38 - Une ombre qui plane




Je soupirai, passant une main dans mes cheveux en désordre, et jetai un coup d'œil à la cuisine. C'était un vrai champ de bataille. Une chaise renversée, des éclats de verre au sol, et le couteau que j'avais lancé, toujours planté dans le mur. Je pris une grande inspiration avant de composer le numéro de Kai.

Le téléphone sonna quelques secondes avant qu'elle ne décroche, sa voix familière et légèrement moqueuse résonnant à l'autre bout.

— Camila ? Tu sais qu'il est presque minuit, hein ?

— Pas le moment, Kai, répondis-je en me penchant pour ramasser les morceaux de verre éparpillés sur le sol. J'ai eu une... soirée mouvementée.

Il y eut un silence, puis sa voix changea de ton, devenant plus sérieuse.

— Qu'est-ce qui s'est passé ?

Je ramassai un morceau de verre, le jetant dans une poubelle que j'avais sortie à la hâte.

— Un homme s'est introduit chez moi, dis-je, essayant de garder ma voix neutre. J'ai dû me défendre.

— Quoi ?! lâcha-t-elle, incrédule. Tu es blessée ?

— Non, rien de grave, répondis-je rapidement. Mon père est venu avec ses hommes, ils l'ont emmené. Mais c'est un foutoir ici.

Je laissai échapper un rire nerveux, balayant les débris sous la table.

— Tu veux que je vienne ? demanda Kai, sa voix pleine d'inquiétude.

— Non, ça va. Je gère. Mais, Kai... ce n'était pas un cambriolage au hasard. Cet homme était ici pour quelque chose. Est-ce que tu as de c'ses nouvelles ?

Je marquai une pause, ramassant une chaise renversée pour la remettre en place.

— De qui ça ?

— Oublie..je suis juste fatiguée. Je crois qu'il faut que je te laisse.

Je terminai de ranger les derniers objets déplacés, puis m'assis sur le bord de la table, le téléphone toujours pressé contre mon oreille.

Kai soupira à l'autre bout de la ligne.

— D'accord, guerrière, je te fais confiance. Mais fais attention à toi, d'accord ? Et appelle-moi si quelque chose d'autre se passe.

— Promis, répondis-je, un petit sourire aux lèvres malgré tout. Merci, Kai.

— Toujours là pour toi.

Je raccrochai, reposant le téléphone sur la table. La pièce était presque revenue à la normale, mais une tension persistante flottait dans l'air. Rien ne serait plus vraiment comme avant.

Un bruit sourd, comme un craquement discret, me fit sursauter. Mon regard se tourna immédiatement vers la porte d'entrée. Les gardes de mon père étaient censés être là, mais une part de moi restait méfiante.

Je me dirigeai lentement vers la porte, mon cœur battant légèrement plus vite. Par réflexe, j'attrapai le manche du couteau que j'avais remis à sa place sur le plan de travail. Je me plaçai sur le côté de l'entrée, tendant l'oreille. Rien.

Finalement, je déverrouillai doucement la porte et l'entrouvris. Deux hommes en costume sombre étaient bien là, l'un appuyé contre le mur, l'autre surveillant le couloir d'un air concentré.

— Tout va bien ? demandai-je en essayant de cacher ma nervosité.

L'un d'eux, un homme à la mâchoire carrée et au regard perçant, tourna la tête vers moi.

— Oui, mademoiselle Camila. Tout est sous contrôle.

Je hochai la tête, refermant la porte derrière moi.

— Bordel. Soufflais-je.

— J'ai ce que vous voulez, dis-je en posant la clé USB sur la table, mes yeux fixés sur Mike Montse.

Il ne prit pas immédiatement la clé, mais la fixa un instant, comme s'il pesait le moment avant de réagir. Puis il la saisit lentement, son regard croisant le mien.

— Vous avez regardé à l'intérieur ? demanda-t-il, son ton aussi calme que calculé.

Je secouai la tête.

— Non. Vous m'avez demandé de trouver la taupe, et les documents et je l'ai fait. Le reste ne me regarde pas.

Il resta silencieux un instant, observant la clé comme si elle pouvait lui révéler plus qu'elle ne semblait. Puis il se tourna vers son assistant et, d'une voix calme mais autoritaire, ordonna :

— Faites vérifier cela, immédiatement.

L'assistant s'empressa de brancher la clé USB dans un ordinateur portable et se mit à examiner les fichiers. Le bruit des clics résonnait dans la pièce alors que l'homme scrutait les documents, tandis que Mike Montse me fixait d'un air pensif. La tension était palpable, et je savais que tout était désormais entre leurs mains.

Finalement, l'assistant releva les yeux, une lueur d'approbation dans son regard.

— Tout est en ordre, Monsieur Montse.

Mike hocha la tête, satisfait, avant de me regarder à nouveau.

— Très bien. Vous avez bien travaillé, Camila. Le virement sera effectué dans les prochaines heures, comme convenu.

Je hochai la tête en silence. Je n'avais pas besoin de l'argent, mais je n'allais pas lui dire ça. Le paiement était une formalité, une reconnaissance de mon travail, mais rien de plus. Je m'apprêtais à partir, mais avant que je ne puisse faire un pas vers la porte, Mike me retint d'un geste.

— Camila, attendez.

Je me tournai lentement vers lui, le regardant sans parler.

