4- Une gamine effrontée
CAMILA
Je jetais un regard distrait à l'homme installé sur le canapé, une expression morose sur le visage, alors qu'il s'enroulait un garrot autour du bras, exposant ses veines avec une attention méthodique. D'un geste presque cérémonieux, il s'injecta un liquide clair dans la peau. Il leva alors son visage vers nous, un sourire presque satisfait s'étirant sur ses lèvres. Je détournai rapidement le regard, agacée.
— Si seulement je pouvais avoir la même chose, murmurai-je d'un ton faussement détaché, tout en roulant des yeux.
— Très drôle, rétorqua Isaac, jetant un regard agacé à l'homme derrière le bar, manifestement pressé.
— Ha ha, répliquai-je, mimant un rire forcé.
— On devrait demander à James ce qu'il en pense, ajouta-t-il, son ton ironique, avant que nos échanges ne soient interrompus.
Je le toise un instant, lui lançant un regard chargé de mépris, alors qu'il mentionnait le nom de mon père et il répondait avec le même défi, juste avant que la porte ne s'ouvre. Un soupir m'échappa alors que je portais une main à mon ventre, une douleur sourde se faisant sentir.
— Redis-moi ce que tu sais sur lui, ordonna Isaac, alors que nous nous engagions dans un long couloir sombre du bar.
— Qui ça ? Éric Woods ?
— Oui, confirma-t-il.
— Eh bien, d'après ce que l'on trouve en ligne, il a une fortune considérable et un doctorat en biochimie moléculaire. Il y a cinq ans, il a mystérieusement disparu après avoir lancé la distribution de ses fameuses pilules du bonheur.
— Et pourquoi cela ? s'enquit-il.
— Certains murmurent qu'il a utilisé sa fortune pour se venger de toi et de moi, on sait bien. La première victime du nettoyeur, c'était Hélène Woods, sa fiancée, ajoutai-je, une grimace déformant mon visage. Bordel.
— Tout va bien ? me demanda-t-il, se tournant vers moi.
— Non, tu ne vois pas que je souffre ? Tu aurais dû me laisser dans la chambre, répondis-je sèchement. Je n'étais d'aucune utilité ici.
— Pour que tu en profites pour t'enfuir ? Je commence à bien te connaître, dit-il, un léger sourire en coin.
Je lui lançai un regard noir et maudissais intérieurement sa présence. Nous arrivâmes enfin devant une porte. Je soufflai profondément, puis scrutai les environs. L'atmosphère était étrange, presque oppressante.
— Isaac, tu ne trouves pas ça bizarre ?
— Bizarre ? De quoi tu parles ?
— Ce silence, dis-je en observant autour de nous. C'est vraiment trop étrange.
— Hé toi ! Ouvre-nous la porte, lança-t-il brusquement à l'homme qui nous avait précédemment conduits ici.
— Je vous l'ai déjà dit, il n'est pas là. Il faudra attendre son retour, répondit l'homme, visiblement mal à l'aise.
— Ouvre cette putain de porte, sinon je peux t'assurer que c'est ta tête que je vais faire sauter, grogna Isaac, une menace à peine voilée dans sa voix.
— Je... je... je... balbutia l'homme avant de se précipiter en courant, nous laissant seuls. Isaac, furieux, fit un mouvement comme pour le poursuivre, mais je le retins d'un geste.
— Isaac, la porte, dis-je en fixant le battant, mon ton déterminé.
Il suivit mon regard et aperçut la trace de sang sous la porte. Il n'hésita pas une seconde et, en un geste rapide, se dirigea vers moi, me poussant derrière lui, avant de dégainer son arme.
— Reste derrière moi, ordonna-t-il en frappant la porte de son pied.
