→˚₊· ܴೈ 𝓙𝐨𝐮𝐫 𝟑 : 𝒏𝒂𝒎𝒊 𝒙 𝒓𝒆𝒂𝒅𝒆𝒓
EPISODE 3
— nami x reader —
CES PIPELETTES COMMENCENT à sérieusement me taper sur le système.
Le cours de potion commencera sous peu, lorsqu’une minuscule fée aux ailes de papillon nommée Kanae et qui n’est autre que notre professeur flânera jusqu’à cette salle. En attendant, les commérages vont de bon train, autour de moi.
Et certains sont plus supportables que d’autres.
— Une humaine ? Tu te rends compte ? Le prince des elfes, mon meilleur ami, sort avec une humaine !? Moi qui aie toujours cru qu’il verrait Mikasa en tant que future épouse…
Nami est un véritable moulin à parole que personne ne songe à couper du fait de son infinie beauté.
Ses longs cheveux roux et brillants encadrent sa silhouette gracieuse, ondulant dans son dos à mesure qu’elle traverse les couloirs de cette université, se place derrière son imposant chaudron noir ou, le plus souvent, hôte son uniforme pour plonger dans le lac entourant le château. Tous sont hypnotisés par la façon qu’ont ses yeux de refléter les étoiles, la nuit, ou de s’éclaircir pour revêtir une teinte noisette, le jour.
Sa beauté abyssale n’est pas très surprenante. Elle est une déité, plus précisément une nymphe d’eau. Son charme avale quiconque la regarde… Contrairement à moi. Nous deux venons du même élément, l’eau. Mais si elle est encensée pour ses courbes, les miennes sont craintes.
— L’année ne pouvait pas plus mal commencer ! commente-t-elle.
— Eren reviendra à la raison, fait remarquer Yuno. Il n’y a aucune raison qu’il en soit autrement.
Un faible rire me prend. Moqueur.
Si Nami est une nymphe, Yuno est un mage. Ceci signifie qu’il est un être humain avec des pouvoirs. Alors l’entendre se plaindre du fait que son ami Eren, un elfe, ait décidé d’assumer son amour avec une humaine est pour le moins… dérisoire.
A ma droite, les deux amis me lancent un regard noir.
— Quelque chose à dire, peut-être ? crache Nami.
A travers mes lunettes de soleil, je les observe. Mes pupilles trouvent les siennes sans que je ne dise rien. Malgré le fait qu’elle ne puisse pas le voir, j’espère que mon regard — combiné à mon éloquent silence — parlera à ma place.
Les secondes passent sans qu’elle ne rompe notre contact visuel. Je dois avouer être légèrement surprise par cela. Etant une gorgone, mon regard change quiconque le croise en pierre. Alors, même si je garde des lunettes sur le nez, la plupart des personnes évitent de me faire face.
Mais pas elle.
— Tu te crois meilleur que nous ? siffle-t-elle. Nous nous inquiétons pour notre ami alors que toi, tu n’en as pas.
— Si un ami est une personne comme toi, je suis bien contente de ne pas en avoir.
Un murmure parcourt la salle. Tous les regards sont rivés vers nous. Une seule réplique a suffi à capter leur attention.
Nami est populaire. Intouchable. Aimée et choyée. Le véritable bijou de notre classe. Tandis que moi…
Les gens craignent de me regarder.
— Vraiment ? commente-t-elle en riant faiblement et regardant autour d’elle. Demandons l’avis des personnes ici ? Qui préfèrerait être proche de toi que de moi ? Voyons…
Elle tourne sur elle-même, observant les personnes ne pipant mot ni ne bougeant. Je n’en suis pas surprise. Si Nami est aimée, elle est aussi crainte. Après tout, elle est une déesse et celle-ci sont connues pour leur esprit vengeur. Elle tient de Némésis.
— Allons, les enfants ! Levez la main ! Que tout le monde parle !
Mais nul ne bouge. Tous se contentent de nous observer, silencieux. Nami finit par reposer les yeux sur moi, un sourire mesquin aux lèvres.
— Bien. Je crois que nous avons notre réponse, souffle-t-elle. A l’avenir, (T/P), tu éviteras de te prononcer quand on ne t’a rien demandé.