Il se leva de son bureau, ses mouvements mesurés, comme si chaque geste était calculé pour imposer encore un peu plus sa présence. Il s'approcha, un léger sourire sur les lèvres, mais il n'avait plus l'air de l'homme d'affaires sérieux que j'avais rencontré au début. Ce sourire était différent, plus intime.

— Vous savez, j'ai beaucoup de respect pour ce que vous faites, dit-il, son ton plus bas, presque chaleureux. Vous êtes... bien plus que ce que vous montrez.

Je plissai légèrement les yeux, consciente de l'invitation sous-jacente dans ses mots. Une tentative de me faire baisser ma garde, mais je n'étais pas dupe.

— Ah, je vois, répondis-je avec un sourire en coin. Vous tentez maintenant d'acheter ma compagnie ?

Il sembla légèrement surpris, mais ne perdit pas son calme. Il se rapprocha encore, son regard plus insistant.

— Vous êtes une femme fascinante, Camila. Vous avez une force rare, et je suis sûr que vous pourriez faire beaucoup plus que ce que vous faites actuellement. Vous ne trouvez pas ?

Je haussai un sourcil, ne pouvant m'empêcher de répondre avec une touche de sarcasme.

— Oh, je suis certaine que vous avez beaucoup de plans pour moi, Mike. Mais je ne suis pas en vente, si vous voyez ce que je veux dire.

Son sourire se figea légèrement, mais il ne se laissa pas démonter.

— Ce n'est pas ce que je voulais dire, dit-il, essayant de retrouver son assurance. Peut-être qu'un jour, vous verrez que nous pourrions faire de grandes choses ensemble.

Je secouai la tête, un léger rire moqueur s'échappant de mes lèvres.

— Non merci, Mike. Je suis bien assez occupée à gérer ma propre vie pour me mêler à vos "grandes choses".

Je fis un pas en arrière, me dirigeant vers la porte.

— Bonne journée, Monsieur Montse.

Je ne lui laissai pas le temps de répondre, quittant son bureau avec une certaine satisfaction. Je n'avais pas seulement récupéré ce qu'il m'avait demandé, mais j'avais aussi bien mis les choses au clair.






Je croisais les bras, le regard fixe, observant l'entrée du bâtiment. Une trentaine de minutes plus tard, la porte s'ouvrit, et je vis enfin Lance sortir, son regard balayant les environs. Il ne m'avait pas vue tout de suite, mais il allait rapidement comprendre que je n'allais pas le laisser filer cette fois-ci.

Je m'avançai lentement, mes talons claquant contre le sol. Lorsqu'il me remarqua, son visage se ferma légèrement, comme s'il avait su que ce moment finirait par arriver.

— Camila, dit-il en se repliant légèrement sur lui-même, comme s'il hésitait à m'adresser la parole.

— Lance, j'ai des questions, dis-je d'un ton qui ne laissait aucune place à la discussion. Et toi, tu vas m'y répondre.

Je le fixai intensément

— Je suppose que tu vas me demander où est Isaac, non ? dit-il, comme s'il essayait de désamorcer la tension.

— C'est exactement ce que je vais te demander, répondis-je, mes yeux plongés dans les siens. Où il est allé pendant presque un an ? Qu'est-ce qu'il faisait ?

Lance prit une profonde inspiration, mais je pouvais voir qu'il n'avait pas de réponse facile à donner. Il se frotta le front, visiblement gêné.

— Ce n'est pas ton rôle de chercher des réponses, Camila. Tu n'es pas détective, et ce n'est pas à toi de mener cette enquête, répondit-il finalement, d'une voix un peu plus ferme.

Je serrai les poings, mais je restai calme.

— J'ai été mise en danger chez moi. Est-ce toi qui as envoyé ce type à mes trousses ?

Lance se tendit, son regard fuyant.

— Non, Camila. Ce n'était pas moi, dit-il d'une voix plus basse, presque coupable. C'est pour ça que je t'ai prévenue. Il faut que tu sois prudente.

Je secouai la tête, ma colère montant.

— En venant me prévenir directement, tu m'as mise en danger, Lance. Si tu n'étais pas venu me parler, cet homme masqué ne serait probablement jamais arrivé chez moi. C'est toi qui l'as conduit ici. Alors arrête de jouer à l'innocent.

— Je voulais juste t'alerter. Je n'avais aucune autre intention, murmura-t-il. Rien d'autre. Je voulais juste te protéger.

Je le fixai en silence, laissant ses paroles se frayer un chemin dans mon esprit. Mais une question persistait, la plus importante.

— C'est lui qui t'a demandé de faire ça ?

— Où est Isaac maintenant ? Où est-il ? demandais-je d'une voix plus douce, bien que l'urgence était toujours présente.

Lance se passa une main dans les cheveux, son visage se fermant davantage.

— Je n'en ai aucune idée, répondit-il d'un ton sombre. Je l'ai vu une seule fois depuis son retour, et il a disparu après.

Un silence lourd s'installa entre nous. J'avais espéré obtenir plus, mais ses mots ne faisaient qu'ajouter au mystère. Isaac, de retour mais introuvable. Et moi, coincée dans ce jeu dont je ne comprenais toujours pas les règles.

Je pris une grande inspiration, essayant de garder mon calme.

—Mais il y a un endroit où il a l'habitude de revenir de temps en temps. C'est pas sûr à cent pour cent, mais si tu veux vraiment le retrouver, c'est peut-être là-bas.

Je m'avançai légèrement, plus attentive que jamais.

— Où ça ? Lance. Dis-moi.

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