Le bruit du choc résonna, et la porte s'ouvrit avec un grincement sinistre, une odeur nauséabonde s'échappant de l'intérieur. Nous pénétrâmes dans la pièce au moment précis où une silhouette fouillait méthodiquement l'endroit. Avant même que je n'eusse le temps de réagir, Isaac me poussa violemment sur le côté, ma tête percutant brutalement le mur. L'impact me sonna momentanément, et avant que je n'aie pu reprendre mes esprits, il avait tiré sur la silhouette.
Par un coup du sort, ou peut-être par pure stupidité, l'individu se dirigea directement vers la fenêtre, sautant sans la moindre hésitation dans le vide. Isaac s'avança vers la fenêtre, rangea son arme et observa d'un air dégoûté.
— Faut vraiment être stupide pour sauter d'aussi haut.
— Ou suicidaire. La prochaine fois, tire-moi dessus, ça achèvera ton travail, répliquai-je en me relevant lentement.
— Tu crois que c'était lui ? demanda Isaac, ignorant ma remarque, ses yeux se posant sur le désordre qui régnait dans la pièce.
— Sûrement. J'en sais rien, répondis-je, mes yeux scrutant chaque recoin. Des papiers volaient dans tous les sens, la pièce avait été fouillée dans les moindres détails, comme si quelqu'un cherchait désespérément quelque chose. Peut-être qu'il avait trouvé ce qu'il cherchait avant qu'on ne l'interrompions ?
— Quoi qu'il en soit, nous arrivons trop tard, constata Isaac, se bouchant le nez, un dégoût palpable sur son visage.
Il tira sur un rideau, découvrant le corps sans vie d'Éric Woods. L'odeur était insupportable. Je m'approchai, mes yeux se portant sur son visage, défiguré par un trou béant dans son crâne. Ses yeux étaient grands ouverts, figés dans une expression d'horreur éternelle.
— Pourquoi son corps est-il déjà dans cet état ? murmurai-je, presque envoûtée par la scène macabre.
— Je n'en sais rien, répondit Isaac, son ton indéchiffrable.
Il observa un instant ma réaction, puis tira brusquement le rideau pour cacher la scène. Il se tourna alors, scrutant la pièce à son tour. Il s'avança vers un bureau, le fouillant méthodiquement.
— On risque pas de trouver grand-chose ici, fit-il, déconcerté.
— Qu'est-ce qu'il faisait ici ? Pourquoi revenir ? demandai-je en fouillant mon coin de la pièce.
Je m'agenouillai pour retirer un cadre, découvrant un coffre dissimulé derrière.
— Isaac, par ici, dis-je en essayant d'ouvrir le coffre.
Il s'approcha silencieusement et se baissa à mon niveau. Je n'avais même pas entendu ses pas.
— C'est un code à quatre chiffres, ça risque d'être...
Je m'interrompis soudainement, réalisant que son visage était maintenant à quelques centimètres du mien. Un frisson parcourut mon dos. Je me redressai brusquement, rougissant, et me plaçai dans son dos sans un mot. Isaac, un sourire presque imperceptible sur les lèvres, se leva également, sortant son arme de son étui. Sans hésitation, il tira sur le coffre, brisant le sceau et l'ouvrant pour révéler son contenu... complètement vide.
— On va manger ? soufflai-je, dépitée. Tout ça pour rien.
— Oui, tirons-nous d'ici avant que quelqu'un ne pointe le bout de son nez, répondit-il en rangeant son arme.
— Et le cadavre dans la pièce d'à côté ? demandai-je en jetant un dernier coup d'œil à la scène.
— Quelqu'un finira bien par le trouver. Allez, on s'en va, répliqua-t-il, sans se retourner.
Je jetai un dernier regard à la pièce, avant de le suivre en silence vers la sortie.
Isaac me regardait en silence, l'air visiblement contrarié. Il soupira, fermant les yeux un instant, avant de poser sa main sur le volant. Il avait cette habitude de toujours vouloir garder le contrôle, même dans les moments les plus tendus. Moi, de mon côté, je n'étais pas prête à céder. Je savais exactement ce que je voulais, et même si je n'avais aucune idée de ce que cela allait donner, je comptais bien m'assurer que rien ne m'échappe.