— Au pays des aveugles, le borgne est roi, je soupire en me tournant à nouveau sur mon chaudron.
— Qu’as-tu dit ?
Me redressant, je souffle longuement, tentant de m’apaiser. Puis, prenant une profonde inspiration, je me tourne vers elle et répète sans une hésitation :
— Au pays des aveugles, le borgne est roi.
— Et qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ?
— Qu’au milieu de tous ces monstres, tu joues la carte de la déité parce que chez toi, tu n’es rien de plus qu’une nymphe de pacotille qui traine la jambe devant les autres déesses et courbe l’échine.
Le temps d’un instant, si fugace que le phénomène en est presque imperceptible, un éclair parcourt son regard. De la surprise, mélangée à une pointe de douleur. Mais elle ravale aussitôt son émotion en papillonnant des cils, chassant ses sentiments comme s’ils ne s’agissait que de simples poussières.
— Dois-je te rappeler ce que les autres déesses en question ont fait à ton ancêtre ? Comment la gorgone Méduse est née ?
Ma mâchoire se contracte et je me crispe. Le choc précède la colère. Tout d’abord, je me dis que j’ai du mal comprendre, qu’elle ne s’est pas servie d’un argument si triste et rude pour me pousser à me taire.
Mais son regard malicieux trahit la vérité et mon sang bouillonne soudain dans mes veines.
— Répète un peu, espèce de…
— Les enfants, les enfants, on se calme…, chantonne une voix fluette.
Dans un papillonnement d’ailes, le professeur pénètre la salle de classe. Puis, au moment où elle se dirige vers son bureau, son minuscule corps implose en une multitude de paillettes, laissant place à une femme bien plus grande.
Depuis sa nouvelle position, elle nous observe, un sourire apaisant aux lèvres.
— Bien, les enfants. Le cours va commencer.
ꕥ
Le cours de potion a été des plus éprouvants. Dans un soupir, je pousse la lourde porte en bois menant aux toilettes et la laisse se refermer derrière moi. Au fond, de multitudes fenêtres longue et fine se terminant en demi-lune laissent filer les rayons orangés du soleil tandis que des colonnes se succédant marque la séparation entre les cabines et les éviers.
Me précipitant vers l’un de ces derniers, je soupire. Au-dessus du miroir encadré de gargouilles brille un chandelier allumé. Ses lueurs vacillantes confèrent un aspect fantomatique à mon teint.
Nami est décidemment une garce.
Les gorgones ont toutes des caractéristiques physiques différentes. Certaines comme Méduse ont des serpents sur la tête. D’autres comme moi ont des écailles à certains endroits du corps et des mains palmées d’une fine membrane.
Là est la raison pour laquelle j’ai dû faire concevoir sur mesure des gants pour le cours de potion qui prendraient en compte cette difformité. Mais cette garce les a fait tomber « par accident » dans sa marmite corrosive et je vais devoir faire une croix sur les entrainements au futur examen de potion par sa faute le temps d’en faire livrer d’autres.
— Tu aurais mieux fait de te taire, je suppose, ricane une voix que je reconnais bien vite.
Elle est là, dans l’encadrement de la porte des toilettes.
— Tu n’as pas un cours avec Muzan ? je crache.
Elle sourit, penchant la tête sur le côté et haussant les épaules. Je lève les yeux au ciel en la voyant faire, même si elle ne peut pas le constater à cause de mes lunettes.
— Je suppose que, comme toi, j’ai décidé de faire l’école buissonnière.
— Tu te rends seulement compte du travail que ta méchanceté va me coûter ?
Elle éclate de rire.
— Tu n’avais qu’à rester à te place.
Je secoue la tête mollement. Cette femme m’a tout l’air d’être considérablement brisée par la réalité. A savoir qu’en dehors de cette université, elle n’est rien. Ici, sa beauté est infinie. Mais parmi les nymphes, elle n’est qu’une déesse. Et parmi les autres déités, elle n’est même qu’un être faible.
Je crois que je pourrais éprouver de la compassion si elle ne m’agaçait pas autant.
— Qu’est-ce que tu viens faire là ? je cingle. Remuer le couteau dans la plaie ? Menacer de brûler un de mes outils ?
— Tu es la meilleure en potion. Je viens demander un service.
Un rire me prend.
