1- Sur ses traces..


CAMILA



— Un gin tonic.

Mon sang se glace à l'entente de cette voix familière.
Je me retourne, la mâchoire serrée, clignant des yeux en déglutissant. Un fantôme ? Mon cœur s'emballe, tambourinant si fort que je me sens vaciller. Tout en moi crie de ne pas bouger, de ne rien faire, comme figée dans une torpeur oppressante.

— Je... je croyais que tu...

Les mots meurent dans ma gorge. Je suis paralysée, incapable de calmer les battements effrénés de mon cœur.

— Que j'étais mort ? dit-il, s'asseyant tranquillement à mes côtés.

Je détourne le regard, incapable de soutenir le sien. Ce n'est pas le moment de jouer les courageuses, encore moins de répliquer. J'aurais tout à perdre.

— Isaac... soufflai-je, me reculant instinctivement dans mon siège. Je...

Ma respiration s'accélère. Les mots se bousculent dans ma tête, mais rien ne sort.

— Tu vas venir avec moi, Camila, dit-il d'une voix sèche, posant une main sur mon siège.

— Non. S'il te plaît... dis-je en secouant la tête, ma voix tremblante.

— Si. Et tu sais très bien pourquoi, réplique-t-il, son regard transperçant le mien.

— Je suis désolée... Isaac, je... pitié, ne me fais pas de mal...

— Évitons cet embarras, Cam.

— Je suis sincère... Isaac...

— Ça ne change rien. Tu sais ce qui va arriver si tu ne te lèves pas et si on ne sort pas de ce bar. Maintenant.

— Tu vas me faire du mal, c'est ça ? Tu vas me tuer ? T'es venu pour te venger, n'est-ce pas ?

— Tu m'as tiré dessus. Quel dommage que tu aies raté ton coup.

— Et maintenant ? Qu'est-ce qui va se passer ?

— Rien de bon. Mais pour commencer, regarde-moi.

— Qu'est-ce que je dois faire... pour que tu... Isaac, je... Combien tu veux ?

— Tu veux m'acheter ? dit-il, un sourire sarcastique au coin des lèvres.

— Non, c'est ma vie que je veux racheter.

— Ça ne marche pas comme ça.

— Tu veux savoir ce que je pense ? Tu ne feras rien. Si tu voulais me tuer, tu l'aurais déjà fait.

Je relève enfin les yeux vers lui, croisant son regard sombre. Mon estomac se noue instantanément, et je regrette d'avoir brisé cette distance.

— Tu ne sais rien de moi, Camila.

— Toi non plus.

— Très bien. On y va, dit-il brusquement, perdant patience.

Il avale son verre d'un trait, jette un billet sur la table, puis m'attrape par le bras, me tirant hors du bar avec une force qui me fait grimacer.

— Tu me fais mal, Isaac, protestai-je en trébuchant légèrement. Je peux marcher seule. Je ne vais pas m'enfuir, sérieusement.

Il soupire, finit par s'arrêter et me relâche.

— Où étais-tu ces six derniers mois ? demandai-je en tentant d'engager une conversation.

— Tu veux dire après que tu m'as tiré dessus ?

— C'était un accident, Isaac...

— Un accident ? grogne-t-il, sa voix dure, presque rugissante, me faisant frissonner.

Je m'arrête net.

— Tu vas me tuer ? murmurai-je, la gorge nouée.

Il se retourne lentement, scrutant les environs. Heureusement, nous étions encore en public. Cela semblait le retenir... pour l'instant. Mais lorsqu'il s'approche, mâchoire serrée et regard perçant, je recule instinctivement.

— Ce serait mérité, tu ne crois pas ? murmure-t-il en se penchant légèrement vers moi.

Je pince les lèvres, évitant de croiser son regard.

— Même après tout ça, tu continues à me regarder avec ce désir pathétique dans les yeux, ricane-t-il.

— Ne me parle pas comme ça, répliquai-je, essayant de rester ferme malgré ma voix vacillante.

— Avance et tais-toi, tranche-t-il, reprenant son chemin.

Mon esprit s'emballe. Je guette les passants, cherchant une opportunité. Puis, prise d'une montée d'adrénaline, je fais volte-face et me mets à courir.

Je cours sans regarder derrière moi, cherchant désespérément une issue. Mon téléphone dans la main, j'active la commande vocale.

