Immortality Of The Crab emmène son Lando fictif pour leur premier date.

Cependant, Lando est persuadé que l'auteur de la fanfiction n'a jamais donné le nom du restaurant dans lequel se déroule la scène. Jusqu'à maintenant, il pensait même qu'il s'agissait d'une pure invention.

Alors comment Carlos a-t-il fait pour savoir ?

Estomaqué, il se tourne vers l'Espagnol qui rayonne à présent de confiance à présent.

- Comment est-ce que tu... ? Il souffle, incrédule.

- Si on allait s'installer, il le coupe gentiment. Notre table est là-bas.

Docilement, Lando hoche la tête et se laisse guider jusqu'à une table, sans doute la mieux placée du restaurant actuellement désert, rendu sans voix par le spectacle et par la main de Carlos qui n'a pas quitté le creux de son dos.

Les deux hommes s'installent à table et Lando est soudain gêné par son apparence en découvrant le pantalon de costume élégant et la chemise seyante dont s'est paré le pilote Espagnol. À côté, son pull en laine et son vieux jean font pâle figure, mais le sourire qui lui adresse son ancien coéquipier le rassure un peu.

Rapidement, un serveur vient prendre leurs commandes et ils se retrouvent tous les deux, Lando n'a plus de menu derrière lequel se cacher.

Mordu par la curiosité, il ne se retient pas plus longtemps.

- Tu as lu la fanfiction, il déclare avec certitude.

Face à lui, Carlos esquisse un petit sourire avant de hocher la tête.

- J'ai lu la fanfiction, il approuve. Et quelques autres en plus. Drôle de nom d'ailleurs.

Lando le regarde avec incompréhension, incapable de déterminer s'il est incroyablement gêné, affreusement mortifié par l'attitude sereine de Carlos ou un mélange de deux.

- Pourquoi ? Il demande du bout des lèvres.

Avec une lenteur criminelle, le plus âgé déplie sa serviette sur ses genoux et prends une gorgée de son verre de vin avant de le reposer sur la table.

- Parce que je voulais savoir, il répond en posant son regard dans le sien.

Lando pique un fard.

- Savoir quoi au juste ? Je trouve tout ça plutôt évident, il joue avec sa fourchette.

- Tu te trompes, ça ne l'est pas, rétorque Carlos. Je voulais savoir, j'ai vraiment essayé de comprendre ce qui a bien pu te faire te replier sur des histoires à notre sujet plutôt que de venir me parler directement.

- Peut-être parce que j'ai un semblant d'instinct de conservation ? Les mots de Lando sont amers. Parce que je savais dès le départ que c'était voué à l'échec et que plutôt que de ruiner bêtement notre amitié, j'ai préféré garder tout ça pour moi et libérer ce trop-plein de sentiments d'une manière qui n'affecte pas notre relation.

Le regard que lui lance Carlos est blessé, un brin torturé.

- Tu penses vraiment que j'aurais pu être cruel envers toi ? Que je me serais moqué de tes sentiments ? Il demande d'une petite voix qui ne lui ressemble pas.

Lando secoue la tête.

- Ce n'est pas ce que j'ai dit, il corrige. Carlos, tu es mon plus vieil ami en Formule 1, peut-être le seul vrai ami que j'ai quand j'y pense. Je te connais, je sais parfaitement que je n'aurai eu aucune chance parce que tu n'es pas attiré par les hommes, tu as toujours été amoureux de femmes et c'est très bien, je ne te reproche rien, jamais, mais tu ne peux pas m'en vouloir de ne pas t'en avoir parlé. C'est ma manière de me protéger et de protéger notre amitié, elle n'est peut-être pas juste, ou bonne, mais c'est la seule que j'ai trouvée.

De l'autre côté de la table, Carlos accuse le coup, les yeux baissés sur son assiette pendant quelques secondes et Lando s'en veut déjà d'avoir accepté de le suivre jusque dans ce restaurant.

Ce n'était pas une bonne idée, il aurait dû le savoir.

Ça ne fait pas moins mal pour autant.

- Je n'ai jamais été attiré par les hommes, prononce le brun d'une voix résolue.

- Je sais Carlos, il ne retient pas un sourire malheureux. Ça va aller, je t'assure que tout ira bien.