— Après avoir jeté mes gants ? Tu ne manques pas d’air.
— Je sais que tu as déjà concocté un philtre de beauté. La recette n’est pas dans les manuels et je veux savoir où tu l’as trouvée. Je te payerai cher pour ça.
L’un de mes sourcils se haussent. De toutes les demandes qu’elle aurait pu me faire, celle-ci est sans nul doute celle à laquelle je m’attendais le moins. Après tout, elle est déjà connue comme étant la plus belle femme de cette école.
— Hors de question.
— Quoi ? Mais pourquoi ?
Je lâche un faible rire avant de murmurer en sortant de toilettes :
— La prochaine fois t’y réfléchiras avant de te comporter comme une véritable peau de vache.
ꕥ
— Je persiste à penser que ton comportement est déplacé, Pudding.
— Cette salope m’a mordue la paupière !
Pudding, ma voisine de chambrée, possède trois yeux ainsi que de longs cheveux roses. Si son regard ne change personne en pierre, ses branchies et écailles trahissent son appartenance à l’espère gorgone, comme moi. Cependant là est sans nul doute notre seul point commun. L’université m’ayant placée dans la même chambre qu’elle, je me force à une certaine courtoisie à son égard mais cette femme est véritablement infecte.
Aujourd’hui, elle est en train de m’expliquer combien elle est furieuse car la nouvelle petite-amie du cuisinier, une vampire, a profité de sa forme de chauve-souris pour la blesser à l’œil. Cependant je connais assez la gorgone pour savoir qu’elle a dû sérieusement provoquer cette femme.
Je ne sais trop pour quelle raison elle hait les vampires et aime les pousser à bout.
— De toute façon, tu n’as pas arrêté de dire, au cours des dernières semaines, que ce cuisinier n’est qu’un gros nullard ringard alors qu’est-ce que ça peut te faire qu’il se trouve quelqu’un ? je lance.
Elle fronce les sourcils, allongée sur son lit à baldaquin aux rideaux roses, n’appréciant visiblement pas que je choisisse de ne pas prendre son parti.
— Bon, parlons d’autre chose…, peste-t-elle.
Derrière mes lunettes, je lève les yeux au ciel. Encore et toujours les potins. Cela en devient éreintant.
— Tu veux savoir la dernière ? rit-t-elle, excitée comme une puce.
— Non, mais tu vas me le dire quand même.
— Nami a préparé un philtre d’amour !
Mes yeux s’écarquillent et je me redresse brutalement, me souvenant de notre conversation de tout à l’heure, aux toilettes.
— Elle a fait quoi ? je répète.
— Elle a fabriqué un philtre d’amour ! s’exclame Pudding en éclatant de rire, moqueuse. Elle qui joue à la beauté fatale commence visiblement à comprendre qu’elle n’est pas si irrésistible que ça !
— Il y a eu des victimes ? je demande, ignorant ses moqueries.
Ayant refusé d’aider Nami, si elle a décidé de se replier sur une solution plus facile à trouver mais surtout plus dangereuse, la responsabilité m’incombe en partie.
— Oh oui ! Plein ! Tout à l’heure, je l’ai vu courir ! Elle était pourchassée par une dizaine de mecs ! rit-t-elle.
— C’est pas vrai, merde !
En toute hâte, je quitte mon lit où je passais en revue un grimoire. J’ouvre la porte et me rue dans le couloir, ignorant Pudding qui m’appelle en me demandant où je vais. Car moi-même je ne sais pas. Il faut juste que j’arrête ces hommes avant que la situation ne dégénère.
Les philtres d’amour sont aussi redoutables que puissants. Mal dosés, leurs victimes deviennent obsédées au point d’atteindre le stade de la folie. Et il me semble qu’une ribambelle de créatures coursant Nami dans les couloirs de l’université trahit la posologie erronée de la recette qu’elle a utilisé.
Courant devant les tableaux anciens et dans les escaliers imposants menant aux étages, je m’arrête devant différentes personnes, leur demandant s’ils ont vu la rousse. Si les premiers ne savent pas quoi me répondre, les autres indiquent très vite l’aile où se trouve la bibliothèque. Non loin de cette dernière.
