troisième lettre
19 novembre 1884
au plus beau des chrysanthèmes,
je t'imagine un peu vive, cette enfant qui court un peu partout et que malheureusement on ne peut calmer. pourtant, laisse moi en quelques mots te dire à quel point je t'admire ! je te trouve particulière, différente. loin des ladies capricieuses qui courrent les rues. tu ne vagabondes pas en te pavanant pour montrer tes formes au premier lord qui passe, non je ne te vois pas comme ça. chrysanthème, style vilain petit canard mais au pétale sauvage et délicat à la fois. il est dur de te discerner, au milieu de ce monde qui croule sous les avances des dames. j'aimerais te connaitre, et je trouve mélodieux ce petit jeu de celui qui découvrira l'autre en premier. je n'oserais dire que je te battrai, mais en tout cas, tu ne gagneras pas si facilement, dame aux annonces. je t'assure mon dévouement envers cette enquête de te retrouver. il y a bien longtemps que je ne me suis pas amusé à tenir un tel jeu avec une quelconque personne. tu es ainsi la première, avec qui j'ose délaisser mon travail et mes belles serres.
j'aime ta vision du timbre, elle se rapproche de ce que j'en pense aussi. aucune mélancolie, très chère, simplement des arguments pour que tu ne laisses ma lettre trainer sur la commode de l'entrée. je serais vexé si tu n'avais pas répondu. à vrai dire, j'ai attendu déjà longtemps pour que le facteur me prévienne de la venue de ta réponse. je me suis alors empressé de rentrer, tu peux en être certaine.
tu pratiques ainsi le jujitsu, sport fastidieux des arts martiaux. ma souplesse me fait défaut, et je pense préférer me battre aux mots plutôt que d'en venir aux mains. mais je serais très heureux d'obtenir un cours particulier lorsque je t'aurai démasquer ! ainsi ma sensibilité se laissera manger par mon courage et ma bravoure. je suis persuadé que je saurais finir par t'impressionner.
ta mère semble parfaitement opposée à la mienne, ma chère. une lady parmie tant d'autres qui se pavane avec un éventail et ne cesse de rappeler l'étiquette. je lui dois le respect et la reconnaissance pour ce qu'elle m'a appris, mais je dois tout de même avouer que mes soirées noctures dans la cabane du bois voisin se faisaient récurentes quand je devais passer une journée entière à l'écouter parler. elle collectionne les robes, les robes chères, de toutes marques et de toutes matières. et je ne pense pas que cela soit une bonne chose. pour les ouvrières qui travaillent d'arrache-pieds derrière tout ça. et puis pour cette pollution constente de faire fonctionner les usines pour une robe portée seulement à un bal ! le monde se lamentera plus tard si nous continuons dans cette direction. le climat n'est pas très stable, d'après les géologues. et même si il pleut sur londres d'une manière à en glacer le sang, je ne peux m'empêcher de penser que ceci est mauvais.
autant de compliments sur mon écriture ! il faut croire que tu tombes déjà sous le charme de mes mots, bien trop facile. mais ne t'en fais pas, tu écris aussi d'une manière qui me rappelle le romantisme, les rois de france s'en retourneraient dans leur tombe !
il est malheureux de te voir parler ainsi de ta relation avec ton père. mais il faut croire que nous sommes totalement différents. pourtant je tombe tout de même d'accord avec toi sur une chose : je ne peux faire confiance à quelqu'un d'autre que toi. maintenant que j'ai osé répondre aux 'avances' que tu as fait dans ce journal, je ne peux penser que quelqu'un d'autre que toi ne pourrait m'écouter raconter mes monotones journées. je ne puis me passer d'oser pour toi, alors montre moi ta parole en répondant à chacun de mes mots qui s'adressent à toi. peut être alors, si tu ne délaisses pas mes lettres sur la commode, finirons-nous par nous battre au jujitsu au milieu de timbres et de chrysanthèmes.
je te glisse encore une fois, un petit présent. au plus beau des chrysanthèmes, que tes pétales rayonnent comme les siens, quand elle était dans mon jardin. ensoleillons nos vies, dame aux annonces. je te fais déjà pleinement confiance et je n'oserais causer du tort à ton joli cœur déjà trop malheureux.
à la personne que je souhaite le plus démasquer sur cette terre,
et avec ma plus sincère envie de te parler
ton correspondant qui s'affole quand il te lit.
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