Mais contre toute attente, la main de l'Espagnol saisit la sienne, figeant Lando sur place comme une statue de glace.

- Tu ne m'as pas laissé finir, Carlos secoue la tête et pose ses yeux dans les siens. Je n'ai jamais été attiré par les hommes, mais j'ai déjà été attiré par toi.

Le monde pourrait très bien s'effondrer autour de Lando, il n'est pas certain qu'il s'en apercevrait. Son esprit répète en boucle les derniers mots de son aîné, attendant sans doute qu'il les retire et lui annonce qu'il ne s'agissait que d'une blague, mais cet instant ne vient pas et la tête de l'Anglais commence à tourner.

Il a tant de fois espéré, prié, supplié dans le secret de son cœur que Carlos prononce de tels mots, qu'il lui avoue que ses sentiments sont partagés et pourtant, alors qu'il vient juste de le faire et le regarde à présent comme s'il attendait que Lando lui retourne sa déclaration, le seul sentiment qui inonde le cœur brisé du jeune homme, c'est la tristesse.

Sans violence, il retire sa main de l'éteinte des doigts du pilote Ferrari et les pose bien à plat sur ses genoux alors qu'un goût de fer se répand sur sa langue.

- C'est exactement pour ça que je ne voulais pas que tu l'apprennes, il souffle, tête basse.

- De quoi tu parles ?

- Écoute Carlos, il prend une inspiration tremblante. Tu ne me dois rien, tu n'as pas à te forcer à faire quoi que ce soit parce que tu sais que je t'aime. C'est plus douloureux qu'autre chose et ça me fait me sentir comme une merde.

C'est la première fois que Lando le dit à voix haute, c'est la première fois qu'il dit à Carlos qu'il l'aime. Cette phrase lui fait l'effet d'une douche froide, d'une claque et en même temps, il se sent soudainement plus léger, liberté du poids de ce secret qui porte depuis des années maintenant.

Face à lui, Carlos semble bouche bée, il lui faut une seconde pour se reprendre.

- Tu crois que... Tu penses vraiment que je serais capable de faire semblant de t'aimer simplement pour préserver notre amitié ?

- Je ne sais pas, Lando hausse les épaules. Je crois que tu m'aimes, sincèrement, mais je ne pense pas que ça soit de l'amour. Je pense que tu as peur de perdre notre amitié, que tu as peur de me blesser et de me donner l'impression que tu ne me comprends pas et qu'en essayant à tout prix de me garder près de toi, tu dis des choses que tu ne penses pas vraiment et je ne veux pas te forcer à m'aimer. Ce n'est pas ça l'amour, je ne mérite pas ça et toi non plus.

Carlos semble avoir du mal à encaisser le coup, il se redresse dans sa chaise, acquiesce à peine quand le serveur apporte leurs entrées, mais Lando n'arrive pas à regretter d'avoir vidé son sac.

Il vaudra toujours mieux une vérité douloureuse que des regrets éternels.

- D'accord, je comprends, il avale difficilement sa salive. Je débarque comme une fleur et j'espère qu'une bagnole et un chouette restaurant arrangeront les choses alors que tu es amoureux de moi depuis je ne sais même pas combien de temps et que je n'ai putain de rien vu du tout. Comment est-ce que j'ai pu être aussi aveugle ?

- Carlos...

- Non, s'il te plaît, il lève la main pour l'arrêter. Ça fait des semaines que je retourne chaque moment de ces dernières années dans ma tête, je cherche les indices que j'ai manqué, ce que tu as pu dire, ce que j'aurai pu ne pas voir.

Il s'arrête une seconde, les yeux fixés sur ses poings serrés et Lando n'ose plus respirer, le cœur au bord des lèvres.

- J'ai même lu toutes ses fanfictions qui sont écrites sur nous pour essayer de trouver une réponse. J'ai cru qu'elles allaient me dégoûter, qu'elles me convaincraient que ce n'est pas une bonne idée, que je ne peux pas te regarder comme ça, que je ne peux pas m'être autant trompé sur mes propres sentiments à ce point.

Le garçon aux yeux couleur de ciel commence à comprendre où les mots de son aîné mènent, son cœur s'emballe dans sa poitrine et sa bouche s'assèche.