Et, en effet, lorsque j’atteins le couloir sombre menant aux larges doubles portes marquant l’entrée de ce lieu, des bruits de pas attirent mon attention, dans mon dos. Je me retourne. Mes yeux s’écarquillent face à la vision s’étendant devant moi.
Ses longs cheveux roux voletant dans son dos, Nami court. Son visage est arqué en une moue terrifiée tandis qu’elle ne cesse de jeter des regards derrière elle, ne parvenant à semer la horde la suivant.
Celle-ci est dense, composée de plusieurs dizaines de créatures en tout genre. Zombies, robots, sirènes, démon, fantôme… Tous la traquent, ne lui laissant aucun répit.
Cette simple vision me noue.
Soudain, elle trébuche. Alors que quelques mètres seulement la sépare de la foule, ses pieds marchent sur sa longue robe blanche et elle s’étale de tout son long sur les dalles de pierre. Mon cœur rate un battement. Ils vont l’attraper.
Juste derrière elle, un démon aux yeux rouges se penche. Un sourire machiavélique étire ses lèvres tandis que sa main attrape le mollet de Nami. Le hurlement qu’elle pousse alors, strident, me tire de mon état de léthargie.
Mes doigts font glisser mes lunettes le long de mon nez à l’instant où un fantôme remarque ma présence. Nos regards se croisent et il se change en pierre. Derrière lui, une femme le percute et, surprise, lève à son tour les yeux jusqu’à moi, se pétrifiant aussitôt. Se tourne alors un loup-garou qui connait le même sort.
En une poignée de secondes, chaque monstre se voit solidifié. Bientôt, Nami demeure seule, au sol, recroquevillée et tremblante tandis que son mollet reste enfermé dans la paume du démon pétrifié.
Respirant difficilement, elle se redresse sur ses avant-bras tandis que je remets mes lunettes.
— Tu m’expliques ce qu’il t’est passé par la tête ? je demande.
Levant la tête vers moi, elle me gratifie d’un regard noir. Je ne suis pas vraiment étonnée de son ingratitude. Soit, je viens de lui sauver la vie. Mais jamais elle ne se l’avouera à elle-même.
Soupirant, je marche jusqu’à elle avant de m’accroupir à sa hauteur. Mees yeux se posent sur son mollet, prisonnier de la main en pierre du démon. Elle me regarde, toujours allongée sur le ventre.
— Ne me touche pas, crache-t-elle.
— Boucle-la un peu, ça fera des vacances à tout le monde.
Posant l’index sur la main du démon, celle-ci revêt sa couleur d’origine avant de s’animer, écartant les doigts. Aussitôt, Nami ôte sa jambe de la prise du garçon avant de se relever en toute hâte.
Je me redresse aussi, observant la trentaine d’élèves pétrifiés.
— Ils reprendront leur forme normale d’ici quelques heures. Je pourrais accélérer le processus mais…
— Je m’en fous.
Le ton de Nami est cassant et son regard, venimeux. Atterrée, je la regarde tournant les talons de son air supérieur et s’éloigner. Mon sang ne fait qu’un tour. Contractant ma mâchoire, je crache :
— Où crois-tu aller, comme ça ?
Elle se raidit. Puis, me lançant un regard noir par-dessus son épaule, lance :
— Je m’en serais sortie toute seule. N’espère même pas que je te remercie pour le stricte minim…
— Espèce d’abrutie, le philtre d’amour est encore actif. Alors soit tu me laisse te préparer un remède, soit je te laisse retenter ta chance et me prouver que tu t’en serais effectivement sortie toute seule.
Sa mâchoire se contracte et elle me fusille du regard. Mais elle n’hésite pas bien longtemps.
— D’accord.
Je soupire. Cette femme va me rendre folle. Je n’arrive pas à croire que je doive lui demander de la soigner. Ses travers de nymphe commencent sérieusement à me taper sur le système.
La dépassant, je lui montre le chemin. Elle me suit silencieusement mais, à quelques reprises, je remarque dans des miroirs sur notre chemin les rougeurs sur ses joues. Elle baisse la tête, visiblement honteuse.
Non seulement elle vient de se faire sauvée par une gorgone mais en plus tout le monde sait qu’elle, une nymphe, a voulu préparer un philtre d’amour. Elle avoue de cette façon qu’elle n’a aucune confiance en ses capacités de séduction.