— Tu devrais boucler ta ceinture, me dit-il enfin, sans me regarder.
Je haussai les épaules, un sourire en coin.
— J'en ai pas envie, répliquai-je sèchement.
Il tourna la tête vers moi, son regard devenu plus insistant.
— C'est quoi ton problème à me désobéir sans cesse ? demanda-t-il d'une voix calme, mais qui ne trompait pas sur la menace sous-jacente.
Je ne laissai pas ma voix trembler.
— J'ai pas de problème, dis-je en croisant les bras.
Un long silence s'installa entre nous. Je savais qu'il était sur le point de réagir, mais je n'avais pas l'intention de lui céder aussi facilement. Finalement, il secoua la tête, un ricanement amer traversant ses lèvres.
— Alors boucle ta ceinture, ordonna-t-il.
Je me contentai de le défier du regard, les bras toujours croisés. Il se pencha en avant et, d'un geste presque imperceptible, il attrapa ma ceinture et la fixa lui-même, sans un mot. Il n'était pas du genre à perdre du temps avec des discussions inutiles. Une fois fait, il s'éloigna, alluma le contact et fit démarrer le moteur.
— Qu'est-ce que je disais, une gamine, souffla-t-il, visiblement agacé.
Je souris légèrement, appréciant cette touche de frustration qu'il ne pouvait cacher. Je me tournais vers la fenêtre, laissant le vent effleurer mon visage. Je savais qu'il pensait que je lui échappais encore, mais au fond, il savait aussi que je l'avais toujours un peu sous mon emprise. Les choses entre nous avaient changé, mais il y avait toujours cette tension, ce lien invisible, une attraction réciproque que nous n'avions jamais vraiment pu ignorer.
— Tu sais, tu dis que j'ai toujours de l'attirance pour toi à cause de ce qui s'est passé entre nous...
Je jetai un coup d'œil furtif dans sa direction, mais il était concentré sur la route. Tout ce qui s'était passé entre nous avait laissé des traces indélébiles. Et même si je n'étais pas certaine de tout ce qui m'attendait, une chose était claire : ce jeu, cette dynamique entre nous, allait encore bien durer.
Après tout, ce n'était pas moi qui avais traversé des kilomètres pour le retrouver. C'était lui qui m'avait retrouvée. Et ça, ça changeait tout.
— Je te rappelle que c'est toi qui as tiré sur moi, pas l'inverse, dit-il d'un ton acerbe.
Je le regardai, légèrement déstabilisée par la manière dont il avait réagi. Isaac n'avait pas l'air de prendre la moindre mesure de ce qu'il venait de dire. C'était un point de fierté pour lui, un souvenir qu'il n'avait de cesse de raviver chaque fois qu'il en avait l'occasion, comme une façon de marquer son territoire.
— Tu ne loupes jamais une occasion de me rappeler ça, n'est-ce pas ? dis-je, agacée, cherchant à garder mon calme.
Il esquissa un léger sourire, comme s'il trouvait tout cela parfaitement normal.
— Bien sûr, parce que c'est un détail essentiel. Un petit rappel, pour que tu n'oublies pas à qui tu as affaire, Camila. Et pour que tu comprennes que ton histoire d'attirance sur ma personne, tu oublier. Toi et moi ça n'arrivera jamais.
Ses mots me frappèrent comme un coup de poing. J'avais toujours su qu'Isaac n'était pas du genre à s'embarrasser de considérations sentimentales, mais l'entendre le dire si clairement, de cette manière presque détachée, me fit réaliser à quel point il n'était pas prêt à se laisser distraire par quoi que ce soit. Pas par moi, pas par quoi que ce soit d'autre.
Je détournai le regard, me forçant à ne pas laisser mes émotions prendre le dessus.
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