- Mais la vérité, c'est que je n'ai pas été dégoûté, pas du tout même et ça m'a fait peur, Carlos ferme les yeux comme s'il se remémorai cet instant. J'étais perdu parce que je ne savais pas quoi faire de tous ces sentiments, toutes ses émotions que j'avais l'impression de découvrir et qui pourtant étaient là depuis des années. Je veux dire, la moitié des fans de Formule 1 nous imagine ensemble et moi, je ne m'en rends compte que maintenant, à quel point est-ce que je suis débile franchement ?

Un pincement serre le cœur du pilote McLaren qui lui adresse un petit sourire plein de tendresse.

- Tu n'es pas stupide, il souffle doucement.

Carlos lui sourit en retour et tend doucement les doigts, demande silencieuse pour nouer leurs mains et après une brève hésitation, Lando la saisit en retour, frissonnant lorsque le pouce du brun caresse la peau sensible à l'intérieur de son poignet.

- Tu n'as pas besoin de me ménager, un petit rire échappe au pilote Ferrari. Ce que je veux dire, c'est que j'ai l'impression que ma tête va exploser, je me suis posé plus de question ces dernières semaines que pendant tout le reste de ma vie, mais si une chose est parfaitement claire, c'est que j'ai détesté plus que tout que tu t'éloignes de moi.

- J'aurais fini par revenir, tu sais, chuchote le bouclé. Après un certain temps.

- Je sais, il hoche doucement la tête. Et tu as raison, je ne sais pas si ce que je ressens est véritablement de l'amour, mais je sais aussi que je ne pourrais jamais le savoir si je n'essaie pas et je ne peux pas essayer sans toi Muppet.

En son for intérieur, le Lando qui est tombé amoureux de Carlos presque au premier regard a terriblement envie d'y croire, besoin même. Mais le Lando qui vient de passer ses années à tenter de réfréner cet amour dévorant ne peut s'empêcher d'avoir peur, de douter.

Son regard s'attarde sur leurs mains jointes, sur la manière qu'ont les doigts de Carlos, dorés contre sa peau blanchie par l'hiver, de caresser les siens comme s'ils étaient la chose à la délicate, la plus fragile et précieuse de l'univers.

- Tu es sûr de toi ? Il demande au bout d'un moment, redoutant déjà la réponse.

- Non, Carlos lui répond honnêtement, mais sans se départir de son sourire. Je ne suis sûr de rien, je suis terrifié même, mais si le Carlos de ton histoire a eu le courage de croire en ses sentiments et que son Lando l'a accepté comme il est avec ses défauts et ses failles, alors je n'ai pas le droit de ne pas essayer.

Alors, pour la toute première fois, Lando s'autorise à y croire, rien qu'un peu. Si Carlos est prêt à faire le premier pas, il ne lui fermera pas la porte de son cœur, pas encore.

Peut-être que c'est une erreur, peut-être que cela ferra mal, mais Carlos à raison, s'il se cantonne à son monde d'histoire et de fiction, il ne saura jamais quel grand amour peut lui réserver la réalité.

Le sourire que lui adresse l'Espagnol est immense, chaud, réconfortant et Lando sait qu'il n'attend pas de réponse, pas encore, qu'il lui laisse le temps de mesurer la sincérité de ses sentiments à son égard et il aime ça, vraiment.

Le dîner qui suit est un peu étrange, gauche, maladroit, comment se comporter après avoir passé des années à être des amis ? Mais il est drôle aussi, comme ils l'ont toujours été, comme ils le seront encore longtemps.

- Comment as-tu su ? Demande Lando au bout d'un moment. Que c'était ce restaurant-là, je veux dire, l'auteur ne donne jamais son nom dans l'histoire.

- Oh, ça, Carlos avale une nouvelle gorgée de vin. J'ai demandé directement à l'auteur.

Le plus jeune manque de s'étouffer avec sa bouchée.

- Tu as fait quoi ?! Il s'exclame.

- Elle n'était pas bien compliquée à trouver, il hausse les épaules. Son Instagram était dans une note de fin de chapitre alors je lui ai envoyé un message et elle m'a donné le nom du restaurant tout de suite.

L'information semble si irréelle et improbable que le cerveau de Lando n'arrive pas à la traiter.

- Tu n'as pas peur qu'elle répande l'information ? Il demande.

