ÉPISODE 20
— yuno x reader —
YUNO A TOUJOURS ETE particulièrement imbu de sa personne, mais je parvenais à surmonter cela. Lorsque nous sommes arrivés à Halloween High, cette vaste université, pour la première fois, nous étions trois. Un humain, une créature insipide et un mage. Deux bouseux et un être de lumière.
Le brun avait promis qu’il ne m’abandonnerait jamais. Mais dès qu’Eren, un prince elfique, a commencé à l’inviter à sa table, il s’est détourné d’Asta et moi. Nous avions beau lui sourire dans les couloirs, il était trop occupé à sourire sans joie aux blagues de Nami, réparer la ferraille couvrant le corps de Francky ou encore préparer des sorts pour apaiser les fureurs de Mina et Mikasa durant la pleine lune.
Ce petit groupe a longtemps formé ce que tous aimaient surnommer « les héritiers ». Les enfants d’immenses familles, clans ou dynastie qui prendraient la tête de ces mêmes importantes organisations au sortir de leurs études. Des personnes qu’il valait mieux avoir dans la poche si on espérait survivre plus tard au sein du monde des créatures.
Malgré ma colère envers Yuno et sa façon de m’abandonner du jour au lendemain, jamais je n’ai été assez mesquine pour révéler la vérité sur ce si bel héritier.
A savoir qu’il est orphelin.
Aucun parent richissime. Aucun empire. Aucune organisation fructifiant et pour cause, tous pensent qu’il est issu d’un cercle de mages très fermés, les Artes. Des créatures de l’ombre dont nul ne connait le visage et qui opère dans les limbes des ténèbres. Etant anonymes, n’importe qui peut se réclamer de leur groupe. Et Yuno est d’une puissance telle qu’il pourrait faire croire à un Arte lui-même qu’il est l’un des leurs.
Seulement la puissance ne fait pas tout. La loyauté est primordiale. Elle lui a fait défaut auprès de moi et il doit s’en manger les doigts, maintenant.
— Tu es sûre de ne pas vouloir lui parler ? lance la voix d’Asta, à ma gauche.
Je sursaute sur mon banc de bois et me reconcentre sur le délicieux plat disposé dans mon assiette de porcelaine. Autour de nous résonnent les bruits des couverts s’entrechoquant et conversation. Le déjeuner se terminera bientôt et je suis loin d’avoir terminé.
En face de moi, Bakugo fronce les sourcils. Derrière lui se dessine la silhouette du grand portrait accroché au fond de la salle et représentant notre directeur.
— Me dis pas que vous le prenez en pitié ? s’exclame-t-il de sa voix rude. Il vous a abandonné comme des merdes, je vous signale.
— C’est sûr que tu sais ce que ça fait, je raille dans une grimace.
— REPETE UN PEU !
Le blond se redresse, faisant tomber sa chaise. Personne à notre table et autour ne lui prête attention. Il est du genre à hurler pour rien. Cela ne devient rapidement qu’un bruit de fond, quand on parle dans la même pièce que lui.
Il y a peu, il mangeait encore avec Pudding, une gorgone. Mais celle-ci a tenté de s’en prendre à une proche de son supérieur direct, Satoru Gojo, un triton surveillant le lac et elle a été dûment punie. En revenant de sa semaine d’incarcération au fond des hauts, elle avait été si humiliée qu’elle a décidé de se venger sur le premier venue.
Elle a raconté à qui voulait l’entendre que Katsuki était fou amoureux d’elle, obsédé, et qu’elle ne voulait plus jamais le voir. Il s’est retrouvé éjecté de leur bande d’amis.
— Yuno a eu ce qu’il méritait, je marmonne. Eren s’est trouvé une petite-amie humaine donc il est passé du mec le plus populaire de l’école à celui le plus détesté et maintenant il est juste là, insipide et insignifiant.
— Parle pour toi, y’avait encore un article sur lui la semaine dernière dans le journal de l’école, souligne Historia, une elfe aux longs cheveux d’or.
Je secoue la tête de droite à gauche.
— Les gens veulent connaitre ses histoires de cœur mais ça n’a plus rien à voir avec le mec puissant et intimidant qui existait à l’époque. Dès qu’il est parti, Mikasa se l’est jouée solitaire et est maintenant collée avec sa petite-amie…
— D’ailleurs, elle fait un travail dégueulasse, grogne Katsuki.
La petite-amie de Mikasa est l’une de nos femmes de ménage.
— Mina est retournée au sein de sa meute et semble plus épanouie et Francky est redevenu un simple gars passant de groupe en groupe et riant. Nami a trainé Yuno comme un chien en laisse jusqu’à trouver sa petite-amie et maintenant il est tout seul, je remarque.