— Nous y sommes, je soupire en passant la porte du laboratoire de potion.
Me tournant vers elle, je la regarde y entrer, embarrassée, à la lueur des chandeliers. Je pourrais rire en me disant qu’elle n’avait pas l’air aussi chétive, ce matin, dans cette même salle. Mais je me contente de saisir quelques ingrédients dans les placards.
Elle, de son côté, verse de l’eau dans un chaudron qu’elle met à bouillir.
— Prend les fioles irisées sur l’étagère derrière toi.
— Les anti-douleurs ? dit-elle en fronçant les sourcils.
J’acquiesce.
— L’annulation d’un philtre d’amour, surtout aussi puissant, est douloureux. Tu n’ingèreras pas le liquide, tu devras l’appliquer sur toi pour défaire le sort. Et ta peau va sérieusement te brûler si tu n’y mets pas la dose d’antidouleur.
Elle obtempère, ouvrant la grosse armoire vitrée ébène, dans son dos. Quant à moi, je saisie quelques plantes séchées dans des bocaux que je dispose sur un chariot métallique avant de le faire glisser jusqu’au chaudron.
Silencieusement, je prépare l’eau en ébullition en y versant de l’huile de morue. L’odeur qui se dégage alors de la marmite est profondément écœurante mais, fronçant le nez, je m’efforce d’attendre le temps règlementaire avant d’y ajouter quelques larmes de sirènes et de la fine poudre irisée violette.
Remarquant le regard profondément dégouté de Nami, je sourie doucement.
— Il s’agit d’un remède à une potion de séduction. Ne t’attends pas à une préparation des plus sexy, je commente.
Elle hausse les épaules.
— Tant que ça fonctionne.
Je suis plutôt soulagée de l’entendre dire cela. Etonnement, je l’aurais plutôt cru du genre à préférer continuer à courir dans les couloirs qu’à se couvrir d’une telle substance.
— Dis…
— Oui ? je réponds en remarquant son air hésitant.
— Pourquoi ça n’a pas fonctionné, sur toi ?
Je me fige dans mes mouvements à l’instant où je m’apprêtais à jeter quelques graines de pavot. Le regard de Nami est brûlant sur moi. Elle connait la réponse. Mais cela n’a aucun sens.
— Tu as dû te planter dans ta préparation, je souligne.
– Elle m’a eu l’air plutôt puissante.
Je secoue la tête.
— J’ai oublié quelque chose, je reviens, je mens en m’éloignant pour couper court à la conversation.
Elle me laisse faire, ne pipant mot. Mais je devine son sourire malicieux, dans mon dos. Cependant elle se trompe. Je ne suis pas amoureuse d’elle. Soit, le philtre ne fonctionne pas quand le cœur est déjà pris par la personne l’ayant ingéré. Seulement là, cela n’a aucun rapport.
Je suppose que mes lunettes de soleil ont dû freiner les effets de la potion. Oui. Cela doit être l’explication.
Nami ne m’attire pas. Soit, elle est jolie. Mais l’enveloppe charnelle ne fait pas tout. Ce qu’elle cache compte et j’exècre au plus haut point cette femme. Au point que je pense sans arrêt à elle, à ses travers. Et je sais qu’elle me perçoit de la même façon car pas une seule journée ne passe sans qu’elle ne cherche une raison de se disputer avec moi.
Ce matin, c’était Eren. Hier, c’était un plat à la cantine. Avant-hier, la rudesse du professeur Muzan et encore avant, l’utilité des cours de divination.
Je ne la supporte pas. Et si je lui suis venue en aide aujourd’hui, c’est simplement car je suis quelqu’un de bien.
Contrairement à elle.
— Et pourquoi tu as dit que tu pouvais accélérer le processus de déprification ? demande-t-elle à l’instant où je projette trois perles nacrée ainsi qu’une marguerite dans la marmite.
— Je peux contrôler qui je pétrifie et pour combien de temps.
— Alors tu n’as pas besoin de tes lunettes ? demande-t-elle en me regardant touiller la mixture qui prend une teinte lilas.
— C’est vous qui en avez besoin.
Lui jetant un regard rapide, je remarque qu’elle fronce les sourcils.
— C’est les élèves qui s’imaginent que je ne suis pas capable de me contrôler et c’est pour qu’on cesse de me fuir que je les porte. Mais je sais encore retenir un tel pouvoir.