- Pas vraiment. Elle avait l'air d'une fille drôle et sympa et puis de toute façon, même si elle en parle, personne ne voudra la croire.

- Tu viens de dire que tu lui avais envoyé un message, fait remarquer le bouclé. Elle a une preuve.

- Oui, mais pas avec mon compte officiel, il lève les yeux au ciel. Muppet, tu me prends vraiment pour un débile ?

- Eh bien, Lando esquisse un rictus narquois. Étant donné le temps qu'il t'a fallu pour comprendre que j'étais amoureux de toi...

Lando a juste le temps d'éclater de rire devant la mine outrée de Carlos avant de prendre la serviette de ce dernier dans la figue en représailles.

Le reste de la soirée se déroule comme dans un rêve et c'est comme si Carlos et Lando ne s'étaient jamais séparés, éloignés uniquement pour mieux se trouver.

Comme dans ce fameux chapitre de The Immortality Of The Crab, après le repas, Carlos emmène Lando pour une longue balade en voiture jusqu'au bord de mer. Les deux hommes ne voient pas le temps passer tandis que Carlos le ramène lentement jusque chez lui et la nuit est bien avancée quand ils se retrouvent face à face sur le perron de la maison familiale des Norris.

- Voilà, chuchote Carlos comme s'il craignait de réveiller les parents de Lando en élevant la voix. Comme dans l'histoire.

Lando adresse un beau sourire.

- Pas tout à fait, il contredit. Dans l'histoire, Carlos embrasse Lando pour lui souhaiter bonne nuit.

Il a le nez rouge, ses cheveux ressemblent sans doute à un nid d'oiseaux particulièrement désordonnés et le froid brûle ses oreilles, mais il n'échangerait cet instant pour rien au monde. Cependant, après quelques secondes, en voyant l'hésitation dans le regard de son vis-à-vis, il s'éclaircit la voix et se reprend.

- Mais on n'est pas obligé de le faire, il rassure en nouant doucement leurs doigts. On n'est pas obligés de suivre l'histoire, on peut aller à notre rythme. C'est nous les héros après tout.

Carlos secoue la tête, les coins des yeux plissés par des rides de bonheur.

- J'en ai envie, il murmure. Et toi, tu en as envie ?

S'il pouvait retomber amoureux de lui à cet instant, Lando le ferait.

- J'en ai eu envie toute ma vie, il balance presque.

Un rire étouffé échappe à l'Espagnol qui passe lentement un bras autour de sa taille réduisant à néant l'espace entre leurs corps.

- Muppet, as-tu toujours été une telle drama queen ? Il ricane, tout proche de ses lèvres.

Lando a besoin de le prendre dans ses bras, il a besoin d'être pris dans ses bras, ses ongles griffent le tissu du blouson du Carlos.

- Ferme-la, grogne Lando avant de céder et de plaquer leurs lèvres l'une contre l'autre.

L'Espagnol laisse échapper un grognement contre lui et il le serre, fort, leurs os vibrants, chantant la joie, le réconfort, l'excitation de s'être enfin trouvés.

Un sourire étire les coins de la bouche de Lando.

Ça, c'est de l'amour, c'est ce que lui ont appris les fanfictions.

Et il faut toujours croire les fanfictions.

Qui sait, un beau jour, il pourrait s'avérer qu'elles soient vraies ?





Note de l'auteur : Miracles happen

Coucou mes petits crabes, long time no see pas vrai ?

Qui aurait cru il y a un an quand j'ai commencé à publier The Immortality Of The Crab (TIOTC pour les intimes) que nous irions si loin ensemble ? Certainement pas moi !

Au fil des chapitres et des aventures de Carlos et Lando, cette histoire est devenue bien plus réelle à mes yeux que je n'aurai pu l'imaginer, mais je n'en dirais pas plus, car l'amour est un merveilleux mystère qu'il ne nous appartient pas de résoudre. ;) 

Merci d'avoir été si nombreux à suivre chaque mise à jour, merci pour les commentaires, merci pour l'amour, je n'en reviens pas quand je regarde tout le chemin parcouru.

Merci d'avoir fait vivre le Carlando bien au-delà des frontières de la fanfiction.

Je vous retrouverai très bientôt pour de nouvelles histoires et de nouvelles aventures à vivre ensemble.

Beaucoup de love,

Bye les copains 
















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