Un faible rire méchant me prend tandis que je regarde le garçon encapuchonné manger seul à sa table. Son visage aux doux traits s’harmonise sous ses mèches brunes lui conférant un aspect particulièrement doux et tendre qui n’a rien avoir avec son austérité naturelle.
— Bien fait pour lui.
Mais au moment où je prononce ces mots, ses yeux se posent sur moi. Leurs iris ambrées se plantent directement dans les miennes, sans même me chercher une seule seconde, comme s’il savait que j’étais là depuis que je suis arrivée.
Mon cœur bat plus vite et mes entrailles se soulèvent. Parfois, j’oublie combien j’étais amoureuse de Yuno, avant qu’il m’abandonne.
Ma mâchoire se contracte.
— Tu m’écoutes depuis tout à l’heure, pas vrai ? je grogne.
Toutes les têtes à ma table se tournent vers lui mais il maintient son regard planté dans le mien. Il utilise un sortilège pour augmenter son ouïe. Quel sale perfide. Pas foutu de rester loyale envers ses amis donc il les met sur écoute ? Je ne suis même pas étonnée.
Levant la main, je lâche simplement d’une voix cassante :
— Ce temps loin de moi a dû te faire oublier à qui tu avais à faire.
Mes doigts claquent et je disparais. Moi, mon odeur, mes sons, mon parfum… Tout s’évanouit. Nul ne semble surpris.
Après tout, je suis une fille « invisible » — quoi je disparaisse aussi sur d’autres plans que celui visuel.
Me levant, je quitte ma table. Agacée, je m’éloigne en direction de la porte. Mais je me permets un petit plaisir. Et si je renversais le plat de Yuno sur ses cuisses ? M’éloignant, j’atteins sa hauteur et tends la main où se trouve son assiette.
Soudain, sa main se referme sur mon poignet. Mes yeux s’écarquillent. Sa poigne est si forte que je n’arrive pas à bouger. Il ne me regarde même pas, trop occupé à manger son plat. Mais sa voix grave s’élève quand même de sorte que seule moi puisse l’entendre :
— Je sais et saurais toujours où tu es (T/P). Je te connais, que tu le veuilles ou non.
Tirant brutalement sur ma main, je me défais de sa poigne. Il me laisse me libérer sans rien dire, sa mâchoire se contractant simplement.
Furieuse, je m’en vais sans un mot.
ꕥ
La nuit est tombée sur Halloween High mais je profite de ma forme invisible pour marcher sans bruit dans les couloirs, transparente. Parfois, je croise un professeur et à d’autres moments, je surprends des scènes plutôt drôles. Le plus souvent se trouvent sur ma route des vampires.
Mais là, tous sont en cours ou sous la couette. Je suis seule dans les couloirs. Et une voix retentit soudain dans mon dos :
— Je vais finir par croire que tu me suis.
Je me raidis. Yuno. Evidemment.
Ce qu’il est passé à la cafétaria m’a travaillée tout au long de la journée. Je n’arrive pas à croire que cet empoté puisse dépasser mon pouvoir. Et il le fait encore, visiblement, puisque je l’utilise.
Dans un soupir, je me retourne. Malgré ma transparence, il se tient derrière moi et me regarde directement dans les yeux. Je sais qu’il ne me voit pas, il ne fait que deviner ma présence ici, juste devant lui. Mais cela reste désarçonnant.
— Je sais que tu ne veux pas me parler, lance-t-il.
Je ne réponds pas, les bras inutilement croisés puisqu’il ne peut pas voir ma position.
— Et je le comprends. Je ne voudrais pas me parler non plus, à ta place. Mais sache que je ne voulais vraiment pas te laisser tomber.
Aussitôt, je laisse tomber mon charme pour qu’il puisse voir le regard noir que je lui lance. Ses yeux semblables à deux ambres s’écarquillent en me voyant apparaitre et des rougeurs apparaissent sur ses joues, comme s’il était gêné que je ne continue pas à être invisible.
Il détourne les yeux et sa cape remue sur sa tête, je lève les yeux au ciel.
— Tu ne voulais pas ? Ils t’ont mis un couteau sur la gorge ? Ils t’ont menacé de t’égorger si tu n’acceptais pas de déjeuner avec eux ?
— Quoi ? Non…
— Ou t’avais juste honte des deux pauvres loosers que tu te trainais et qui te donnaient un air si peu sophistiqué !
— M… mais non !
— Ou alors tu espérais effectivement faire parti des vrais héritiers mais ça faisait tache d’être vu avec nous si tu comptais épouser l’une d’e…
— JE SUIS TOMBE AMOUREUX DE TOI.
Je sursaute en l’entendant hausser le ton. Pardon ? Ai-je bien entendu ce que je crois avoir entendu ?