J’anticipe le rire moqueur de Nami sur le fait que je ne sais pas m’imposer mais il ne vient pas. Au lieu de cela, elle déclare simplement :
— Désolée, je ne savais pas.
Je hausse les épaules d’un air indifférent.
— Je maintiens ce que j’ai dit tout à l’heure, tu sais. Je préfère être seule qu’accompagner de gens comme toi. Donc c’est pas si grave.
Là, elle lève les yeux au ciel avant de m’affubler d’un regard noir. Je l’ignore, jetant une poudre blanche à l’odeur puissante qui aidera Nami à oublier les différents ingrédients peu ragoûtants que nous avons déposé dans ce chaudron.
Maintenant, je n’ai plus qu’à laisser la mixture reposer un peu.
— Pourquoi tu fais ça ? crache-t-elle soudain.
— Pour le parfum et…
— Je parle pas de ça, abrutie ! me coupe-t-elle. Le premier jour où je suis arrivée, je t’ai demandé où tu avais trouvé les paillettes que tu mets sur tes pommettes et tu as levé les yeux au ciel !
— Parce que ce ne sont pas des paillettes mais les vestiges du sortilège que m’avait lancé Yuno pour me faire vomir et tu le sais très bien !
— Non, je le sais pas ! tonne-t-elle. Moi, je voulais être gentille avec toi, tu as toujours voulu me haïr ! Pourquoi ? On vient pourtant toutes les deux de l’eau ! On devrait s’entraider !
Je pousse un soupir avant de la regarder avec suspicion.
— Tu te fous de moi, Nami ?
Mais elle semble réellement blessée. Son regard fuyant, ses bras croisés sous son imposante poitrine et sa mine boudeuse trahissant son état.
— T’as toujours été une garce et ta bande de potes aussi. Eren a cessé de l’être quand il s’est trouvé sa petite humaine mais toi, t’as empiré. T’es devenue encore plus vicieuse. Au point que Mina, Francky et Mikasa veulent plus entendre parler de toi !
Ses bras retombent doucement le long de son corps tandis qu’elle accuse le coup de mes paroles.
— Tu veux savoir quel problème j’ai avec toi, Nami ? Tu es hautaine et te crois meilleure que tout le monde. Maintenant, rentre dans le chaudron.
Je m’attends à ce qu’elle me hurle dessus. Le temps d’un instant, j’hésite même à ôter mes lunettes pour me préparer à me défendre. Mais, tandis que je fixe la mixture lilas irisée des yeux, les secondes s’écoulent sans qu’elle ne bouge.
Je lève alors les yeux vers la rousse et réalise que des larmes coulent le long de ses joues. Prise de court, je ne sais pas quoi dire, hébétée. Peut-être y suis-je allée trop fort ?
— Ma sœur veut rejoindre l’université aux prochaines vacances, murmure-t-elle soudain dans le silence pensant des lieux.
Je ne réponds pas, sentant qu’elle a besoin de parler sans être interrompue.
— Elle est magnifique. Plus que moi. On m’en a toujours fait la remarque. Et, pour une fois, j’étais la plus jolie quelque part. On m’aimait. Je n’étais pas « la sœur de Nojiko » mais « la jolie Nami ». Je comptais… Alors j’ai voulu boire ce philtre pour essayer de faire en sorte que cela dure.
En tant que gorgone, j’ai effectivement été amenée à assister à des défilés de nymphes. Et, avec ses cheveux bleus ainsi que ses yeux bruns, Elise est effectivement très attirante. Mais je ne pensais pas que cela faisait souffrir sa sœur.
— Les nymphes sont toutes belles alors, parmi elles, je suis le laideron. Pour une fois, ce n’était pas le cas alors je suppose que j’en ai abusé. Je comptais juste être gentille, en arrivant ici, comme partout ailleurs. Mais Eren a décidé que j’étais assez belle pour intégrer son groupe. A partir de là, les gens comme toi ont décidé que j’étais méchante. Et je suppose que c’était plus facile de suivre le mouvement.
Elle tremble légèrement avant d’essuyer ses larmes.