— Siri, appelle Klara !

Le téléphone sonne dans le vide. Une deuxième tentative. Toujours rien. Maudite soit ma sœur. Je m'arrête enfin, à bout de souffle, et vérifie autour de moi. Il n'est pas là. Je prends une profonde inspiration et m'adosse à un mur, tremblante.

— Bon, on reprend, soufflai-je à moi-même.

J'appelle Klara une dernière fois. Messagerie.

— Sérieusement ? Klara, j'espère que tu t'amuses, parce que moi je suis dans une merde noire. Si quelque chose m'arrive, je t'en voudrais pour le peu qu'il me reste de vie... rappelle-moi vite.

Je raccroche et tape du pied contre le mur, furieuse. Mon regard tombe sur le contact de mes parents. Je n'ai pas le choix...

— Raccroche.

La voix glaciale d'Isaac retentit à mes côtés. Un objet froid se pose contre ma tempe.

Mon souffle se coupe. Ma main tremblante met fin à l'appel.

— Donne-moi ton téléphone, ordonne-t-il, son arme toujours levée.

— Non, répondis-je faiblement, secouant la tête.

Sans attendre, il m'arrache le téléphone et l'écrase sous son talon. Le bruit du verre brisé me fait tourner la tête.

Il baisse son arme et la range. J'en profite pour me jeter sur lui, le poussant de toutes mes forces. L'arme tombe au sol. Nos regards se croisent, et pendant une seconde, le temps semble s'arrêter.

— Tu vas la ramasser et me tirer dessus ? Une deuxième fois ?

— Peut-être, crachai-je, me précipitant vers l'arme.

Il me devance, sa main se refermant sur la mienne.

— Donne-moi ça, grogne-t-il. T'es complètement malade, Camila.

— Laisse-moi partir !

— Non, répond-il sèchement. Tu viens avec moi, point final.

Je déglutis, le suivant docilement jusqu'à un hôtel. À contrecœur, je franchis la porte qu'il referme derrière nous.

— On reste ici deux jours, dit-il en déposant son sac. Après, on quitte la ville.

Je reste silencieuse, mais intérieurement, je fulmine.

Je devais trouver un moyen de fuir. Et vite.

Isaac retire sa veste et la jette négligemment sur le lit, me jetant un bref regard. Je serre les bras contre moi, les pensées brouillées par l'angoisse et la colère.

— Tes papiers pour le voyage, dit-il en s'approchant de moi.

— Pourquoi ? demandai-je, reculant instinctivement.

Il ne répond pas. Il tend simplement la main, attendant. Je reste figée, jusqu'à ce qu'il s'impatiente. Sans douceur, il attrape mon sac, l'ouvre et fouille à l'intérieur.

— Hey ! protestai-je en essayant de le repousser.

Il ignore mon geste, fouille jusqu'à trouver mon portefeuille. Son regard se durcit en découvrant mon deuxième téléphone, que j'avais dissimulé dans une poche intérieure.

— Tu es pleine de surprises, souffle-t-il en s'emparant du téléphone.

— C'est juste... un téléphone, Isaac, rien d'autre.

— Évidemment, Camila. Rien d'autre, répète-t-il avec sarcasme avant d'écraser l'appareil sous son talon, comme le précédent.

Un frisson glacé me traverse alors qu'il me tourne le dos pour ranger mes papiers dans la poche de son pantalon.

— Pourquoi on ne part pas maintenant ? murmurai-je, tentant de briser ce silence oppressant.

— Parce que j'ai des choses à régler ici, réplique-t-il sans me regarder.

Je reste immobile, mon regard suivant chacun de ses mouvements. Lorsqu'il disparaît dans une pièce adjacente, je prends une grande inspiration et me précipite vers son sac. J'ouvre la fermeture éclair, fouille rapidement, mais ne trouve que des vêtements. Rien d'utile.

— Qu'est-ce que tu fais ?

Sa voix me glace sur place. Je me retourne lentement, le souffle court. Isaac se tient dans l'embrasure de la porte, torse nu, des bandages entourant son abdomen. Mon regard s'attarde un instant sur les cicatrices qui zèbrent sa peau. Je détourne rapidement les yeux, le cœur battant.