Devant moi, Yuno soupire, comme exaspéré, en secouant la tête. Puis, il prend une profonde inspiration et lève les yeux au ciel en fermant les yeux, basculant la tête en arrière, comme s’il venait de réaliser ses propres paroles.
Il finit néanmoins par me regarder à nouveau et déclare :
— J’étais amoureux de toi et tu faisais que parler de la beauté du triton du lac, Gojo. Alors j’ai préféré m’éloigner.
J’écarquille les yeux. Oui, je me souviens en avoir beaucoup parlé. A l’époque, j’espérais rendre Yuno jaloux. Plus tard, je me suis dit que j’avais été stupide de croire qu’une telle tentative fonctionnerait. Aujourd’hui, je me dis que j’aurais sans nul doute mieux fait de ne pas me traiter de fille stupide trop vite.
Je suis si bouche bée que je réponds seulement :
— Q… Quoi ?
Mais, exaspéré par lui-même, il lève les yeux au ciel et s’excuse avant de s’en aller, me dépassant et filant dans un couloir.
ꕥ
Les paroles de Yuno m’ont obsédée. Je n’en ai parlé à personne. Je ne sais pas comment prendre ce problème. J’ai longtemps aimé cet homme et je crois que si je suis autant en colère contre lui, cela n’est du qu’au fait que mon cœur a été brisé par son départ.
Alors je ne sais pas comment agir. La fille éperdument amoureuse en moi trépigne à l’idée de le revoir. La femme qui a vue son plus proche ami lui tourner le dos a encore mal.
Pourtant, il m’a expliqué la raison de son geste. Et je suis à blâmer. L’envie de le rendre jaloux l’a sans doute poussé à avoir trop mal pour montrer cette jalousie que je désespérais de voir.
Doucement, je me place dans l’encadrement de la salle de cours de divination.
Le professeur Erwin Smith est en arrêt maladie depuis qu’un démon a mis le feu à cet endroit. Sa porte est depuis condamnée par des pancartes attestant du commencement à venir des travaux. Mais je sais que Yuno vient régulièrement ici pour lancer quelques sorts et s’entrainer.
Il est sûr d’y être tranquille.
Mes yeux se posent sur lui, sa silhouette drapée d’une cape. Ses mains sont ouvertes sur un grimoire épais tandis qu’il balbutie un dialecte incompréhensible. Des cendres au sol frétille, formant à nouveau ce qu’elles étaient autrefois.
Un crayon.
Les murs sont encore couverts de suie, l’estrade est partie en fumée et quelques tables retournées et brisées jonchent le sol parmi les débris. Yuno fait tournoyer sa main et ces mêmes débris s’amoncèlent en un petit tas de déchet.
— Tu peux entrer, soupire-t-il. Engueule-moi rapidement, qu’on en finisse.
— Je ne suis pas venue te faire la morale.
Il ne répond pas, continuant ses mouvements. Nerveuse, je m’approche de quelques pas pour tenter d’attirer mon attention. Je sais qu’il m’écoute même s’il ne le montre pas.
— Je suis aussi tombée amoureuse de toi. J’essayais de te rendre jaloux avec Gojo. Désolée.
Ses mouvements cessent brutalement mais il ne dit rien. De longs instants durant, j’attends qu’il se retourne. Mais il ne le fait pas. Mes épaules retombent et je laisse voir un sourire triste.
— Voilà, c’est tout ce que j’avais à dire… Bonne chance.
Je me retourne, prête à partir. Mon cœur se fait lourd.
Soudain, une ombre surgit devant moi. Je bats des paupières au moment où deux mains se posent sur mes joues. Devant moi, Yuno vient de se matérialiser. Sa tête est penchée vers moi, quelques centimètres seulement séparent nos lèvres et il me fixe avec une douceur déstabilisante.
— Redis-le.
Mon estomac se soulève en une chaleur asphyxiante. Je peine à respirer et penser correctement face à notre proximité. Mais j’obéis tout de même :
— Je suis tombée amoureuse de toi.
Tendrement, il pose ses lèvres sur les miennes. Aussitôt, je ferme les yeux, savourant cette sensation. Contre lui, je souris, émerveillée. Ses mains lâchent son grimoire pour se poser sur mon dos, me plaquant à son torse.
J’enroule mes bras autour de sa nuque quand, ouvrant mes lèvres, je glisse ma langue autour de la sienne. Nos bouches remuent l’une contre l’autre puis nous nous séparons.
Essoufflée, je pose mon front contre le sien. Un sourire étire mes lèvres et il me rend l’appareil.
— On fait quoi, maintenant ? je chuchote. Envie d’une balade ou rester ici ?
Ses yeux louchent sur mes lèvres et il chuchote :
— Qu’importe, tant que tu es avec moi.
...
J'espère que cet OS vous aura plu ! A demain avec Bakugo !
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