CHAPITRE 18

ATTENTION : CE CHAPITRE CONTIENT DES SCÈNES DE VIOLENCE !

Deux mois plus tôt.

La boule au ventre, je rentrais tout doucement de l'école. Cette fois-ci, ma mère ne revenait pas du boulot avant dix-neuf heures. En tant que vendeuse dans une boutique de vêtements réputée, elle faisait régulièrement des heures supplémentaires le vendredi soir. Elle argumentait : « Le patron veut tout son personnel opérationnel, surtout le soir ». Mais moi je savais très bien qu'elle avait juste besoin de penser à autre chose, oublier le temps de quelques heures la douleur de la perte de sa fille et de son mari devenu alcoolique.

Aujourd'hui, nous étions un vendredi. Le seul jour de la semaine que mes amis attendaient avec impatience alors que moi, je le redoutais. Dès le matin, j'angoissais sachant que ma protectrice ne serait pas présente pour me sauver de la violence de l'alcool.

Qu'allait-il se produire cette fois-ci ?

Je marchais sur le passage piéton après avoir regardé de chaque côté. Les pas se posaient au hasard, tantôt sur une ligne blanche, tantôt sur le goudron noir. Depuis longtemps, je n'essayais plus d'atteindre les bandes blanches comme quand j'étais petit, lorsque j'imaginais le blanc comme une passerelle qui m'empêcherait de tomber dans la lave tout autour. Désormais, je ne faisais plus attention à cela.

Des arbres feuillus, pour combien de temps ? De nombreux sapins étaient mélangés à eux. Cet alignement d'arbres me montrait le chemin, celui que j'empruntais tous les soirs, sauf le mardi. Mardi était le seul jour où je me sentais bien car ma mère venait me chercher après l'école et on affrontait ensemble le monstre siégeant à la maison.

Un oiseau s'envola tout proche de moi. Il était sorti de la haie que je longeais. Je vis alors une boîte aux lettres avec mon nom de famille. L'objet métallique avait plusieurs points de rouille aux quatre coins et était un peu renfoncée dans la haie – qui n'avait pas été taillée depuis longtemps. La peinture était passée et un vert caca d'oie avait remplacé la teinte sinople en seulement quatre ans.

Mes jambes semblaient fonctionner toutes seules. Je tournais la poignée en espérant ne pas tomber sur lui directement. Une odeur de pamplemousse avec un soupçon de pêche arriva jusqu'à mes narines lorsque je tirai la porte vers moi. Le parfum délicat de la lessive masquait la puanteur du renfermé et de la sueur. Un pas de plus et j'allais rentrer dans ma « maison ».

Je pris mon courage à deux mains et je refermai la porte derrière moi. Je fis deux pas et je le vis. Il était là. Mais cette fois-ci, je le vis debout, trônant au milieu du salon. Son ivresse n'était pas aussi marquée que les autres jours. Par contre, sa cruauté n'en était pas moins atténuée. C'était beaucoup plus effrayant que la dernière fois. Il m'arrivait de préférer lorsqu'il comatait dans le canapé, des cadavres de bière jonchant le sol agrémenté d'un plateau repas non fini.

Il me fixait avec ses yeux perçants. Je fis un pas sur le côté mais sa voix puissante me fit tressaillir :

Reviens ici tête de larve !

Je me statufiai directement sur place. Je ne pouvais plus bouger. J'étais tétanisé. Qu'allait-il inventer pour continuer de me briser ? Lui manquait-il de la bière dans laquelle il pouvait se noyer ?

Il me fixait toujours de ces yeux remplis d'amertume puis, sans prévenir, je vis une bouteille de bière se fracasser contre le mur en brique. Je compris vite que j'étais la cible mais qu'il n'avait pas réussi à m'atteindre. L'homme devant moi répéta cette action une seconde fois avec l'autre bouteille, elle aussi vide. Elle se brisa en milliers de morceaux dans le même fracas que la précédente mais plus proche de moi cette fois-ci. S'il lui venait l'envie de réitérer cette action, il finirait par me toucher.

Je plaçai immédiatement les mains sur mes oreilles en fermant les yeux, ce qui n'échappa pas à mon père. Une main m'empoigna le bras et son horrible voix graveleuse me parvint :

...RAMASSER ÇA IMMEDIATEMENT !

Je me vis propulsé sur le sol. Il venait de me balancer avec une force que je ne lui connaissais pas. Soudain, les cristaux de verre s'enfoncèrent dans ma peau créant une douleur insoutenable. Je criai toute la souffrance qui m'était infligée. Mais l'homme m'arrêta net en me donnant un violent coup de pied.

Je serrai les dents pour ne pas crier de nouveau. Je venais de sentir les pointes des cristaux m'entailler la peau au niveau de mes côtes et rentrer à l'intérieur de mon corps. Du liquide écarlate sortait de toute part. mes mains étaient entaillées, mon côté gauche ne valait pas mieux et un goût âcre parvint à ma bouche. J'essayais de trouver la force de me lever. Mais en vain... Je n'y arrivais pas... C'était trop douloureux.

Une douleur semblable à celle que j'allais ressentir quelques mois plus tard...


***

Chapitre flash-back pour vous permettre d'en savoir plus sur ce qu'à vécu Matthieu.

On se retrouve rapidement pour la suite du chapitre précédent, pour savoir si Matthieu va s'en sortir.

N'oubliez pas de me dire ce que vous en penser et à voter si cela vous plaît :)

À bientôt

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