— Je... rien, je cherchais...

— Ne mens pas, coupe-t-il sèchement.

Il avance lentement, son regard noir ancré dans le mien. Je recule instinctivement jusqu'à sentir la froideur de la porte contre mon dos.

— Isaac, je...

— Arrête de jouer à ce jeu, murmure-t-il en se penchant légèrement vers moi. Tu n'as aucune chance.

Je détourne le regard, les mains tremblantes. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, et je lutte pour ne pas céder à la panique.

— Laisse-moi partir, dis-je d'une voix presque inaudible.

Il secoue la tête, un sourire sans joie sur les lèvres.

— Tu sais que je ne peux pas.

Il recule enfin, me laissant respirer. Mais l'atmosphère reste tendue, comme si un fil invisible nous retenait tous les deux.

— Je vais prendre une douche, lance-t-il en se dirigeant vers la salle de bain. Ne fais rien de stupide.

La porte se referme derrière lui, et j'entends le bruit de l'eau couler. Mon esprit s'emballe. C'était ma chance.

Je scrute rapidement la pièce, cherchant un moyen de fuir. Mais la fenêtre est trop petite, et la porte est verrouillée de l'intérieur. Je tremble légèrement en fouillant dans les poches de sa veste, mon cœur battant à tout rompre. Mes doigts glissent sur du tissu, du vide, quelques papiers froissés... Rien d'utile.

— Merde, murmurais-je en retenant ma respiration.

Je passe rapidement à la poche intérieure. Toujours rien, juste une sensation de cuir lisse. Peut-être une doublure renforcée, mais aucun objet. Je déglutis, l'urgence pesant sur mes épaules.

Je jette un coup d'œil vers la porte de la salle de bain. L'eau continue de couler, signe qu'il est encore occupé. Il me reste peut-être quelques secondes.

Je fouille le sac posé près du lit. Deux t-shirts, des caleçons, une trousse de toilette... Rien qui puisse m'aider. Pas de téléphone, pas de papiers. C'est comme s'il avait anticipé ce moment.

Mon esprit tourne à plein régime. Je cherche des solutions, des moyens de m'en sortir. Mais tout semble me ramener à la même conclusion : je suis coincée.

Un bruit sourd me fait sursauter. Je me retourne d'un bond, mon cœur manquant un battement. La poignée de la porte de la salle de bain tourne lentement.

— Camila ? appelle Isaac d'un ton calme, presque inquiétant.

— Qu'est-ce que tu fais ?

Sa silhouette apparaît dans l'embrasure de la porte. Ses cheveux sont encore humides, et son regard perçant se pose directement sur moi. Je sens mon estomac se nouer.

— Je... je voulais juste prendre un verre d'eau, dis-je en essayant de masquer ma panique.

Il plisse les yeux, puis regarde rapidement autour de la pièce. Je le vois examiner chaque détail. Ses lèvres se pincent.

— Ne me prends pas pour un idiot, souffle-t-il. Tu as fouillé, pas vrai ?

Je secoue la tête, mais mon visage doit me trahir.

— Camila... commence-t-il en avançant lentement.

Je recule instinctivement, mais il me coupe rapidement toute échappatoire.

— Tu n'as rien trouvé, hein ?

Il me fixe intensément, un sourire froid étirant ses lèvres.

— Bien sûr que non. Je ne laisse jamais rien au hasard.

Il tend la main et attrape doucement mon poignet, mais la fermeté de sa prise me rappelle à quel point il contrôle la situation.

— Tu sais ce qui est frustrant avec toi ? reprend-il. Tu ne sais pas quand t'arrêter.

Je baisse les yeux, incapable de soutenir son regard.

— Tu as terminé de fouiller ? Ou dois-je te montrer à quel point c'est une mauvaise idée ?

Je reste silencieuse, incapable de répondre.

— Très bien, dit-il finalement en relâchant mon poignet. Mais si tu veux jouer à ce petit jeu, je peux jouer aussi.

Il recule légèrement, me laissant respirer, mais son ton reste glacial.

— Tu veux voir ce que ça fait de ne pas avoir le contrôle, Camila ? Alors continue. Je t'en prie.

Mon estomac se serre, et je détourne les yeux. Je n'avais rien trouvé, et maintenant, j'étais encore plus piégée qu'avant.

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