— Mais Eren est parti et Mikasa préfère se la jouer solo. Francky a toujours été du genre solitaire même s’il nous rejoignait régulièrement. Mina passe du temps avec son petit-ami et Yuno est le seul qui me reste… Mais je sais qu’il va partir. Et Nojiko va arriver. Et je vais devoir dire adieu à la place que j’occupais ici. Mes amis et ma beauté, tout ce que j’avais, faneront.
Ma gorge est sèche. Je ne suis pas trop à l’aise avec les effusions d’émotions et je me sens même légèrement nauséeuse en repensant à mes paroles de ce matin. Je disais vrai, finalement. Et j’ai tapé sur un point sensible de Nami.
Je me sens idiote.
— Si ça peut te consoler… J’ai toujours pensé que tu étais la plus belle des nymphes, je murmure.
Aussitôt, elle pose les yeux sur moi, désarçonnée. Appréhensive, je la regarde faire. Et je regrette immédiatement mon intervention quand un sourire malicieux étire ses lèvres.
— Non. Ne dis rien, je la coupe quand elle ouvre la bouche. Laisse-moi deviner, « c’est facile de te trouver jolie étant donné que je suis si laide » ?
Elle rit doucement en secouant la tête.
— Non, pas du tout. Je suis juste surprise que tu puisses me trouver jolie.
— Tu sais que tu l’es, je remarque d’un air agacé.
— Oui. Mais c’est différent si toi, tu le remarques.
Mes muscles se raidissent et j’écarquille les yeux. Sans me laisser le temps de réagir, elle enjambe le chaudron et passe un premier pied dedans. Puis, le deuxième le rejoint et le bas de sa robe trempe dans la mixture au parfum vanillé.
S’asseyant sur le fond, le liquide lui arrive à présent juste en-dessous des clavicules. Je déglutis péniblement quand, réalisant la chaleur de la mixture, elle pousse un profond soupire. Mais je me reprends bien vite.
En tant que potioniste, je dois surveiller son teint pour être sûre qu’elle ne réagisse pas mal aux ingrédients.
Posant une main sur le bord du chaudron, je me penche vers elle à l’instant où elle relève la tête. Mon cœur rate un battement. Nos nez se frôlent. Mon souffle se coupe. Elle ne recule pas. Moi non plus. Sa respiration s’écrase sur mes lèvres brûlantes.
Quelques instants, nous nous regardons dans les yeux. Puis, son regard dérive sur ma bouche et mon estomac se tord. Là, sa main saisit mes lunettes, les retirant avant de le jeter au loin.
Ma gorge se serre quand elle reporte son attention sur mon visage, à présent entièrement nu. Là, un sourire étire ses lèvres.
— Eh bien, tu n’es pas si laide que ça, finalement.
Je respire difficilement. La chaleur est asphyxiante. Quand sa main mouillée se pose sur ma joue, je manque de tomber dans le chaudron.
— Même loin de là, soupire-t-elle.
Puis, ses lèvres se posent sur les miennes.
Une explosion scinde mon ventre. J’écarquille les yeux avant de les fermer. Sa bouche happe délicieusement la mienne et sa langue caresse mes lèvres avant de trouver sa jumelle. Elle m’attire dans sa direction. Je me laisse attirer vers le chaudron.
La chaleur du liquide m’enlise tandis que je me tiens au-dessus de lui. Mes mains se glissent aussi sur les joues de Nami.
Nous ne cessons de nous mouvoir l’une contre l’autre. Ma jambe passe par-dessus le chaudron, plongeant dans ma mixture. L’autre la rejoint. Je me retrouve à genoux sur les cuisses de la rousse qui ne cesse de m’embrasser.
Le liquide tangue autour de nous. Sa peau est mouillée et chaude. Le parfum vanillé nous apaise. Mes mains glissent sur son dos, la plaquant contre moi. Sa poitrine se presse contre la mienne et je sens son cœur battre à l’unisson avec le mien.
Bientôt, nous nous séparons. Puis, mon front se pose contre le sien.
— J’ai peur que tu regrettes ce que tu viens de faire, je susurre.
— Oh, (T/P), ricane-t-elle.
Sa main caresse doucement ma tête.
— Si il y a bien une chose que je ne regretterai pas, c’est ce que je viens de faire.
...
J'espère que ce troisième épisode vous a plu !
A demain avec rayleigh !
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